4A_422/2024 04.02.2025
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_422/2024
Arrêt du 4 février 2025
Ire Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux Hurni, Président,
Denys et Rüedi.
Greffière : Mme Raetz.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Cyril Kleger, avocat,
recourant,
contre
B.________ SA,
intimée.
Objet
mainlevée provisoire; rectification des vices de forme,
recours contre l'arrêt rendu le 7 juin 2024 par l'Autorité de recours en matière civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel (ARMC.2024.15).
Faits :
A.
Sur réquisition de la société B.________ SA, un commandement de payer no xxx a été notifié le 9 août 2023 à A.________, pour la somme de 64'439 fr. 20. Le titre de la créance était: "Acte de défaut de biens no. yyy du 10.05.2010. Carte de crédit (C.________) no. zzz, OP Payerne. concerne D.________ AG Créance cédée par D.________ AG. (...) ". À cette somme s'ajoutaient les frais d'établissement du commandement de payer de 103 fr. 30. A.________ a fait opposition totale le jour même.
Le 13 novembre 2023, B.________ SA a requis auprès du Tribunal civil régional du Littoral et du Val-de-Travers la mainlevée provisoire de l'opposition formée par A.________, pour l'intégralité de la somme réclamée dans le commandement de payer. Elle a produit à cet effet une copie et l'original du commandement de payer, une copie de l'acte de défaut de biens et de l'extrait du registre du commerce de la société. Cette dernière indique qu'étant au bénéfice d'un acte de défaut de biens après saisie, elle est autorisée à requérir la mainlevée provisoire de l'opposition.
Par courrier du 30 novembre 2023, le tribunal civil a imparti un délai de dix jours à A.________ pour déposer une réponse écrite, avec pièces à l'appui, en précisant que, sauf décision ultérieure contraire, les parties ne seraient pas citées à une audience et qu'il serait statué sur pièces.
Le 10 janvier 2024, après une prolongation de délai, A.________ s'est déterminé par écrit sur la requête de mainlevée provisoire en concluant principalement à son irrecevabilité, subsidiairement à son rejet, le tout avec suite de frais et dépens.
En substance, A.________ soutenait que la requête déposée était irrecevable, premièrement parce que B.________ SA n'alléguait pas être titulaire de l'acte de défaut de biens délivré à E.________ AG; deuxièmement, car la requête indiquait comme signataires les noms de F.________ (au bénéfice d'une procuration collective à deux) et de G.________ (également au bénéfice d'une procuration collective à deux), alors que seule la signature manuscrite de la première y était apposée; concernant la signature du second, une personne indéterminée, a signé "p.o" (par ordre) à la place de G.________ et cette personne non identifiée ne saurait clairement pas engager la société requérante, même aux côtés de F.________.
Le 16 janvier 2024, B.________ SA s'est spontanément déterminée sur la réponse de A.________. En résumé, la société mentionnait que l'acte de défaut de biens était au nom de la société E.________ AG et qu'elle avait repris l'actif et le passif de cette société, le registre du commerce pouvant le confirmer. Elle a déposé, par la même occasion, la requête de mainlevée du 13 novembre 2023 dûment signée par G.________ et F.________, tous deux au bénéfice d'un pouvoir de signature collective à deux.
Par décision du 9 février 2024, le tribunal civil a prononcé la mainlevée provisoire de l'opposition formée par A.________ à la poursuite no xxx et arrêté les frais de la cause à 500 fr., les mettant à charge du poursuivi. Il a retenu qu'un acte de défaut de biens après saisie constituait un titre de mainlevée provisoire au sens de l'art. 82 LP; qu'il ressortait du registre du commerce de Zurich que B.________ SA avait, par suite de fusion, succédé en droit à E.________ AG, dont elle avait repris les actifs et passifs; que l'irrégularité formelle dont se prévalait A.________ avait été corrigée.
B.
Par arrêt du 7 juin 2024, l'Autorité de recours en matière civile du canton de Neuchâtel a rejeté le recours de A.________.
C.
A.________ (ci-après: le recourant) forme un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que la requête de mainlevée est déclarée irrecevable. Il sollicite par ailleurs l'effet suspensif.
Invitées à se déterminer, B.________ SA (ci-après: l'intimée) y a renoncé tandis que la cour cantonale s'est référée à son arrêt.
Considérant en droit :
1.
Interjeté en temps utile (art. 46 al. 1 let. b et 100 al. 1 LTF), par la partie qui a succombé en instance cantonale (art. 76 al. 1 LTF), contre une décision rendue en matière de mainlevée de l'opposition (art. 72 al. 2 let. a LTF, qu'elle soit définitive ou provisoire), soit une décision finale au sens de l'art. 90 LTF puisqu'elle met fin à l'instance (ATF 134 III 115 consid. 1.1), et prise sur recours par le tribunal supérieur du canton de Neuchâtel (art. 75 LTF), dont la valeur litigieuse s'élève à plus de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours en matière civile est recevable au regard de ces dispositions.
2.
Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, compte tenu de l'obligation de motiver qui incombe au recourant en vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine pas, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, mais uniquement celles qui sont soulevées devant lui, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 86 consid. 2, 115 consid. 2). Il ne traite donc pas les questions qui ne sont plus discutées par les parties (ATF 140 III 86 consid. 2). Il n'examine pas non plus les griefs qui n'ont pas été soumis à l'instance cantonale précédente (principe de l'épuisement des griefs; ATF 147 III 172 consid. 2.2; 143 III 290 consid. 1.1).
3.
Invoquant une fausse application de l'art. 132 al. 1 CPC, le recourant considère que la requête de mainlevée aurait dû être déclarée irrecevable faute pour l'intimée d'être valablement représentée. Il observe que le vice de forme de l'intimée, spécialisée dans les affaires de recouvrement, était volontaire et ne saurait être réparé.
3.1. La cour cantonale a relevé que l'intimée avait déposé une requête de mainlevée provisoire d'opposition contre le recourant. La requête mentionnait comme signataires F.________ et G.________ (tous deux au bénéfice d'un pouvoir de signature collective à deux). Cependant, seule F.________ avait personnellement signé l'acte. G.________ n'avait quant à lui pas signé l'acte, puisqu'une autre personne avait apposé sa signature "par ordre". Dans sa réponse à la requête, le recourant concluait à l'irrecevabilité de celle-ci en évoquant l'absence de signature valable de G.________. Dans une réplique spontanée, l'intimée a redéposé l'acte désormais signé par F.________ et G.________ personnellement. La cour cantonale a observé qu'en raison de la réaction spontanée de l'intimée elle n'avait pas eu à lui fixer un délai selon l'art. 132 al. 1 CPC pour rectifier son acte, mais que si l'intimée n'avait pas elle-même agi de son propre chef, elle aurait alors dû bénéficier de la disposition précitée. Sa requête était ainsi valablement signée et recevable.
3.2. Les actes adressés au tribunal doivent être signés par la partie ou par une personne habilitée à la représenter (cf. art. 130 al. 1 CPC). Conformément à l'art. 132 al. 1 CPC, le tribunal fixe un délai pour la rectification des vices de forme telle l'absence de signature ou de procuration. À défaut, l'acte n'est pas pris en considération.
3.3. La jurisprudence a déduit de l'art. 29 al. 1 Cst. prohibant le formalisme excessif, que les tribunaux agissent de manière contraire à la bonne foi s'ils déclarent irrecevable un recours non signé, ou signé par une personne non autorisée à la représentation, sans impartir un bref délai de grâce pour corriger le vice (ATF 142 I 10 consid. 2.4). Récemment encore, le Tribunal fédéral a traité d'un acte juridique signé par une personne qui n'était pas seule habilitée à représenter la partie requérante et a considéré que l'art. 132 al. 1 CPC s'applique également dans une telle constellation (arrêt 4A_376/2022 du 5 décembre 2022 consid. 3.3).
3.4. Il résulte de ce qui précède que la solution cantonale ne viole nullement le droit fédéral. Si l'intimée n'avait pas réagi spontanément, la cour cantonale aurait dû lui impartir un délai pour que la personne désignée signe elle-même ou pour produire une procuration au nom de la personne qui avait signé par ordre. Dans le cas d'espèce, rien ne laisse supposer un quelconque abus de droit ou une abstention volontaire d'apposer une signature valable. L'intimée a redéposé une requête identique valablement signée. Il aurait été contraire à l'art. 132 al. 1 CPC et à l'art. 29 al. 1 Cst. de déclarer la requête irrecevable.
4.
Le recourant ne formule aucune autre critique contre l'octroi de la mainlevée. Son recours doit être rejeté. Le recourant, qui succombe, supportera dès lors les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimée, qui procède en personne et a renoncé à se déterminer. La cause étant ainsi jugée, la requête d'effet suspensif n'a plus d'objet.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'500 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à l'Autorité de recours en matière civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
Lausanne, le 4 février 2025
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Hurni
La Greffière : Raetz