4A_138/2024 31.01.2025
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_138/2024
Arrêt du 31 janvier 2025
I
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Hurni, Président, Kiss et May Canellas.
Greffier : M. Esteve.
Participants à la procédure
A.________ SA,
représentée par Me Michel Montini, avocat,
recourante,
contre
B.________,
représenté par Me Johnny Dousse, avocat,
intimé.
Objet
contrat de travail; qualification d'une prime mensuelle; droit d'être entendu; principe de la clause la plus favorable (art. 357 al. 2 CO),
recours en matière civile et recours constitutionnel subsidiaire contre l'arrêt rendu le 6 février 2024 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel (CACIV.2023.97/ctr).
Faits :
A.
A.a. Le 18 septembre 2017, A.________ SA (ci-après: l'employeuse, la défenderesse ou la recourante), société de transport de marchandises membre de l'association X.________, a engagé B.________ (ci-après: le travailleur, le demandeur ou l'intimé), titulaire d'un permis de conduire pour la catégorie CE membre de l'association Y.________, en qualité de conducteur de poids lourds.
Le contrat conclu entre les parties fixait l'engagement au jour de la signature et pour une durée indéterminée.
Sous un article 5 intitulé "Salaire", ce contrat prévoyait le versement d'un salaire mensuel brut de 3'600 fr., augmenté à 3'800 fr. "[a]près validation par [un] client [de l'employeuse]". Le travailleur avait en outre droit à un 13e salaire mensuel et les frais de déplacement ainsi que ceux "raisonnablement encourus par [le travailleur] dans le cadre de son activité" seraient "versés en supplément".
L'article 5 du contrat indiquait par ailleurs: "Une prime appelée de sécurité de CHF 380.00 est versée au conducteur mensuellement pour autant que toutes les conditions requises soient remplies, cette prime pouvant être versée 12 fois par an en fonction de l'atteinte de critères objectifs de professionnalisme et de qualité, ainsi que des directives et normes de travail en vigueur dans l'entreprise.
A cet égard, le conducteur s'engage à respecter scrupuleusement toutes les normes de la loi sur la circulation routière, et de ses prescriptions d'exécution, ainsi que les normes de sécurité, en particulier sur le transport de marchandises dangereuses.
La prime sécurité sera en particulier non versée [ sic], dans le cas où le conducteur aura [ sic] violé de manière répétée les normes précitées."
A.b. En cours d'emploi, le travailleur a perçu un salaire mensuel brut qui, de 3'700 fr. à l'origine, s'est établi, à l'issue d'augmentations successives, à 4'040 fr. Il a reçu un treizième salaire dès la première année de service.
L'employeuse a également versé au travailleur une prime de sécurité d'un montant mensuel brut compris entre 95 fr. et 400 fr. pendant toute la durée des rapports de travail, à l'exception d'un mois. En effet, la prime de sécurité a été réduite à plusieurs reprises en raison d'absences du travailleur pour cause de maladie et a été supprimée en mars 2021 en raison de l'inobservation d'un feu rouge.
Le travailleur a également bénéficié, chaque mois depuis janvier 2018, d'une prime d'ancienneté d'un montant brut de 38 fr.
A.c. Les rapports de travail se sont achevés le 31 mars 2022.
B.
B.a. Ensuite de l'obtention d'une autorisation de procéder, le travailleur a formé, le 20 septembre 2022, par-devant le Tribunal civil du Littoral et du Val-de-Travers, une demande en paiement contre l'employeuse pour une somme totale brute de 20'060 fr., avec les intérêts correspondants. Ce versement était réclamé au titre d'un différentiel entre le salaire brut perçu au cour des mois travaillés et le salaire mensuel minimum de 4'300 fr. brut prévu par la Convention collective nationale pour la branche suisse des transports routiers (ci-après: la CCT).
Par jugement du 11 octobre 2023, la juridiction de première instance a considéré que, pour déterminer si le salaire minimum avait été respecté, la prime de sécurité ne devait pas être prise en compte, alors que la prime d'ancienneté devait l'être. Il en résultait que le travailleur n'avait pas reçu le salaire brut minimal auquel il avait droit, de sorte que le Tribunal civil du Littoral et du Val-de-Travers a condamné la défenderesse à verser au demandeur le montant brut de 14'330 fr. 30, sous déduction des charges légales et conventionnelles, avec intérêts.
B.b. Par arrêt du 6 février 2024, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a rejeté l'appel de la défenderesse et l'appel joint du demandeur. Elle a notamment débouté le travailleur de ses conclusions tendant au paiement en ses mains de 16'268 fr. 30.
C.
Contre l'arrêt de deuxième instance qui lui avait été notifié le 8 février 2024, la défenderesse a formé, le 1er mars 2024, un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire.
Elle conclut à la réforme de la décision attaquée, en ce sens que les prétentions de l'intimé soient intégralement rejetées. Elle requiert à titre subsidiaire le renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision.
L'intimé conclut au rejet du recours, tandis que la cour cantonale se réfère à son arrêt.
Considérant en droit :
1.
Interjeté, dans le délai fixé par la loi (art. 100 al. 1 LTF), par la défenderesse, qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF), et dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par un tribunal supérieur statuant, sur appel, en dernière instance cantonale (art. 75 LTF) dans une affaire de droit du travail (art. 72 al. 1 LTF) dont la valeur litigieuse, déterminée par les conclusions restées litigieuses devant l'autorité précédente (art. 51 al. 1 let. a LTF), dépasse 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF), le recours en matière civile est en principe recevable.
Il s'ensuit que le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (art. 113 LTF).
Demeure réservée, à ce stade, la recevabilité des griefs invoqués par la recourante.
2.
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
S'agissant de l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2). Il ne suffit pas qu'une appréciation différente puisse être tenue pour également concevable, ou apparaisse même préférable (ATF 144 I 170 consid. 7.3; 142 II 369 consid. 4.3; 140 III 167 consid. 2.1).
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3).
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 86 consid. 2). Il n'est en revanche pas lié par l'argumentation juridique développée par les parties ou par l'autorité précédente; il peut admettre le recours, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4).
2.3. La recourante a dédié une section de son recours à "rappeler les faits essentiels de la cause". Étant donné qu'elle n'y soutient ni n'y établit que l'état de fait constaté par la cour cantonale serait arbitraire, pas plus qu'elle n'en sollicite le complètement, il ne sera pas tenu compte de cet exposé.
De même, la recourante fonde sa critique de l'arrêt attaqué sur plusieurs faits qui n'ont pas été constatés par la cour cantonale, sans qu'elle ne sollicite pour autant valablement le complètement de l'état de fait de la décision querellée sur ces points, faute pour elle de démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle aurait valablement allégué et prouvé ces faits devant la cour cantonale. La Cour de céans ne peut en conséquence tenir compte de ces éléments (cf. supra consid. 2.1).
3.
Dans un premier moyen, la recourante conteste la qualification donnée par l'instance précédente de la prime mensuelle de sécurité prévue par le contrat de travail et fait valoir à ce titre une violation arbitraire des art. 322 et 322d CO.
3.1. Afin de qualifier juridiquement une prime, il faut, dans une première étape (cf. infra consid. 3.1.1), déterminer, par interprétation des manifestations de volonté des parties lors de la conclusion du contrat ou de leur comportement ultérieur au cours des rapports de travail (accord par actes concluants), le contenu du contrat puis, dans une seconde étape (cf. infra consid. 3.1.2), catégoriser la prime convenue comme un élément du salaire (art. 322 s. CO) ou une gratification (art. 322d CO) (ATF 142 III 381 consid. 2.1 et 2.2; arrêt 4A_280/2020 du 3 mars 2021 consid. 3).
3.1.1. Conformément au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective (ATF 144 III 93 consid. 5.2.1; 123 III 35 consid. 2b), pour déterminer ce que les parties voulaient, le juge doit rechercher leur réelle et commune intention (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices (art. 18 al. 1 CO; ATF 132 III 268 consid. 2.3.2, 626 consid. 3.1; 131 III 606 consid. 4.1; arrêt 4A_280/2020 précité consid. 4.1). Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes. L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et les arrêts cités). Si le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises ou, au contraire, qu'elles ne se sont pas comprises, il s'agit de constatations de fait qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles ne soient manifestement inexactes (art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF), c'est-à-dire arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2).
Ce n'est que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, qu'il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre, c'est-à-dire conformément au principe de la confiance (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 133 III 61 consid. 2.2.1; 132 III 268 consid. 2.3.2; 132 III 626 consid. 3.1; 130 III 417 consid. 3.2). L'application du principe de la confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral peut examiner d'office (art. 106 al. 1 LTF); cependant, pour trancher cette question, il doit se fonder sur le contenu des manifestations de volonté et sur les circonstances, dont la constatation relève du fait. Les circonstances déterminantes sont celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, à l'exclusion des événements postérieurs (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 133 III 61 consid. 2.2.1).
3.1.2. Lorsqu'un montant est déterminé ou objectivement déterminable, c'est-à-dire qu'il a été promis par contrat dans son principe et qu'il est fixé ou doit l'être sur la base de critères objectifs préétablis comme le bénéfice, le chiffre d'affaires ou une participation au résultat de l'exploitation, et qu'il ne dépend pas de l'appréciation de l'employeur, il doit être considéré comme un élément du salaire (variable), que l'employeur est tenu de verser au travailleur (art. 322 s. CO; ATF 141 III 407 consid. 4.2.1; 136 III 313 consid. 2; 129 III 276 consid. 2; 109 II 447 consid. 5c; arrêt 4A_587/2020 du 28 mai 2021 consid. 12.2).
En revanche, on se trouve en présence d'une gratification lorsque la prime est indéterminée ou objectivement indéterminable, c'est-à-dire que son versement dépend du bon vouloir de l'employeur et que sa quotité dépend pour l'essentiel de la marge de manoeuvre de celui-ci en ce sens qu'elle n'est pas fixée à l'avance et qu'elle dépend de l'appréciation subjective de la prestation du travailleur par l'employeur (ATF 141 III 407 consid. 4.2.2; 139 III 155 consid. 3.1; arrêt 4A_280/2020 précité consid. 3.1).
3.2. La cour cantonale a retenu que, nonobstant la référence contenue dans le contrat de travail à des critères objectifs, il n'était pas possible de déterminer à sa lecture quels motifs précis pouvaient justifier une suppression ou une réduction de la prime de sécurité et, le cas échéant, dans quelle proportion.
De même, si le respect des règles de la circulation routière était, d'après les juges cantonaux, en soi un critère objectif, le contrat, par l'emploi du critère imprécis de violation "répétée" desdites règles de circulation, laissait à l'interprétation de l'employeuse la réduction ou la suppression de la prime dans le cas de leur violation. À cet égard, la cour cantonale, prenant appui sur le contexte général, a relevé qu'il n'était pas possible de comprendre pour quelle raison la prime avait été entièrement supprimée à la suite de la non-observation d'un feu rouge, plutôt que réduite dans une certaine proportion, par exemple.
En outre, selon l'instance précédente, la notion de "critères objectifs de professionnalisme et de qualité" était sujette à interprétation et, nécessairement, à appréciation de l'employeuse. La cour cantonale a pris sur ce point en considération les nombreuses réductions de la prime de sécurité intervenues en cours d'emploi en raison d'arrêts maladie de l'intimé. On peinait en effet, selon elle, à voir un lien entre le fait que le travailleur fût malade et la qualité de son travail, son professionnalisme, le respect de normes quelconques ou, plus généralement, des exigences de l'employeuse en matière de sécurité. De plus, si la prime de sécurité pouvait être réduite en cas de maladie, cela constituait un indice fort qu'elle ne faisait pas partie du salaire, puisque le salaire aurait été dû en cas de maladie du travailleur et que la défenderesse n'avait jamais prétendu que les absences pour cause de maladie auraient dépassé la durée pendant laquelle le salaire devait être versé en vertu de l'art. 324a CO.
Aussi, faute d'être objectivement déterminable et puisque sujette à l'appréciation de l'employeuse, la prime de sécurité devait être qualifiée de gratification.
3.3. La recourante reproche à la cour cantonale de ne pas avoir pris en considération le fait que la prime de sécurité était prévue à un article du contrat de travail intitulé "Salaire" et que l'étendue de cette prime était précisément décrite, le contrat indiquant un montant chiffré et "non négligeable" de 380 fr.
Cet état de choses, cumulé au caractère automatique et répétitif de cette prime, due à la fin de chaque mois, aurait dû, selon la recourante, conduire les juges cantonaux à qualifier la prime de sécurité d'élément de salaire.
En outre, s'agissant de l'existence de critères objectifs de fixation de la prime, la recourante fait valoir que le contrat se réfère expressément aux directives et devoirs professionnels en vigueur dans l'entreprise, lesquels n'auraient rien de subjectif. Elle avance pareillement que les normes légales en vigueur devaient naturellement être strictement respectées par un chauffeur poids lourd professionnel et constituaient précisément un critère objectif prédéterminé.
Le fait que le versement de la prime de sécurité n'était pas laissé à son appréciation résultait, selon la recourante, de ce que la seule occasion où cette prime n'avait exceptionnellement pas été versée était due à une violation évidente des règles de la circulation routière.
La recourante reproche également à l'instance précédente d'avoir limité son examen à une interprétation littérale des termes du contrat et aucunement porté son attention à la réelle et commune intention des parties. D'après la recourante, cela aurait conduit les juges cantonaux a faire fi des circonstances ultérieures à la conclusion du contrat de travail relatives au fait que la prime de sécurité avait été versée de manière systématique, ce que ne pouvait venir remettre en question le fait que cette prime avait été réduite à quelques occasions.
Partant, aux yeux de la recourante, la prime de sécurité ne répondrait pas à la définition de gratification de l'art. 322d al. 1 CO, puisqu'elle ne revêtirait aucun caractère "spécial" et n'aurait aucunement été versée "à certaines occasions".
3.4. L'argumentaire de la recourante ne saurait emporter la conviction de la Cour de céans.
À titre liminaire, il doit être relevé que, contrairement à ce que soutient la recourante, la cour cantonale a constaté la réelle et commune intention des parties, en se fondant non seulement sur le contrat de travail litigieux mais aussi sur le comportement ultérieur des parties. C'est à ce titre qu'elle a pris en considération les circonstances entourant les réductions réitérées et la suppression momentanée de la prime de sécurité pendant les rapports de travail, attendu qu'il n'aurait pas été permis de se référer à ce comportement dans le contexte d'une interprétation selon le principe de la confiance (cf. supra consid. 3.1.1).
Il était en tout état de cause exclu de suivre l'approche que prône la recourante en référence à l'intitulé de la disposition contractuelle litigieuse et au montant qui y est prévu, une interprétation purement littérale du contrat étant d'autant plus inadmissible sous l'angle de l'interprétation subjective qu'elle est prohibée en cas d'interprétation objective (cf. ATF 136 III 186 consid. 3.2.1; 135 III 295 consid. 5.2).
Dès lors que l'interprétation à laquelle s'est livrée l'instance précédente ressortait aux constatations de fait, la recourante se devait d'en établir le caractère arbitraire.
Or, par sa critique, la recourante ne fait que substituer son appréciation des preuves administrées à celle opérée par l'instance précédente, ce qui constitue une démarche appellatoire. La recourante ne conteste au demeurant pas - contrairement à ce que requiert l'art. 42 al. 2 LTF (cf. ATF 142 III 364 consid. 2.4; arrêt 4A_417/2022 du 25 avril 2023 consid. 7) - la motivation indépendante, suffisante à sceller cette partie du litige, selon laquelle, en l'absence d'invocation de l'art. 324a CO, le fait que la prime de sécurité ait été réduite en cas de maladie du travailleur établit la dépendance de son versement à l'appréciation de l'employeuse.
Dans cette mesure, le grief de la recourante est irrecevable.
S'agissant de l'application des art. 322 et 322d CO par l'instance précédente, la critique de la recourante manque sa cible, du moment qu'elle se focalise sur le caractère régulier du versement de la prime de sécurité.
En effet, ainsi que cela ressort de la jurisprudence citée (cf. supra consid. 3.1.2), ce qui distingue la gratification du salaire réside en ce que son versement dépend totalement ou au moins partiellement du bon vouloir de l'employeur. Les échéances auxquelles une prime a pu ou dû être versée ne peuvent être déterminantes à cet égard. On ne décèle partant pas de violation du droit fédéral dans le fait que la prime litigieuse ait été qualifiée de gratification, dès lors que la volonté de soumettre le versement de ladite prime à l'appréciation de l'employeuse a valablement été établie par la cour cantonale.
Sur ce plan, le grief de la recourante doit en conséquence être rejeté.
4.
Invoquant l'art. 9 et l'art. 29 al. 2 Cst., l'art. 112 al. 1 let. b LTF et l'art. 357 al. 2 CO, la recourante fait grief aux juges cantonaux d'avoir violé son droit d'être entendue en raison d'un prétendu défaut de motivation de l'arrêt querellé relativement au principe de la clause la plus favorable, principe qui se trouverait aussi violé.
4.1.
4.1.1. Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 Cst. implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. Le juge n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 143 III 65 consid. 5.2; 134 I 83 consid. 4.1; arrêt 4A_400/2019 du 17 mars 2020 consid. 5.7.3, non publié in ATF 146 III 265). La motivation peut pour le reste être implicite et résulter des différents considérants de la décision. En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst. si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; arrêts 4A_555/2023 du 29 novembre 2024 consid. 3.2.1; 4A_266/2020 du 23 septembre 2020 consid. 4.1).
4.1.2. L'art. 357 al. 2 CO prévoit qu'en tant qu'ils dérogent à des clauses impératives d'une convention collective de travail, les accords entre employeurs et travailleurs liés par la convention sont nuls et remplacés par ces clauses; toutefois, les dérogations stipulées en faveur des travailleurs sont valables.
Le principe du caractère impératif des dispositions collectives est ainsi limité par celui de la clause la plus favorable ( Günstigkeitsprinzip) (ATF 116 II 153 consid. 2a/aa; arrêt 4C.269/2001 du 16 novembre 2001 consid. 4b).
Si les parties sont convenues de déroger à une convention collective de travail, il faut dès lors procéder à une comparaison des avantages ( Günstigkeitsvergleich). Il s'agit de vérifier, pour le rapport de travail en question, si les conditions contractuelles de travail sont ou non plus favorables au travailleur que celles de la convention collective. La préférence du travailleur concerné pour l'une ou l'autre réglementation est sans incidence. Il convient bien plutôt de partir de critères objectifs. On doit se demander quelle serait l'appréciation d'un travailleur raisonnable en considération du corps de métier visé et des conceptions prévalant au sein de la branche d'activité concernée. Le caractère objectif de cet examen implique également que l'on ne peut pas comparer isolément les différentes dispositions en cause. Pour autant, il n'est pas non plus possible de procéder à une comparaison globale du contrat de travail avec la convention collective. Il faut au contraire effectuer une comparaison par secteurs ( Gruppenvergleich). Dans ce cadre, on compare les dispositions de la convention collective qui sont étroitement liées entre elles avec la réglementation correspondante du contrat individuel de travail. Cela permet par exemple que des systèmes de rémunération différents soient comparés entre eux dans leur ensemble. La comparaison ne peut cependant s'attacher qu'à un ensemble de normes qui sont en corrélation les unes avec les autres. Cette exigence de connexité doit donc être interprétée de manière restrictive. Ainsi, même lorsque l'on compare des systèmes de rémunération, on ne peut pas dans tous les cas comparer le revenu annuel probable avec la réglementation de la convention collective. Il faut bien plus limiter à une période déterminée la comparaison du salaire total selon la convention collective et selon le contrat individuel de travail. Le but de protection de la disposition correspondante de la convention collective est à cet égard d'une importance cruciale. Le Tribunal fédéral a ainsi jugé adéquat de limiter la comparaison à une période d'un mois (ATF 134 III 399 consid. 3.2.4.3; 116 II 153 consid. 2a/aa et 2a/bb; arrêt 4A_629/2011 du 6 juin 2012 consid. 4 et les références citées).
4.2. La cour cantonale a constaté que la défenderesse n'avait pas remis en cause devant elle l'ensemble de la motivation du jugement de première instance relative au principe de la clause la plus favorable, ce qui rendait la recevabilité de son grief sur ce point douteuse. En particulier, les juges cantonaux ont relevé que la défenderesse n'avait pas critiqué le fait que le système de rémunération prévu entre les parties n'était pas conforme au but de la CCT, parce qu'il permettait à l'employeuse de "passer sous la barre du salaire mensuel brut fixe minimum conventionnel par l'exercice d'un pouvoir d'appréciation".
L'instance précédente a considéré par ailleurs qu'il n'était pas déterminant qu'à l'issue de la relation contractuelle, le demandeur ait globalement perçu un revenu supérieur à ce qu'un strict respect de la CCT lui aurait permis de toucher. Ce qui, selon la cour cantonale, était problématique résidait en l'espèce dans le fait que la rémunération minimale prévue par la CCT n'était pas garantie, puisque le travailleur était placé devant le risque que sa prime de sécurité soit supprimée ou réduite à tout moment, sur la base de critères laissés à la libre appréciation de l'employeuse. La situation contractuelle n'était donc pas objectivement plus favorable que ce que prévoyait la CCT sous l'angle de l'assurance de percevoir un salaire minimum.
En outre, les juges cantonaux ont retenu que la comparaison des modèles de rémunération dans leur ensemble conduisait à retenir que la prime de sécurité ne pouvait pas appartenir au même secteur que le salaire brut fixe prévu par la CCT, puisque son versement n'était pas garanti et que son montant n'était pas objectivement déterminable.
Par ailleurs, l'instance précédente a exposé, s'agissant du remboursement de frais professionnels, qu'aussi généreux qu'il ait pu être - ce qui n'avait, selon elle, pas été prouvé -, il ne poursuivait à l'évidence pas le même but que le salaire et ne saurait appartenir au même secteur que ce dernier, dans le but de compenser son insuffisance.
4.3. La recourante reproche tout d'abord à la cour cantonale d'avoir rejeté son grief "aux termes [ sic] d'un considérant [...] excessivement sommaire" et de n'avoir ce faisant pas dûment examiné les divers griefs soulevés dans l'appel qu'elle avait formé. La recourante affirme en effet avoir suffisamment contesté la motivation du jugement de première instance s'agissant du respect du but de protection de la CCT.
Sur le fond, la recourante avance en substance (1) qu'il serait faux de prétendre que la prime de sécurité pouvait être réduite ou supprimée à tout moment, (2) qu'il serait évident que du point de vue d'un travailleur raisonnable et objectif, une rémunération globalement supérieure au salaire minimum applicable était dans l'intérêt du travailleur et (3) qu'en considération de la jurisprudence, la prime de sécurité devait assurément faire partie du même secteur que le salaire brut fixe.
La recourante déduit de ce qui précède que le résultat auquel aboutit le raisonnement de l'instance précédente serait choquant car il conduirait en définitive à un déséquilibre en permettant à l'intimé de cumuler les avantages de la CCT et ceux de son contrat individuel de travail, au détriment de la recourante.
Elle fait valoir enfin, par des références à ses allégations et aux pièces qu'elle a versées à la procédure, qu'elle aurait fait la démonstration que l'intimé avait effectivement bénéficié de défraiements et autres avantages allant bien au-delà des obligations de la recourante, ce dont la cour cantonale aurait fait fi de manière insoutenable. Elle se réfère en outre à des extraits de la CCT et de son annexe pour prétendre que les défraiements convenus relèveraient du même secteur que le salaire.
4.4. Force est de constater que la recourante ne démontre aucunement que l'instance précédente aurait effectivement omis de se prononcer sur l'un quelconque des griefs qu'elle a formulés en appel. Elle va même jusqu'à se contredire à ce sujet en affirmant que les juges cantonaux n'auraient "pas ou peu discuté les nombreux arguments soulevés" ou encore que ceux-ci n'auraient "pas été examinés ni débattus par [la cour cantonale], qui a[urait] rejeté ce[s] grief[s] de manière excessivement laconique". La recourante n'expose en tout état de cause pas en quoi les griefs qui n'auraient pas été examinés par la cour cantonale auraient été décisifs pour l'issue du litige (cf. supra consid. 4.1.1), en sorte que le moyen tiré d'une prétendue violation de son droit d'être entendue doit être rejeté.
En outre et nonobstant des références à des éléments de fait qui n'ont pas été constatés par la cour cantonale et dont elle ne requiert pas valablement qu'ils soient intégrés à l'état de fait, la recourante ne démontre aucunement que l'instance précédente aurait erré dans l'application du principe de la clause la plus favorable.
Au contraire, la recourante se contente de développer son raisonnement propre sur ce point sans réellement discuter la motivation de l'arrêt querellé. Tout spécialement, la recourante ne remet pas en cause de manière effective l'argumentation tirée du but du salaire minimum conventionnel. Elle ne s'exprime pas en effet sur les considérations ressortant à l'essence de cette réglementation, c'est-à-dire la garantie en faveur du travailleur d'un plancher salarial mensuel fixe, et ses dénégations quant aux réductions et suppressions de la prime de sécurité se trouvent en tout état de cause réfutées par le constat de variations sensibles des montants versés à ce titre. Elle perd pareillement de vue que, même à retenir que la prime de sécurité devrait relever du même secteur que le salaire, la jurisprudence a établi un cadre temporel de comparaison des systèmes salariaux d'un mois (cf. supra consid. 4.1.2), si bien qu'elle ne saurait être suivie lorsqu'elle se prévaut de la situation du travailleur sur l'entier de la durée des rapports de travail.
De même, les éléments de fait qu'invoque la recourante n'établissent en aucune manière que le défraiement accordé au travailleur aurait excédé les frais professionnels effectifs de celui-ci au point que cet élément de revenu doive être qualifié de salaire. On ne peut partant faire reproche aux juges cantonaux d'avoir violé le droit fédéral en considérant que le système de défraiement n'appartenait pas au même secteur que le salaire.
En conséquence, ce grief est également mal fondé.
5.
Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.
Les frais judiciaires et les dépens seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.
2.
Le recours en matière civile est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de la recourante.
4.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 1'000 fr. à titre de dépens.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.
Lausanne, le 31 janvier 2025
Au nom de la I re Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Hurni
Le Greffier : Esteve