4A_327/2024 19.03.2025
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_327/2024
Arrêt du 19 mars 2025
I
Composition
M. et Mmes et les Juges fédéraux
Hurni, Président, Kiss et May Canellas.
Greffière : Mme Fournier.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Luc André, avocat,
recourant,
contre
B.________,
représenté par Me Julien Lattion et Me Marie-Laure Moerch,
intimé.
Objet
reprise cumulative de dette,
recours contre l'arrêt rendu le 29 avril 2024 par la Cour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais (C1 21 292).
Faits :
A.
A.a. C.________ SA (devenue aujourd'hui D.________ SA) appartenait à la société E.________ SA (devenue aujourd'hui F.________ SA; ci-après: la société-mère). D.________ était la branche " publishing " du groupe.
A.b. A.________ a occupé la fonction de directeur de D.________, puis, dès le 26 septembre 2008, la fonction d'administrateur avec signature collective à deux. Il était, en outre, actionnaire de la société-mère. Il est devenu ensuite actionnaire de D.________. Il a quitté ses fonctions et sa signature a été radiée en juillet 2017.
A.c. Par contrat de travail du 20 mars 2007, D.________ a engagé B.________ (ci-après: l'employé) en tant que " chief operating officer " pour une durée indéterminée. Son engagement débutait le 12 mars 2007. Son salaire était de 15'000 fr. brut par mois, payable douze fois l'an.
Le contrat de travail renvoyait à un avenant, conclu à la même date. Celui-ci prévoyait, pour l'année 2007, l'octroi d'un bonus de 100'000 fr. en faveur de l'employé à condition que "la branche publishing " soit bénéficiaire. Il prévoyait encore, pour l'année 2008, une participation de l'employé de "5% sur l'EBITDA 2008" (" earnings before interest, taxes, depreciation and amortization "; bénéfice avant déduction des intérêts, impôts, dépréciation et amortissement).
A.________, en tant que directeur de D.________, a négocié les conditions d'engagement de l'employé. Agissant au nom de D.________, il a également cosigné le contrat de travail et son avenant avec le président du conseil d'administration de la société.
Par e-mail du 28 mars 2007, l'employé s'est adressé au président du conseil d'administration en le priant de confirmer que le bonus de 100'000 fr. prévu par l'avenant lui serait versé si D.________ sortait "des chiffres rouges en 2007". Après s'être référé à A.________, le président du conseil d'administration a confirmé à l'intéressé les conditions d'octroi du bonus.
A.d. À une date inconnue suivant la réception des comptes de D.________ établis au 30 juin 2007, l'employé s'est inquiété de diverses charges extraordinaires pesant sur D.________. Il relevait que les "bidouillages internes" rendaient illusoire l'objectif dont dépendait son bonus. Le 25 juillet 2007, A.________ lui a répondu qu'il pouvait ignorer "les arrangements cosmétiques" du groupe: "seuls les résultats réels hors provisions ser[aient] pris en compte pour le calcul des bonus".
A.e. Par e-mail du 18 janvier 2008 intitulé "résultats provisoires de D.________ au 31.12.2007", A.________ a écrit à l'employé ce qui suit: "[l]a branche presse est bénéficiaire avant management fees ! Un grand bravo à toi B.________! Mission accomplie".
A.f. Le 18 mai 2009, faisant suite à la requête de l'employé qui réclamait le paiement de son bonus pour 2007, A.________ lui a confirmé que la somme de 100'000 fr. lui était acquise. Le 19 avril 2010, à nouveau interpellé au sujet du versement de ce bonus, A.________ a rétorqué que ce serait lui qui payerait la somme en question, mais qu'il n'était pas pressé de s'exécuter. Par e-mail du 21 avril 2010, A.________ a encore déclaré ce qui suit: "[p]our la paix des ménages, étant probablement partiellement responsable du flou de ce dossier, je paierai de ma poche personnelle la somme de 100'000 à M. B.________. Je ferai ce versement d'ici à fin septembre 2010". Cet e-mail était adressé à l'employé, à l'ancien directeur financier de D.________ (entre-temps devenu directeur financier du groupe) et expédié en copie à l'un des administrateurs de D.________. Faisant suite à une nouvelle requête de l'employé, A.________ lui a répondu, le 21 juin 2011, qu'il ne "pens[ait] pas que D.________ en [av]ait les moyens pour le moment". L'employé lui ayant précisé que D.________ n'était plus responsable du paiement, A.________ a ajouté que "[lui] non plus, [n'en avait] pas les moyens". L'employé a réitéré sa demande à plusieurs reprises, se heurtant toujours au refus d'A.________.
A.g. Par pli recommandé du 10 janvier 2012, l'employé a mis en demeure A.________ de lui payer la somme de 100'000 fr. dans les dix jours. A.________ n'y a pas donné suite, malgré plusieurs relances de l'employé.
A.h. Le 31 janvier 2014, l'employé a déposé une réquisition de poursuite contre A.________. Ce dernier a fait opposition au commandement de payer qui lui a été notifié le 21 février 2014.
B.
B.a. Après une tentative de conciliation infructueuse, l'employé a assigné A.________ devant le Tribunal du district de Sierre en vue d'obtenir le paiement d'un montant de 100'000 fr. à titre du bonus convenu pour 2007 avec intérêts, ainsi que la levée de l'opposition au commandement de payer.
A.________ a conclu au rejet de la demande.
Par jugement du 25 octobre 2021, le Tribunal du district de Sierre a condamné A.________ à payer à l'employé la somme de 100'000 fr. avec intérêts, sous déduction des charges sociales à verser aux institutions concernées.
B.b. Statuant le 29 avril 2024, la Cour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais a rejeté l'appel d'A.________ et confirmé le jugement de première instance. En substance, les juges cantonaux ont estimé que la condition dont dépendait le bonus était réalisée et qu'A.________ avait repris cumulativement la dette de D.________.
Les motifs de l'arrêt attaqué seront évoqués de manière plus détaillée dans les considérants en droit du présent arrêt, dans la mesure utile à la discussion des griefs.
C.
A.________ (ci-après: le recourant) forme un recours en matière civile à l'encontre de cet arrêt, assorti d'une requête d'effet suspensif. À titre principal, il conclut à sa réforme, en ce sens que la demande en paiement de l'employé (ci-après: l'intimé) est rejetée. Subsidiairement, il sollicite le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Dans sa réponse, l'intimé s'est opposé à l'octroi de l'effet suspensif et a conclu au rejet du recours, suscitant une réplique du recourant à laquelle il a dupliqué.
La cour cantonale s'est référée aux considérants de son arrêt.
La demande d'effet suspensif a été admise par ordonnance présidentielle du 29 juillet 2024.
Considérant en droit :
1.
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont satisfaites sur le principe. Demeure réservée, à ce stade, la recevabilité des griefs soulevés par le recourant.
2.
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3).
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3).
Le complètement de l'état de fait ne relève pas de l'arbitraire; un fait non constaté ne peut pas être arbitraire, c'est-à-dire constaté de manière insoutenable. En revanche, si un fait omis est juridiquement pertinent, le recourant peut obtenir qu'il soit constaté s'il démontre qu'en vertu des règles de la procédure civile, l'autorité précédente aurait objectivement pu en tenir compte et s'il désigne précisément les allégués et les offres de preuves qu'il lui avait présentés, avec référence aux pièces du dossier (ATF 140 III 86 consid. 2).
C'est le lieu de relever que les éléments de fait qui ressortent du mémoire de recours, notamment de la partie "faits", et divergent de ceux retenus par la cour cantonale, sans que l'arbitraire ou le complètement de l'état de fait ne soit invoqué dans les formes prescrites, ne seront pas pris en considération.
2.2. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), il n'examine en principe que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il n'examine la violation d'un droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 137 III 580 consid. 1.3; 135 III 397 consid. 1.4).
3.
Le litige porte sur deux points, qu'il convient d'analyser successivement. Il s'agit tout d'abord d'examiner si l'intimé a droit au bonus prévu dans l'avenant au contrat de travail du 20 mars 2007 ( infra consid. 4). Dans l'affirmative, il faudra déterminer si c'est le recourant qui doit payer ce bonus à l'intimé sur la base d'un accord passé entre eux, ce qui supposera d'examiner si cet accord doit être qualifié de reprise de dette ou de cautionnement ( infra consid. 5).
4.
Afin de déterminer si l'intimé a droit au bonus qu'il réclame pour 2007, il convient d'examiner à quelle condition cette prestation était soumise et si cette condition s'est réalisée.
4.1. L'avenant au contrat de travail du 20 mars 2007, conclu entre D.________ et l'intimé, subordonne l'octroi du bonus pour l'année en question à la condition que "la branche publishing [soit] bénéficiaire". La cour cantonale a recherché le sens que D.________ et l'intimé ont donné au terme "bénéficiaire" sur la base d'une interprétation subjective. Elle a constaté au terme de cet examen que la condition se rapportait à l'EBITDA, comme l'intimé le soutenait, et non au bénéfice comptable de la société, comme le recourant l'affirmait. Pour ce faire, elle s'est référée aux déclarations que le recourant, en sa qualité de directeur de D.________, avait formulées après la conclusion de l'avenant. À cet égard, il avait donné l'assurance à l'intimé que "seuls les résultats réels hors provisions [seraient] pris en compte pour le calcul du bonus" et qu'il n'avait pas "à s'inquiéter des arrangements cosmétiques" liés à l'existence du groupe. Au surplus, dans son e-mail du 18 janvier 2008, le recourant avait relevé à l'attention de l'intimé que la "branche presse [était] bénéficiaire" en se fondant sur l'EBITDA avant " management fees ", et avait félicité l'intimé pour avoir atteint son objectif. Par ailleurs, plus d'un an après l'établissement des comptes annuels révisés de 2007 et du rapport de l'organe de révision (qui mentionnait notamment le surendettement de la société), il avait encore confirmé à l'intimé que son droit au bonus était acquis et indiqué à plusieurs reprises qu'il en payerait le montant. D'après la cour cantonale, les parties à l'avenant s'étaient donc entendues pour évaluer les résultats de la branche " publishing " selon l'EBITDA, avant " management fees ", ce que le directeur financier de D.________ de l'époque avait lui aussi confirmé.
S'il était vrai que l'avenant du 20 mars 2007 faisait référence à l'EBITDA dans la clause relative à la participation pour 2008 et non dans celle qui concernait le bonus de 2007, poursuit la cour cantonale, le recourant n'avait pas énoncé les raisons pour lesquelles D.________ et l'intimé seraient convenus d'un critère différent pour ces deux années. Il n'avait pas non plus exposé pour quelle raison le critère du bénéfice comptable était plus à même que l'EBITDA d'appréhender les résultats de la branche " publishing ".
Dès lors qu'il existait effectivement un bénéfice avant déduction des intérêts, impôts, dépréciation, amortissement et avant déduction des " management fees ", la cour cantonale a conclu que la condition dont dépendait le bonus était réalisée et que l'intimé y avait droit.
4.2. Selon le recourant, tout en indiquant procéder à une interprétation subjective, la cour cantonale se serait en réalité livrée à une interprétation objective de l'avenant au contrat de travail. Dans ce contexte, il ne serait pas admissible de tenir compte des déclarations du directeur de D.________ ( i.e. du recourant) postérieures à la conclusion de cet avenant. Par ailleurs, l'instance précédente aurait versé dans l'arbitraire en ne tenant compte que d'une partie du témoignage de l'ancien directeur financier de D.________. Enfin, elle n'aurait pas tenu compte de la lettre de l'avenant, qui ne se référait pas à l'EBITDA dans la clause relative au bonus de l'année 2007.
Dans une argumentation subsidiaire, le recourant relève que même à admettre que la cour cantonale ait procédé à une interprétation subjective, elle aurait alors arbitrairement établi la volonté réelle des parties, ignorant le texte pourtant clair de l'avenant et faisant fi du fait que les parties maîtrisaient les termes de nature comptable, ce qui les aurait portées à utiliser des concepts distincts pour déclencher le droit à un éventuel bonus, en 2007 et en 2008.
4.3. Déterminer quel est le contenu d'un contrat est soumis au principe de la priorité de la volonté subjective sur la volonté objective (ATF 144 III 93 consid. 5.2.1; 123 III 35 consid. 2b).
Dans un premier temps, le juge doit donc rechercher la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices. Constituent des indices en ce sens non seulement la teneur des déclarations de volonté - écrites ou orales -, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et les arrêts cités). L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait. Si le juge parvient à la conclusion que les parties se sont comprises ou, au contraire, qu'elles ne se sont pas comprises, il s'agit de constatations de fait qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles ne soient manifestement inexactes (art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF), c'est-à-dire arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 III 93 consid. 5.2.2 et les arrêts cités).
Ce n'est que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle et commune des parties - parce que les preuves font défaut ou ne sont pas concluantes - ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté exprimée par l'autre à l'époque de la conclusion du contrat - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, qu'il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective), à savoir rechercher leur volonté objective, en déterminant le sens que, d'après les règles de la bonne foi, chacune d'elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l'autre, c'est-à-dire conformément au principe de la confiance (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 133 III 61 consid. 2.2.1; 132 III 268 consid. 2.3.2; 130 III 417 consid. 3.2). Ce principe permet d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 130 III 417 consid. 3.2 et les arrêts cités). L'application du principe de la confiance est une question de droit que le Tribunal fédéral peut examiner d'office (art. 106 al. 1 LTF); cependant, pour trancher cette question, il doit se fonder sur le contenu des manifestations de volonté et sur les circonstances, dont la constatation relève du fait. Les circonstances déterminantes sont celles qui ont précédé ou accompagné la manifestation de volonté, à l'exclusion des événements postérieurs (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 133 III 61 consid. 2.2.1 et les arrêts cités).
Le sens d'un texte, apparemment clair, n'est pas forcément déterminant, de sorte que l'interprétation purement littérale est prohibée. Même si la teneur d'une clause contractuelle paraît limpide à première vue, il peut résulter d'autres conditions du contrat, du but poursuivi par les parties ou d'autres circonstances que le texte de ladite clause ne restitue pas exactement le sens de l'accord conclu. Il n'y a toutefois pas lieu de s'écarter du sens littéral du texte adopté par les intéressés lorsqu'il n'existe aucune raison sérieuse de penser qu'il ne correspond pas à leur volonté (ATF 136 III 186 consid. 3.2.1 et les arrêts cités).
4.4. En l'espèce, contrairement à ce que prétend le recourant, la cour cantonale a bien dégagé la réelle et commune intention de D.________ et de l'intimé à l'issue d'une interprétation subjective, en constatant que les parties se sont entendues pour que le bonus de 2007 soit accordé à l'intimé si la société réalisait un EBITDA (avant " management fees ").
À cet égard, la cour de céans ne décèle nulle trace d'arbitraire dans cette constatation, malgré les protestations du recourant qui, brandissant certains éléments, voudrait bien faire oublier ce qu'en sa qualité de directeur de D.________, il a lui-même déclaré à l'intimé à réitérées reprises lorsque l'affaire n'avait pas encore pris un tour judiciaire. Ces déclarations, comme la cour cantonale l'a fort bien relevé, vont dans le sens opposé de l'interprétation qu'il prône désormais, et il n'est en tout cas pas insoutenable de s'être fondé sur celles-ci pour en déduire que selon la volonté commune de D.________ et de l'intimé, le bonus était lié à l'EBITDA. Par ailleurs, il ne ressort pas de l'état de fait que D.________ aurait, à un moment quelconque précédant la procédure, contesté le droit au bonus de l'intimé ou le critère dont il dépendait. Certes, le libellé de l'avenant ne comportait pas de référence expresse à l'EBITDA pour le calcul du bonus de l'année 2007, alors qu'il le mentionnait textuellement dans la clause relative à la participation de l'intimé pour l'année 2008. Le texte de l'avenant n'est toutefois à lui seul pas décisif, d'autant moins que D.________, par la voix du recourant, s'est ensuite exprimée très clairement sur la portée de la clause.
Par conséquent, le grief doit être rejeté.
5.
Il convient à présent de rechercher si le recourant est personnellement débiteur de ce bonus.
5.1. Selon la cour cantonale, le recourant a, par e-mail du 21 avril 2010, offert à l'intimé de payer lui-même pour la fin septembre 2010 le montant du bonus dû par D.________, ce que l'intimé a tacitement accepté. Un contrat est dès lors venu à chef entre ces deux parties.
L'autorité précédente a qualifié juridiquement ce contrat de reprise cumulative de dette, et non de cautionnement, comme le recourant le soutenait. Elle a déterminé quelle était la volonté des parties en procédant à une interprétation subjective et est parvenue à la conclusion qu'elles s'étaient entendues pour que le recourant assume une obligation principale, et non accessoire, par rapport à celle de D.________. L'e-mail du 21 avril 2010 n'était assorti d'aucune réserve ou condition; l'obligation assumée par le recourant ne dépendait pas, notamment, de l'éventuelle insolvabilité de D.________: le recourant avait tout bonnement indiqué qu'il paierait personnellement le montant de 100'000 fr., puisqu'il s'estimait responsable du "flou" existant. Cet e-mail avait été adressé également à deux administrateurs de D.________. Il faisait suite à un précédent courriel du 19 avril 2010 dans lequel le recourant s'était déjà exprimé dans ce sens ("c'est de toute façon moi qui doit payer [...]") ( supra let. A.f). Le comportement que le recourant et l'intimé avaient adopté ultérieurement le révélait également: l'intimé s'était, suite à l'e-mail du 21 avril 2010, directement adressé au recourant pour requérir le paiement du bonus; le recourant n'avait quant à lui jamais contesté devoir cette somme; mis au pied du mur, il s'était contenté d'opposer qu'il n'avait finalement pas les moyens de s'en acquitter. Par surabondance, le recourant avait intérêt à assumer directement les créances salariales de la société puisque la responsable administrative et financière de celle-ci le sollicitait personnellement en cas de "problèmes pour le paiement des salaires". Cet élément dénotait également une obligation principale, caractéristique d'une reprise cumulative de dette.
5.2. Selon le recourant, l'instance précédente a violé son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) en retenant de manière contradictoire deux critères distincts pour délimiter la reprise de dette du cautionnement et sans éclaircir quel critère serait central. Une violation de son droit d'être entendu résulterait également du fait que l'arrêt attaqué serait lacunaire et incompréhensible sur ce point.
Le recourant se plaint ensuite d'une violation des art. 18, 176 et 492 CO. Il conteste que la cour cantonale ait procédé à une interprétation subjective pour établir la volonté des parties. Elle aurait opéré une interprétation objective que la cour de céans pourrait revoir librement. Dans ce cadre, la cour cantonale ne pourrait tenir compte d'événements postérieurs à la conclusion du contrat. De plus, le recourant n'aurait pas eu d'intérêt personnel à l'exécution de l'obligation, ce qui serait pourtant le critère central pour admettre la conclusion d'une reprise de dette. En particulier, la position dirigeante du recourant au sein de D.________ ne serait manifestement pas suffisante pour retenir un tel intérêt. Les parties auraient ainsi conclu un contrat de cautionnement. Il soutient encore que même si la cour cantonale a bien procédé à une interprétation subjective, elle aurait alors arbitrairement établi la volonté réelle des parties, qui portait sur un contrat de cautionnement.
Faute de respecter la forme légale applicable au cautionnement (art. 493 CO), ce contrat serait nul, de sorte que le recourant ne serait, à l'en croire, pas débiteur du bonus.
5.3.
5.3.1. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. et l'art. 53 CPC, qui ont à cet égard la même portée, comprend notamment l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse apprécier la portée de celle-ci et exercer son droit de recours à bon escient. Pour satisfaire à cette exigence, il lui suffit d'exposer, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé son raisonnement (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 138 I 232 consid. 5.1; 133 III 439 consid. 3.3 et les arrêts cités).
5.3.2. En l'espèce, l'arrêt attaqué satisfait à ces exigences en ce qu'il expose de manière parfaitement compréhensible les considérations qui ont conduit l'instance précédente à retenir que les parties se sont entendues pour que le recourant reprenne la dette de D.________. Il ressort notamment clairement de l'arrêt que la cour cantonale a tenu compte du fait que le recourant n'avait pas précisé vouloir garantir la dette en cas d'insolvabilité de D.________ uniquement. En sus de cet élément, elle a estimé que le recourant avait un intérêt personnel à exécuter la dette. Enfin, les circonstances, en particulier la situation financière de D.________, ne rendaient pas plausible, aux yeux de l'instance précédente, que les parties aient conclu un cautionnement. Ce faisant, la cour cantonale n'a pas violé le droit d'être entendu du recourant. Les reproches de ce dernier ont trait en définitive à la nature des motifs qui sous-tendent la décision et cet aspect doit être examiné à l'aune des griefs de fond qu'il leur adresse spécifiquement (cf. infra consid. 5.4).
5.4.
5.4.1. La qualification juridique d'un contrat est une question de droit. Le juge applique le droit d'office (art. 57 CPC) et détermine d'office les règles légales applicables à la convention des parties. Il n'est lié ni par la qualification effectuée par les parties ni par les expressions ou dénominations inexactes dont les parties ont pu se servir soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (" falsa demonstratio non nocet ") (art. 18 al. 1 CO; ATF 131 III 217 consid. 3; 129 III 664 consid. 3.1; arrêts 4A_117/2024 du 21 août 2024 consid. 4.1; 4A_93/2022 du 3 janvier 2024 consid. 3.1), d'autant qu'il peut être particulièrement tentant de déguiser la nature véritable de la convention pour éluder certaines dispositions légales impératives (ATF 129 III 664 consid. 3.2).
5.4.2. Le cautionnement comme la reprise cumulative de dette renforcent la position du créancier et reposent souvent dans cette mesure sur des considérations économiques identiques. Cependant, ils diffèrent notamment quant aux conditions de forme. Ainsi, la validité de la reprise de dette n'est subordonnée à l'observation d'aucune forme. En revanche, le législateur a édicté pour le cautionnement des règles de forme strictes ( i.e. la forme authentique), afin de protéger la partie qui s'oblige; elles doivent d'une part empêcher la conclusion irréfléchie de cautionnements, d'autre part rendre la caution au moins consciente du contenu de l'engagement pris (art. 493 CO; ATF 129 III 702 consid. 2.2; arrêt 4A_624/2017 du 8 mai 2018 consid. 3.1.1).
5.4.3. Une personne peut garantir le paiement d'un tiers débiteur en s'obligeant par un contrat de cautionnement conclu entre lui et le créancier, selon l'art. 492 al. 1 CO. Le cautionnement présuppose l'existence d'un autre engagement (celui qui doit être garanti). Il constitue une adjonction à cet engagement et en dépend nécessairement pour son existence et son objet; de nature accessoire, il garantit la solvabilité du débiteur ou l'exécution d'un contrat (ATF 129 III 702 consid. 2.1 et les réf. citées; arrêts 4A_24/2020 du 26 mai 2020 consid. 4.2.1; 4A_624/2017 précité consid. 3.1.2; 4A_59/2017 du 28 juin 2017 consid. 2.4.1).
En cas de reprise cumulative de dette, le reprenant crée un engagement propre, indépendant, qui s'ajoute à celui du débiteur; il reprend ainsi personnellement et directement la dette d'un tiers (ATF 129 III 702 consid. 2.1 et les réf. citées; arrêts 4A_624/2017 précité consid. 3.1.3; 4A_59/2017 précité consid. 2.4.3). L'engagement solidaire naît lorsque le garant déclare au créancier qu'il pourra être recherché au même titre et pour les mêmes prestations que le débiteur; ce dernier et le garant sont alors tenus solidairement selon l'art. 143 al. 1 CO (ATF 129 III 702 consid. 2.1).
Du point de vue juridique, il faut partir de l'idée - dans le cautionnement - que la dette issue du cautionnement et la dette principale diffèrent de par leur objet et leur cause. En revanche, dans la reprise cumulative de dette, celui qui reprend cumulativement la dette s'oblige comme le débiteur primitif, se range à ses côtés en tant que débiteur solidaire. Dans le premier cas, l'obligation a pour cause la garantie que le débiteur principal est solvable alors que, dans le second, la cause réside dans le désintéressement du créancier indépendamment du débiteur (ATF 129 III 702 consid. 2.2 et les réf. citées). Contrairement à ce qui se passe dans le cautionnement, la sûreté ne constitue pas l'élément essentiel de la cause de l'obligation découlant de la reprise cumulative de dette, même si une telle reprise a toujours un certain effet de garantie (ATF 129 III 702 consid. 2.2).
À l'inverse de la caution, le reprenant (dans la reprise cumulative de dette) a d'ordinaire un intérêt propre et reconnaissable à l'affaire conclue entre le débiteur principal et le créancier, et pas seulement un intérêt à garantir le paiement de la dette primitive (ATF 129 III 702 consid. 2.6 et les réf. citées; arrêts 4A_624/2017 précité consid. 3.1.3; 4A_59/2017 précité consid. 2.4.3). D'ailleurs, si la validité du cautionnement a été subordonnée à l'observation de règles de forme particulières, c'est parce que, dans ce contrat, un tel intérêt propre fait défaut et qu'il s'agit d'un acte gratuit typiquement consenti pour garantir l'engagement de parents ou d'amis intimes (ATF 129 III 702 consid. 2.6; arrêts 4A_624/2017 précité consid. 3.1.3; 4A_59/2017 précité consid. 2.4.3). Partant, on penchera pour une reprise cumulative de dette lorsque le garant a un intérêt direct et matériel dans l'affaire à conclure entre le débiteur et le créancier, que ce dernier a connaissance de cet intérêt et qu'il peut donc apercevoir le motif pour lequel le garant se déclare prêt à assumer une obligation identique à celle du débiteur. Il en va ainsi, notamment, lorsque le débiteur est lié au garant par un contrat de société et que l'affaire concourt à la réalisation du but social (arrêt 4C.191/1999 du 22 septembre 1999 consid. 1d) ou lorsque le prêt (garanti) est destiné au fonds de roulement et donc aux opérations d'une société anonyme dont les trois garants sont actionnaires et administrateurs (arrêt 4C.24/2007 du 26 avril 2007 consid. 5; cf. aussi s'agissant d'administrateurs d'une société, arrêts 4A_310/2015 du 29 octobre 2015 consid. 3.5 et 5A_849/2012 du 25 juin 2013 consid. 2.2.2).
5.4.4. En l'espèce, contrairement à ce que prétend le recourant, la cour cantonale a bien procédé à une interprétation subjective de la volonté des parties pour déterminer ce qu'elles avaient en vue. De la constellation de faits qui entoure leur accord (y compris les déclarations du recourant qui ont suivi celui-ci), elle a déduit que le recourant avait la volonté de reprendre à titre personnel la dette de D.________ (c'est-à-dire d'assumer la même obligation) sans que la solvabilité de cette dernière n'y soit pour quelque chose, mais bien parce qu'il s'estimait personnellement responsable du flou entourant le versement du bonus, ce que l'intimé avait compris et accepté comme tel.
Il n'y a pas d'arbitraire qui entache ce processus. En ce qui concerne la volonté du recourant, on ne décèle pas en quoi il n'était pas admissible, pour l'instance précédente, de se référer, en premier lieu, à la teneur de son e-mail du 21 avril 2010. Dans le contexte d'une interprétation subjective, les juges cantonaux étaient parfaitement en droit de se rapporter non seulement au contexte général, mais aussi au comportement ultérieur du recourant qui était suffisamment explicite. Il n'en va pas autrement s'agissant de la volonté de l'intimé, elle aussi établie sans arbitraire.
Quant à l'intérêt que le recourant avait à assumer l'obligation querellée, il est assez évident. Le recourant lui-même a indiqué qu'il s'estimait responsable du flou entourant le versement du bonus de 2007, ce qui le motivait à le payer personnellement. Ceci n'a rien d'incongru dans le présent contexte, compte tenu de sa position à la fois d'administrateur, mais aussi d'actionnaire tant de la société-mère que de D.________ et du fait qu'il avait lui-même en sa qualité de directeur, négocié les conditions de l'engagement de l'intimé. Le recourant avait ainsi un intérêt économique à ce que ladite société assume ses engagements contractuels vis-à-vis de l'intimé. C'est en vain que le recourant prétend - en se fondant sur un exposé partiel des faits - qu'un tel intérêt ferait manifestement défaut.
5.4.5. Dès lors que les parties ont convenu que le recourant s'engageait de manière indépendante aux côtés de D.________ (et non qu'il garantissait la solvabilité de la société) et qu'il avait un intérêt propre et reconnaissable dans l'affaire, la cour cantonale a qualifié à bon droit le contrat litigieux de reprise cumulative de dette, et non de cautionnement.
Le grief tiré d'une violation des art. 18, 176 et 492 CO ne peut être que rejeté.
6.
En définitive, le recours doit être rejeté. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de procédure (art. 66 al. 1 LTF) et versera des dépens à l'intimé (art. 68 al. 1 et 2 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le recourant versera à l'intimé une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour civile II du Tribunal cantonal du canton du Valais.
Lausanne, le 19 mars 2025
Au nom de la I re Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Hurni
La Greffière : Fournier