4A_239/2024 19.03.2025
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
4A_239/2024
Arrêt du 19 mars 2025
Ire Cour de droit civil
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux Hurni, Président,
Denys et May Canellas.
Greffière : Mme Raetz.
Participants à la procédure
A.________ SA,
représentée par Me Nicolas Saviaux, avocat,
recourante,
contre
B.________,
représenté par Me Laura Emonet, avocate,
intimé.
Objet
contrat de bail à loyer; nullité du loyer initial,
recours contre l'arrêt rendu le 11 mars 2024 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (XA20.042190-230153, 110).
Faits :
A.
A.a. B.________ bénéficie d'une curatelle de représentation et de gestion au sens des art. 394 al. 1 et 395 al. 1 CC. Le 10 février 2016, C.________, assistante sociale auprès de l'Office des curatelles et tutelles professionnelles (devenu par la suite le Service des curatelles et tutelles professionnelles), a été nommée curatrice de celui-ci, avec pour tâche notamment de le représenter dans les rapports avec les tiers, en particulier en matière de logement, santé, affaires sociales, administration et affaires juridiques.
A.b. Le 14 août 2017, A.________ SA (ci-après: la bailleresse) et B.________ (ci-après: le locataire) ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur un studio meublé à U.________. Le bail a débuté le 1er septembre 2017. Le loyer mensuel net s'élevait à 1'050 fr., auquel s'ajoutait un forfait pour le chauffage et l'eau chaude de 200 francs. Ce contrat a été signé par D.________ au nom de la bailleresse, le locataire personnellement et sa curatrice C.________.
Lors de son audition devant le tribunal, C.________ a déclaré ne pas se souvenir d'avoir reçu une "feuille verte" avec le bail, sinon elle l'aurait certainement signée, et n'avoir jamais vu de "feuilles vertes" remises à d'autres personnes dont elle s'était occupée et qui avaient loué des logements dans l'immeuble litigieux; elle avait en revanche reçu de tels documents de la part d'autres gérances de la place.
A.c. L'état des lieux d'entrée s'est déroulé le 1er septembre 2017 en présence du locataire, accompagné par E.________, nouvelle curatrice professionnelle ayant remplacé C.________, ainsi que de F.________, alors concierge de l'immeuble, en qualité de représentante de la bailleresse.
Une formule de notification du loyer initial datée du 1er septembre 2017, ne comportant aucune signature manuscrite, a été produite par la bailleresse.
Lors de son audition, E.________ a déclaré qu'aucune formule officielle ne lui avait été remise lors de l'état des lieux, précisant que si tel avait été le cas, elle l'aurait classée dans le dossier du locataire avec le bail et le procès-verbal d'état des lieux.
Par deux témoignages écrits, F.________ a indiqué avoir remis personnellement la formule officielle au locataire, en fin d'après-midi le jour de l'état des lieux, étant montée à nouveau au 6ème étage pour lui donner la "feuille verte". Elle s'en souvenait car le locataire n'avait pas été agréable avec elle, lui avait mal répondu et avait refusé de signer la feuille. Elle lui avait alors laissé les deux copies avant de partir.
A.d. En septembre 2019, en raison de la présence de punaises de lit dans l'appartement, le locataire et sa curatrice ont consulté une avocate.
B.
B.a. Le 15 avril 2020, le locataire a saisi la Commission de conciliation en matière de baux à loyer du district de U.________ d'une requête en fixation du loyer initial, restitution du trop-perçu, réduction de la garantie de loyer, ainsi qu'en réduction de loyer et dommages et intérêts consécutifs à la présence de punaises de lit dans le studio loué.
Après l'échec de la conciliation, la commission de conciliation a formulé une proposition de jugement, à laquelle le bailleur s'est opposé. Au bénéfice d'une autorisation de procéder, celui-ci a déposé une demande auprès du Tribunal des baux du canton de Vaud, concluant à ce que le loyer initial soit fixé à 1'050 fr. par mois. Le locataire a pris des conclusions reconventionnelles en constat de la nullité du loyer initial, en fixation de celui-ci à 500 fr. par mois, en remboursement du trop-perçu à raison de 550 fr. par mois dès le 1er septembre 2017 et en réduction de la garantie locative. Le locataire a ensuite saisi le tribunal d'une demande en réduction de loyer de 70 % du 27 septembre au 18 décembre 2019, en remboursement du trop-versé et en paiement de 1'230 fr. à titre de dommages-intérêts, en lien avec la présence des punaises de lit.
Le tribunal a joint les causes. Il a entendu C.________ et E.________ en qualité de témoins.
Par jugement du 24 janvier 2022, le tribunal a fixé le loyer initial mensuel net à 600 fr. dès le 1er septembre 2017 (I), a dit que la bailleresse était tenue de restituer au locataire les montants versés en trop à titre de loyer jusqu'au jour de l'entrée en force du jugement (II), a réduit le montant de la garantie de loyer à 1'800 fr. (III), a réduit le loyer mensuel net précité de 70 % du 27 au 29 septembre 2019, du 17 octobre au 7 novembre 2019 et du 15 novembre au 18 décembre 2019 (IV), et a dit que la bailleresse devait payer au locataire la somme de 826 fr. avec intérêts à titre de parts de loyer versées en trop pour la période du 27 septembre au 18 décembre 2019 (V), ainsi que la somme de 317 fr. avec intérêts (VI).
B.b. La bailleresse a formé un appel contre ce jugement, en produisant notamment un avis de droit du Prof. G.________.
Par arrêt du 11 mars 2024, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois a très partiellement admis l'appel. Elle a supprimé le chiffre VI du dispositif du jugement entrepris et a confirmé ce dernier pour le surplus.
C.
La bailleresse (ci-après: la recourante) a exercé un recours en matière civile au Tribunal fédéral à l'encontre de cet arrêt. Elle a conclu à sa réforme en ce sens que le loyer initial soit fixé à 1'050 fr. et que les conclusions du locataire (ci-après: l'intimé) soient rejetées. Subsidiairement, elle a conclu à son annulation et au renvoi de la cause au Tribunal des baux pour nouvelle instruction et nouvelle décision au sens des considérants. Elle a à nouveau produit l'avis de droit précité.
Par ordonnance du 1er mai 2024, l'effet suspensif a été conféré au recours.
Dans sa réponse, l'intimé a conclu au rejet du recours et a sollicité l'octroi de l'assistance judiciaire.
La cour cantonale s'est référée à son arrêt.
Considérant en droit :
1.
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes à la valeur litigieuse minimale de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF) et au délai de recours (art. 45 al. 1, 46 al. 1 let. a et 100 al. 1 LTF).
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Toutefois, compte tenu de l'obligation de motiver qui incombe au recourant en vertu de l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine pas, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser, mais uniquement celles qui sont soulevées devant lui, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 86 consid. 2, 115 consid. 2). Il ne traite donc pas les questions qui ne sont plus discutées par les parties (ATF 140 III 86 consid. 2). Il n'examine pas non plus les griefs qui n'ont pas été soumis à l'instance cantonale précédente (principe de l'épuisement des griefs, ATF 147 III 172 consid. 2.2; 143 III 290 consid. 1.1). Le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2). En outre, le Tribunal fédéral ne connaît de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été invoqué et motivé par le recourant, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3).
En matière d'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral se montre réservé, vu le large pouvoir qu'il reconnaît en ce domaine aux autorités cantonales. Il n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 140 III 26 consid. 2.3). L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution serait concevable, voire préférable (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2).
3.
3.1. La recourante soutient d'abord que l'élément de fait concernant la non-connaissance, par l'intimé et ses curatrices, de l'exigence de la formule officielle pour la notification du loyer initial, est discuté dans la partie "En droit" de l'arrêt attaqué, mais n'a pas été constaté dans la partie "En fait". On n'y trouvait pas les constatations de la cour cantonale indiquant ce qu'elle avait estimé que l'intimé et ses curatrices savaient au sujet de la formule officielle ou en termes de connaissances juridiques. L'état de fait serait ainsi dressé de manière arbitraire et en violation des exigences de l'art. 112 al. 1 let. b LTF.
Déterminer ce qu'une personne savait à un moment donné est une question de fait (arrêt 4A_552/2020 du 12 mars 2021 consid. 6.2). Cela ne veut évidemment pas encore dire que cette constatation devrait impérativement figurer dans la partie "En fait" de l'arrêt cantonal. En l'occurrence, le constat de la non-connaissance de l'intimé et de ses curatrices résulte d'une appréciation des preuves et avait toute sa place dans la partie "En droit" de l'arrêt attaqué. Ainsi, les griefs du recourant ne peuvent qu'être rejetés, pour autant qu'ils soient recevables.
3.2. La recourante reproche ensuite à la cour cantonale d'avoir établi les faits de manière manifestement inexacte dans la mesure où elle n'avait pas résumé, dans la partie "En fait", l'avis de droit du Prof. G.________.
Or, la cour cantonale, qui a relevé la production de cet avis de droit avant de le déclarer recevable, pouvait de toute évidence s'abstenir de le résumer ou le reproduire, sans pour autant violer le droit fédéral (cf. aussi consid. 6.3 infra).
4.
Les parties divergent sur trois points, premièrement, sur la preuve de la notification de la formule officielle, deuxièmement, sur l'abus de droit à invoquer la nullité du loyer initial, et troisièmement sur la prescription de l'action en remboursement du trop-perçu.
4.1. En vertu de l'art. 270 al. 2 CO, en cas de pénurie de logements, les cantons peuvent rendre obligatoire, sur tout ou partie de leur territoire, l'usage de la formule officielle, mentionnée à l'art. 269d CO, pour la conclusion de tout nouveau bail. Le canton de Vaud a fait usage de cette faculté.
La formule officielle doit être notifiée au locataire au moment de la conclusion du bail ou, au plus tard, le jour de la remise de la chose louée. Elle a pour but d'informer le locataire de sa possibilité de saisir l'autorité de conciliation afin de contester le montant du loyer, en lui fournissant toutes les indications utiles. Elle sert aussi à empêcher les hausses abusives de loyer lors d'un changement de locataire, de sorte que l'indication du loyer versé par le précédent locataire doit y figurer (ATF 140 III 583 consid. 3.1; arrêt 4A_302/2021 du 28 janvier 2022 consid. 4.1.1 non publié à l'ATF 148 III 63). Lorsqu'elle n'a pas été employée par le bailleur alors qu'elle était obligatoire ou que la hausse de loyer par rapport à celui payé par le précédent locataire n'y a pas été motivée, le loyer fixé est nul (nullité partielle du contrat) (ATF 140 III 583 consid. 3.2.1; arrêt précité 4A_302/2021 consid. 4.1.1 non publié à l'ATF 148 III 63).
Lorsque la remise de la formule officielle est contestée par le locataire, il appartient au bailleur de la prouver (art. 8 CC).
4.2. Le locataire qui n'a pas reçu la formule officielle peut agir en fixation judiciaire du loyer initial et en restitution de l'éventuel trop-perçu.
Tant que dure le bail qui a été conclu sans que soit utilisée la formule officielle ou sans que la hausse de loyer n'y soit motivée, le locataire peut en principe toujours se prévaloir du vice de forme affectant la notification du loyer initial, ne serait-ce que pour obtenir la fixation des loyers futurs, et ce indépendamment de l'éventuelle prescription de l'action en restitution des parts de loyer versées indûment, l'abus de droit étant réservé (art. 2 al. 2 CC) (ATF 148 III 63 consid. 5.1.1; 146 III 82 consid. 3.5 et les références citées).
4.3. L'action en répétition de l'indu de l'art. 67 CO se prescrit par trois ans (mais en l'espèce par un an conformément à l'ancien art. 67 al. 1 CO, qui lui est applicable) à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance de son droit de répétition et, dans tous les cas, par dix ans à compter de la naissance de ce droit.
Le créancier a connaissance de son droit de répétition - et le délai de prescription relatif commence à courir (art. 67 al. 1 CO) - lorsqu'il connaît suffisamment d'éléments pour fonder et motiver son action en justice, laquelle n'a pas besoin d'être chiffrée (art. 85 CPC). Cela suppose qu'il ait connaissance de la mesure approximative de l'atteinte à son patrimoine, de l'absence de cause du déplacement de patrimoine et de la personne de l'enrichi. Est déterminant le moment de la connaissance effective de sa prétention, et non celui où il aurait pu ou dû connaître son droit en faisant preuve de l'attention commandée par les circonstances (ATF 148 III 63 consid. 6.1; 146 III 82 consid. 4.1.3). L'abus manifeste de droit (art. 2 al. 2 CC) demeure toujours réservé (ATF 148 III 63 consid. 6.1).
Dans le cas du locataire qui n'a pas reçu la formule officielle obligatoire en vertu de l'art. 270 al. 2 CO, la connaissance effective intervient lorsque le locataire sait que l'absence de cette formule, respectivement de l'indication du loyer du locataire précédent ou de la motivation de la hausse, entraîne la nullité du loyer initial, que le loyer qu'il a versé était trop élevé et qu'il était, partant, abusif (ATF 148 III 63 consid. 6.2).
L'ignorance du locataire est présumée. Le juge du fait doit vérifier, par appréciation des preuves, si le locataire demandeur doit bénéficier de la présomption d'ignorance compte tenu de l'ensemble des circonstances. Tel ne serait notamment pas le cas si le locataire avait des connaissances spécifiques en droit du bail, s'il avait déjà loué un appartement pour lequel il avait reçu la formule officielle, ou s'il avait été impliqué dans une précédente procédure de contestation du loyer initial (ATF 148 III 63 consid. 6.2.1 et 6.2.3).
4.4. L'abus manifeste d'un droit (art. 2 al. 2 CC) n'est pas protégé par la loi. Ce principe permet de corriger les effets de la loi dans certains cas où l'exercice d'un droit allégué créerait une injustice manifeste. Le juge apprécie la question au regard des circonstances concrètes, qui sont déterminantes. L'emploi dans le texte légal du qualificatif "manifeste" démontre que l'abus de droit doit être admis restrictivement. Les cas typiques en sont l'absence d'intérêt à l'exercice d'un droit, l'utilisation d'une institution juridique de façon contraire à son but, la disproportion manifeste des intérêts en présence, l'exercice d'un droit sans ménagement ou l'attitude contradictoire (ATF 143 III 279 consid. 3.1; 140 III 583 consid. 3.2.4 et les références citées).
Au titre de l'attitude contradictoire du locataire, la jurisprudence a retenu qu'une exception au droit de répétition des art. 62 ss CO peut être admise, par exemple, lorsque le preneur s'est rendu compte du vice de forme et s'est abstenu de protester dans le dessein d'en tirer, le cas échéant, ultérieurement profit (ATF 140 III 583 consid. 3.2.4).
5.
Tout d'abord, la recourante reproche aux juges cantonaux d'avoir retenu de manière arbitraire, et en violation des art. 52 et 56 CPC, que la formule officielle n'avait pas été remise au locataire.
5.1. La cour cantonale a indiqué que la bailleresse invoquait une "appréciation arbitraire des preuves" au motif que les témoignages écrits de F.________ n'avaient pas été pris en compte; selon la bailleresse, les premiers juges auraient pu apprécier la crédibilité des déclarations de F.________ s'ils l'avaient convoquée en tant que témoin, ce qu'ils n'avaient pas fait. La cour cantonale a d'abord relevé que la bailleresse ne prétendait pas avoir requis l'audition de F.________ en qualité de témoin en première instance, s'étant contentée de produire deux témoignages écrits. Il n'y avait pas à reprocher aux premiers juges de ne pas avoir administré un moyen de preuve qui n'avait pas été requis, étant précisé qu'ils n'avaient pas à le faire d'office, puisque les parties étaient toutes deux assistées par un avocat, nécessitant d'appliquer la maxime inquisitoire sociale avec retenue. Par ailleurs, s'agissant de la force probante d'un témoignage écrit, ce dernier ne constituait pas l'un des moyens de preuve exhaustivement prévu à l'art. 168 CPC et n'était dès lors pas admissible. Les premiers juges n'avaient toutefois pas simplement écarté les témoignages écrits de F.________. Même si la recevabilité de ces écrits était douteuse, il convenait de confirmer l'appréciation des premiers juges à l'égard de ces documents, à savoir qu'ils n'étaient pas suffisants pour apporter la preuve de la remise effective du formulaire officiel à l'intimé, compte tenu de leur valeur probante amoindrie, du rapport de travail ayant existé entre F.________ et la bailleresse et du fait qu'ils n'étaient pas corroborés par un autre moyen de preuve. Le formulaire officiel produit n'était d'aucune utilité puisqu'il ne comportait pas de signature manuscrite.
5.2. La recourante allègue que la cour cantonale n'avait pas à lui reprocher de ne pas avoir requis l'audition de F.________ en qualité de témoin. Elle affirme que la pratique des tribunaux n'est pas constante à l'égard des témoignages écrits; il était donc contraire à la bonne foi de l'avoir laissé croire que les témoignages écrits pouvaient constituer un moyen de preuve. Les premiers juges auraient dû l'informer que ceux-ci devaient être écartés du dossier, de sorte qu'elle aurait alors pu requérir l'audition de F.________ en qualité de témoin. Toutefois, comme l'a relevé la cour cantonale, le témoignage écrit ne constitue pas l'un des moyens de preuve prévu exhaustivement à l'art. 168 CPC. La recourante se contente de vagues affirmations et ne démontre en aucun cas que le raisonnement des juges cantonaux serait critiquable, étant d'ailleurs rappelé qu'elle était déjà assistée d'un avocat devant les instances précédentes. Par ailleurs, les témoignages écrits de F.________ n'ont pas simplement été écartés, mais ont été pris en compte et discutés par les juges précédents dans leur appréciation des preuves.
À cet égard, la recourante se limite à se fonder sur ces témoignages écrits et sur la formule officielle produite, pour retenir qu'un tel document aurait été transmis à l'intimé. Ce faisant, elle se contente d'opposer sa propre appréciation des preuves à celle effectuée par les juges cantonaux, sans parvenir à démontrer qu'ils ont retenu de manière arbitraire qu'elle n'avait pas prouvé la remise effective de la formule officielle à l'intimé.
6.
La recourante dénonce ensuite un abus de droit de l'intimé à se prévaloir de la nullité du loyer initial faute de remise du formulaire officiel. Ses curatrices connaissaient ou devaient connaître l'exigence de notification du loyer initial par formule officielle, ce qui était imputable à l'intimé. Il ne pouvait invoquer, des années plus tard, le défaut d'une telle formule.
6.1. La cour cantonale a retenu que l'intimé ne connaissait pas cette exigence.
S'agissant de la première curatrice, C.________, la cour cantonale a relevé qu'il apparaissait qu'elle avait connaissance de cette exigence lors de son audition, pour avoir reçu des "feuilles vertes" de la part d'autres gérances, mais qu'on ignorait si, au moment de la conclusion du bail en août 2017, elle en avait connaissance. De plus, dans la mesure où elle avait été ensuite remplacée par E.________, laquelle avait assisté à l'état des lieux d'entrée et avait repris la curatelle de l'intimé courant septembre 2017, l'éventuelle connaissance de l'exigence d'une formule officielle par la première curatrice ne suffirait de toute façon pas pour conclure à un abus de droit. Même si C.________ avait su que la conclusion d'un bail devait s'accompagner de la remise d'un formulaire officiel, elle n'avait pas à s'inquiéter de l'absence de ce dernier lors de la signature du bail, puisqu'il pouvait également être remis ultérieurement, lors de l'état des lieux d'entrée, à laquelle E.________ avait participé.
Concernant cette dernière, la cour cantonale a retenu que le manuel établi à l'attention des curateurs privés du canton de Vaud, comportant 215 pages, mentionnait qu'une formule officielle était requise pour notifier valablement le loyer lors de la conclusion d'un nouveau bail. Selon la cour cantonale, cela ne suffisait pas à apporter la preuve que E.________ connaissait effectivement l'exigence de la formule, puisqu'on ne pouvait pas partir du principe que les curateurs avaient constamment à l'esprit toutes les informations contenues dans un manuel de ce type, d'autant plus que le manuel précisait, en page 174, les points qui devaient être vérifiés par le curateur d'un locataire lors de la signature du contrat de bail, et que la remise du formulaire officiel n'y figurait pas.
Par ailleurs, les deux curatrices exerçaient le métier d'assistante sociale et n'avaient donc aucune formation juridique particulière. Elles avaient été entendues comme témoins et il aurait été aisé pour la bailleresse de leur poser la question de savoir si elles connaissaient la règle concernant la formule officielle, ce qu'elle n'avait toutefois pas fait, se contentant d'exprimer des suppositions sur les connaissances des curatrices.
Enfin, l'intimé se trouvait soumis à une curatelle de représentation et de gestion et conservait donc l'exercice des droits civils. Selon le manuel précité, "lorsque la personne concernée conserve l'exercice de ses droits civils, elle peut valablement signer le contrat de bail sans l'accord de son curateur. En outre, le curateur peut également signer le contrat de bail seul et engager la personne sous curatelle, si cette tâche relève de son mandat. Le curateur et la personne concernée disposent donc d'un pouvoir de signature concurrent, ils peuvent tous deux signer un contrat de bail ensemble ou de manière indépendante". Il apparaissait ainsi que les deux curatrices n'étaient pas les représentantes de l'intimé, qui avait lui-même signé le bail en tant que détenteur de l'exercice des droits civils. On ne pourrait donc pas simplement opposer à l'intimé les éventuelles connaissances juridiques - eussent-elle été démontrées - des curatrices. À cet égard, il ne ressortait pas du dossier que les curatrices aient informé l'intimé de l'exigence d'une formule officielle lors de la conclusion d'un nouveau bail.
Ainsi, rien n'indiquait que l'intimé, ni ses curatrices, connaissaient l'exigence de notification du loyer initial par formule officielle au moment de la conclusion du bail et de l'état des lieux en août et septembre 2017. La bailleresse échouait à apporter la preuve d'un abus de droit à invoquer le vice de forme lié à la notification du loyer initial.
6.2. La recourante expose que l'intimé est sous curatelle de représentation et de gestion, et qu'il s'est vu nommer (successivement) deux curatrices professionnelles de l'Office des curatelles et tutelles professionnelles, avec pour tâche de le représenter en particulier en matière de logement. En tant que représentantes qualifiées, elles disposaient de connaissances spécialisées en matière de logement, ce d'autant plus que cet Office bénéficie d'un support juridique. Elles savaient, ou devaient savoir, qu'une formule officielle de notification de loyer lors de la conclusion d'un nouveau bail était nécessaire, ce qui était imputable à l'intimé. Le défaut d'une telle formule aurait dû être immédiatement signalé. S'en prévaloir des années plus tard relève de l'abus de droit.
La recourante allègue encore qu'il suffit au locataire d'affirmer qu'il ignorait cette exigence, de sorte que l'abus de droit ne sera jamais retenu contre lui. Selon la recourante, en matière de droit du bail, la connaissance ou l'ignorance coupable du représentant ou mandataire du locataire n'est jamais retenue à la charge de ce dernier, contrairement à ce qui prévaut pour le bailleur. Le sentiment de justice et le principe d'égalité n'y trouvent "pas leur compte".
6.3. Lorsque la recourante soutient que C.________ et E.________, en tant que curatrices professionnelles, connaissaient l'exigence de la formule officielle, elle se limite à exposer sa propre appréciation des preuves, sans discuter celle opérée par les juges cantonaux. De plus, comme relevé par ces derniers, il était loisible à la recourante, représentée par un avocat, de demander aux curatrices lors de leur audition si elles avaient bel et bien eu connaissance de cette exigence au moment topique, ce qu'elle a omis de faire. S'agissant de E.________, qui venait de remplacer C.________ lorsqu'elle a participé à l'état des lieux - moment où la formule officielle pouvait encore être remise - on ignore tout de son expérience et de ses connaissances en matière de droit du bail.
Par ailleurs, la recourante invoque désormais une "ignorance coupable" des curatrices et les connaissances qu'elles auraient dû avoir; elle ne soutient toutefois pas, références à l'appui, avoir déjà soulevé ce moyen devant la cour cantonale, qui ne l'a pas traité. Il n'y a ainsi même pas à entrer en matière.
La recourante indique encore se référer à l'avis de droit du Prof. G.________. Elle reproche à la cour cantonale de ne pas l'avoir discuté, "de manière arbitraire". Elle semble ainsi dénoncer une violation de son droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst.), sous l'angle du droit à une décision motivée. Toutefois, même si la cour cantonale ne s'est pas expressément référée à cet avis de droit, elle a expliqué de manière claire les raisons pour lesquelles - contrairement à celui-ci - elle retenait que tant le locataire que les curatrices ignoraient l'exigence de la formule officielle. De plus, cet avis exposait en substance que les curatrices, désignées notamment pour la question du logement, devaient avoir des compétences en droit du bail, ce qui se recoupe avec les arguments présentés par la bailleresse. On ne discerne ainsi aucune violation de droits constitutionnels, pour autant qu'une telle violation ait été valablement invoquée, compte tenu des exigences de motivation accrue prévalant devant le Tribunal fédéral à cet égard (cf. consid. 2.1 supra).
En définitive, la recourante ne parvient pas à démontrer que la cour cantonale a retenu arbitrairement que ni l'intimé, ni ses curatrices, ne connaissaient l'exigence de la formule officielle en cas de conclusion d'un bail. On peut rappeler que l'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution serait concevable, voire préférable. Dans ces circonstances, il n'y a même pas à examiner si la prétendue connaissance des curatrices pouvait ou non être imputée au locataire.
La cour cantonale n'a ainsi pas violé le droit fédéral en écartant un abus de droit de l'intimé à se prévaloir de la nullité du loyer initial faute de remise de la formule officielle.
7.
Enfin, la recourante soutient que le droit du locataire au remboursement du trop-perçu est prescrit.
7.1. La cour cantonale a relevé que l'intimé et ses curatrices successives n'avaient eu connaissance de la nullité du loyer initial qu'au moment où ils ont consulté une avocate pour le problème des punaises de lit apparues en septembre 2019; la requête de conciliation datant du 15 avril 2020, le délai de prescription d'une année était respecté.
7.2. La recourante se limite à déplorer qu'il suffit que le locataire affirme qu'il ne "savait pas" pour qu'il soit réputé ignorer ses droits, peu importe qu'il ait été assisté d'un avocat ou d'autres mandataires "censés maîtriser les affaires juridiques". Ce faisant, elle perd de vue que la jurisprudence en lien avec l'action en répétition de l'indu exige la connaissance effective de ses droits par le locataire lui-même (cf. arrêt précité 4A_302/2021 consid. 6.5 non publié in ATF 148 III 63). La recourante ne prétend pas que le locataire aurait été informé de ses droits avant le 15 avril 2019. Elle ne critique pas réellement le raisonnement de la cour cantonale et se contente de remarques générales. Elle semble remettre en cause la jurisprudence précitée. Or, un changement de jurisprudence ne peut se justifier, notamment, que lorsqu'il apparaît que les circonstances ou les conceptions juridiques ont évolué ou qu'une autre pratique respecterait mieux la volonté du législateur; les motifs du changement doivent être objectifs et d'autant plus sérieux que la jurisprudence est ancienne, afin de ne pas porter atteinte sans raison à la sécurité du droit (ATF 149 III 28 consid. 6.2.3.1). Ces conditions strictes ne sont pas réunies; la recourante n'allègue d'ailleurs même pas le contraire.
8.
On peut encore relever que la recourante conclut au rejet de toutes les prétentions de l'intimé. Elle ne formule pourtant aucun grief s'agissant des considérations des juges cantonaux relatives à la problématique des punaises de lit, les ayant amenés à confirmer la réduction de loyer de 70 % fin 2019 et la condamnation à verser la somme de 826 fr. à titre de trop-perçu pour cette période. Il n'y a donc pas à entrer en matière sur ce sujet.
9.
En définitive, le recours doit être rejeté, dans la mesure où il est recevable.
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires et versera à l'intimé une indemnité à titre de dépens (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF).
La demande d'assistance judiciaire de l'intimé devient ainsi sans objet, étant précisé que la recourante sera selon toute probabilité en mesure de payer à son adverse partie les dépens auxquels celle-ci a droit.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire de l'intimé est sans objet.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
4.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 3'500 fr. à titre de dépens.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 19 mars 2025
Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Hurni
La Greffière : Raetz