2C_632/2024 11.04.2025
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_632/2024
Arrêt du 11 avril 2025
IIe Cour de droit public
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Ryter.
Greffière : Mme Jolidon.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Pierre-André Oberson, avocat,
recourant,
contre
Service de la population du canton de Vaud,
avenue de Beaulieu 19, 1014 Lausanne Adm cant VD.
Objet
Requête de restitution de délai; défaut de paiement de l'avance de frais,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 13 novembre 2024 (PE.2024.0158).
Considérant en fait et en droit :
1.
1.1. En date du 29 mars 2023, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service de la population) a refusé de prolonger l'autorisation de séjour de A.________. Au terme de la procédure, le Tribunal fédéral a rejeté le recours de l'intéressé par arrêt du 13 juin 2024 (cause 2C_101/2024).
1.2. Parallèlement, A.________ a demandé la reconsidération de la décision du 29 mars 2023, "à tout le moins en tant que celle-ci prononce [le] renvoi". Ledit service l'a déclarée irrecevable et l'a subsidiairement rejetée, par décision du 7 juin 2024, puis par décision sur opposition du 30 août 2024, le délai de départ ayant été fixé au 30 septembre 2024.
A.________ a attaqué cette décision sur opposition devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal), qui lui a imparti, le 3 octobre 2024, un délai au 4 novembre 2024 pour procéder à l'avance de frais de 600 fr., sous peine d'irrecevabilité du recours. En raison d'un solde insuffisant sur le compte de l'intéressé, le versement n'a pu être opéré dans le délai imparti, ce dont l'épouse de A.________ s'est rendue compte le 5 novembre 2024. Celle-ci a alors saisi une nouvelle fois le paiement, qui a été exécuté le 6 novembre 2024. Le même jour, l'ancien mandataire de A.________ a requis la restitution du délai.
Par arrêt du 13 novembre 2024, le Tribunal cantonal a rejeté la demande de restitution de délai et a déclaré le recours irrecevable. Le paiement tardif de l'avance de frais était uniquement dû à une erreur; dès lors que la concentration de l'épouse, qui devait gérer son activité professionnelle, les trois enfants du couple et aller trouver sa mère atteinte d'un cancer à l'hôpital à Bâle, était altérée, A.________ aurait dû se charger lui-même du versement ou désigner un autre auxiliaire pour ce faire.
1.3. Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 13 novembre 2024 du Tribunal cantonal, d'ordonner à cette autorité de lui impartir un nouveau délai pour effectuer l'avance de frais requise et de dire que le recours devant le Tribunal cantonal est recevable et qu'il doit être traité au fond.
Le Service de la population a expressément renoncé à déposer des observations. Le Tribunal cantonal s'en remet au Tribunal fédéral quant à la recevabilité du recours et conclut à son rejet.
Par ordonnance du 17 décembre 2024, la Juge présidant de la IIe Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif.
2.
Dans une procédure administrative, l'auteur d'un recours déclaré irrecevable pour non-paiement de l'avance de frais dans le délai imparti est habilité à contester l'arrêt d'irrecevabilité par un recours en matière de droit public lorsque l'arrêt au fond de l'autorité intimée aurait pu être déféré au Tribunal fédéral par cette voie (ATF 135 II 145 consid. 3.2; 131 II 497 consid. 1; arrêt 2C_135/2024 du 7 mai 2024 consid. 1.3).
Selon l'art. 83 let. c LTF, dans le domaine du droit des étrangers, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit (ch. 2), ainsi que le renvoi (ch. 4). Il appartient à la partie recourante de démontrer de manière suffisante en quoi les conditions de recevabilité sont réunies, à moins que tel ne soit manifestement le cas; il n'appartient pas au Tribunal fédéral de se livrer à des recherches à ce sujet (art. 42 al. 2 LTF; ATF 134 II 45 consid. 2.2.3; 133 II 400 consid. 2, 249 consid. 1.1; arrêts 2C_589/2024 du 28 novembre 2024 consid. 2.1; 1C_661/2023 du 12 septembre 2024 consid. 1).
En l'espèce, la procédure au fond a trait au droit des étrangers. Le recourant a demandé la reconsidération de la décision du 29 mars 2023 du Service de la population, qui refusait de prolonger son autorisation de séjour et prononçait son renvoi, "à tout le moins en tant que celle-ci prononce [le] renvoi". L'arrêt attaqué ne précise pas si la décision sur opposition du 30 août 2024 portait uniquement sur la reconsidération en lien avec le renvoi ou également en lien avec l'autorisation de séjour, ce qui influence potentiellement la voie de droit ouverte (cf. art. 83 let. c ch. 2 et 4 LTF) et la recevabilité du recours. L'intéressé devait démontrer en quoi la voie du recours en matière de droit public (qui suppose un droit à une autorisation de séjour), par laquelle il procède, lui était ouverte, ce qu'il ne fait pas.
Cela étant, dès lors que le recourant se plaint notamment de formalisme excessif (cf. art. 29 al. 1 Cst.), ce qui lui confère non seulement la qualité pour déposer un recours en matière de droit public (cf. art. 89 LTF), mais aussi un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de l'arrêt attaqué dans le cadre du recours constitutionnel subsidiaire (cf. art. 115 let. b LTF), qu'il soulève uniquement des griefs d'ordre constitutionnel (cf. art. 116 LTF), et que les autres conditions de recevabilité du recours constitutionnel subsidiaire (cf. art. 113 ss LTF) sont remplies, il convient néanmoins d'entrer en matière. Ainsi, le point de savoir si la voie du recours en matière de droit public est ouverte peut rester indécis.
3.
Le Tribunal fédéral ne revoit l'interprétation et l'application du droit cantonal que sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst.). Il ne s'écarte de la solution retenue que si celle-ci se révèle insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. Il ne suffit pas que la motivation de la décision critiquée soit insoutenable; encore faut-il que celle-ci se révèle arbitraire dans son résultat. En outre, il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'une autre solution que celle adoptée par l'autorité intimée serait concevable, voire préférable (ATF 147 II 454 consid. 4.4; 145 II 32 consid. 5.1; 144 I 170 consid. 3 et les arrêts cités).
4.
Le recourant invoque le formalisme excessif, ainsi que l'application arbitraire des art. 47 al. 3 et 22 al. 1 et 2 de la loi vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA/VD; RS/VD 173.36). Il soutient, d'une part, qu'aucun intérêt digne de protection ne justifie une rigueur procédurale telle qu'elle aboutisse à l'irrecevabilité du recours. D'autre part, il allègue que le retard dans le paiement de l'avance de frais résulte d'un cas d'impossibilité subjective dû à des circonstances personnelles extrêmes et excusables rencontrées par son épouse chargée de procéder au paiement: la mère de celle-ci venait d'être admise à l'hôpital à Bâle pour une tumeur rénale avec métastases; aux trajets pour aller la voir, s'ajoutaient la charge des trois enfants en bas âge, la poursuite de l'activité professionnelle, ainsi que le contexte lourd d'un renvoi de son époux, malade durant la période où le versement litigieux devait être opéré, renvoi traumatisant pour la famille.
4.1. Le Tribunal cantonal a exposé de façon complète les dispositions topiques cantonales traitant du versement de l'avance de frais (cf. art. 47 LPA/VD), ainsi que la jurisprudence relative à la restitution du délai pour empêchement non fautif (ATF 119 II 86 consid. 2; arrêts 1C_695/2024 du 11 décembre 2024 consid. 4.2; 6B_1156/2023 du 26 avril 2024 consid. 1.1; 2C_183/2022 du 31 mai 2022 consid. 3.2;); il y est, ainsi, renvoyé (cf. art. 109 al. 3 LTF).
Le formalisme excessif (cf. art. 29 al. 1 Cst.) est réalisé lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi, complique de manière insoutenable la réalisation du droit matériel ou entrave de manière inadmissible l'accès aux tribunaux (ATF 149 IV 9 consid. 7.2; 149 III 12 consid. 3.3.1; 145 I 201 consid. 4.2.1). Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé et que le montant requis n'a pas été versé dans ce délai, pour autant que l'auteur du recours ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 133 V 402 consid. 3.3; arrêts 2C_135/2024 du 7 mai 2024 consid. 3.2; 2C_690/2022 du 7 décembre 2022 consid. 6).
4.2. En l'espèce, le recourant ne conteste pas que l'avance de frais de 600 fr. en faveur du Tribunal cantonal n'a pas été effectuée dans le délai imparti. En outre, l'art. 47 LPA/VD ne prévoit pas l'octroi d'un délai supplémentaire si le versement n'a pas été opéré dans le délai prévu (comme le fait l'art. 62 al. 3 LTF). Il s'ensuit qu'en déclarant irrecevable le recours pour cause de paiement tardif de l'avance de frais, les juges précédents n'ont fait preuve ni de formalisme excessif ni d'arbitraire dans l'application de l'art. 47 al. 3 LPA/VD, dès lors que l'auteur du recours avait été averti des éléments pertinents en la matière (cf. supra consid. 4.1), comme cela ressort de l'arrêt attaqué. Une telle sanction ne consacre pas davantage une atteinte inadmissible à la garantie de l'accès au juge consacrée aux art. 29a et 30 al. 1 Cst., le recourant ne prétendant pas que le montant requis à ce titre aurait été disproportionné et qu'il n'était pas en mesure de s'en acquitter (cf. arrêt 1C_466/2022 du 31 octobre 2022 consid. 2 in fine).
4.3. En ce qui concerne l'empêchement non fautif d'agir en temps utile invoqué comme motif de restitution du délai, on ne peut que considérer qu'il est soutenable de juger, comme l'a fait l'autorité précédente, que le retard dans le paiement était dû à une erreur, à savoir l'absence de vérification d'un solde suffisant sur le compte, et qu'en chargeant son épouse de s'acquitter du versement, le recourant avait pris le risque que cette tâche ne soit pas effectuée correctement. En effet, compte tenu du contexte familial extrêmement difficile pour celle-ci, il incombait au recourant soit de donner des instructions complètes à son épouse, y compris quant à la vérification du solde du compte, soit de s'assurer que la somme correcte avait bien été créditée sur le compte de l'autorité précédente, soit de confier cette tâche à un autre auxiliaire ou de l'effectuer lui-même. La bronchite dont il souffrait à ce moment-là ne l'empêchait pas de procéder tel que susmentionné. En outre, il appartient à l'intéressé d'assumer le risque d'avoir fait procéder au paiement de l'avance de frais par ordre bancaire et à un moment proche du terme fixé. Par ailleurs, il importe peu que le recourant ait rapidement effectué un nouveau versement; cet acte ne saurait en effet réparer le vice lié à l'inobservation du délai imparti pour verser l'avance de frais (arrêts 2C_107/2019 du 27 mai 2019 consid. 6.3), ni constituer un motif de restitution de délai. Au demeurant, si le recourant a été en mesure d'effectuer ce second paiement (comme cela est mentionné dans le recours), il aurait probablement été à même de se charger du premier. On relève finalement que la gravité des conséquences d'un défaut de paiement de l'avance de frais sur la situation de la partie recourante n'est pas pertinente (arrêts 9C_421/2024 du 25 septembre 2024 consid. 4.2; 2C_107/2019 susmentionné consid. 6.3).
En conclusion, en considérant que l'inobservation du délai pour verser l'avance de frais n'était pas due à un empêchement non fautif mais à une négligence, de sorte qu'une restitution de ce délai n'entrait pas en considération, les juges précédents ne sont pas tombés dans l'arbitraire.
5.
Au regard de ce qui précède, le recours est rejeté en application de la procédure simplifiée de l'art. 109 al. 2 let. a LTF.
Succombant, le recourant supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (cf. art. 68 al. 1 et 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, ainsi qu'au Service de la population et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public.
Lausanne, le 11 avril 2025
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : F. Aubry Girardin
La Greffière : E. Jolidon