6B_462/2024 19.03.2025
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_462/2024
Arrêt du 19 mars 2025
Ire Cour de droit pénal
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Jacquemoud-Rossari, Présidente,
von Felten et Wohlhauser.
Greffier : M. Vallat.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Dina Bazarbachi, avocate,
recourante,
contre
Ministère public de la République et canton de Genève,
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy,
intimé.
Objet
Mendicité (art. 11A al. 1 let. c LPG); arbitraire,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice
de la République et canton de Genève,
Chambre pénale d'appel et de révision,
du 29 avril 2024 (P/9176/2023 AARP/133/2024).
Faits :
A.
A.________, née en 1981 en Roumanie, est issue de la communauté rom et domiciliée dans ce pays. Elle est mariée mais ne mentionne pas l'existence d'enfants. Elle indique être analphabète, sans formation et sans emploi. L'extrait de son casier judiciaire suisse ne fait pas état d'antécédents.
Par jugement du 2 octobre 2023, le Tribunal de police du canton de Genève, statuant sur opposition à deux ordonnances pénales du Service des contraventions, du 21 mars 2023, l'a reconnue coupable de mendicité (art. 11A al. 1 de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006, dans sa teneur en vigueur dès le 12 février 2022 [RS/GE E 4 05; LPG/GE]), l'a condamnée à une amende de CHF 40.- et a prononcé une peine privative de liberté de substitution d'un jour, avec suite de frais (200 fr.).
B.
Saisie par la condamnée et statuant en procédure écrite, par arrêt du 29 avril 2024, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a très partiellement admis l'appel, acquitté la prévenue de l'infraction de mendicité pour les faits du 3 décembre 2022 et condamné l'intéressée, avec suite de frais, pour ceux constatés le 21 décembre 2022, à une amende de 40 fr. (peine privative de liberté de substitution d'un jour) pour mendicité au sens de l'art. 11A al. 1 let. c LPG/GE. Cet arrêt, auquel on renvoie pour le surplus dans son intégralité retient en fait, pour l'essentiel, que, le 3 décembre 2022 à 15h02, l'intéressée avait commis des actes de mendicité au [...], rue U.________, à V.________, aux abords immédiats d'un magasin; elle en avait fait de même le 21 décembre 2022, à 18h04, au [...] de la même rue. Elle se trouvait devant l'entrée du magasin dans le premier cas et à proximité de l'entrée de celui-ci dans le second. Sa situation était indéniablement précaire.
C.
Par acte du 5 juin 2024, A.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, principalement, à la réforme de la décision cantonale dans le sens de son acquittement. À titre subsidiaire, elle demande l'annulation de la décision entreprise et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. Elle requiert aussi le bénéfice de l'assistance judiciaire.
D.
Par pli daté du 11 octobre 2024, se référant à l'ATF 148 IV 445, la recourante a encore invoqué qu'à ses yeux les décisions rendues par le Service des contraventions, notamment dans son cas, ne répondraient pas à l'exigence formelle d'une signature manuscrite figurant notamment à l'art. 353 al. 1 let. k CPP.
E.
Invités à présenter des observations sur le recours, la cour cantonale y a renoncé par courrier du 12 décembre 2024, cependant que le ministère public a conclu à son rejet par acte du 16 janvier 2025. La recourante a répliqué le 28 janvier 2025 et son écriture a été communiquée aux parties à titre de renseignement.
Considérant en droit :
1.
Dans le recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de l'arbitraire dans la constatation des faits (sur cette notion, v. ATF 148 IV 356 consid. 2.1; 147 IV 73 consid. 4.1.2). Il en va ainsi notamment du contenu de la pensée (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.2). Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs ainsi que, de manière plus générale, tous ceux qui relèvent de la violation de droits fondamentaux, que s'ils sont invoqués et motivés par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), soit s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (cf. ATF 150 I 50 consid. 3.3.1; 149 IV 231 consid. 2.4; 148 IV 356 consid. 2.1, 409 consid. 2.2; 147 IV 73 consid. 4.1.2).
Si le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), la violation du droit cantonal ne constituant pas un motif pouvant être invoqué dans le recours en matière pénale (art. 95 LTF), il n'en examine l'application que sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst.), respectivement de la violation des droits fondamentaux. Cela suppose le respect des exigences de motivation accrues précitées (art. 106 al. 2 LTF), qui valent tant pour les règles que le législateur cantonal a lui-même édictées, que s'il a opté (explicitement ou non) pour la technique législative consistant à renvoyer, à titre supplétif, au droit fédéral (cf. ATF 148 I 145 consid. 4.1 et 6.1; cf. déjà: ATF 126 III 370 consid. 5; v. aussi, plus récemment et en matière pénale: arrêts 6B_1021/2023 du 26 avril 2024 consid. 1.4; 6B_951/2019 du 14 janvier 2020 consid. 2.2; 6B_728/2015 du 12 février 2016 consid. 4).
2.
La recourante ne discute pas précisément les faits de la cause mais renvoie à ceux constatés par la cour cantonale. Dans le cours de ses développements, elle affirme cependant qu'en tendant la main pour solliciter l'aumône, elle démontrerait et communiquerait que sa communauté, dont les membres vivent encore en dessous du seuil de pauvreté, serait notoirement discriminée, ce qui obligerait ces personnes à solliciter de l'aide pour survivre.
La décision entreprise ne retient rien de tel expressément et la recourante n'explique pas en quoi ce silence procéderait d'une constatation insoutenable des faits. Le jugement de première instance auquel renvoie, en fait, la cour cantonale faute de contestation en appel dans une cause ayant exclusivement trait à des contraventions, retient expressément que la recourante n'avait pas allégué avoir voulu passer un message politique ou une information sur la situation des personnes dans le besoin en Suisse. Elle avait mendié par besoin et par intérêt personnel, sans qu'il faille retenir une dimension symbolique à ses gestes. Quant à la cour cantonale, elle a encore expressément souligné que la recourante ne prétendait pas qu'en mendiant, elle aurait agi pour sensibiliser sur la situation sociale des pauvres ou des membres de sa communauté (jugement du 2 octobre 2023, consid. 4.2 p. 9; arrêt entrepris, consid. 1.2 et 2.2; art. 398 al. 4 CPP). La recourante invoque certes le caractère notoire de la discrimination de la communauté rom. La seule invocation du caractère notoire de cette situation ne démontrerait toutefois pas sa propre disposition d'esprit (question de fait: v. supra consid. 1) lorsqu'elle demande l'aumône et moins encore que la cour cantonale aurait arbitrairement omis de constater qu'elle agissait spécifiquement ainsi pour communiquer l'existence de cette discrimination le 21 décembre 2022.
La recourante parle aussi de misère noire, affirme être contrainte de demander la charité pour survivre et qu'il s'agit là de sa seule source de subsistance pour elle et pour sa famille. Force est également de constater que la décision querellée ne retient pas ce fait et ne constate ni que la recourante, qui est mariée mais n'a pas mentionné l'existence d'enfants (arrêt entrepris, consid. D p. 4) aurait charge de famille, ni qu'elle en serait le soutien exclusif. Ces allégations sont irrecevables en tant qu'elles sont présentées pour la première fois en procédure fédérale (art. 99 al. 1 LTF). La recourante n'explique pas plus en quoi il aurait été insoutenable de ne pas retenir ces circonstances au-delà du constat d'une situation indéniablement précaire opéré par la cour cantonale. Ses développements sont, de toute manière, au mieux appellatoires dans cette mesure. Ils sont irrecevables sous cet angle également (v. supra consid. 1).
3.
Quant au vice formel affectant les ordonnances pénales rendues à son encontre, qu'elle invoque dans son courrier du 11 octobre 2024, il convient de rappeler que la motivation du recours doit être complète; il n'est pas possible de la parachever passé le délai de recours ou à l'occasion d'une réplique (v. arrêt 6B_1202/2023 du 30 janvier 2024 consid. 18; cf. aussi arrêt 9C_236/2020 du 2 juin 2021 consid. 6, non publié aux ATF 147 V 251 et arrêt 2C_347/2012 du 28 mars 2013 consid. 2.6 non publié aux ATF 139 II 185). Présenté plus de 6 mois après l'échéance du délai de recours de 30 jours (art. 100 al. 1 LTF), ce moyen est à l'évidence irrecevable sous cet angle simplement formel.
De surcroît, cette question ne fait manifestement pas l'objet de la décision de dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF). Le recours est également irrecevable quant à son objet sur ce point.
La recourante ne tente pas de démontrer dans son écriture du 5 juin 2024 que le vice dont elle voudrait se prévaloir entraînerait inexorablement la nullité absolue de la décision qui l'affecte et, soulignant au contraire, par le truchement d'un conseil professionnel, n'avoir pas détecté plus tôt la pratique du Service cantonal des contraventions qu'elle critique, elle ne tente pas de démontrer que ce vice serait manifeste et aisément reconnaissable. Quant aux développements figurant dans la réplique du 28 janvier 2025, hormis que la recourante se borne à y discuter librement de questions qui relèvent exclusivement du droit cantonal (la réglementation des signatures en matière d'ordonnances pénales portant sur des contraventions de droit cantonal; art. 106 al. 2 LTF) en invoquant des faits et moyens de preuve nouveaux (art. 99 al. 1 LTF), ils sont tardifs. Au demeurant, la recourante mentionne certes une application "arbitraire" des art. 80 al. 2 et 353 al. 1 let. k CPP, mais la première de ces dispositions réserve expressément la procédure de l'ordonnance pénale. On ne verrait, en toute hypothèse, pas qu'une telle sanction garantisse la sécurité du droit dans un domaine où de très nombreuses décisions sont rendues (ATF 144 IV 362 consid. 1.4.3) et la jurisprudence citée par l'intéressée à l'appui de son moyen soutient précisément la conclusion inverse (ATF 148 IV 445 consid. 1.4.2).
Enfin, la recourante perd de vue que, s'agissant de contraventions de droit cantonal, la procédure relève de ce seul et même droit lors même que celui-ci renvoie, à titre supplétif, aux dispositions fédérales du CPP (art. 1 CPP; art. 8 de la Loi genevoise du 27 août 2009 d'application du code pénal suisse et d'autres lois fédérales en matière pénale [LaCP/GE; RS/GE E 4 10]). En l'absence de toute argumentation quant à une éventuelle application arbitraire du droit cantonal (v. supra consid. 1; art. 106 al. 2 LTF), il n'est pas nécessaire d'examiner plus avant le contenu du courrier du 11 octobre 2024.
4.
La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir "arbitrairement examiné" les griefs tirés des art. 1 CP, 5, 9 et 164 Cst. ainsi que 7 CEDH, d'avoir arbitrairement violé sa liberté personnelle (art. 7, 10 et 36 al. 3 Cst. ainsi que 8 CEDH), d'avoir arbitrairement violé sa liberté de communication (art. 16 Cst. et 10 CEDH), une "violation arbitraire des griefs" tirés des art. 14 CEDH, 8 al. 2 Cst. et 2 EIMP, ainsi que d'avoir arbitrairement violé les art. 17 et 52 CP.
Au-delà de la formulation largement impropre de ces moyens, on comprend que l'intéressée se plaint d'une application arbitraire des art. 1, 17 et 52 CP, en tant que règles de droit cantonal supplétif en matière de contraventions de droit cantonal (v. supra consid. 1) ainsi que de la violation du principe de la légalité, de celle de l'interdiction de la discrimination ainsi que de celle de ses droits fondamentaux, singulièrement ses libertés personnelle et de communication. On rappelle, pour le surplus, que le Tribunal fédéral examine librement les questions qui lui sont posées en lien avec la violation de droits fondamentaux, pour peu toutefois que leur articulation réponde aux exigences de motivation accrues déduites de l'art. 106 al. 2 LTF (v. supra consid. 1; cf. ATF 130 I 26 consid. 2.1; GRÉGORY BOVEY, in Commentaire de la LTF, 3e éd. 2022, no 37 ad art. 106 LTF).
5.
L a recourante affirme que l'interdiction de la mendicité constituerait une discrimination à raison de sa situation sociale. Elle n'argüe pas expressément une discrimination à raison de son appartenance à la communauté rom. Dans la mesure où elle se réfère cependant de manière ambigüe à son appartenance à "un groupe de personnes particulièrement vulnérables", on peut se limiter à relever qu'elle n'apporte aucun indice concret que les mendiants d'autres origines que rom seraient épargnés par les amendes (v. déjà parmi d'autres décisions: arrêts 6B_214/2012 et 6B_31/2012 du 17 août 2012 consid. 3.4). Selon les informations fournies par les travailleurs sociaux sur le terrain, d'autres personnes (les toxicomanes en particulier) sont au contraire souvent amendées à V.________ (Grand Conseil de la République et canton de Genève, P 2184-A, Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour rendre le calme au quartier de Saint-Jean, du 21 février 2024, p. 12).
Pour le surplus, en affirmant être victime d'une discrimination à raison de sa situation sociale, la recourante n'explique pas en quoi elle aurait été traitée autrement qu'une personne ou un groupe de personnes placées dans une situation comparable à la sienne, ni de la même façon qu'un groupe de personnes placées dans une situation sensiblement différente (sur la notion de discrimination v. p. ex.: arrêts de la CourEDH Ukraine c. Russie [Crimée], Grande Chambre, du 25 juin 2024, Requêtes nos 20958/14 et 38334/18, par. 1181; Beeler c. Suisse, Grande Chambre, du 11 octobre 2022, Requête no 78630/12, par. 93 s.; Fabris contre France, Grande Chambre, du 7 février 2013, Requête no 16574/08, par. 56; Guide sur l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article 1 du Protocole no 12 à la Convention ch. 56), compte tenu en particulier de son statut spécifique en Suisse (cf. ATF 149 I 248 consid. 6; PETER UEBERSAX, Wegweisung Bettelnder Angehöriger von EU - und EFTA - Mitgliedstaaten aus der Schweitz, AJP 2025 116). Elle ne démontre donc pas en quoi l'art. 14 CEDH, qui n'a pas de portée propre mais complète les autres garanties normatives de la convention (Guide sur l'article 14, précité, ch. 3 et les références citées), lui offrirait une protection plus étendue que ces autres garanties conventionnelles, qu'elle invoque par ailleurs.
Enfin, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir considéré qu'elle pouvait obtenir de l'aide d'une autre manière et objecte que, n'étant pas établie à V.________, elle ne remplirait pas les conditions pour percevoir une aide. Elle n'explique pas en quoi elle n'aurait pu bénéficier d'aucune des aides financières exceptionnelles, respectivement d'urgence, prévues par le droit cantonal, soit l'art. 11 al. 4 de la loi genevoise du 22 mars 2007 sur l'insertion et l'aide sociale individuelle (LIASI/GE; RS/GE J 4 04) et les art. 13 ss du Règlement du 25 juillet 2007 d'exécution de la loi sur l'insertion et l'aide sociale individuelle (RIASI/GE; RS/GE J 4 04.01), telle l'aide financière exceptionnelle aux personnes de passage (art. 18 RIASI/GE).
6.
La recourante invoque aussi une application arbitraire des art. 17 et 52 CP en relation avec l'art. 11A LPG/GE. Elle allègue être contrainte, pour survivre, de demander l'aumône, qui serait sa seule source de subsistance pour elle-même et sa famille. Elle se préserverait ainsi d'un danger imminent, impossible à détourner autrement, soit une atteinte à sa santé pouvant aller jusqu'à la mort, et sauvegarderait donc un bien juridique d'une valeur nettement supérieure à celle du sentiment de culpabilité de la population de V.________ face à la misère du monde. Subsidiairement, elle relève que l'infraction reprochée serait plus que minime quant à son résultat et qu'elle n'aurait pas d'autre solution pour vivre.
6.1. On renvoie sur les allégations de la recourante relatives à sa situation à ce qui a déjà été exposé (v. supra consid. 2). En tant qu'elle affirme que, dans l'arrêt Lacatus précité la CourEDH aurait "balayé" l'argument selon lequel le dépôt d'une demande d'aide sociale n'avait pas été démontré, il suffit de relever que cet aspect n'a, au contraire, pas été examiné. La CourEDH n'a, en effet, pas répondu à l'argument du Gouvernement suisse selon lequel la Constitution fédérale prévoit que personne ne doit être laissé dans la pauvreté et que la loi genevoise assure à toute personne qui se trouve sur le territoire du canton une aide sociale, alors même qu'elle n'y est pas résidente (opinion en partie concordante et en partie dissidente du Juge Ravarani, par. 6). Quant à une nécessité vitale ("pour sa survie"), nombre d'associations et groupements caritatifs sont actifs dans le canton de Genève et offrent notamment un accès à de la nourriture voire à de l'hébergement. Caritas semble, en particulier, avoir mis sur pied un programme structuré incluant la formation de Roms à la médiation pour informer les familles concernées au sujet des lieux où il est possible de trouver à manger gratuitement, respectivement leur permettre d'obtenir des cartes d'épicerie (Secrétariat du Grand Conseil genevois, PL 12862-A, p. 17). Par ailleurs, l'art. 12 Cst. garantit, a minima, le droit d'obtenir ce qui est nécessaire pour assurer une survie décente afin, notamment, de ne pas être réduit à la mendicité (JACQUES DUBEY, in Commentaire romand, Constitution fédérale, 2021, nos 21 et 46 ad art. 12 Cst.; GÄCHTER/WERDER, in Basler Kommentar Bundesverfassung, 2015, nos 5 et 25 ad art. 12 Cst.) et la recourante n'allègue pas concrètement avoir vainement sollicité une telle aide. En tant qu'elle se prévaut de l'avis exprimé dans un article de doctrine faisant état de la difficulté, voire l'impossibilité pour les Roms d'obtenir des prestations financières faute d'adresse dans le canton de Genève (MAYA HERTIG RANDALL, Les droits des Roms en situation précaire: un test case de la société européenne, in Polis und Kosmopolis. Festschrift für Daniel Thürer 2015, p. 251), il suffit de rappeler que la garantie minimale offerte par la norme constitutionnelle n'ouvre pas nécessairement un droit à des prestations en espèces et que de telles prestations ne sont pas indispensables pour atteindre les buts visés par l'art. 12 Cst.
6.2. On rappelle en outre que les deux dispositions du Code pénal invoquées ne trouvent application qu'à titre de droit cantonal supplétif, si bien que le Tribunal fédéral n'en examine l'application que sous l'angle de l'arbitraire et de la violation des droits fondamentaux (v. supra consid. 1).
En l'espèce, la recourante n'explique pas à satisfaction de droit, de manière concrète et précise, en quoi elle aurait été empêchée de mendier de façon licite, soit notamment sans se tenir aux abords immédiats des entrées et sorties d'un centre commercial. Elle affirme certes que la réglementation cantonale mise en place, prolixe en interdits, n'autoriserait plus la mendicité qu'en zone agricole ou industrielle, ce qui reviendrait à l'interdire, faute de passants dont solliciter la générosité dans ces lieux. Ces affirmations péremptoires sont toutefois aussi peu étayées que crédibles. Un bref examen permet, en effet, de se convaincre que le périmètre des lieux ayant une vocation commerciale ou touristique prioritaire tel qu'il a été délimité par l'autorité compétente ne couvre qu'une fraction minime du territoire cantonal, située sur la seule commune de V.________ et en bord de lac (arrêt entrepris, consid. 2.4.4.3 p. 8: soit la région de la rade, allant de la Perle du Lac jusqu'à Baby-Plage). La décision entreprise constate également qu'il subsiste des emplacements au centre-ville où la mendicité n'est pas interdite, que l'espace public n'est pas totalement exclu pour les personnes s'y adonnant et que celles-ci bénéficient de suffisamment d'endroits pour ne pas être toutes réunies dans le même espace. Du reste, la recourante n'a pas été interpellée uniquement à V.________ même, mais aussi sur le territoire communal de W.________. Elle ne démontre pas non plus ce qui rendrait illicite ou impossible la mendicité hors des abords immédiats des entrées et sorties de centres commerciaux, soit au-delà de quelques mètres de distance des entrées et sorties des centres commerciaux devant lesquels elle a agi.
7.
La recourante se prévaut des art. 1 CP, 5, 9, 164 Cst. et 7 CEDH. En bref, elle reproche à la cour cantonale d'avoir considéré que telle qu'elle est rédigée, la loi cantonale ne pose pas de problème de compréhension. Selon elle, les notions de "réseau organisé", "comportement de nature à importuner le public", "abords immédiats" et "vocation commerciale ou touristique prioritaire" seraient trop abstraites, leur emploi violerait le principe de la légalité en réservant une latitude excessive aux organes d'application de la loi. Au sein de ce même grief, la recourante reproche à la cour cantonale de s'être référée à trente précédentes condamnations, qui reposeraient sur l'ancien art. 11A LPG/GE, lequel avait précisément été abrogé ensuite de l'arrêt de la CourEDH Lacatus c. Suisse (Requête no 14065/15) du 19 janvier 2021. Après une période de plus d'une année durant laquelle la mendicité avait été autorisée sur l'entier du territoire cantonal, le législateur aurait volontairement utilisé des termes vagues afin que le citoyen [ recte: l'administré] se trouve dans l'incapacité de comprendre où la mendicité serait susceptible d'être autorisée, ce qui reviendrait à la prohiber de manière générale, en violation de l'arrêt européen précité. La recourante voit dans l'art. 11A LPG/GE une énumération prolixe d'interdits quadrillant le canton de Genève, alors qu'il eût fallu, selon elle, indiquer pour l'aisance où la mendicité est autorisée et selon quelles modalités. La formulation adoptée n'autoriserait plus la mendicité qu'en zone agricole ou industrielle, ce qui reviendrait à l'interdire, faute de passants dont solliciter la générosité dans ces lieux.
7.1. On ne perçoit pas concrètement ce que la recourante entend déduire en sa faveur de l'art. 164 Cst. et l'intéressée, qui ne cite pas le contenu de cette norme, ni ne tente d'en donner une quelconque interprétation, ne l'explique pas non plus. Il suffit de rappeler à ce propos, que cette disposition constitutionnelle pose certes le principe de la légalité, mais dans le cadre de la législation fédérale (cf. arrêt 2C_146/2014 du 30 mars 2015 consid. 3.2) : elle définit les règles de droit que l'Assemblée fédérale édicte sous la forme d'une loi fédérale, en d'autres termes, la compétence législative du Parlement fédéral (DUBEY, op. cit., no 1 ad art. 164 Cst.; WYTTENBACH/WYSS, in Basler Kommentar Bundesverfassung, 2015, no 4 ad art. 164 Cst.; JEAN-FRANÇOIS AUBERT, in Petit Commentaire de la Constitution fédérale, 1re éd. 2003, no 11 ad art. 164 Cst.). Par ailleurs, la Confédération n'accomplit que les tâches que lui attribue la Constitution (art. 42 al. 1 Cst.). Or, si, en principe, il lui incombe de légiférer en matière pénale (art. 123 al. 1 Cst.), la loi réserve expressément le pouvoir des cantons de le faire sur les contraventions de police qui ne sont pas l'objet de la législation fédérale (art. 335 al. 1 CP) et c'est précisément sur une telle base légale cantonale (l'art. 11A LPG/GE) que repose la condamnation de la recourante. Celle-ci ne tente pas de démontrer que la norme cantonale instituerait autre chose que des contraventions de police. On peut, dès lors, se restreindre à relever que l'intéressée n'invoque non plus expressément la violation d'aucun droit fondamental garanti par la Constitution cantonale genevoise (sur l'application du principe d'invocation à ce type de moyens, v.: BOVEY, op. cit., no 37 ad art. 95 LTF) et qu'elle ne démontre pas en particulier que ce dernier texte lui offrirait des garanties plus étendues que la CEDH, dont elle invoque aussi la violation. Faute de toute motivation précise et substantielle, n'y a pas de motif d'examiner plus avant le moyen fondé sur la violation de l'art. 164 Cst.
7.2. Il n'en va pas différemment en tant que la recourante mentionne l'art. 1 CP, dès lors qu'il est constant que l'art. 11A LPG/GE constitue une base légale formelle et que l'on recherche en vain dans le mémoire de recours toute tentative de démontrer précisément que cette règle de droit pénal fédéral, qui s'applique à titre de droit cantonal supplétif (art. 1 al. 1 let. a LPG/GE), l'aurait été de manière arbitraire. La recourante relève certes, dans ce contexte, que la règle de droit cantonal utiliserait des notions trop générales et abstraites en violation du principe de la légalité ("réseau organisé", "comportement de nature à importuner le public", "abords immédiats", "vocation commerciale ou touristique prioritaire"). Il est toutefois constant que rien d'autre ne lui a été reproché en l'espèce que d'avoir mendié aux abords immédiats de deux centres commerciaux, une seule des deux occurrences (faits du 21 décembre 2022; v. supra consid. B) demeurant litigieuse en procédure fédérale.
Le recours formé contre l'arrêt du 28 juillet 2022 dans lequel la Chambre constitutionnelle de la Cour de justice genevoise a procédé au contrôle abstrait de l'art. 11A LPG/GE dans sa teneur actuelle a été déclaré irrecevable en raison de son dépôt tardif (arrêt 1C_518/2022 du 30 septembre 2022). Il n'y a pas lieu de procéder à ce contrôle en l'espèce. La présente procédure porte exclusivement sur la condamnation de la recourante pour avoir mendié aux abords immédiats des entrées et sorties d'un établissement à vocation commerciale. Si, dans ce cadre procédural, la conformité au droit supérieur de la norme pénale cantonale peut certes encore faire l'objet d'un contrôle préjudiciel (cf. ATF 150 I 50 consid. 3.1.2 et les références citées), seule la légalité, respectivement la conformité au droit conventionnel et constitutionnel, de la répression du comportement concret reproché à la recourante peut être examinée. L'intéressée n'a, en revanche, aucun intérêt juridique (cf. art. 81 al. 1 let. b LTF) à un examen étendu à la définition d'autres comportements incriminés par la règle cantonale.
7.3. Enfin, la recourante invoque expressément l'art. 5 Cst. mais non l'art. 36 Cst., qui règle pourtant spécifiquement l'exigence d'une base légale qualifiée pour restreindre les droits fondamentaux.
Quoi qu'il en soit, le principe de la légalité dans son volet pénal (" nullum crimen nulla poena sine lege "), consacré notamment par l'art. 7 CEDH, s'applique à l'ensemble du domaine, y compris en matière de contraventions de droit cantonal (ATF 138 IV 13 consid. 4.1; 118 Ia 137 consid. 1c) et ses exigences, en tant qu'il s'agit de restrictions à des droits fondamentaux (cf. art. 36 Cst.) vont au-delà des principes généraux posés par l'art. 5 Cst., avec lequel il entretient un rapport de spécialité (DUBEY, op. cit., no 5 ad art. 36 Cst.; ASTRID EPINEY, in Basler Kommentar Bundesverfassung, 2015, nos 6 et 7 ad art. 36 Cst.). On peut ainsi se limiter à examiner si la condamnation de la recourante respecte les exigences de l'art. 7 par. 1 CEDH. Quant à la question de la proportionnalité, que la recourante discute séparément, on y reviendra en lien avec les moyens expressément soulevés (v. infra consid. 8 et 8.4 ss).
7.4. Conformément à l'art. 7 par. 1 CEDH, nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international. De même, il n'est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise.
7.4.1. L'art. 7 CEDH n'a pas pour unique vocation de prohiber l'application rétroactive du droit pénal au désavantage de l'accusé. Il consacre aussi, de manière plus générale, le principe de la légalité des délits et des peines ( nullum crimen, nulla poena sine lege) et celui qui commande de ne pas appliquer la loi pénale de manière extensive au détriment de l'accusé, notamment par analogie. Il découle de ces principes qu'une infraction doit être clairement définie par la loi. Cette condition est satisfaite lorsque le justiciable peut savoir, à partir du libellé de la disposition pertinente et, au besoin, à l'aide de son interprétation par les tribunaux, quelles actions et omissions engagent sa responsabilité pénale. La notion de "droit" (" law ") utilisée à l'article 7 correspond à celle de "loi" qui figure dans d'autres articles de la Convention; elle englobe le droit d'origine tant législative que jurisprudentielle et implique des conditions qualitatives, notamment celles d'accessibilité et de prévisibilité (voir, entre autres références, les arrêts de la CourEDH Streletz, Kessler et Krenz c. Allemagne [GC] du 22 mars 2021, Requêtes nos 34044/96 et 2 autres du 22 mars 2001, par. 50, et Del Río Prada c. Espagne du 21 octobre 2013, Requête no 42750/09, par. 91).
Aussi clair que puisse être le libellé d'une disposition légale, il existe immanquablement dans tout système juridique, y compris le droit pénal, un élément d'interprétation judiciaire. Il faudra toujours élucider les points douteux et s'adapter aux changements de situation. D'ailleurs, il est solidement établi dans la tradition juridique des États parties à la Convention que la jurisprudence, en tant que source du droit, contribue nécessairement à l'évolution progressive du droit pénal. On ne saurait interpréter l'art. 7 de la Convention comme proscrivant la clarification graduelle des règles de la responsabilité pénale par l'interprétation judiciaire au fil des affaires, à condition que le résultat soit cohérent avec la substance de l'infraction et raisonnablement prévisible. L'absence d'une interprétation jurisprudentielle accessible et raisonnablement prévisible peut même conduire à un constat de violation de l'art. 7 CEDH à l'égard d'un accusé. S'il en allait autrement, l'objet et le but de cette disposition - qui veut que nul ne soit soumis à des poursuites, condamnations ou sanctions arbitraires - seraient méconnus (arrêts de la CourEDH Yüksel Yalçinkaya c. Türkiye [GC] du 26 septembre 2023, requête no 15669/20, par. 238 s.; Del Río Prada, précité, par. 93, avec d'autres références).
7.4.2. De surcroît, l'exigence de précision dépend aussi des destinataires de la norme (ATF 149 I 248 consid. 4.6.1), soit leur nombre, leur statut et la possibilité dont ils disposent de s'entourer de conseils éclairés (en lien avec l'art. 7 CEDH: arrêts de la CourEDH Tristan c. République de Moldova du 4 juillet 2023, Requête no 13451/15, par. 53; Kafkaris c. Chypre du 12 février 2008, Requête no 21906/04, par. 137 à 141; cf., dans le contexte de restrictions à la liberté d'association: Arrêt de la CourEDH Maestri c. Italie du 17 février 2004, Requête no 39748/98, par. 30).
7.5. Conformément à l'art. 11A (Mendicité) al. 1 LPG/GE, dans sa teneur en vigueur dès le 12 février 2022:
Sera puni de l'amende:
a) quiconque aura mendié en faisant partie d'un réseau organisé dans ce but;
b) quiconque aura mendié en adoptant un comportement de nature à importuner le public, notamment en utilisant des méthodes envahissantes, trompeuses ou agressives;
c) quiconque aura mendié:
1° dans une rue, un quartier ou une zone ayant une vocation commerciale ou touristique prioritaire; le Conseil d'État établit et publie la liste des lieux concernés,
2° aux abords immédiats des entrées et sorties de tout établissement à vocation commerciale, notamment les magasins, hôtels, cafés, restaurants, bars et discothèques,
3° aux abords immédiats des entrées et sorties de tout établissement à vocation médicale, notamment les hôpitaux, établissements médico - sociaux et cliniques,
4° aux abords immédiats des entrées et sorties de tout établissement à vocation culturelle, notamment les musées, théâtres, salles de spectacle et cinémas,
5° aux abords immédiats des banques, bureaux de poste, distributeurs automatiques d'argent et caisses de parking,
6° aux abords immédiats des entrées et sorties de tout établissement à vocation éducative, notamment les crèches, écoles, cycles d'orientation et collèges,
7° à l'intérieur et aux abords immédiats des entrées et sorties des marchés, parcs, jardins publics et cimetières,
8° à l'intérieur et aux abords immédiats des entrées et sorties des gares, ports et aéroports,
9° à l'intérieur des transports publics,
10° aux abords immédiats des arrêts de transport public et des amarrages de bateaux, de même que sur les quais ferroviaires,
11° aux abords immédiats des lieux cultuels.
L'al. 2 de cette norme punit, par ailleurs, d'une amende de 2000 fr. au moins quiconque aura mendié en étant accompagné d'une ou plusieurs personnes mineures ou dépendantes, ou aura organisé la mendicité d'autrui, notamment en lui assignant un emplacement, en lui imposant un horaire ou en mettant à sa disposition un moyen de transport.
7.5.1. Comme on l'a déjà relevé, dans le cadre du recours portant sur sa condamnation concrète en application de l'art. 11A al. 1 let. c ch. 2 LPG/GE, on ne discerne pas quel intérêt pourrait avoir la recourante à discuter, dans la perspective du principe de la légalité, l'emploi des expressions "réseau organisé", "comportement de nature à importuner le public" et "vocation commerciale ou touristique prioritaire" (v. supra consid. 7.2). Faute de toute explication, le recours est irrecevable sur ce point.
En tant que de besoin, on peut également souligner, au demeurant, en lien avec la notion de "rue, quartier ou une zone ayant une vocation commerciale ou touristique prioritaire", que le législateur cantonal a chargé le Conseil d'État genevois d'établir et publier la liste des lieux concernés (art. 11A al. 1 let. c ch. 1 LPG/GE), qui est accessible depuis le 9 février 2022, sous forme de plan sur le site internet du canton de Genève (https://www.ge.ch/document/perimetre-lieux-ayant-vocation-commerciale-touristique-prioritaire consulté la dernière le 6 février 2025). La recourante n'explique d'aucune façon en quoi cette manière de procéder laisserait subsister une ambiguïté ou une imprécision au sujet de cette délimitation territoriale et rien n'indique que tel serait manifestement le cas. Elle n'explique pas plus en quoi elle serait empêchée d'accéder à ces informations en recourant, au besoin, à des conseils éclairés (v. à ce sujet supra consid. 7.4.2) notamment par l'entremise d'organisations caritatives, dont certaines axent notoirement leur activité sur l'aide aux Roms se trouvant à V.________ et d'autres, de manière plus large, sur l'aide aux sans-abris. Du reste, il semble que des mesures d'information ont été prises dès la mise en application de la loi et doivent se poursuivre en lien avec les associations qui s'occupent de la population s'adonnant à la mendicité (Grand Conseil de la République et canton de Genève, Réponse du Conseil d'État à la question écrite urgente "Evaluation de l'application de la loi pénale sur la mendicité, bilan, obstacles et mesures prises", du 19 juin 2024; QUE 2067-A). Enfin, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de constater que le seul emploi de notions telles que mendicité "organisée" ou "en réseau organisé" n'enfreint pas nécessairement l'exigence de précision déduite de l'art. 7 CEDH (cf. ATF 149 I 248 consid. 5.2.2 et 5.2.3).
7.5.2. Après avoir relevé que le législateur avait renoncé à chiffrer une limite de 5 mètres autour de lieux déterminés, telle que celle adoptée à Bâle-Ville, la cour cantonale a souligné que l'adjectif "immédiat" ("qui précède ou suit sans intermédiaire, notamment dans une relation spatiale", selon les dictionnaires usuels) suffisait à réaliser l'exigence de précision.
7.5.3. On peut donner acte à la recourante que la locution "aux abords immédiats" n'est pas univoque. À l'instar d'autres tours de langage, tels que "à proximité immédiate", "aux alentours immédiats" ou "aux environs immédiats", cette indication ne permet pas de déduire une distance limite en-deça de laquelle le comportement incriminé serait punissable. On peut relever à ce propos que l'expression "aux abords immédiats" a été introduite dans la loi genevoise afin d'éviter la fixation d'"un rayon géographique de 50 mètres", cette limite chiffrée ayant été jugée "délicate" (Secrétariat du Grand Conseil, PL 12881-A, Rapport de la commission judiciaire et de la police portant sur l'adaptation de l'interdit pénal de la mendicité ensuite de l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme, du 19 janvier 2021, p. 5) et que cette expression a simultanément remplacé celle d'"abords" (sans exigence d'immédiateté) d'un bâtiment administratif du canton, d'une commune ou d'une institution de droit public (Secrétariat du Grand Conseil genevois, PL 12881 p. 1 s.). Le Tribunal fédéral a quant à lui utilisé la notion d' unmittelbare Nähe, de manière très générale, dans un cas, où l'autorité cantonale avait fixé des limites de 5 mètres; il a aussi souligné à ce propos qu'il n'importait pas de savoir si la distance était de 5 ou de 2 mètres, tant que la réglementation n'aboutissait pas à une interdiction générale de la mendicité, respectivement ne se révélait pas chicanière (ATF 149 I 248 consid. A, consid. 4.6.2 et consid. 5.3.2). Quant à la CourEDH, après avoir laissé la question ouverte (arrêt Malofeyeva c. Russie du 30 mai 2013, Requête no 36673/04, par. 49 et 131), elle a vu, dans le large pouvoir d'appréciation conféré à l'autorité d'exécution par l'expression "in the immediate vicinity", s'agissant d'une restriction non limitée dans le temps et portant sur l'intégralité du territoire de la Russie d'organiser toute manifestation publique à proximité immédiate de bâtiments judiciaires ( court buildings), une limitation insuffisamment précise à la liberté de réunion. L'autorité d'exécution avait interprété la règle dans le sens d'un rayon de 150 mètres au centre duquel se trouvait un tribunal mais pour interdire au recourant de manifester devant le bâtiment du bureau du procureur qui se trouvait aussi dans le périmètre ainsi délimité (arrêts Tsvetkova et autres c. Russie du 10 avril 2018, Requête no 54381/08, par. 128 ss; Lashmankin et autres c. Russie, du 7 février 2017, Requêtes nos 57818/09 et 14 autres, par. 437 à 441).
7.5.4. L'art. 7 par. 1 CEDH ne pose pas des exigences excessives en termes de précision du texte légal. Il ne proscrit ni la technique de la législation par catégories, ni celle de la référence et le principe de la légalité pénale ne peut guère exclure d'emblée tout point douteux. Il doit aussi permettre de s'adapter aux changements de situation. On ne saurait en déduire qu'il exclurait nécessairement le recours à des expressions telles que "aux abords immédiats" que l'on retrouve dans plus d'un texte normatif. Cette notion, polysémique par nature, ne peut toutefois se comprendre que dans un contexte donné, qui peut en fixer tout au moins l'ordre de grandeur. "Aux abords immédiats d'une ville" ou d'un État ne renvoie pas au même ordre de grandeur qu'"aux abords immédiats d'une construction ou d'un monument" ou encore d'un conducteur électrique (ch. 18 de l'annexe 1 à l'Ordonnance du 30 mars 1994 sur les lignes électriques; OLEI; RS 734.31), d'un champ de mines (art. 5 du Protocole II de la Convention du 10 octobre 1980 sur l'interdiction ou la limitation de l'emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs ou comme frappant sans discrimination; RS 0.515.091) ou de la chaussée (art. 9 al. 2 de l'Ordonnance du 5 septembre 1979 sur la signalisation routière; OSR; RS 741.21), pour ne prendre que quelques exemples tirés du droit fédéral. Il apparaît donc difficile de faire l'économie d'une approche fonctionnelle ou téléologique, tenant compte du rôle que joue la notion d'"abord immédiat" et de celui de la zone ainsi délimitée.
7.5.5. Dans cette perspective, il faut constater que le législateur genevois a distingué, d'une part, les abords immédiats de certains bâtiments (banques, bureaux de poste, notamment), regroupés avec des appareils (distributeurs automatiques d'argent et caisses de parking; art. 11A al. 1 let. c ch. 5 LPG/GE), ceux des arrêts de transports publics et des amarrages de bateaux (ch. 10), ceux des lieux cultuels (ch. 11), ainsi que les "abords immédiats des entrées et sorties" d'autres établissements (commerciaux, médicaux, culturels, éducatifs, notamment; ch. 2 à 4 et 6 à 8). Force est, par ailleurs aussi, de constater, en l'absence d'une jurisprudence établie permettant d'interpréter la disposition cantonale (sur cette circonstance dans l'appréciation de la prévisibilité de la norme: v. parmi d'autres: Arrêts de la CourEDH G. c. France du 27 septembre 1995, Requête no 15312/89, par. 25; Müller et autres contre Suisse du 24 mai 1988, Requête no 10737/84, par. 29; Kokkinakis c. Grèce du 25 mai 1993, Requête no 14307/88, par. 40) et de toute norme réglementaire d'application, que les travaux préparatoires du texte ne faisaient état que d'une distance de 50 mètres tant pour les arrêts de transports publics qu'autour de bâtiments bancaires ou postaux ou de distributeurs d'argent en espèces (Secrétariat du Grand Conseil genevois, PL 12881, p. 1 ss), respectivement de l'intention de renoncer à une limite de 5 mètres, mais sans autre précision. À eux seuls, ces éléments d'exégèse disparates ne permettent pas de comprendre immédiatement et précisément l'étendue des multiples interdictions posées par la norme en matière de mendicité. Il n'apparaît certes pas exclu d'emblée d'interpréter différemment la notion d'"abords immédiats" des bâtiments de postes, des banques ainsi que des points de retrait et de paiement, de celle des entrées et sorties de commerces, dès lors que l'interdiction de mendier dans ces catégories d'endroits ne paraît pas répondre aux mêmes impératifs. Du reste, telle semble bien avoir été l'intention du législateur genevois en faisant usage du terme "abords" (Secrétariat du grand Conseil, Rapport de la commission judiciaire et de la police, PL 12881-A, p. 17). Une telle technique législative, qui juxtapose des concepts distincts sous une seule dénomination au sein de la même norme n'apparaît toutefois pas celle en favorisant au mieux l'accessibilité (cf. NESA ZIMMERMANN/ANTOINE DA RUGNA, Interdire la mendicité sans violer les droits humains? sui generis 2023 p. 29).
7.6. Il reste qu'en l'espèce seule entre en considération l'interprétation de la notion des abords immédiats des entrées et sorties d'établissements commerciaux. Dans ces sites, l'interdiction de mendier vise moins, au premier plan, la garantie d'intérêts publics tels que la sécurité ou l'ordre public, que de ménager les intérêts commerciaux, respectivement l'attractivité des commerces, soit les droits et libertés d'autrui au sens de l'art. 8 par. 2 CEDH. En l'absence d'intérêts publics stricto sensu, seule une lecture relativement étroite de la norme peut s'imposer. S'il s'agit, en définitive principalement, quant à la mendicité passive, de parer aux difficultés évoquées par les commerçants d'exercer leur activité commerciale dans des conditions sereines, de favoriser l'accueil des clients, le confort de ceux-ci et l'attractivité commerciale, soit de réguler des obstacles à l'exercice de l'activité commerciale (Secrétariat du Grand Conseil genevois, PL 12862-A, p. 22 s.), la lecture de la loi ne peut être que restrictive. On ne saurait envisager un rayon de plus de quelques mètres, sans qu'il faille préciser s'il s'agit de 2 ou 5 mètres, tant que la réglementation ne se révèle pas chicanière (ATF 149 I 248 consid. A, consid. 4.6.2 et consid. 5.3.2; v. aussi supra consid. 7.5.3). Au-delà d'une telle limite, ces clients ne se distinguent en effet plus des autres passants; ils ne font plus usage des entrées ou sorties des établissements commerciaux et ne se trouvent plus à leurs "abords immédiats" mais simplement à proximité de ces bâtiments. Une interprétation plus extensive de la norme ne répondrait plus à l'impératif de précision.
7.7. En résumé, il résulte de ce qui précède, ainsi que d'autres cas que le Tribunal fédéral a été appelé à examiner que la notion d'"abords immédiats" délimite essentiellement un rayon de quelques mètres autour des entrées et sorties des établissements commerciaux, ainsi que de celles des marchés et des banques, autour des arrêts de transports publics et autour des caisses de parking (arrêt 6B_923/2024 du 19 mars 2025 consid. 7.6.2 à 7.6.4 et les références citées).
7.8. En l'espèce, la recourante a été condamnée pour avoir commis des actes de mendicité au [...], rue U.________, à V.________, le 21 décembre 2022, à 18h04. Selon les constatations des autorités cantonales, elle se trouvait à proximité de l'entrée d'un magasin.
7.9. La cour cantonale n'a pas expliqué précisément comment elle rapportait le comportement ainsi constaté en fait ("à proximité de l'entrée") à la formulation de la norme cantonale ("aux abords immédiats des entrées et sorties"). Quant au jugement de première instance, il en ressort uniquement que le comportement ainsi décrit était constitutif de l'infraction visée par l'art. 11A al. 1 let. c LPG/GE (jugement du 2 octobre 2023 consid. 1.2 p. 4). On peut certes comprendre de la référence à l'entrée d'un magasin que la cour cantonale a implicitement considéré l'art. 11A al. 1 let. c ch. 2 LPG/GE comme applicable. En revanche, on ignore concrètement ce qui imposerait d'assimiler la constatation de fait de la "proximité de l'entrée" du négoce avec l'exigence juridique de se trouver "aux abords immédiats" imposée par la norme pénale, au risque de vider de tout contenu la condition d'immédiateté, alors qu'il s'imposerait, au contraire, de l'interpréter de manière stricte. Plus généralement, force est de constater qu'en l'absence de tout élément objectif permettant de la concrétiser, une telle constatation de fait, de même, par exemple, que celle de la "proximité immédiate", qui procède déjà d'une appréciation, ne permet tout simplement pas de contrôler l'application de la norme pénale, fût-ce sous l'angle de l'arbitraire.
7.10. Ni la cour cantonale, ni l'autorité de première instance n'ont ensuite exposé précisément en quoi l'aspect subjectif de l'infraction était réalisé. En revanche, en lien avec l'exigence de précision de la norme pénale, la cour cantonale a souligné que la recourante n'avait pas d'antécédent et que le dossier ne contenait aucun élément indiquant qu'elle aurait préalablement au 3 décembre 2022, date de la première occurrence qui lui était reprochée, été avertie ou sensibilisée au fait qu'il lui était interdit de mendier à proximité de l'entrée d'un commerce, sous peine d'une amende, elle-même susceptible de conversion en peine privative de liberté en cas de non-paiement (arrêt entrepris consid. 3.2 p. 13).
7.10.1. La recourante s'offusque vainement de prétendues références nombreuses à de précédentes condamnations rendues sous l'égide de l'ancien droit. La décision entreprise ne dit rien de tel. Il n'y a pas lieu d'examiner la cause sous cet angle.
7.10.2. La recourante affirme encore dans son recours que, selon son appréciation, elle ne se trouvait pas, au moment des faits, "aux abords immédiats" des magasins devant lesquels elle mendiait "puisque tant la loi que les dictionnaires [...] ne mentionnent pas de distance à respecter".
Pour les motifs qui ont été exposés, on peut se dispenser d'examiner cet argumentaire (v. supra consid. 7.9). Il sied néanmoins de relever que si la notion d'"abords immédiats" des entrées et sorties de commerces peut nécessiter une interprétation (v. supra consid. 7.5.3 ss), il n'en est pas moins, en soi, possible de constater sans arbitraire la réalisation de cet élément objectif, par exemple, en considérant que l'auteur de la contravention, s'il est en mesure de solliciter les usagers de ces accès en leur tendant un gobelet à café, se trouve bien "aux abords immédiats" des entrées ou sorties de ces commerces (v. supra consid. 7.5.5). Une telle représentation, même simplificatrice, de cet élément objectif de la norme pénale suffirait, de toute manière, à exclure sans arbitraire toute erreur ( Parallelwertung in der Laiensphäre; v. à propos de cette notion de droit fédéral applicable à titre de droit cantonal supplétif: ATF 150 IV 10 consid. 4.1.7; 129 IV 238 consid. 3.2.2). On peut aussi relever, dans ce contexte, qu'il est généralement vain de nier la réalisation de l'élément subjectif de l'infraction en lien avec la distance tout en ayant agi à 2 ou 3 mètres de l'entrée d'un commerce ou en étant adossé à une caisse automatique de parking (v. arrêts 6B_715/2024 du 19 mars 2025 consid. 7.10.2; 6B_923/2024 du 19 mars 2025 consid. 7.9.2).
7.10.3. Il résulte de ce qui précède que la recourante se plaint vainement de l'imprécision de la norme pénale au regard des exigences de l'art. 7 CEDH, cependant que la décision entreprise ne permet pas de contrôler comment a été appliquée cette disposition pénale de droit cantonal.
7.10.4. Pour le surplus, le cas d'espèce pose encore des questions spécifiques en termes d'accessibilité (v. supra consid. 7.4.1 et 7.4.2), à raison des destinataires de la norme, qui sont étrangers, se présentent comme analphabètes et se trouvent confrontés à une législation relativement nouvelle faisant usage de concepts indéterminés. Il apparaît expédient d'examiner ces points conjointement avec l'exigence de proportionnalité (v. infra consid. 8 et 8.4 ss).
8.
La recourante invoque ensuite la violation des art. 7, 9, 10 et 36 Cst. ainsi que 8 CEDH. En bref, elle soutient que sa condamnation en application de l'art. 11A LPG/GE constituerait une restriction inadmissible à la garantie fondamentale de sa liberté personnelle. Elle conteste en particulier l'existence d'un intérêt public à prohiber la mendicité devant les magasins, en soulignant l'absence de plainte tant des commerçants que de leurs clients et en contestant que sa vue tendant la main puisse faire naître un sentiment d'insécurité. Il existerait, au contraire, un intérêt public à l'autoriser à mendier, cela suscitant un sentiment de satisfaction personnelle chez ceux qui l'aident. La restriction apportée à son droit fondamental ne serait, par ailleurs, pas proportionnée. Elle relève à ce sujet qu'elle ne remplit de toute évidence pas les conditions légales pour l'obtention d'une aide financière des autorités genevoises, que la sanction prononcée contre elle viole déjà le principe de la proportionnalité en raison de son caractère pénal et que la CourEDH a clairement proscrit la conversion d'amendes en privation de liberté pour toute personne vulnérable dénuée de moyens de subsistance qui s'adonne à la mendicité.
8.1. Conformément à l'art. 8 CEDH, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (par. 1). Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (par. 2).
8.2. L'art. 7 Cst. garantit la dignité humaine, cependant que conformément à l'art. 10 al. 2 Cst., tout être humain a droit à la liberté personnelle, notamment à l'intégrité physique et psychique et à la liberté de mouvement. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral et la littérature juridique, le fait de mendier, comme forme du droit de s'adresser à autrui pour en obtenir de l'aide, est une liberté élémentaire, faisant partie de la liberté personnelle garantie par l'art. 10 al. 2 Cst., respectivement du droit au respect de sa vie privée garanti par l'art. 8 CEDH. Qu'elle soit totale ou partielle, l'interdiction de la mendicité constitue une restriction à ces droits et libertés et atteint la dignité humaine (ATF 149 I 248 consid. 4.3 et les nombreuses références citées).
8.3. La recourante invoque encore, concurremment, une violation de sa liberté de communication (art. 10 CEDH et 16 Cst.). Elle reproche à la cour cantonale de s'être référée sur ce point à divers arrêts du Tribunal fédéral rendus sous l'empire de l'ancien art. 11A LPG/GE. Elle objecte que cette jurisprudence a conduit à la condamnation de la Suisse par la Cour européenne, que d'autres autorités judiciaires ont annulé des normes interdisant la mendicité en se fondant sur cette liberté qui protège précisément la communication entre personnes, dont le fait de tendre la main pour mendier serait le premier pas. Appartenant à la minorité ethnique rom, elle démontrerait et communiquerait, en tendant la main pour solliciter l'aumône, que sa communauté, dont les membres vivent encore aujourd'hui en dessous du seuil de pauvreté, est notoirement discriminée, ce qui obligerait ces personnes à solliciter de l'aide pour survivre. Ce message comporterait une dimension symbolique qui ne pourrait être réduite à une simple expression préalable de sa précarité pour solliciter de l'aide.
La recourante ne conclut pas expressément à la constatation formelle d'une violation de cette liberté, ce qui lie le Tribunal fédéral (art. 107 al. 1 LTF). Elle ne démontre, ensuite, pas en quoi cette liberté lui offrirait une protection plus étendue que les art. 8 CEDH ainsi que 7 et 10 Cst., dont le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de relever qu'ils permettaient de prendre en considération les éventuels aspects de communication en lien avec l'acte de mendier, de sorte que la cour de céans n'a, en l'espèce non plus, aucun motif de revenir sur cette question (cf. ATF 149 I 248 consid. 4.4). Il suffit de relever que la CourEDH n'a, à ce jour, jamais constaté de violation de l'art. 10 CEDH par la Suisse (non plus qu'un autre pays) en matière de mendicité. Ces développements reposent, par ailleurs, sur un état de fait distinct de celui constaté souverainement par la cour cantonale et la recourante n'expose pas en quoi la décision entreprise serait arbitraire à cet égard. On renvoie, sur ce point, à ce qui a déjà été exposé en lien avec ces mêmes allégations de la recourante à l'appui de son grief de violation du principe de la légalité (v. supra consid. 7.3).
8.4. Dès lors qu'il est constant que l'interdiction de la mendicité, respectivement la condamnation de la recourante, constitue une atteinte aux droits garantis par l'art. 8 CEDH mais qu'elle trouve toutefois son fondement dans une loi au sens formel en l'espèce, dont la qualité n'est pas discutable en tant que telle (v. supra consid. 7.4 ss), seule doit encore être questionnée la proportionnalité de l'atteinte (art. 36 al. 3 Cst.), respectivement sa nécessité dans une société démocratique (art. 8 par. 2 CEDH). Cela suppose son aptitude à atteindre le but visé, que celui-ci ne puisse être atteint par une mesure moins incisive et qu'il existe un rapport raisonnable entre les effets de la mesure sur la situation de la personne visée et le résultat escompté. Il convient, dans ce cadre, de considérer que, dans la règle, les personnes qui mendient sont particulièrement vulnérables et démunies, qu'elles sont réduites à cette extrémité pour assurer leur minimum d'existence et que la liberté personnelle couvre aussi, dans ce contexte, le droit de s'adresser à autrui pour en obtenir de l'aide. Selon la manière dont elle est conçue, une sanction pénale peut ainsi être particulièrement lourde. Compte tenu de la situation précaire des mendiants, les amendes élevées et les peines privatives de liberté doivent être examinées avec une attention particulière et d'autres mesures envisagées, telles des interdictions de mendier limitées dans le temps et l'espace, respectivement des sanctions moins lourdes prises en considération (ATF 149 I 248 consid. 4.6.3; 134 I 214 consid. 5.3).
8.5. Dans l'arrêt Lacatus contre Suisse précité, la CourEDH a admis que la protection des intérêts de tiers, notamment passants, résidents et propriétaires de commerces peut constituer un but légitime, en particulier contre les formes de mendicité agressives (par. 97). Un tel comportement n'a toutefois pas été retenu en l'espèce où la condamnation de la recourante ne porte que sur le fait d'avoir mendié en tendant un gobelet à café rempli de pièces de monnaie aux passants devant un centre commercial, respectivement demandé de l'argent aux clients qui sortaient d'un autre magasin d'alimentation et commerce de denrées essentielles. Le Tribunal fédéral a également déjà relevé que la proportionnalité de la pénalisation de tels comportements purement passifs, même dans le cadre d'interdictions limitées spatialement, était délicate (ATF 149 I 248 consid. 5.4.6 s.; v. aussi: RAPHAELA CUENI, [Fehlende] öffentliche Interessen an Bettelverboten, recht 2021 p. 244 ss). Il était douteux que l'amende (même de 50 fr. selon le dispositif mis en place dans le canton de Bâle-Ville), à laquelle, en cas de non-paiement, pouvait se substituer une privation de liberté d'un jour au moins (art. 106 al. 2 CP; v. à propos du caractère fautif ou non du non-paiement: arrêt 6B_889/2022 du 2 novembre 2022 consid. 2.3.3), apparaisse adaptée. Une telle sanction ne peut donc entrer en considération que comme ultima ratio après l'échec d'autres mesures, de nature administrative et plus adéquates, à l'instar de l'éloignement par la police (dûment documenté) hors de la zone d'interdiction lors de la première infraction et l'avertissement administratif sous commination d'une amende en cas de récidive avant le prononcé d'une amende à la troisième occurrence, toutes mesures nécessitant, elles aussi, la mise en place d'un dispositif réglementaire (ATF 149 I 248 consid. 5.4.6 s.). Même si elles ne sont pas exemptes d'inconvénients, parce que les interventions policières sont généralement vécues, notamment par les mendiants roms, comme "des agressions arbitraires dans un climat anxiogène" (MONICA BATTAGLINI/IULIA HASDEU, "Faire village en ville", Communautés de migrants roms et anti-tsiganisme à Genève, Anuac, vol. 6 no 1, juin 2017, p. 175), de telles mesures sont un préalable nécessaire au prononcé d'une amende sanctionnant ce comportement.
8.6. Après avoir relevé que la recourante n'avait pas d'antécédents et qu'il serait bienvenu d'intégrer à la législation genevoise un mécanisme graduel de sanction avant le prononcé de l'amende quasiment systématiquement convertie (avertissement formel dans la langue maternelle du contrevenant, indiquant le caractère pénal de son comportement et la sanction encourue en cas de récidive, voire un guide des bonnes pratiques à adopter), la cour cantonale a jugé que la première amende infligée à la recourante n'était pas compatible avec la CEDH, respectivement la jurisprudence du Tribunal fédéral. Elle a donc annulé cette première condamnation, en retenant néanmoins que l'interpellation y relative aurait constitué un avertissement quant au risque encouru, dès lors qu'il ressortait expressément du rapport de l'agent qui avait constaté la contravention qu'elle avait été sensibilisée à cette question, mais avait néanmoins récidivé moins de trois semaines plus tard au même endroit.
8.7. Bien que la condamnation de la recourante doive déjà être annulée pour un autre motif, il sied de relever que le raisonnement de la cour cantonale ne saurait être suivi. Le rapport de contravention relatif à l'infraction du 3 décembre 2022 indique certes que la contrevenante a été priée de ne plus s'adonner à "cette pratique interdite" soit "mendier dans un lieu proscrit", avec la précision qu'elle se trouvait "devant l'entrée" d'un magasin et le complément "abords immédiats d'un magasin". On ignore toutefois dans quelle langue elle a ainsi été "sensibilisée" et ni l'indication "abords immédiats d'un magasin" ni la précision "devant l'entrée" ne restituent de toute manière précisément le texte légal. De surcroît, cette première intervention policière avait déjà un caractère pénal et non pas simplement administratif et aurait, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, dû être suivie d'un avertissement formel et comporter en outre l'indication que la récidive l'exposait à une amende susceptible d'être convertie en privation de liberté, toutes indications absentes. Or, rien de tel ne ressort du rapport de contravention. Quant à l'ordonnance pénale y relative, à laquelle était annexée une traduction en langue roumaine, elle mentionne elle aussi "les abords immédiats d'un magasin" ( Imprejurimi imediate ale unui magazin) mais non "devant un magasin" et n'a, de toute manière été remise à la recourante que le 21 mars 2023, soit bien après le 21 décembre 2022, date du cas de mendicité qui a finalement été retenu.
Par ailleurs, des mesures ont accompagné la mise en vigueur de la loi, notamment des rencontres entre l'unité de proximité de la gendarmerie et les différentes associations s'occupant de la population qui s'adonne à la mendicité, afin de les sensibiliser à cette thématique (v. supra consid. 7.5.1). De telles mesures doivent être accueillies favorablement; elles renforcent l'accessibilité de la loi. Elles n'en conservent pas moins un caractère général. Dès lors qu'il n'est guère possible d'établir concrètement comment elles ont pu atteindre la recourante, elles ne peuvent, dans la perspective de la proportionnalité de la mesure, se substituer à celles, administratives et préalables, préconisées par le Tribunal fédéral (ATF 149 I 248 consid. 5.4.6 s.).
8.8. Le ministère public intimé objecte encore que la conversion d'une amende en peine privative de liberté de substitution fait l'objet d'une ordonnance à laquelle il peut être fait opposition et que le condamné peut invoquer dans ce cadre procédural s'être trouvé sans faute dans l'impossibilité de payer l'amende (art. 106 al. 2 CP).
Selon la jurisprudence, le non-paiement de l'amende conduisant à sa conversion, ne peut cependant être considéré comme non fautif au sens de l'art. 106 al. 2 CP que dans l'hypothèse où les circonstances qui ont présidé à la fixation de son montant se sont notablement détériorées, sans faute de l'intéressé, depuis le prononcé de la sanction (arrêt 6B_889/2022 précité consid. 2.3.3). Hormis que la jurisprudence ne s'est pas encore prononcée précisément sur les conséquences d'un tel non-paiement (arrêt 6B_889/2022 précité consid. 2.3.4), il est ainsi douteux que l'art. 106 al. 2 CP puisse apporter un correctif lorsqu'une amende est infligée à une personne qui se trouve d'emblée dans le dénuement. De surcroît, l'art. 106 al. 2 CP s'appliquant à titre de droit cantonal supplétif aux amendes de droit cantonal, on ignore comment cette règle est appliquée par les autorités cantonales et le ministère public ne tente pas de démontrer que la pratique cantonale serait, sur ce point, plus large que la jurisprudence fédérale.
9.
Il résulte de ce qui précède que la condamnation de la recourante en application de l'art. 11A LPG/GE doit être annulée, cette atteinte à ses droits fondamentaux ne respectant pas l'exigence de proportionnalité. Ce vice n'étant pas susceptible d'être guéri dans les circonstances concrètes, il y a lieu non seulement d'annuler la condamnation de la recourante mais d'acquitter l'intéressée et de ne retourner la cause à la cour cantonale qu'afin qu'elle rende une nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale.
10.
La recourante obtient gain de cause. Elle ne supporte pas de frais (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF), mais peut prétendre à des dépens à la charge du canton de Genève (art. 68 al. 1 et 2 LTF) dont le montant sera fixé en tenant compte des considérants qui précèdent et du fait que les écritures de la recourante sont pour l'essentiel identiques à celles déposées par son avocate dans les procédures parallèles ayant le même objet. La demande d'assistance judiciaire est sans objet (art. 64 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable.
2.
La décision entreprise est réformée en ce sens que la recourante est acquittée. La cause est renvoyée à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision sur les frais et dépens de la procédure cantonale.
3.
Il est statué sans frais.
4.
Le canton de Genève versera en main du conseil de la recourante la somme de 500 fr. à titre de dépens pour la procédure fédérale.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.
Lausanne, le 19 mars 2025
Au nom de la Ire Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Jacquemoud-Rossari
Le Greffier : Vallat