6B_1008/2024 08.05.2025
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_1008/2024
Arrêt du 8 mai 2025
Ire Cour de droit pénal
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux
Jacquemoud-Rossari, Présidente,
von Felten et Guidon.
Greffière : Mme Kistler Vianin.
Participants à la procédure
A.________,
recourant,
contre
Ministère public de l'État de Fribourg, case postale 1638, 1701 Fribourg,
intimé.
Objet
Discrimination et incitation à la haine; fixation de la peine; droit d'être entendu,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, Cour d'appel pénal, du 27 novembre 2024
(501 2024 64).
Faits :
A.
Par jugement du 15 février 2024, le Juge de police de l'arrondissement de la Sarine a reconnu B.________ (dont le prénom et le nom ont été modifiés en A.________ par décision du 31 janvier 2025 du Service de l'état civil et des naturalisations du canton de Berne) coupable de discrimination et incitation à la haine (art. 261bis CP) et a condamné l'intéressé à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à 35 fr. le jour, avec sursis pendant quatre ans. De plus, il a ordonné la confiscation et la destruction du paquet contenant environ 500 "stickers" arborant les couleurs du drapeau LGBTQ avec une croix gammée dessus, séquestré le 14 juin 2023.
B.
Par arrêt du 27 novembre 2024, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal fribourgeois a rejeté l'appel formé par B.________ (devenu A.________).
En résumé, elle a retenu les faits suivants:
Le 14 juin 2023, à 18h30, à Fribourg, B.________ (devenu A.________) a collé, dans l'espace public, trois ou quatre "stickers" arborant les couleurs du drapeau LGBTQ avec une croix gammée dessus et, à la place U.________, en a remis à un groupe de personnes indéterminées.
C.
Contre cet arrêt cantonal, B.________ (devenu A.________) dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens qu'il est acquitté du chef d'accusation de discrimination et incitation à la haine. A titre subsidiaire, il requiert l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouveau jugement. En outre, il sollicite l'assistance judiciaire.
Considérant en droit :
1.
Le recourant fait valoir que la cour cantonale a constaté les faits de manière manifestement inexacte en retenant que les stickers "arboraient les couleurs du drapeau LGBT (recte: LGBTQ) avec une croix gammée dessus".
1.1. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente, sauf si ceux-ci ont été retenus de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (sur cette notion, cf. ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf. art. 105 al. 1 et 2 LTF) et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Lorsque le recourant entend s'en prendre aux faits ressortant de l'arrêt attaqué, il doit établir de manière précise la réalisation de ces conditions. À défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergent de celui qui est contenu dans l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (cf. ATF 150 I 50 consid. 3.3.1; 149 IV 231 consid. 2.4; 148 IV 409 consid. 2.2).
1.2. Le recourant explique que les stickers arboraient quatre drapeaux nommés "Progress Pride Flag" et non pas le drapeau LGBTQ comme le constate à tort la cour cantonale. Pour le recourant, le drapeau "Progress Pride Flag" se différencie du drapeau LGBTQ en ce sens qu'il a en plus une bande blanche, rose et bleu clair pour représenter la communauté transgenre et des bandes noire et brune pour représenter les communautés de couleur; la bande noire est également un clin d'oeil aux milliers de personnes que la communauté a perdues pendant la crise du VIH/sida dans les années 1980 et 1990. En outre, le recourant relève que la croix gammée ne figure pas sur le drapeau LGBTQ, mais que les quatre drapeaux "Progress Pride Flag" sont disposés de manière à former une croix gammée, qui serait le symbole du fascisme. Le recourant en déduit que les stickers litigieux ne se référeraient à aucune orientation sexuelle et que la correction de ce vice serait susceptible d'influer sur le sort de la cause conformément à l'art. 97 LTF.
Sur les stickers distribués par le recourant, figurent effectivement quatre drapeaux "Progress Pride Flag" disposés de manière à former une croix gammée et non "le drapeau LGBTQ avec une croix gammée dessus". Comme on le verra, le drapeau LGBT a évolué au fil des années. Il est toutefois sans importance que le sticker représente le drapeau créé par Daniel Quasar ou le drapeau LGBTQ, dès lors que, dans tous les cas, le drapeau reproduit sur le sticker fait référence, pour tout destinataire non prévenu, au mouvement LGBTQ. Il importe également peu que la croix gammée soit formée par les quatre drapeaux LGBTQ ou qu'elle soit dessinée sur ledit drapeau, dès lors que, dans les deux cas, la croix gammée est associée à la communauté LGBTQ. Lors de la discussion en droit, la cour cantonale mentionne du reste bien que le recourant a formé "une croix gammée avec quatre drapeaux LGBTQIA+" (cf. arrêt attaqué p. 4 consid. 3.5). Le grief du recourant est donc infondé.
2.
Le recourant dénonce la violation de son droit d'être entendu (obligation de motivation du juge). Il reproche notamment à la cour cantonale de ne pas avoir expliqué comment elle arrivait à la conclusion que "de tels argument sont de pure circonstance".
2.1. Le droit d'être entendu implique notamment pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. Il ne lui impose cependant pas d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties; l'autorité peut, au contraire, se limiter à ceux qui, sans arbitraire, lui paraissent pertinents (ATF 134 I 83 consid. 4.1 p. 88; 133 III 439 consid. 3.3 p. 445; 130 II 530 consid. 4.3 p. 540). Savoir si la motivation présentée est convaincante est une question distincte de celle du droit à une décision motivée. Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision des juges, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée (arrêts 6B_431/2015 du 24 mars 2016 consid. 1.1; 4P.308/2005 du 1er juin 2006, consid. 3.2).
2.2. La cour cantonale a mentionné les faits qui étaient reprochés au recourant et les dispositions qu'elle a appliquées. Elle a certes renvoyé à la motivation du tribunal de première instance, comme le lui autorise l'art. 82 al. 4 CPP. Elle a néanmoins repris les critiques partiellement nouvelles du recourant et a expliqué les raisons pour lesquelles elle ne pouvait pas les retenir. Le recourant ne soutient du reste pas avoir rencontré des difficultés de compréhension l'ayant empêché de recourir. À la lecture de son mémoire de recours de 22 pages, il apparaît bien au contraire qu'il a saisi la portée de l'arrêt attaqué et qu'il a pu le contester en parfaite connaissance de cause. Dans ces conditions, la cour de céans ne voit pas en quoi le droit d'être entendu du recourant aurait été violé. Le grief soulevé doit être rejeté.
3.
Le recourant conteste sa condamnation pour discrimination et incitation à la haine au sens de l'art. 261bis al. 1 CP.
3.1. Aux termes de l'art. 261bis al. 1 CP, se rend notamment coupable de discrimination quiconque, publiquement, incite à la haine ou à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle.
Cette disposition vise notamment à protéger la dignité que toute personne acquiert dès la naissance et l'égalité entre les êtres humains (ATF 149 IV 170 consid. 1.1.1; 148 IV 188 consid. 1.3; 140 IV 67 consid. 2.1.1; 133 IV 308 consid. 8.2 et les références citées; FF 2018 3897 p. 3911). Classée parmi les infractions contre la paix publique, elle protège aussi la paix publique, qui est menacée par des actes qui peuvent conduire à dresser des groupes d'individus les uns contre les autres (ATF 149 IV 170 consid. 1.1.1; 148 IV 188 consid. 1.3; 148 IV 113 consid. 3; 140 IV 67 consid. 2.1.1; 133 IV 308 consid. 8.2 et les références citées). Dans ce contexte, conformément à la volonté du législateur, les trois premiers alinéas de l'art. 261bis CP visent plus précisément à combattre la haine raciale et l'alinéa 4 à interdire les atteintes discriminatoires (ATF 126 IV 20 consid. 1c p. 24).
Déterminer le contenu d'un message relève des constatations de fait (ATF 145 IV 23 consid. 4.2). Saisi d'un recours en matière pénale, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir pour l'essentiel de l'arbitraire dans la constatation des faits (sur cette notion, cf. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2). L'interprétation du message ressortit, en revanche, à l'application du droit fédéral, que le Tribunal fédéral revoit librement dans le recours en matière pénale. Il s'agit de rechercher le sens qu'un destinataire non prévenu doit conférer aux expressions utilisées, compte tenu de l'ensemble des circonstances pertinentes, à savoir, notamment, la personne dont émane le message et celles qui sont visées (ATF 149 IV 170 consid. 1.1.4; 148 IV 113 consid. 3; 145 IV 462 consid. 4.2.3; 143 IV 193 consid. 1).
3.2. La cour cantonale a considéré qu'en formant une croix gammée avec quatre drapeaux LGBTQIA+, le recourant avait associé les communautés homosexuelle et lesbienne avec le symbole du régime nazi et par là assimilé les personnes de cette communauté à des nazis, ce qui constituait manifestement une atteinte à leur dignité en raison de leur orientation sexuelle. En distribuant et en collant ces autocollants sur le domaine public, il avait incité publiquement à la haine ou à la discrimination de ces personnes. La cour cantonale en a conclu que le recourant s'était rendu coupable de discrimination et d'incitation à la haine au sens de l'art. 261bis CP.
Le recourant explique avoir voulu, par le biais de son action, participer au débat public et ainsi exercer son droit d'exprimer librement son opinion sur les moyens utilisés par la "communauté de l'alphabet" pour défendre ses valeurs relatives à l'orientation sexuelle de ses membres. En effet, selon le recourant, les méthodes adoptées par ces derniers s'apparenteraient à des actions fascistes menées par un mouvement révolutionnaire (la "communauté de l'alphabet") qui tenterait d'instaurer une certaine tyrannie au sein de la société civile pour faire reconnaître aux yeux de tout un chacun l'orientation sexuelle de ses membres. Par le biais de ces stickers, le recourant voulait uniquement exposer aux yeux de tous que les membres de la "communauté de l'alphabet" adoptaient usuellement des méthodes fascistes pour imposer dans notre société leur propre conception de la sexualité.
3.3.
3.3.1. Pour que l'art. 261 bis CP soit applicable, il faut d'abord que l'auteur agisse publiquement, c'est-à-dire en dehors d'un cercle privé (ATF 130 IV 111 consid. 5.2.2), par des paroles, des écrits, des images, des gestes ou des voies de fait (ATF 149 IV 170 consid. 1.1.2; 145 IV 23 consid. 2.2). Sont privées les déclarations qui ont lieu dans un cercle familial ou d'amis ou dans un environnement de relations personnelles ou empreint d'une confiance particulière (ATF 130 IV 111 consid. 5.2.2; arrêt 6B_636/2020 du 10 mars 2022 consid. 5.1, non publié in ATF 148 IV 113). En l'espèce, le recourant a distribué les stickers litigieux à un groupe de personnes indéterminées et en a collés trois ou quatre sur le domaine public, de sorte que le recourant a bien agi publiquement.
3.3.2. Deuxièmement, il faut que le message, quelle qu'en soit la forme ou le support, s'en prenne à une ou plusieurs personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou de leur orientation sexuelle. Par l'orientation sexuelle, on entend la "capacité qu'a chacun de ressentir une profonde attirance émotionnelle, affective et sexuelle envers des individus de sexe opposé (hétérosexuel), de même sexe (gai, lesbienne) ou de plus d'un sexe (bisexuel), et d'entretenir des relations intimes et sexuelles avec ces individus" (FF 2018 p. 3908). Sont couvertes les orientations hétérosexuelles, homosexuelles et bisexuelles (cf. FF 2018 5331). La notion d'orientation sexuelle est distincte de celle de préférence sexuelle; ne sont ainsi pas protégées les paraphilies telles que le voyeurisme, l'exhibitionnisme ou encore la pédophilie. L'identité de genre en tant que telle n'est pas non plus couverte par la formulation (FF 2018 5331).
En l'espèce, le sticker litigieux reproduit le drapeau arc-en-ciel (ou, selon le recourant, le "Progress Pride Flag" ou le "drapeau des fiertés"). Depuis des décennies, ce drapeau constitue le symbole de la fierté LGBTQIA+ et de sa diversité. Créé en 1978, il a été modifié au fil du temps. Le drapeau figurant sur le sticker du recourant a été conçu par Daniel Quasar en 2018; les bandes blanche, rose et bleue représentent la transidentié et les bandes marron et noires symbolisent les personnes queer racisées et l'antiracisme (cf. Symboles LGBT in Wikipedia; https://fr.wikipedia.org/wiki/SymbolesLGBT, consulté en avril 2025). Même si, comme le soutient le recourant, le drapeau reproduit sur le sticker litigieux représente accessoirement d'autres minorités, il n'en reste pas moins, pour tout destinataire moyen, le symbole des communautés homosexuelle et lesbienne. La cour de céans ne peut suivre le recourant lorsqu'il soutient que le drapeau figurant sur lesdits stickers ne vise pas la communauté LGBTQIA+, mais "un mouvement beaucoup plus large et différencié représentant aujourd'hui un lobby à caractère purement politique".
3.3.3. Le message doit, en troisième lieu, inciter à la haine ou à la discrimination en raison de l'appartenance raciale, ethnique ou religieuse des personnes visées ou de leur orientation sexuelle. La notion d'"incitation" à la haine ou à la discrimination englobe notamment le fait d'"exciter" (aufreizen), à savoir, dans une acception très large, d'alimenter ou d'attiser des émotions de manière à susciter la haine et la discrimination, même en l'absence d'une exhortation très explicite (ATF 143 IV 193 consid. 1; 123 IV 202 consid. 3b; arrêt 6B_644/2020 précité consid. 1.2). La discrimination consiste à traiter injustement de façon moins favorable (ATF 124 IV 121 consid. 2b p. 124). Par haine, on entend une aversion telle qu'elle pousse à vouloir le mal de quelqu'un ou à se réjouir du mal qui lui arrive (ATF 126 IV 20 consid. 1f p. 28).
Sur le sticker litigieux, les quatre drapeaux LGBTQIA+ forment une croix gammée. Le recourant fait valoir en vain que la croix gammée - qu'il désigne sous le nom de swastika - a dépassé la simple représentation du parti national-socialiste mené par C.________ pour représenter aujourd'hui de manière plus large le fascisme, respectivement tout régime autoritaire (recours p. 8). En effet, pour tout destinataire non prévenu, la croix gammée reste l'emblème du parti national-socialiste allemand. Il est vrai que, contrairement à l'Allemagne, les symboles nazis ne sont pas interdits en Suisse; pour qu'un tel symbole soit pénalement répréhensible das notre pays, il faut que son utilisation vise à propager une idéologie au sens de l'art. 261bis CP (cf. VERA LEIMGRUBER, La norme pénale antiraciste dans la pratique judiciaire, Analyse de la jurisprudence relative à l'art. 261bis CP de 1995 à 2019, Commission fédérale contre le racisme, janvier 2021, p. 42 ss; ATF 140 IV 102 consid. 2.2.4; cf. toutefois avant-projet du Conseil fédéral visant à interdire l'utilisation de symboles nazis mis en consultation le 13 décembre 2024, disponible sur https://www.bj.admin.ch/bj/fr/home/sicherheit/gesetzgebung/verbotnazisymbole.html, consulté en avril 2025). En l'espèce, le comportement du recourant est sans conteste allé au-delà de la simple utilisation d'un symbole nazi. Le recourant ne s'est en effet pas borné à afficher une croix gammée, mais a associé celle-ci au drapeau LGBTQIA+. Or, cette association ne peut qu'éveiller un sentiment de haine à l'égard de la communauté LGBTQIA+, compte tenu des horreurs bien connues dont le régime nazi allemand a été responsable, ce qui tombe sous le coup de l'actuel art. 261bis CP (cf. arrêt 6B_6/2015 du 23 mars 2016 consid. 3.3 au sujet de l'art. 173 CP).
3.3.4. Enfin, pour que l'art. 261bis CP soit applicable, il faut que le message haineux soit directement lié à l'appartenance raciale, ethnique ou religieuse ou à l'orientation sexuelle. Il doit faire apparaître les personnes qui appartiennent à une race, une ethnie ou une religion ou qui ont une certaine orientation sexuelle comme étant de moindre valeur du point de vue de la dignité humaine et ce en raison de leur race, de leur religion ou de leur orientation sexuelle. L'appartenance à une race, à une ethnie, à une religion ou l'orientation sexuelle doit être la raison pour laquelle l'auteur rabaisse les personnes concernées. Ainsi, sera un dénigrement punissable le fait d'assimiler les Noirs à des bêtes (ATF 124 IV 121 consid. 2b p. 125) ou encore de faire apparaître les Juifs comme foncièrement avides d'argent (ATF 126 IV 20 consid. 1f p. 28).
Le recourant essaye d'argumenter, en faisant valoir qu'il est indifférent à l'orientation sexuelle des membres de la communauté LGBTQIA+; il ne voulait pas rabaisser ladite communauté en raison de son orientation sexuelle, mais uniquement s'en prendre aux moyens que celle-ci utilise pour défendre les valeurs relatives à l'orientation sexuelle de ses membres. Cette argumentation s'écarte toutefois du dessin figurant sur le sticker. En effet, le sticker vise clairement la communauté LGBTQIA+ dans son ensemble, qui est assimilée au régime nazi; il ne ressort nullement du sticker que le recourant entendait uniquement critiquer les méthodes que ladite communauté utilise pour défendre leur conception de la sexualité.
3.3.5. Du point de vue subjectif, le délit est intentionnel, le dol éventuel pouvant suffire (ATF 149 IV 170 consid. 1.1.3; 148 IV 113 consid. 3; 145 IV 23 consid. 2.3). Ainsi, l'auteur doit savoir et vouloir, à tout le moins par dol éventuel, que son message porte atteinte à la dignité d'autrui, en ce sens qu'il présente les membres de la communauté concernée comme inférieurs ou dangereux et qu'il est ainsi suffisamment violent pour influencer autrui (ALEXANDRE GUYAZ, L'incrimination de la discrimination raciale, thèse 1996, p. 256). Au vu du dessin figurant sur le stickers litigieux, il convient d'admettre que le recourant ne pouvait qu'accepter que son message porte atteinte à la dignité des communautés homosexuelle et lesbienne. En tant que le recourant fait valoir qu'il n'était animé par aucune motivation de haine ni de discrimination à l'encontre de la communauté LGBTQIA+, mais qu'il entendait uniquement s'en prendre aux méthodes utilisées par la communauté LGBTQIA+ pour véhiculer leurs valeurs, son argumentation est purement appellatoire et donc irrecevable.
3.3.6. En définitive, la cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral en retenant que les éléments constitutifs de l'infraction de discrimination et d'incitation à la haine étaient réalisés.
4.
Le recourant invoque sa liberté d'opinion et d'expression garantie par les art. 16 Cst. et 10 CEDH. Il fait valoir qu'il devrait être possible dans une société démocratique de critiquer le comportement de groupes déterminés si la critique reste objective.
4.1. L'art. 261bis CP peut entrer en conflit avec la liberté d'opinion et d'expression, garantie par les art. 16 Cst. et 10 CEDH. En principe, dans une démocratie, chacun a le droit d'exposer ses vues sur un sujet d'intérêt public, même si elles déplaisent à certains. La majorité ne peut prétendre réduire la minorité au silence (ATF 101 Ia 252 consid. 3c p. 258). A l'instar des autres droits fondamentaux, la liberté d'opinion n'a toutefois pas une valeur absolue. Des restrictions peuvent y être apportées si elles sont fondées sur une base légale, sont justifiées par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui et demeurent proportionnées au but visé (art. 36 Cst.; cf. art. 10 § 2 CEDH).
Lors de l'interprétation de l'art. 261bis CP, le juge devra tenir compte de la liberté d'opinion. Il ne saurait notamment apporter une trop grande restriction à la liberté d'opinion et rendre intouchable certains groupes humains, en interdisant toute critique à leur égard. Seules des critiques heurtant directement le principe de la dignité humaine et celui d'égalité pourront légitimement limiter la liberté d'opinion (AUBERT, L'article sur la discrimination raciale et la Constitution fédérale, PJA 1994 1079 spéc. 1081 s., 1083; RIKLIN, Die neue Strafbestimmung der Rassendiskriminierung (Art. 261bis StGB), Media Lex 1995 36 spéc. p. 43).
4.2. Dans son recours, le recourant prétend que son action relève du mouvement anti-wokisme, consistant à s'opposer aux revendications progressistes portées notamment par la communauté LGBTQIA+. En distribuant le sticker litigieux, il est allé toutefois bien au-delà, puisqu'il a assimilé la communauté LGBTQIA+ au régime nazi et a ainsi porté atteinte à la dignité humaine de cette communauté. La démarche du recourant ne relève dès lors nullement du débat politique ou d'un débat d'intérêt général sur une question d'intérêt public, de sorte qu'il ne saurait bénéficier de la garantie des art. 16 Cst. et 10 CEDH.
Ainsi, la restriction apportée à la liberté d'expression du recourant repose sur une base légale suffisante et poursuit un but légitime de protection de la réputation et des droits d'autrui (cf. ATF 137 IV 313 consid. 3.6). Elle demeure en outre proportionnée. Même dans un débat politique, il ne peut en effet être admis d'assimiler la communauté LGBTQIA+ au parti national-socialiste allemand.
5.
Le recourant critique la peine qui lui a été infligée et la durée du délai d'épreuve assortissant son sursis.
5.1. Il reproche au juge de première instance d'avoir retenu qu'il ne regrettait pas son acte. Il sollicite que sa peine soit réduite, pour manque complet d'intention, à trois jours-amende conformément au minimum légal prévu par l'art. 34 al. 1 CP et que le montant du jour-amende soit fixé au minimum légal de 10 fr. compte tenu de sa faible capacité contributive.
La cour cantonale n'a pas revu la quotité de la peine, au motif que le recourant n'avait pas contesté, dans sa déclaration d'appel, la peine prononcée par le premier juge, à titre indépendant, mais uniquement comme conséquence de son acquittement (cf. arrêt 6B_419/2014 du 9 janvier 2015 consid. 2.3). Le recourant devait contester ce raisonnement et faire valoir que la cour cantonale avait commis un déni de justice formel en ne traitant pas son grief en relation avec la peine. Il ne peut pas contester la peine qui lui a été infligée par le tribunal de première instance devant le Tribunal fédéral, faute d'épuisement des instances cantonales (art. 80 al. 1 LTF). Son grief est irrecevable.
5.2. Le recourant conteste la durée du délai d'épreuve assortissant son sursis qui a été arrêté à quatre ans, estimant celle-ci trop longue. Il explique qu'il n'y a aucun risque de récidive au vu de l'épreuve qu'a été pour lui toute cette procédure et qu'un délai d'épreuve de deux ans paraît suffisant.
La cour cantonale a considéré qu'un délai d'épreuve relativement long de quatre ans était nécessaire et adapté pour pallier le risque de récidive, étant donné l'absence de toute prise de conscience du recourant, qui contestait encore aujourd'hui avoir commis l'infraction reprochée et qui persistait à croire son action comme étant légitime. Le raisonnement de la cour cantonale ne prête pas le flanc à la critique. Lorsque le recourant soutient que cette procédure a été une épreuve pour lui et qu'en conséquence il n'y a plus de risque de récidive, son argumentation est appellatoire et, partant, irrecevable.
6.
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable.
Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière qui n'apparaît pas favorable.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, Cour d'appel pénal.
Lausanne, le 8 mai 2025
Au nom de la Ire Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Jacquemoud-Rossari
La Greffière : Kistler Vianin