TF 4A_322/2012

2012-2013

art. 158 CPC

Le TF rappelle que la preuve à futur peut servir d’outil destiné à évaluer les chances de succès d’un procès. Sous l’angle de l’intérêt digne de protection (art. 158 al. 1 let. b CPC), le requérant doit rendre vraisemblable, d’une part, qu’un état de fait qui lui accorde un droit existe et, d’autre part, que la preuve requise est apte à prouver l’existence de cet état de fait. L’établissement de l’intérêt digne de protection ne doit toutefois pas être soumis à des exigences trop élevées. Une requête de preuve à futur ne peut être rejetée que s’il apparaît que cet intérêt n’existe manifestement pas, ce qui sera notamment le cas lorsque le moyen de preuve requis est clairement inapproprié (c. 2.2.1).

Dans la procédure de preuve à futur selon l’article 158 al. 1 CPC, la question litigieuse (« das Prozessthema ») n’est pas encore arrêtée définitivement au stade de l’administration des preuves préalable à l’introduction du procès principal. Il appartient au requérant de fournir au tribunal les informations nécessaires au sujet de l’état de fait et de déterminer la preuve proposée (c. 2.2.2).

Le TF juge arbitraire la décision rendue par les juges cantonaux, qui avaient écarté la requête de preuve à futur au motif que d’autres circonstances que l’accident de circulation subi par le requérant pouvaient justifier le traumatisme qui faisait l’objet de l’expertise demandée. Le fait que les circonstances invoquées par l’intimé pour nier l’existence du lien de causalité entre l’accident et le traumatisme étaient litigieuses rendait, selon le tribunal cantonal, la preuve à futur sans objet : l’expertise requise ne serait de toute façon pas apte à prouver le lien de causalité entre l’un et l’autre et devrait de toute façon être complétée dans le procès au fond ; le requérant ne pouvait dès lors justifier d’aucun intérêt digne de protection. Or, pour le TF, les circonstances invoquées par l’intimé peuvent précisément faire l’objet de questions soumises à l’expert. Rejeter la requête de preuve à futur au motif qu’il y aurait trop d’incertitudes quant à l’état de fait (« (…) der massgebliche Sachverhalt sei umstritten und damit unklar ») est arbitraire, le but de cet instrument étant précisément de lever cette incertitude. L’intérêt digne de protection ressortant justement du fait que certains aspects de l’état de fait sont litigieux, il est ainsi tout à fait normal que, à ce stade de la procédure, l’état de fait ne soit pas encore entièrement établi (c. 2.5).