Art. 4, 59 lit. d, 71, 72 LPM ; 261 al. 1 lit. a CPC

L’application de l’art. 4 LPM présuppose que le véritable ayant droit à la marque bénéficie d’un droit qui prime celui du titulaire formel. L’utilisation de la marque par son détenteur formel doit en outre pouvoir être fondée sur une autorisation contractuelle de l’ayant droit, et l’enregistrement doit être intervenu pendant la durée du devoir de loyauté découlant du contrat qui lie les parties. L’application de l’art. 4 LPM est exclue lorsque la marque a été déposée avec l’accord du cocontractant (consid. III.3.1). En rendant vraisemblable, d’une part, l’usage antérieur qu’elle a fait à l’étranger de marques identiques ou très fortement similaires à celles déposées en Suisse par la requérante et, d’autre part, l’intégration de la désignation « Reico » dans sa raison de commerce depuis 1992, l’intimée a démontré, compte tenu de l’exigence de preuve limitée à la vraisemblance en procédure de mesures provisionnelles, qu’elle dispose d’un droit préférentiel sur les marques déposées en Suisse par la requérante (consid. III.3.2). Le contrat entre les parties prévoyant que la requérante est la distributrice directe et exclusive des produits de l’intimée sur le marché suisse implique nécessairement l’autorisation d’utiliser en Suisse les marques déposées à l’étranger par l’intimée. Il est ainsi vraisemblable que l’utilisation de ces marques par la requérante a été autorisée par l’intimée au moins pendant la durée du contrat, de sorte que l’exigence d’une autorisation contractuelle portant sur l’utilisation des marques controversées de l’art. 4 LPM est admise (consid. III.3.3). L’art. 4 LPM ne s’applique qu’aux marques déposées sans autorisation de leur titulaire, une telle autorisation se distinguant de la simple tolérance d’une situation. En vertu du contrat passé entre les parties, 70 % des actions de la requérante – qui était détenue à 100 % par l’intimée – ont été transférées à la direction de la requérante, désormais actionnaire majoritaire. Un tel transfert d’actions ne permet pas d’inférer un transfert des marques. Le contrat prévoit au contraire que le développement du marché suisse doit être mené en partenariat. Il est ainsi plus probable que les droits sur les marques de l’intimée ne sont pas mentionnés, car celle-ci voulait vraisemblablement se limiter à autoriser l’utilisation de ces droits pendant la durée du contrat et ne souhaitait pas les transférer à la requérante. Une autorisation d’usage de la marque apparaît en effet suffisante pour la commercialisation des produits de l’intimée. L’enregistrement des marques « REICO » et « REICO (fig.) » en Suisse par la requérante est ainsi intervenu sans le consentement de l’intimée (consid. III.3.4). Les conditions de l’art. 4 LPM sont remplies sous l’angle de la vraisemblance et la titularité de l’intimée sur les marques litigieuses confirmée. La requérante ne peut ainsi se fonder sur les marques qu’elle a déposées en Suisse pour faire valoir une violation existante ou imminente de ses droits. La requête de mesures provisionnelles est rejetée (consid. III.3.5).