ATF 148 II 1 (d)

2021-2022

Cet arrêt éclaircit plusieurs aspects relatifs à la rétrogradation d’une autorisation d’établissement (art. 62 al. 2 LEI). La possibilité pour les autorités migratoires compétentes de procéder, depuis le 1er janvier 2019, à la rétrogradation d’une autorisation d’établissement en autorisation de séjour concerne également les autorisations d’établissement délivrées sous l’ancien droit. Il est toutefois nécessaire que les faits à l’origine de la rétrogradation se soient produits après le 1er janvier 2019, et ce afin de ne pas violer le principe de non-rétroactivité. Les faits antérieurs peuvent cependant être pris en considération afin d’apprécier la nouvelle situation à la lumière de l’ancienne et de clarifier ainsi l’origine et la persistance du manque d’intégration. Finalement, le manque d’intégration menant à la rétrogradation d’une autorisation d’établissement octroyée avant le 1er janvier 2019 se doit d’être d’une importance considérable en ce que l’on doit pouvoir admettre qu’il y a un intérêt public important à la rétrogradation. Le TF précise également que, dans le cadre de la rétrogradation, l’octroi, par les autorités cantonales, de la nouvelle autorisation de séjour, n’est pas soumis à l’approbation du SEM, et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, l’acte de révocation de l’autorisation d’établissement ainsi que celui d’octroi d’une nouvelle autorisation de séjour doivent être considérés comme un tout, c’est-à-dire comme un seul acte. La délivrance de la nouvelle autorisation de séjour ne saurait donc être assimilé à l’octroi ordinaire d’une autorisation et relever de l’art. 85 al. 1 OASA (décisions soumises à approbation). Deuxièmement, si l’octroi de l’autorisation de séjour était soumis à approbation du SEM, les autorités cantonales ne pourraient vérifier de manière appropriée la proportionnalité de la rétrogradation puisqu’elles ignoreraient si la personne concernée devrait ou non quitter le pays en raison de l’absence d’approbation du SEM. Finalement, une telle manière de procéder soulèverait des problèmes de cohérence dans le cadre d’un recours auprès du TF (consid. 3.2.3). Pour finir, la Haute Cour précise que l’art. 63 al. 3 LEI ne concerne normalement pas la rétrogradation de sorte qu’il est possible de procéder à une rétrogradation en raison de la commission d’infractions pour lesquelles un juge pénal a déjà prononcé une peine ou une mesure mais a renoncé à prononcer une expulsion pénale. En outre, il n’est, à cet effet, pas nécessaire que des éléments supplémentaires (par exemple un manque d’intégration économique se traduisant par l’existence de dettes) viennent s’ajouter à la commission des infractions, puisqu’une délinquance persistante peut également être indicative d’un manque d’intégration.