(A. SA c. B. Corp., C.). Recours contre la décision rendue le 21 juin 2021 par un Tribunal arbitral CCI avec siège à Genève. Demande d’arbitrage introduite par « X. Inc./C. » ; requête de la défenderesse sollicitant la clôture de la procédure en raison, d’une part, « de la nullité et de l’irrecevabilité » de la demande du fait de l’inexistence alléguée de la demanderesse X. Inc./C., et, d’autre part, au motif que les mandataires de la demanderesse auraient agi en qualité de falsus procurator. En parallèle, la défenderesse avait présenté une demande de récusation à l’encontre d’un des arbitres, qui avait été rejetée par la Cour internationale d’arbitrage de la CCI. Dans une décision incidente (Procedural Order No. 6 on the Respondent’s Preliminary Motion), le Tribunal arbitral a confirmé la régularité de sa composition, rejeté l’instance de clôture de la procédure, décidé que le libellé de la procédure arbitrale devait être modifié en remplaçant « X. Inc./C. » par la désignation « B. Corp. (formerly X.) and C. », et réservé certaines questions relatives, entre autres, à sa compétence pour une phase ultérieure de l’arbitrage. La recourante, qui conteste la validité de la constitution du Tribunal arbitral en réitérant, devant le TF, que la procédure avait été initiée par une partie inexistante, ne tient nullement compte dans sa critique des considérations émises par les arbitres pour justifier leur décision quant à la rectification de la désignation de la demanderesse. Rappel par le TF de la jurisprudence dans laquelle il a été amené à se pencher sur des problématiques similaires, et du principe qui veut que « la désignation d’une partie qui est entachée d’une inexactitude purement formelle peut être rectifiée lorsqu’il n’existe dans l’esprit du juge et des parties aucun doute raisonnable sur son identité ». Selon le TF, la rectification était admissible dans le cas d’espèce car il était évident, même pour la recourante, que la désignation initiale de la demanderesse n’avait guère de sens. Dans ces conditions (et sous réserve des objections relatives à la qualité de parties de B. Corp. et C., qui restent à trancher dans une phase ultérieure de l’arbitrage), on ne saurait conclure qu’aucun tribunal arbitral ne pouvait être constitué ab initio (consid. 4.1 à 4.4). La recourante se plaint également de la composition irrégulière du Tribunal en raison du risque de partialité de l’arbitre dont elle avait demandé la récusation devant la Cour CCI. A cet égard, la recourante fait valoir qu’un associé de l’arbitre, œuvrant dans la même étude d’avocats, avait été, entre 2010 et 2019, consul honoraire de l’Etat Y., circonstance que l’arbitre incriminé a omis de révéler, nonobstant le fait que cet Etat est directement concerné par l’issue du litige soumis au Tribunal arbitral. Selon le TF, il convient de distinguer cette situation des cas de prévention qui peuvent survenir en raison de l’activité d’avocat déployée par un arbitre (ou par l’un de ses associés), situations dans lesquelles il existe entre les personnes concernées une relation de mandat à proprement parler. Le rôle de consul honoraire n’est pas de la même nature. La recourante ne s’exprime pas sur le fait que l’activité de consul honoraire n’est pas rémunérée, et de manière plus générale sur le fait que ladite activité n’est pas comparable à un mandat d’avocat. Elle ne s’attarde pas non plus sur le fait que l’associé de l’arbitre avait cessé ses activités de consul au moment où la procédure arbitrale a été introduite, et elle ne fournit guère de précisions quant aux intérêts spécifiques de l’Etat Y. qui seraient affectés par l’issue de l’arbitrage. Enfin, il sied de relever que la mission de consul honoraire s’exerce à titre privé, si bien qu’on ne peut pas exclure qu’elle n’était pas connue de l’arbitre incriminé. Ainsi, sans preuve du contraire (que la recourante n’apporte pas), on ne peut pas apprécier au détriment de l’arbitre le fait qu’il ait omis de mentionner cette circonstance au moment où il a accepté son mandat. Dans l’ensemble, les circonstances alléguées ne permettent pas de conclure à une prévention ou apparence de prévention de l’arbitre concerné (consid. 5.2). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler