5D_54/2014 01.07.2014
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
Arrêt du 1er juillet 2014
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
Herrmann et Bovey.
Greffier : M. Braconi.
Participants à la procédure
A.________,
recourante,
contre
Cour des poursuites et faillites du
Tribunal cantonal du canton de Vaud, route du Signal 8, 1014 Lausanne,
intimée.
Objet
indemnité à l'avocat dans une procédure de
mainlevée d'opposition,
recours constitutionnel contre l'arrêt de la Cour
des poursuites et faillites du Tribunal cantonal
du canton de Vaud du 31 mars 2014.
Faits :
A.
Le 27 juillet 2013, l'Etat de Vaud ( poursuivant ) a fait notifier à B.________ ( poursuivie ) un commandement de payer portant sur la somme de 5'639 fr. 65, sous déduction de 250 fr. (valeur au 25 mars 2013); ce montant est réclamé " en vertu de la décision d'octroi de l'assistance judiciaire OJV no AJ11.049772 " (poursuite n° xxxx de l'Office des poursuites de Morges). Cet acte a été frappé d'opposition totale.
Le 13 août 2013, le poursuivant a demandé la mainlevée définitive de l'opposition; il a produit une décision rendue le 15 novembre 2012 par la Justice de paix du district de Morges, qui arrête à 5'639 fr. 65, débours compris, sans TVA, la rémunération de Me C.________ pour les opérations qu'elle a effectuées du 7 octobre 2011 au 9 juillet 2012 en qualité d'avocate d'office de la poursuivie (I) et dit que la bénéficiaire de l'assistance judiciaire est, dans la mesure de l'art. 123 CPC, tenue au remboursement de cette indemnité, mise à la charge de l'Etat (II).
B.
Statuant le 1er octobre 2013, le Juge de paix du district de Morges a prononcé la mainlevée définitive de l'opposition (I), avec suite de frais et dépens (II-IV).
La poursuivie a recouru le 11 novembre 2013 contre cette décision. Le 13 décembre suivant, le président de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois lui a accordé l'assistance judiciaire, avec effet au jour du dépôt du recours, sous forme d'exonération de l'avance de frais et des frais judiciaires et de désignation d'un avocat d'office en la personne de Me A.________.
Par arrêt du 31 mars 2014, la cour cantonale a réformé le prononcé entrepris en ce sens que l'opposition est maintenue (II), mis les frais et dépens de première instance à la charge du poursuivant (II), mis les frais de deuxième instance à la charge de celui-ci (III), fixé à 496 fr. 80 l'indemnité d'office de Me A.________ (IV), dit que la bénéficiaire de l'assistance judiciaire est, dans la mesure de l'art. 123 CPC, tenue au remboursement de l'indemnité du conseil d'office mise à la charge de l'Etat (V) et condamné le poursuivant à verser à la poursuivie la somme de 700 fr. à titre de dépens de deuxième instance (VI).
C.
Par mémoire du 22 avril 2014, Me A.________ interjette un recours constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral; elle conclut, principalement, à ce que son indemnité soit fixée à 2'143 fr. 25, débours et TVA compris, et, subsidiairement, à ce que le ch. IV du dispositif de l'arrêt attaqué soit annulé et la cause renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle statue à nouveau sur le montant de l'indemnité.
La cour cantonale se réfère à son arrêt et s'en remet à justice.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité du recours dont il est saisi (ATF 139 III 133 consid. 1 et les arrêts cités).
1.1. La décision entreprise a pour objet la fixation de l'indemnité due à la recourante en sa qualité d'avocate d'office de la poursuivie pour la procédure de recours cantonale.
Depuis l'entrée en vigueur le 1er juin 2002 de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (LLCA; RS 935.61), les avocats sont tenus en vertu du droit fédéral d'accepter les défenses d'office et les mandats d'assistance judiciaire dans le canton au registre duquel ils sont inscrits (art. 12 let. g LLCA); leur rémunération demeure cependant du ressort des cantons (ATF 132 I 201 consid. 7.2). L'avocat d'office n'exerce pas un mandat privé, mais accomplit une tâche étatique soumise au droit public cantonal, qui lui confère une prétention (de droit public) à être rémunéré dans le cadre des normes cantonales applicables (ATF 122 I 1 consid. 3a et la jurisprudence citée). Lorsqu'elle porte - comme en l'espèce (art. 80 ss LP) - sur la rétribution de l'activité déployée par le défenseur d'office dans une affaire susceptible de recours en matière civile (art. 72 al. 2 let. a LTF; ATF 134 III 520 consid. 1.1), la décision est rendue dans une matière connexe au droit civil au sens de l'art. 72 al. 2 let. b LTF (arrêt 5D_175/2008 du 6 février 2009 consid. 1.1, publié in : Pra 2009 n° 114).
1.2. Il est constant que la valeur litigieuse n'atteint pas le seuil légal de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF; cf. sur ce point: arrêt 5D_175/2008 précité) et qu'aucune des exceptions prévue à l'art. 74 al. 2 LTF n'est réalisée; seul le recours constitutionnel subsidiaire est dès lors ouvert en l'occurrence (art. 113 ss LTF).
1.3. Pour le surplus, le recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 et 117 LTF) contre une décision finale (art. 90 et 117 LTF) rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur, même s'il n'a pas statué sur recours au sujet de l'indemnité litigieuse (art. 75 al. 1 et 114 LTF; ATF 137 III 424 consid. 2.2, avec les citations); la recourante, qui est titulaire de cette prétention, a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 115 LTF; arrêt 5D_175/2008 précité, consid. 1.2).
1.4. Comme le constate la juridiction précédente, la recourante n'a pas produit de liste des opérations. L'intéressée lui reproche cependant de ne pas l'avoir invitée, " contrairement à la pratique ", à déposer une telle liste; aussi allègue-t-elle, " conformément à l'art. 99 al. 1 LTF ", divers faits nouveaux censés documenter sa réclamation.
Ce procédé n'est pas admissible. La partie recourante ne peut pas se prévaloir en instance fédérale de faits ou de moyens de preuve qu'elle a omis d'alléguer ou de produire devant l'autorité précédente; partant, elle ne saurait se fonder sur des faits ou moyens de preuve nouveaux qu'elle était en mesure de soumettre à cette autorité et que celle-ci n'a pas pu examiner (arrêt 5A_173-174/2014 du 6 juin 2014 consid. 2.3, avec la jurisprudence citée). Outre le fait que la " pratique " évoquée par la recourante n'est nullement établie, le Tribunal fédéral a jugé que le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) n'oblige pas l'autorité cantonale à inviter le défenseur d'office à produire sa note de frais et d'honoraires (arrêt 5P.70/2000 du 6 septembre 2000 consid. 2a). Il s'ensuit que les faits nouveaux allégués dans le mémoire de recours ( p. 3) doivent être écartés du débat (art. 99 al. 1 LTF).
2.
En l'espèce, la recourante soutient que l'indemnité qui lui a été allouée est arbitrairement faible; elle affirme avoir consacré dix heures trente à l'affaire, ce qui lui donne droit à une rémunération de 1'890 fr. (au tarif horaire de 180 fr.), à laquelle s'ajoutent 94 fr. 50 pour les débours.
2.1. Les frais d'avocat relatifs à la défense de la poursuivie en instance cantonale de recours font l'objet d'un double régime: d'une part - c'est l'objet de la présente cause -, l' avocate perçoit une indemnité d'office de 496 fr. 80 au total (IV); d'autre part, la poursuivieelle-même se voit allouer 700 fr. à titre de dépens de deuxième instance (VI), somme qui correspond à l'indemnité " pour ses frais d'avocat de deuxième instance " ( arrêt attaqué, p. 6 consid. IV ).
Cette solution méconnaît l'art. 122 al. 2 CPC, en vertu duquel, lorsque le plaideur au bénéfice de l'assistance judiciaire l'emporte, le conseil juridique commis d'office est rémunéré équitablement par le canton " si les dépens ne peuvent pas être obtenus de la partie adverse ou qu'ils ne le seront vraisemblablement pas "; or, on ne saurait sérieusement mettre en doute la capacité de l'Etat de Vaud de s'acquitter des dépens, par ailleurs modestes, mis à sa charge (Bühler, in : Berner Kommentar, ZPO, 2012, n° 68 ad art. 122 CPC, avec les références). Dans une telle situation, le sort des frais et dépens obéit aux règles ordinaires posées aux art. 106 ss CPC (Tappy, in : Code de procédure civile commenté, 2011, n° 14 ad art. 122 CPC; cf. pour la procédure devant le Tribunal fédéral: arrêt 5A_388/2009 du 29 juin 2009 consid. 3.2, publié in : Praxis 2010 n° 47); cela implique, en particulier, que le défraiement du conseil de la partie assistée victorieuse doit être fixé d'après le tarif applicable aux affaires plaidées par un avocat de choix (Bühler, ibid., n° 62, avec les références; Tappy, loc. cit.). En fixant la rétribution de la recourante sur la base du tarif horaire (inférieur) applicable au défenseur d'office (180 fr.), la cour cantonale est tombée dans l'arbitraire (art. 9 Cst.; sur cette notion: ATF 139 III 334 consid. 3.2.5; 132 III 209 consid. 2.1).
2.2. Pour fixer la rétribution de l'avocat, aussi bien d'office (ATF 122 I 1 consid. 3a) que de choix (ATF 93 I 116 consid. 6b), l'autorité doit tenir compte, notamment, de la difficulté que la cause présente en fait et en droit, ainsi que du travail qu'elle a nécessité.
En l'occurrence, la juridiction précédente a estimé à " deux heures " le temps que la recourante a consacré aux " opérations nécessaires pour la conduite du procès ". Même examinée dans le respect du pouvoir d'appréciation dont jouit l'autorité de taxation, cette estimation apparaît manifestement trop basse. La recourante devait prendre connaissance du prononcé de première instance, l'analyser, effectuer les recherches juridiques nécessitées par l'argumentation qu'elle entendait développer dans son recours cantonal et, enfin, rédiger cet acte. A ces opérations, il faut ajouter les démarches accomplies pour documenter la requête d'assistance judiciaire, activité qui s'inscrit clairement dans le cadre de l'accomplissement de la tâche de l'avocat ( cf. sur ce critère: ATF 109 Ia 107 consid. 3b; pour les débours: ATF 117 Ia 22 consid. 4b).
2.3. Une décision de taxation ne viole l'art. 9 Cst. que si la rétribution globale de l'avocat est arbitraire (ATF 109 Ia 107 consid. 3d).
En l'espèce, l'arrêt attaqué est arbitraire tant dans ses prémisses que dans l'estimation du temps de travail consacré à la cause ( cf. supra, consid. 2.1 et 2.2), mais il ne l'est pas dans son résultat. A teneur des chiffres IV et VI du dispositif, les frais d'avocat de la poursuivie pour la procédure de deuxième instance ont été fixés à 1'196 fr. 80, y compris 100 fr. de débours (396.80 + 700 + 100). Aux termes de l'art. 8 du Tarif vaudois des dépens en matière civile du 23 novembre 2010 (TDC/VD; RS/VD 270.11.6), qui est applicable à la procédure de recours dans les contestations portant sur des affaires patrimoniales, le défraiement de l'avocat est compris entre 400 fr. et 1'500 fr. lorsque la valeur litigieuse est de 5'001 fr. à 10'000 fr. (3ème tiret). Le montant précité n'apparaît dès lors pas manifestement trop faible - du moins la recourante ne démontre-t-elle pas le contraire (art. 106 al. 2 LTF; cf. ATF 134 II 244 consid. 2.2 et la jurisprudence citée) -, d'autant que la valeur litigieuse se situe près de la limite inférieure de la fourchette réglementaire.
3.
En conclusion, le présent recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les motifs de l'arrêt déféré donnaient manifestement prise à la critique, en sorte qu'il se justifie de renoncer exceptionnellement à percevoir des frais de justice ( cf. Corboz, in : Commentaire de la LTF, 2e éd., 2014, n° 45 ad art. 66 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties.
Lausanne, le 1er juillet 2014
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Le Greffier :
von Werdt Braconi