5A_279/2019 30.07.2019
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_279/2019
Arrêt du 30 juillet 2019
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,
Marazzi et von Werdt.
Greffière : Mme de Poret Bortolaso.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Carole Wahlen, avocate,
recourante,
contre
Département des finances et des relations
extérieures du canton de Vaud,
intimé.
Objet
accès aux informations du registre foncier (abonnement Intercapi),
recours contre l'arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud
du 26 février 2019 (GE.2018.0075).
Faits :
A.
A.________, juriste, bénéficie depuis 1997 d'une autorisation générale renouvelée annuellement, délivrée par l'Association suisse des locataires (ci-après: ASLOCA), section vaudoise, l'autorisant " à assister, et éventuellement à représenter les locataires devant la Commission de conciliation en matière de baux à loyer et le Tribunal des baux pour toutes causes devant cette Commission et ce Tribunal ".
A.________ est affiliée depuis 1998 auprès de la Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS comme personne de condition indépendante pour son activité de juriste.
B.
Les 8 et 14 décembre 2017, de même que le 13 mars 2018, A.________ a requis l'accès à l'abonnement dit " Intercapi ", à savoir le système d'information en ligne du registre foncier, ce qui lui permettrait en particulier de procéder à la recherche d'immeubles par le nom des propriétaires.
Par décisions des 15 et 23 mars 2018, le Département des finances et des relations extérieures du canton de Vaud (ci-après: DFIRE) a rejeté cette demande.
Le 26 février 2019, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: la CDAP) a rejeté le recours formé par A.________ contre cette dernière décision.
C.
Agissant le 29 mars 2019 par les voies du recours en matière de droit public et du recours constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral, A.________ (ci-après: la recourante) conclut à la réforme de l'arrêt cantonal en ce sens que l'accès à la recherche en ligne par le nom des propriétaires auprès du registre foncier lui est accordé; subsidiairement, elle réclame l'annulation de l'arrêt entrepris et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants.
Des déterminations n'ont pas été demandées.
Considérant en droit :
1.
La décision attaquée est une décision finale (art. 90 LTF), qui concerne la tenue du registre foncier, singulièrement le refus d'un droit d'accès étendu à celui-ci. Elle est donc sujette au recours en matière civile (art. 72 al. 2 let. b ch. 2 LTF; cf. arrêt 5A_502/2014 du 2 février 2015 consid. 1 et les références; CORBOZ, in Commentaire de la LTF, 2e éd. 2014, n. 37 ad art. 72 LTF; cf. également ATF 144 III 310 consid. 1.1), étant précisé que l'intitulé erroné d'un recours ne nuit pas à son auteur, pour autant que les conditions de recevabilité du recours qui aurait dû être déposé soient réunies (notamment: ATF 136 II 489 consid 2.1). Tel est ici le cas: la décision querellée a été rendue par un tribunal supérieur statuant en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF) et la recourante, qui a agi à temps (art. 100 al. 1 LTF), a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF). En tant que la prétention litigieuse poursuit principalement un but économique, il faut admettre que le litige est de nature pécuniaire (cf. ATF 144 III 310 consid. 1.1) : la question de savoir si la valeur litigieuse de 30'000 fr. est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF) peut néanmoins demeurer indécise en tant que la recourante soulève exclusivement la violation de garanties constitutionnelles ainsi que celle de l'interdiction de l'arbitraire (9 Cst.). La recevabilité du recours en matière civile rend le recours constitutionnel subsidiaire irrecevable (art. 113 LTF).
2.
Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3; 135 III 397 consid. 1.4). Le recourant doit par conséquent critiquer les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2 précité). Le Tribunal fédéral ne connaît en outre de la violation des droits fondamentaux que si le grief a été expressément soulevé et motivé de façon claire et détaillée par le recourant, en indiquant précisément quelle disposition constitutionnelle ou légale a été violée et en démontrant, par une argumentation précise, en quoi consiste la violation ( " principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 139 I 229 consid. 2.2; 137 II 305 consid. 3.3; 135 III 232 consid. 1.2, 397 consid. 1.4 in fine).
3.
La recourante se plaint de se voir refuser un accès étendu à certaines données du registre foncier. Avant toutefois d'examiner ses griefs, il convient de brièvement présenter le système d'accès aux données du registre foncier et sa mise en oeuvre dans le canton de Vaud.
3.1. Le registre foncier a pour fonction de réaliser, en matière immobilière, le principe de publicité, selon lequel les droits réels doivent être rendus manifestes pour les tiers (STEINAUER, Les droits réels, tome I, 5e éd. 2012, n. 526). La portée de ce principe est notamment définie par l'art. 970 al. 1 CC, disposition qui règle les conditions de la consultation du registre foncier pour permettre ainsi aux tiers d'accéder à des informations concernant certains éléments du patrimoine immobilier des personnes inscrites.
3.2. Certaines données figurant au registre foncier sont librement accessibles, ce sans justifier d'un intérêt particulier. Selon l'art. 970 al. 2 CC, toute personne a ainsi accès à la désignation de l'immeuble et à son descriptif (ch. 1), au nom et à l'identité du propriétaire (ch. 2), au type de propriété et à la date d'acquisition (ch. 3). En se fondant sur l'art. 970 al. 3, le Conseil fédéral a par ailleurs autorisé la libre consultation des servitudes et des charges foncières ainsi que certaines mentions (art. 26 al. 1 de l'Ordonnance sur le registre foncier du 23 septembre 2011 [RS 211.432.1], ci-après: ORF; cf. également ATF 132 III 603 consid. 4.2; arrêt 5A_502/2014 du 2 février 2015 consid. 3.1). L'accès à ces données peut se faire sous la forme d'une demande de renseignement ou d'un extrait au bureau du registre foncier (art. 26 al. 1 i.i. ORF); il peut également être effectué en ligne et sa gestion appartient alors à la compétence des cantons (art. 949a CC; 27 al. 1 ORF).
Quel que soit le mode de consultation - traditionnelle ou en ligne - les données librement accessibles ne peuvent être obtenue qu'en relation avec un immeuble déterminé (art. 26 al. 2 ORF), ce qui exclut une consultation en série, pour connaître par exemple tous les immeubles dont une personne est propriétaire ou simplement pour satisfaire la curiosité d'une personne (STEINAUER, op. cit., n. 581a; TRAUFFER, Revision der Grundbuchverordnung per 1. April 2005, in RNRF 2006 56, p. 61). L'art. 27 al. 2 ORF le prévoit d'ailleurs expressément pour l'accès en ligne en indiquant que " les cantons garantissent que l'accès aux données ne pourra avoir lieu qu'en relation avec un immeuble déterminé et que le système d'informations sera protégé contre les appels en série ").
3.3.
3.3.1. L'accès aux autres données du registre foncier requiert en revanche la démonstration d'un intérêt légitime (art. 970 al. 1 CC). Cet intérêt peut être de droit ou de fait (économique, scientifique, personnel ou familial). Il ne suffit toutefois pas de rendre vraisemblable n'importe quel intérêt (celui d'un simple curieux, par exemple), celui-ci devant pouvoir prétendre primer sur l'intérêt opposé du propriétaire foncier concerné. La consultation du registre foncier ne doit en outre être autorisée que dans la mesure strictement nécessaire à la satisfaction de l'intérêt considéré (ATF 132 III 603 consid. 4.3.1 et les références; arrêt 5A_502/2014 du 2 février 2015 consid. 3.1).
3.3.2.
3.3.2.1. L'intérêt allégué peut être ponctuel, mais, lorsque le registre est tenu au moyen de l'informatique (art. 949a CC; 27 ss ORF), les cantons peuvent autoriser d'une manière générale la consultation du registre par certaines catégories de personnes dont la profession ou les tâches qu'elles exercent permettent de présumer qu'elles ont un intérêt digne de protection à la consultation du registre (" accès étendu en ligne "; cf. art. 949a al. 2 ch. 4 et 28 ss ORF; STEINAUER, op. cit., n. 585). Cette autorisation, octroyée sur la base de conventions particulières dont le cadre est défini par l'art. 29 ORF, permet un accès aux données du grand livre, du journal et des registres accessoires - notamment au registre des propriétaires (art. 11 ORF) - sans que ses bénéficiaires ne soient ainsi tenus de rendre leur intérêt vraisemblable. Les cantons ne sont cependant pas entièrement libres de définir les catégories d'utilisateurs bénéficiant de l'accès étendu en ligne, mais sont limités par le cadre posé par l'art. 28 ORF, disposition qui définit celles-ci précisément. En font notamment partie les avocats inscrits au registre des avocats, pour les données nécessaires à l'exercice de leur profession (art. 28 al. 1 let. c ORF), mais également les personnes habilitées à dresser des actes authentiques, les ingénieurs géomètres inscrits au registre des géomètres ainsi que certaines autorités administratives (art. 28 al. 1 let. a ORF), les banques, la Poste suisse, les caisses de pensions, les assurances et les institutions de crédit (art. 28 al. 1 let. b ORF) ou encore les titulaires de droits réels sur l'immeuble en cause (art. 28 al. 1 let. d ORF); l'accès est cependant systématiquement limité aux données nécessaires à l'activité du bénéficiaire concerné.
Il faut souligner que, dans les situations énumérées à l'art. 28 al. 1 ORF, l'accès sans contrôle se fait exclusivement par appel de données et non par le transfert d'une base de données (STEINAUER, op. cit., n. 585b; TRAUFFER, op. cit., p. 68); chaque consultation peut ainsi être enregistrée (art. 30 al. 1 et 2 ORF), ce qui permet à l'office du registre foncier de réagir en cas d'abus dans l'exercice du droit de consultation (art. 30 al. 3 ORF; également KARAU, L'art. 111m ORF et les réglementations cantonales concernant l'accès au registre foncier informatisé, in RNRF 2001 65 ss, p. 78).
3.3.2.2. L'art. 28 ORF a repris pour l'essentiel la teneur de l'art. 111m aORF, disposition qui prévoyait déjà que les cantons pouvaient accorder un accès informatisé étendu à certains utilisateurs dans la mesure nécessaire à leurs activités (ainsi: ingénieurs géomètres, officiers publics, certaines autorités et titulaires de droits réels sur l'immeuble en cause). La possibilité de concéder l'accès étendu aux banques, caisses de pensions et assurances s'agissant des données dont elles ont besoin pour accomplir leurs tâches dans le domaine hypothécaire n'a été introduite que dans la dernière version de l'aORF, adoptée le 11 mars 2005 (RO 2005 1343); la soumission de ces entités à la surveillance d'une autorité a été soulignée, cette circonstance les créditant d'une confiance plus élevée (TRAUFFER, op. cit., p. 67; FASEL, Grundbuchverordnung (GBV) vom 23. September 2011, Kommentar, 2e éd., 2013, n. 6 ad art. 28 ORF). La possibilité d'offrir un accès étendu aux avocats inscrits au registre des avocats a en revanche été introduite par l'actuelle ORF, dans le cadre de la consultation (cf. Office fédéral de la justice, 2011, Classement des réponses à l'audition, projet de révision totale de l'ordonnance sur le registre foncier, p. 41 [Berne], 42 [Genève], 44 [Fédération suisse des avocats]). Cette dernière possibilité a néanmoins fait l'objet de discussions suite à la motion 15.3319 Egloff " Réglementer plus strictement les conventions d'accès au système électronique d'informations foncières ", motion finalement retirée suite aux débats en cours concernant le projet de modification du code civil (Projet parlementaire 14.034 Code civil suisse [Enregistrement de l'état civil et registre foncier] FF 2017 7475; Message du Conseil fédéral du 16 avril 2014 FF 2014 3395). L'avant-projet de révision de l'ORF maintient finalement cette possibilité (cf. Office fédéral de la justice, Modification de l'ordonnance sur le registre foncier, accès en ligne aux données du registre foncier, rapport explicatif du 8 juin 2018, p. 3 ss).
3.3.2.3.
3.3.2.3.1. En définitive, il s'agit de retenir que le droit fédéral détermine le cadre général de l'accès étendu en ligne au registre foncier, à savoir d'abord l'autorisation que le canton doit obtenir pour tenir le registre foncier de manière informatisée (art. 949a al. 1 CC; art. 159 s. ORF), mais également les modèles et le contenu minimum des conventions à conclure avec les titulaires du droit (art. 28 et 29 ORF), de même que certaines exigences relatives à l'accès aux données, à l'enregistrement des interrogations et à la protection des données (art. 949a al. 2 ch. 5 et 6 CC; art. 30 ORF). Les cantons sont en revanche seuls compétents pour accorder, et dès lors concrétiser, cet accès étendu (FASEL, op. cit., n. 5 ad art. 29 ORF) : il leur appartient ainsi de désigner les catégories d'utilisateurs autorisés parmi celles énumérées à l'art. 28 ORF, de conclure avec eux les conventions décrites à l'art. 29 ORF, voire d'intervenir en cas de traitement abusif de données (art. 30 al. 3 ORF). Il convient à ce dernier égard de souligner que le traitement des données personnelles figurant au registre foncier n'est pas soumis à la Loi fédérale sur la protection des données (LPD; RS 235.1; art. 2 al. 2 let. d LPD), mais relève ici également de la compétence cantonale, les cantons étant tenus de fournir un concept de protection des données avec leur demande de tenir le registre foncier par voie informatique (art. 159 al. 3 let. d ORF; cf. KARAU, op. cit., p. 69).
3.3.2.3.2. Dans le canton de Vaud, le registre foncier est tenu sur support informatique (art. 1 du règlement du 19 août 2009 sur la tenue informatique du registre foncier [ci-après: RIRF; BLV 211.61.3]. Se référant à l'art. 111m aORF (actuel 28 ORF), l'art. 7 RIRF confirme que les droits d'accès en ligne à la base de données du registre foncier sont délivrés sous forme contractuelle par l'inspectorat du registre foncier (al. 1). Ces conventions d'utilisation (art. 111m al. 4 aORF [actuel 29 ORF]), qui sont conclues avec les utilisateurs, définissent pour chaque catégorie d'entre eux les données accessibles (art. 7 al. 5 RIRF). L'art. 9 RIRF précise que les données publiques (nom et identification du propriétaire, état descriptif de l'immeuble notamment) sont ouvertes au public dans un système distinct. L'interrogation n'est alors possible que par rapport à un immeuble déterminé.
Conformément à l'art. 28 al. 1 let. c ORF, le canton de Vaud a accordé un accès étendu au registre foncier aux avocats inscrits au registre des avocats s'agissant des données nécessaires à l'exercice de leur profession. Il a élargi cette faculté aux membres de l'Association des agents d'affaires brevetés, bien que ceux-ci ne soient pasexpressément désignés par cette dernière disposition, procédant ainsi à une interprétation extensive de celle-ci. Le site internet du registre foncier du canton de Vaud précise que les personnes autorisées au sens de l'article précité s'engagent à consulter uniquement les données dont elles ont besoin pour exercer leur activité professionnelle dans le strict respect des usages du barreau (avocats) ou de l'article 24 de la loi sur la profession d'agents d'affaires brevetés. Le site souligne également que la rediffusion des données est soumise à autorisation, que leur utilisation à des fins de démarchage est interdite et que le registre foncier opérera des vérifications et des comptages (art. 28 ORF), les abus étant poursuivis et dénoncés au Conseil de l'Ordre ou à la Chambre des agents d'affaires brevetés.
4.
Se prévalant de sa qualité de mandataire indépendante professionnellement qualifiée, autorisée par l'ASLOCA à assister ou représenter professionnellement les locataires devant les Commissions de conciliation et le Tribunal des baux, la recourante conteste la décision entreprise en invoquant la violation du principe de l'égalité de traitement (art. 8 Cst.) et l'arbitraire de la décision attaquée (art. 9 Cst.).
4.1. La CDAP a relevé à cet égard qu'il n'était pas contesté que la recourante disposait d'un diplôme universitaire en droit, qu'elle avait été désignée par l'ASLOCA pour assister ou représenter professionnellement les parties devant les Commissions de conciliation et le Tribunal des baux et qu'un comportement répréhensible de sa part pourrait conduire l'ASLOCA à résilier l'autorisation dont elle bénéficiait. La juridiction cantonale a néanmoins souligné que l'ASLOCA était une association et non pas une autorité judiciaire ou administrative exerçant une réelle surveillance sur la base de règles professionnelles claires, comme l'étaient la Chambre des avocats, respectivement la Chambre des agents d'affaires brevetés. Contrairement aux avocats ou aux agents d'affaires, la recourante n'était pas formellement soumise au secret professionnel, ce qui n'était pas sans incidence quant à la protection des données. Sa situation différait ainsi significativement de ces deux professions, ce qui justifiait de la traiter différemment en matière d'octroi d'un accès étendu au registre foncier. La cour cantonale a par ailleurs relevé que la recourante conservait la possibilité de requérir les extraits du registre foncier nécessaires à l'exercice de son mandat en invoquant l'intérêt spécial, concret et actuel de ses clients: ces désavantages en terme d'efficacité ne justifiaient cependant pas une extension de l'art. 28 al. 1 let. c ORF à son bénéfice.
4.2. La recourante soutient qu'il découlerait clairement de la volonté législative ainsi que de celle des instances judiciaires, que les mandataires professionnellement qualifiés disposeraient d'un pouvoir de représentation identique à celui d'un agent d'affaire breveté, voire d'un avocat dans les procédures de conciliation et de première instance en matière de bail: elle nécessitait à ce titre de pouvoir disposer du même accès au registre foncier que ceux-ci. Elle relève à cet égard l'importance de la consultation du registre des propriétaires, notamment lorsqu'un bailleur invoque son besoin propre à l'appui d'un congé donné à son locataire, et souligne le caractère essentiel de l'obtention d'informations en amont d'une procédure afin de pouvoir conseiller efficacement ses clients: à défaut, une inégalité des armes s'instaurerait entre les justiciables selon le choix de leur représentation, leur créant ainsi un préjudice irréparable. La recourante remarque ensuite que tous les bénéficiaires du droit d'accès étendu au registre foncier n'étaient pas soumis au secret professionnel ou à la surveillance d'une autorité, en sorte que ces critères n'étaient à son sens pas pertinents pour lui refuser l'accès sollicité, étant au demeurant précisé que certaines dispositions topiques de l'ORF instituaient déjà une surveillance pleine et entière de l'État et garantissaient une protection contre les accès non autorisés ou abusifs aux données du registre foncier. Elle-même était d'ailleurs soumise à une forme de surveillance de la part de l'ASLOCA, celle-ci pouvant lui refuser le renouvellement de son autorisation annuelle en cas d'éventuelle utilisation abusive de son droit d'accès; elle devait enfin se conformer aux exigences des art. 394 ss CO, obligations assimilables à celles des agents d'affaires brevetés (art. 47 ss LPAg). La recourante en conclut qu'en lui refusant l'accès sollicité, la décision querellée distinguerait de manière insoutenable et sans raison objective les mandataires agréés par l'ASLOCA des agents d'affaires brevetés, violant ainsi le principe de l'égalité de traitement.
4.3.
4.3.1. Toute personne capable d'ester en justice peut se faire représenter au procès (art. 68 al. 1 CPC). Les mandataires professionnellement qualifiés sont autorisés à représenter les parties à titre professionnel devant les juridictions spéciales en matière de contrat de bail et de contrat de travail si le droit cantonal le prévoit (art. 68 al. 2 let. d CPC).
Selon l'art. 11 de la loi cantonale du 9 novembre 2010 sur la juridiction en matière de bail (LJB; BLV 173.655), les agents d'affaires brevetés et les personnes dûment autorisées par une organisation représentative de locataires ou de bailleurs préalablement autorisée par le Tribunal cantonal peuvent assister ou représenter professionnellement les parties devant les Commissions de conciliation et le Tribunal des baux. D'après l'art. 36 al. 2 du Code de droit privé judiciaire vaudois du 12 janvier 2010 (CDPJ; BLV 211.02), les représentants des organisations représentatives de locataires ou de bailleurs, préalablement autorisées par le Tribunal cantonal, peuvent représenter les parties devant les Commissions de conciliation en matière de baux, le Tribunal des baux et pour les causes relevant de l'art. 5 ch. 30 CDPJ (expulsion de l'ancien locataire ou fermier dont le bail a été résilié faute de paiement du loyer ou du fermage).
4.3.2. L'exercice des professions d'avocats et d'agents d'affaires brevetés est réglé par des lois spécifiques, à savoir la loi fédérale du 23 juin 2000 sur la libre circulation des avocats (LLCA; RS 935.61) et la loi cantonale du 9 juin 2015 sur la profession d'avocat (LPAv; BLV 177.11), respectivement la loi cantonale du 20 mai 1957 sur la profession d'agent d'affaires breveté (LPAg; BLV 179.11). Tant l'avocat que l'agent d'affaires breveté doivent avoir suivi une formation spécifique et obtenu un brevet, délivré suite à la réussite d'examens auxquels procède une commission d'experts (art. 7 LLCA; art. 25, 32 et 33 LPAv; art. 15 et 19 LPAg). L'exercice de la profession est subordonné à l'inscription à un registre (art. 5 et 6 LLCA; art. 37 LPAv; art. 12, 22 et 26 LPAg), qui relève de la compétence d'une autorité nommée par le Tribunal cantonal, à savoir la Chambre des avocats, respectivement la Chambre des agents d'affaires brevetés (art. 5a et 21 let. d du règlement du 13 novembre 2007 d'administration de l'ordre judiciaire [RAOJ; BLV 173.01.3]). Ces deux chambres exercent par ailleurs la surveillance de ces deux professions (art. 14 LLCA; art. 11 LPAv; art. 55 LPAg). Les agents d'affaires brevetés sont encore assermentés par le Tribunal cantonal (art. 24 LPAg) tandis que les avocats le sont à leur entrée en stage (art. 24 LPAv). Enfin, tant les avocats que les agents d'affaires brevetés sont soumis à certaines règles professionnelles (art. 12 LLCA; art. 47 ss LPAg), notamment à celle du secret professionnel (art. 13 LLCA; art. 48 LPAg).
La notion de mandataire professionnellement qualifié implique certes une certaine spécialisation dans les domaines visés par l'art. 68 al. 2 let. d CPC, en sorte qu'un juriste généraliste, même titulaire du brevet d'avocat, ne devrait pas être reconnu comme tel (BOHNET/MARTENET, Droit de la profession d'avocat, 2009, n. 959); il n'empêche qu'il n'est pas soumis aux exigences susmentionnées mais uniquement aux dispositions du code des obligations relatives au contrat de mandat, à savoir les art. 394 ss CO. En adoptant l'art. 68 al. 2 let. d CPC, le législateur a en réalité cherché à maintenir certaines spécificités cantonales (ATF 141 II 280 consid. 6.5 et 6.6), laissant ainsi la possibilité aux cantons d'autoriser les " mandataires professionnellement qualifiés issus des partenaires sociaux " à représenter les parties devant les juridictions spéciales en matière de contrat de bail et de contrat de travail " par respect de la nature et de l'identité de ce type de juridiction paritaire " (BOHNET/MARTENET, op. cit., n. 957 avec la référence aux débats parlementaires).
4.4. L'intérêt pratique que conférerait à la recourante l'accès étendu en ligne au registre foncier dans l'exercice de son activité professionnelle est ici indéniable. Sans se déterminer sur la compatibilité avec l'art. 28 al. 1 let. c ORF de l'élargissement de cet accès aux agents d'affaires brevetés vaudois, il faut néanmoins admettre avec la cour cantonale que c'est en vain que la recourante dénonce l'inégalité de traitement dont elle ferait l'objet, au regard des considérations qui viennent d'être développées et singulièrement du cadre législatif actuel.
Ainsi que l'a parfaitement relevé la CDAP, s'il n'est certes pas contesté que la recourante pourrait effectivement être sanctionnée par l'ASLOCA en cas de comportement répréhensible, celle-ci n'en demeure pas moins une association de droit privé: elle ne saurait ainsi être assimilée à une autorité judiciaire ou administrative assurant la surveillance disciplinaire du respect de règles professionnelles strictement définies auxquelles la recourante, en qualité de mandataire professionnellement qualifiée, n'est d'ailleurs pas assujettie. Or, il est à ce dernier égard indiscutable que la soumission à une autorité de surveillance constitue un gage de fiabilité particulier: ce critère a d'ailleurs été décisif afin d'octroyer l'accès étendu aux banques, assurances et caisses de pensions (supra consid. 3.3.2.2); selon les indications du DFIRE à la recourante, c'est ce critère qui a lui aussi été déterminant pour étendre l'accès sollicité aux agents d'affaires brevetés; il y est également fait expressément référence sur le site internet du registre foncier du canton du Vaud. L'on relèvera d'ailleurs que, contrairement à ce que soutient la recourante, les autres titulaires de l'accès étendu aux données concernant des tiers (art. 28 al. 1 let. a et b ORF) sont eux aussi assujettis à une autorité de surveillance: c'est le cas bien évidemment des autorités administratives, mais aussi, pour reprendre l'exemple cité par la recourante, des ingénieurs géomètres inscrits au registre des géomètres. Ceux-ci sont en effet soumis à des obligations professionnelles définies par l'Ordonnance concernant les ingénieurs géomètres (RS 211.432.261; cf. art. 22 ss), notamment au secret professionnel (art. 22 al. 1 let. h: " obligation de garder le silence sur toutes les informations qui leur ont été confiées ou qu'ils ont pu recueillir en exerçant leur profession "), dont la violation est sanctionnée par une autorité de surveillance, soit la Commission des géomètres (art. 25 ss de l'Ordonnance concernant les ingénieurs géomètres). A cela s'ajoute que l'accès étendu au registre foncier en ligne des seuls avocats a lui-même fait l'objet de contestations, puis de discussions récentes, lesquelles ont finalement conduit à un maintien de la situation actuelle, sans qu'une possibilité d'extension n'ait été retenue (supra consid. 4.1.2.3).
Il s'agit enfin de relever que la recourante ne peut se référer à l'égalité des armes entre les justiciables et au préjudice irréparable que ceux-ci subiraient du fait de la décision querellée pour fonder son propre droit à l'accès qu'elle sollicite.
5.
La recourante prétend encore que la décision attaquée entraverait sa liberté économique (art. 27 Cst.).
L'art. 27 Cst. garantit la liberté économique (al. 1), en particulier le droit individuel à celle-ci, à savoir le libre choix d'une profession, le libre accès à une activité lucrative privée et son libre exercice (al. 2). La dimension institutionnelle ou systémique de la liberté économique est quant à elle protégée par l'art. 94 Cst. qui prévoit que la Confédération et les cantons doivent respecter cette garantie constitutionnelle (ATF 145 I 183 et les références). La liberté économique englobe aussi le principe de l'égalité de traitement entre personnes appartenant à la même branche économique, principe selon lequel les mesures étatiques qui ne sont pas neutres sur le plan de la concurrence entre les concurrents directs sont prohibées (ATF 145 I 183 consid. 4.1.1). C'est en réalité cet aspect précis que soulève la recourante en invoquant la garantie de sa liberté économique: soulignant être en concurrence directe avec l'avocat ou l'agent d'affaire breveté, elle affirme en effet être placée dans une situation moins attractive que ceux-ci dès lors qu'elle ne disposerait pas du même accès au registre foncier et des mêmes informations nécessaires à l'exercice de son activité professionnelle. Cette critique est toutefois scellée par le considérant qui précède, en sorte qu'elle est sans objet.
6.
La même conclusion s'impose quant au grief de violation de l'art. 36 Cst. dès lors qu'aucune violation des garanties constitutionnelles invoquées par la recourante n'a été retenue.
7.
En définitive, le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable. Le recours, traité comme un recours en matière civile, est rejeté aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). Aucune indemnité de dépens n'est allouée à l'intimé (art. 68 al. 3 LTF), celui-ci n'ayant de surcroît pas été invité à se déterminer.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable.
2.
Le recours, traité comme un recours en matière civile, est rejeté.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge de la recourante.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud et à l'Office fédéral de la Justice.
Lausanne, le 30 juillet 2019
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
La Greffière : de Poret Bortolaso