6B_1436/2022 19.10.2023
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B_1436/2022
Arrêt du 19 octobre 2023
Ire Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux
Denys, Juge présidant, Muschietti et van de Graaf
Greffier : M. Barraz.
Participants à la procédure
1. A.________,
2. B.________,
3. C.________,
4. D.________,
5. E.________,
6. F.________,
7. G.________,
8. H.H.________,
9. I.H.________,
10. J.________,
tous représentés par Me Jean-Cédric Michel, avocat,
recourants,
contre
Ministère public central du canton de Vaud,
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens,
intimé.
Objet
Droit d'être entendu; principe de l'unité de la procédure; présomption d'innocence,
recours contre le jugement de la Cour
d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois,
du 14 septembre 2022 (n° 281 PE19.025148-JRC/LCB).
Faits :
A.
Par jugement du 11 février 2022, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne a reconnu les recourants coupables d'entrave aux services d'intérêt général, d'empêchement d'accomplir un acte officiel, de violation simple des règles de la circulation routière et de contravention à la loi vaudoise du 19 mai 2009 sur les contraventions (RSVD 312.11; LContr) et a prononcé les peines suivantes:
- A.________: une peine pécuniaire de 15 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à trois jours;
- B.________: une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à trois jours;
- C.________: une peine pécuniaire de 15 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à trois jours;
- D.________: une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant quatre ans, ainsi qu'une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à trois jours;
- E.________: une peine pécuniaire de 15 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à trois jours;
- F.________: une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à trois jours;
- G.________: une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à trois jours;
- H.H.________: une peine pécuniaire de 15 jours-amende à 200 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 1'000 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à dix jours;
- I.H.________: une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 200 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 1'000 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à dix jours;
- J.________: une peine pécuniaire de 15 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif étant fixée à trois jours.
B.
Par jugement du 14 septembre 2022, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté les appels de A.________, B.________, C.________, D.________, E.________, F.________, G.________, H.H.________, I.H.________ et J.________. Elle a confirmé le jugement précédent sur la base des faits suivants.
B.a.
B.a.a. Né en 1998, A.________ exerce le métier de technicien du spectacle et perçoit un revenu de l'ordre de 19'000 fr. par année. Sa part du loyer s'élève à 715 fr. par mois et sa prime d'assurance-maladie à 320 fr. par mois. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.a.b. Née en 1993, B.________ exerce le métier de comédienne. Elle a traversé une période de chômage jusqu'en août 2022, durant laquelle elle a touché mensuellement 80 % de son gain assuré de 2'883 francs. Elle occupe par ailleurs la fonction de conseillère communale. Sa part du loyer s'élève à 600 fr. par mois et sa prime d'assurance-maladie à 280 fr. par mois. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.a.c. Née en 1990, C.________ exerce le métier de biologiste et perçoit un salaire mensuel net de 3'125 francs. Sa part du loyer se monte à 1'200 fr. par mois et sa prime d'assurance-maladie à 300 fr. par mois, subsides compris. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.a.d. Née en 1978, D.________ travaille en qualité d'employée de commerce et perçoit un salaire mensuel net de 2'600 francs. Sa part du loyer se monte à 820 fr. par mois et sa prime d'assurance-maladie à 300 fr. par mois. L'extrait de son casier judiciaire fait état d'une condamnation en 2014 pour violation de domicile à une peine pécuniaire avec sursis et à une amende, ainsi que d'une condamnation en 2016 pour contrainte à une peine pécuniaire avec sursis.
B.a.e. Née en 2000, E.________ poursuit ses études en sciences sociales afin d'obtenir un master. Elle perçoit une contribution d'entretien de ses parents d'un montant de 1'960 fr. par mois. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.a.f. Né en 1999, F.________ suit des études en relations internationales. Il vit chez ses parents, qui pourvoient à son entretien. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.a.g. Née en 1996, G.________ travaille dans le domaine de l'énergie. Elle occupe en outre la fonction de conseillère communale. Elle vit chez ses parents, qui pourvoient à son entretien. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.a.h. Né en 1956, H.H.________ a travaillé comme médecin pour un salaire mensuel net de 12'000 francs. Il est retraité depuis août 2022, sa rente s'élevant à 60 % de son dernier salaire. Avec son épouse, I.H.________, ils sont propriétaires de leur logement. Leurs charges hypothécaires mensuelles sont de 3'500 francs. Il paie 1'000 fr. par mois de primes d'assurance-maladie pour l'ensemble de la famille, deux enfants étant encore à sa charge. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.a.i. Née en 1971, I.H.________ exerce le métier de médecin et a été nommée professeure ordinaire de la faculté de médecine. Ses revenus s'élèvent à un peu plus de 12'500 fr. par mois. Elle occupe en outre la fonction de conseillère communale. Mariée à H.H.________, ses charges mensuelles correspondent à celles de son époux. Elle dit s'acquitter en sus d'un montant de 2'500 fr. par mois pour un traitement lié à son éco-anxieté. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.a.j. Née en 1984, J.________ exerce le métier d'assistante sociale. Elle est actuellement à la recherche d'un emploi à temps partiel. Mère d'une petite fille, elle habite avec le père de celle-ci et vit pour le surplus de ses économies. L'extrait de son casier judiciaire ne comporte aucune inscription.
B.b.
B.b.a. À U.________, rue W.________, le 14 décembre 2019, entre 10h05 et 15h55, sans avoir obtenu d'autorisation préalable pour se réunir en ce lieu, plusieurs manifestants, au nombre desquels figuraient A.________, H.H.________, J.________, E.________, C.________, G.________, D.________, B.________, F.________ et I.H.________, se sont assis sur les voies de circulation de l'artère précitée afin de bloquer le trafic sur cet axe. Ils ont alors scandé des slogans, certains manifestants utilisant des mégaphones. Le trafic des véhicules, notamment des véhicules d'urgence et des bus, a dû être dévié sur d'autres artères attenantes. Les forces de l'ordre ont dans un premier temps demandé aux manifestants de quitter les lieux de leur propre chef. Cette requête ayant été ignorée, les agents de police ont dû évacuer par la force les manifestants un par un, y compris A.________, H.H.________, J.________, E.________, C.________, G.________, D.________, B.________, F.________ et I.H.________, qui leur ont opposé une résistance physique en s'agrippant les uns aux autres.
B.b.b. Selon le rapport de police du 16 décembre 2019, des militants du mouvement Extinction Rebellion recrutaient, depuis plusieurs semaines, des personnes sur les réseaux sociaux afin de mener une action de blocage le 14 décembre 2019. Celle-ci devait se focaliser sur la place V.________, à U.________, vers 10h00, durant les festivités du marché de Noël. Aucune demande d'autorisation n'a été déposée auprès des autorités, même si les organisateurs ont adressé des courriers aux Transports publics de la région lausannoise (ci-après: TL) pour annoncer leur action et poser leurs exigences.
Le 14 décembre 2019, à 10h05, la rue W.________ a été bloquée à la hauteur de l'immeuble n° 4 par une cinquantaine de personnes, au moyen de blocs en béton et de palettes en bois. L'artère a ensuite été fermée par les autorités et des déviations mises en place. À 10h10, une vingtaine de personnes se sont couchées sur le sol à l'angle de la place V.________ et de la rue X.________, gênant ainsi le trafic des piétons. Vers 10h25, ces personnes se sont déplacées par la rue Y.________ afin de rejoindre le blocage de la rue W.________. Un autre regroupement d'une cinquantaine de personnes a eu lieu une dizaine de minutes devant l'église V.________, avant de rejoindre leurs camarades qui bloquaient la rue W.________. À 13h15, des injonctions de quitter les lieux ont été adressées par la police aux manifestants bloquant la rue W.________. Il avait en outre été décidé que les interpellations de ceux qui ne respecteraient pas cette injonction débuteraient un quart d'heure plus tard.
À 13h32, une ambulance, partie de la rue Z.________, a été appelée pour un malaise cardiaque survenu dans l'établissement "K.________", situé à la hauteur du blocage. Pour accéder à ce lieu, l'itinéraire le plus court aurait été de descendre la rue U1.________, puis la rue W.________. Toutefois, en raison du blocage de la rue W.________, l'ambulance a été contrainte d'emprunter la place V.________, puis la rue Y.________. Celle-ci étant fermée en raison de la présence de manifestants à son débouché sur la rue W.________, l'ambulance a dû pénétrer dans le périmètre de sécurité établi par les forces de l'ordre et passer malgré la rubalise délimitant ce secteur, ce qui a rallongé le délai d'intervention. L'acheminement de la victime au CHUV a en outre nécessité qu'un couloir soit organisé par la police sur la rue W.________, direction rue U1.________, parmi les manifestants et la foule, qui s'étaient agglutinés à cet endroit. Dès 13h35, la police a déployé un dispositif afin de procéder aux premières interpellations. À 15h55, les derniers manifestants ont été évacués de la chaussée sur la rue W.________. En définitive, 90 personnes ont été transférées à l'hôtel de police. Elles ont été libérées progressivement au terme des procédures et la dernière d'entre elles a quitté les locaux de la police à 18h00.
Le trafic des TL a été interrompu dès 10h55 pour toutes les lignes transitant par la place V.________, ce qui a engendré un retard de 30 à 40 minutes. Les effets de cette perturbation se sont estompés dès 16h00. Dans une même mesure, ces contraintes se sont répétées sur la rue W.________ dès sa fermeture à 10h05 et jusqu'à 16h18, heure à laquelle le trafic a été rétabli.
C.
A.________, B.________, C.________, D.________, E.________, F.________, G.________, H.H.________, I.H.________ et J.________, tous représentés par Me Jean-Cédric Michel, forment un recours commun en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 14 septembre 2022. Ils concluent principalement, avec suite de frais et dépens, à son annulation, à ce que soient versés au dossier de la cause les dossiers de la police et des autorités u.________, à la rectification et au complément de l'état de fait et à ce qu'ils soient libérés des chefs de prévention d'entrave aux services d'intérêt général, d'empêchement d'accomplir un acte officiel, de violation simple des règles de la circulation routière et de contravention à la LContr. Subsidiairement, toujours avec suite de frais et dépens, ils concluent à l'annulation de ce jugement et au renvoi de la cause à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Considérant en droit :
1.
En plusieurs points, les recourants font état de leur avis personnel quant à l'implication générale des autorités face au réchauffement climatique et quant au rôle que la justice suisse devrait assumer dans ce contexte. Ils invoquent pour ce faire différents éléments factuels et font plusieurs fois référence au " choix " qu'il appartiendrait à la justice suisse de faire (cf. notamment mémoire de recours, ch. I et III.6).
Ce faisant, les recourants font état d'éléments factuels qui ne ressortent pas du jugement attaqué, sans simultanément invoquer et établir que leur omission serait arbitraire. Une telle démarche, appellatoire, est irrecevable (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2). De surcroît, il est relevé que le recours en matière pénale au Tribunal fédéral n'a pas pour vocation d'être érigé en tribune politique. Au contraire, il ne permet de faire valoir qu'une violation de règles de droit (art. 95, 96 et 98 LTF), voire exceptionnellement de critiquer l'appréciation des preuves et l'établissement des faits qui en découlent (art. 97 LTF). Il n'appartient pas au Tribunal fédéral d'opérer les modifications législatives que les recourants appellent de leurs voeux ou de se prononcer sur le bien-fondé de celles-ci.
2.
Invoquant une violation de leur droit d'être entendu, les recourants reprochent à la cour cantonale d'avoir rejeté leur réquisition de preuve tendant à l'apport des dossiers de police et de la municipalité, selon eux pourtant susceptibles d'établir que les autorités en question avaient connaissance de la manifestation et du lieu où elle se tiendrait, mais encore de ne pas avoir motivé ce rejet.
2.1.
2.1.1. Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment celui de produire ou de faire administrer des preuves, à condition qu'elles soient pertinentes et de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1; 143 V 71 consid. 4.1). Il n'empêche pas le juge de mettre un terme à l'instruction, lorsque les preuves administrées lui ont permis de se forger une conviction et que, procédant de manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude qu'elles ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion. Le refus d'instruire ne viole ainsi le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 144 II 427 consid. 3.1.3; 141 I 60 consid. 3.3; 136 I 229 consid. 5.3).
2.1.2. En principe, la procédure de recours se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance (art. 389 al. 1 CPP). L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. Ainsi, la juridiction de recours administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours. Le droit d'être entendu, consacré par l'art. 107 CPP, garantit aux parties le droit de déposer des propositions relatives aux moyens de preuves (al. 1 let. e). Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 Cst. en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêts 6B_1204/2022 du 18 août 2023 consid. 1.1.2; 6B_1389/2022 du 14 mars 2023 consid. 2.1).
2.1.3. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les art. 29 al. 2 Cst. et 3 al. 2 let. c CPP (cf. aussi art. 6 par. 1 CEDH) implique notamment, pour l'autorité, l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 142 I 135 consid. 2.1). Il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 139 IV 179 consid. 2.2). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1).
2.2. Il n'est pas contesté que les recourants ont requis l'apport des documents susmentionnés. Pour cause, la cour cantonale a rejeté cette réquisition par ordonnance du 11 août 2022, indiquant uniquement " les conditions de l'art. 389 CPP n'étant pas remplies ", puis à nouveau lors de l'audience du 14 septembre 2022, indiquant cette fois " pour les motifs qui seront exposés dans le jugement à intervenir " (jugement attaqué, p. 3). Or, le jugement attaqué ne contient aucune explication circonstanciée, alors qu'il ne peut d'emblée être exclu qu'il s'agisse d'une question décisive pour l'issue du litige. Il découle de cette omission une violation du droit d'être entendus des recourants, tant il est impossible pour le Tribunal fédéral d'exercer son contrôle, à défaut pour la cour cantonale d'avoir explicité, même brièvement, pourquoi la réquisition des recourants devait être rejetée. Dans cette mesure, le jugement attaqué doit être annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision. Il incombera à celle-ci de livrer une motivation circonstanciée.
2.3. Par soucis d'économie de procédure, il convient d'aborder les autres griefs de nature formelle soulevés par les recourants.
3.
Invoquant une violation des art. 29 et 30 CPP, de même qu'une violation de la présomption d'innocence garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Ct. et 6 par. 2 CEDH, les recourants reprochent à la cour cantonale de ne pas avoir joint la cause de tous les prévenus ayant participé à la manifestation du 14 décembre 2019.
3.1.
3.1.1. Selon l'art. 29 al. 1 CPP, les infractions sont poursuivies et jugées conjointement lorsqu'un prévenu a commis plusieurs infractions (let. a) ou lorsqu'il y a plusieurs coauteurs ou participation (let. b). Cette disposition consacre le principe de l'unité de la procédure pénale. Ce principe tend à éviter les jugements contradictoires, que cela soit au niveau de la constatation de l'état de faits, de l'appréciation juridique ou de la fixation de la peine. Il garantit également le respect du principe de l'égalité de traitement (art. 8 Cst. et 3 al. 2 let. c CPP) et sert l'économie de la procédure (ATF 138 IV 214 consid. 3.2; 138 IV 29 consid. 3.2; arrêts 6B_655/2022 du 31 août 2022 consid. 1.1; 1B_121/2021 du 10 novembre 2021 consid. 4.1; 1B_524/2020 du 28 décembre 2020 consid. 2.3, non publié in ATF 147 IV 188). Le Tribunal fédéral a relevé le caractère problématique, du point de vue du droit à un procès équitable garanti aux art. 29 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH, de la conduite de procédures séparées ou de la disjonction de causes en cas d'infractions commises par plusieurs auteurs ou participants, eu égard au risque de voir l'un des intéressés rejeter la faute sur les autres (ATF 134 IV 328 consid. 3.3; 116 Ia 305 consid. 4b; arrêt 1B_116/2020 du 20 mai 2020 consid. 1.2).
3.1.2. Si des raisons objectives le justifient, le ministère public et les tribunaux peuvent ordonner la jonction ou la disjonction de procédures pénales (art. 30 CPP). La disjonction de procédures doit rester l'exception (ATF 144 IV 97 consid. 3.3; 138 IV 214 consid. 3.2). Elle doit avant tout servir à garantir la rapidité de la procédure et à éviter un retard inutile (ATF 138 IV 214 consid. 3.2; arrêts 6B_655/2022 précité consid. 1.1; 1B_121/2021 précité consid. 4.1; 1B_203/2021 du 19 juillet 2021 consid. 2.1). Constituent notamment des motifs objectifs justifiant la disjonction de causes un nombre élevé de co-prévenus rendant la conduite d'une procédure unique trop difficile, une incapacité de comparaître de longue durée d'un des co-prévenus, ou l'imminence de la prescription (ATF 138 IV 214 consid. 3.2; arrêts 6B_655/2022 précité consid. 1.1; 6B_23/2021 du 20 juillet 2021 consid. 3.3; STEPHAN SCHLEGEL, in DONATSCH/LIEBER/ SUMMERS/WOHLERS [édit.], SK-Kommentar zur Schweizerischen Straf-prozessordnung [StPO], 3e éd. 2020, vol. I, Art. 1-196 StPO, n° 4 ad art. 30 CPP; DAVID BOUVERAT, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 4 ad art. 30 CPP). En revanche, la mise en oeuvre d'une procédure simplifiée (cf. art. 358 ss CPP) à l'égard d'un des co-prévenus (arrêt 1B_506/2020 du 5 octobre 2020 consid. 2) ou des raisons d'organisation des autorités de poursuite pénale - notamment quant à une compétence spéciale des autorités de poursuite - ne constituent en soi pas des motifs de disjonction (ATF 138 IV 214 consid. 3.2; arrêt 6B_23/2021 précité consid. 3.3 et les références citées).
3.1.3. Aux termes de l'art. 10 al. 1 CPP, toute personne est présumée innocente tant qu'elle n'est pas condamnée par un jugement entré en force. Selon l'art. 6 par. 2 CEDH, toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.
La CourEDH a jugé que, dans les procédures parallèles, les tribunaux étaient tenus de s'abstenir d'émettre des propos susceptibles d'avoir des conséquences préjudiciables sur le procès en cours, quand bien même ils ne s'imposaient pas au requérant. À cet égard, si la nature des charges rendait inévitable l'établissement de l'implication d'un tiers au cours d'une instance et si la conclusion avait des conséquences sur l'appréciation de la responsabilité juridique des tiers jugés séparément, il y avait de lourds obstacles à la disjonction des instances. Toute décision tendant à l'examen, dans le cadre de procédures pénales séparées d'affaires ayant des liens factuels aussi étroits, devait reposer sur une évaluation de tous les intérêts concurrents en jeu, et le coaccusé devait avoir la possibilité de s'opposer à cet examen séparé (arrêt de la CourEDH Navalnyy et Ofitserov c. Russie du 23 février 2016 [requêtes nos 46632/13 et 28671/14], § 104).
3.2. La cour cantonale a tout d'abord jugé que la requête de jonction déposée par les recourants n'était pas motivée et qu'elle était imprécise, dans la mesure où elle n'indiquait ni l'identité des autres co-prévenus ni les causes devant faire l'objet de la jonction. Ainsi, la cour cantonale a estimé qu'il était impossible de comprendre si, par " manifestation du 14 décembre 2019", il fallait uniquement entendre celle s'étant déroulée à la rue W.________, ou également celle du même jour de la place V.________. Elle a également relevé que le nombre de participants à ces manifestations était inconnu, le rapport de police du 6 décembre 2019 faisant quant à lui état de 90 interpellations.
Au-delà de ces aspects formels et factuels, la cour cantonale a jugé que la jonction en une seule procédure de la cause d'une centaine de manifestants était incompatible avec le principe de célérité consacré à l'art. 5 al. 1 CPP et contrevenait au principe d'économie de la procédure. Elle a notamment relevé que " la tenue et le déroulement d'un procès réunissant une centaine de personnes seraient indéniablement compromis pour des raisons évidentes d'organisation ".
Finalement, la cour cantonale a considéré qu'il n'existait aucun risque d'aboutir à des jugements contradictoires, dans la mesure où aucun des intéressés n'était susceptible de rejeter la faute sur les autres.
3.3. De manière générale, il convient de se rallier aux considérations claires et détaillées de la cour cantonale (art. 109 al. 3 LTF; cf. supra consid. 3.2), tant elles sont justifiées. En particulier, en référence à l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_655/2022 précité consid. 1.2, lequel traite la cause d'un autre des manifestants ayant participé aux événements du 14 décembre 2019, il est rappelé que le nombre élevé de co-prévenus rendant la conduite d'une procédure unique trop difficile constitue un motif objectif justifiant la disjonction de causes, en particulier lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, à tout le moins une centaine de personnes sont concernées. On ne saurait suivre les recourants, qui se contentent de dire que la praticabilité d'une audience n'est pas un critère déterminant, ou encore qu'une audience groupée pour tous les participants à une même manifestation était assurément possible. Au contraire, il est patent que la tenue et le déroulement d'un procès pénal avec un si grand nombre de prévenus auraient impliqué des difficultés pratiques insurmontables, quand bien même les autorités concernées auraient fourni des efforts dépassant ce qui peut raisonnablement être attendu d'elles. Il convient de garder à l'esprit le caractère tout à fait exceptionnel de l'ampleur des répercussions pénales de la manifestation précitée au moment d'examiner le respect des art. 29 et 30 CPP. En cela déjà, les autorités précédentes étaient légitimées à refuser la requête de jonction des causes concernées.
3.4. Les recourants invoquent également, sans pour autant étayer leurs propos, qu'il aurait résulté de la jonction des causes un " meilleur respect du principe de célérité ". Au contraire, rien ne permet d'affirmer que la tenue d'un seul procès pénal réunissant la cause d'une centaine de prévenus aurait permis une plus grande rapidité dans le rendu de la justice. Au contraire, il semble que l'organisation d'un tel procès et la réunion d'une centaine de co-prévenus et de leurs avocats au même moment et au même endroit - pour autant que possible - aurait à tout le moins nécessité autant de temps que la tenue de plusieurs procès distincts comme ce fut le cas en l'espèce. Il convient en outre de relever que les recourants ne se plaignent pas d'une violation du principe de célérité, ce qui fait perdre toute portée à leur grief, lequel doit par conséquent être rejeté.
3.5. Les recourants font valoir que la disjonction des causes a non seulement impliqué le risque de jugements contradictoires, mais que celui-ci s'est matérialisé. Sans pour autant démontrer la véracité de cet argumentaire, ils indiquent notamment que seuls certains des participants à la manifestation du 14 décembre 2019 ont été condamnés pour contravention à la LContr, que les peines infligées ont varié du simple au double pour des faits et situations personnelles pourtant identiques ou similaires, mais encore qu'un concours entre les art. 90 al. 1 LCR et 239 CP n'a pas été retenu dans tous les cas.
Dans la mesure où il s'agit d'une question de fait qui dépasse largement ceux établis par la cour cantonale, lesquels lient pourtant le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), il n'est pas du ressort de l'autorité de céans de déterminer si chacune des causes résultant de la manifestation du 14 décembre 2019 est factuellement identique aux autres, ce qui n'est assurément pas le cas, ne serait-ce qu'au regard de la situation personnelle des prévenus. En cela déjà, il est difficile d'admettre la matérialité des supposées contradictions entre les jugements cantonaux, à défaut pour les recourants d'en apporter la preuve. Même en imaginant que le risque de jugements contradictoires se serait bien matérialisé, il convient de relever que seules des questions de droit seraient alors l'objet de ces hypothétiques contradictions. Or, le Tribunal fédéral peut procéder librement à l'analyse juridique des faits retenus (art. 106 al. 1 LTF), dans les limites des conclusions prises (art. 107 al. 1 LTF) et ainsi, y remédier. De ce fait, la solution retenue par les autorités précédentes apparaît d'autant moins problématique.
3.6. Finalement, les recourants soutiennent qu'il découle du refus de joindre la cause de toutes les personnes poursuivies suite à la manifestation du 14 décembre 2019 une violation de la présomption d'innocence. Selon ces derniers, dès la prononciation d'un premier jugement de condamnation contre l'un des manifestants, les autorités précédentes " n'allaient plus, qu'il s'agisse du ou des mêmes magistrats ou non, modifier leur position pour les prévenus suivants. Cela nonobstant que les argumentations juridiques présentées allaient être multiples et différentes ".
En réalité, le seul fait de faire référence à une manifestation ne permet pas de retenir qu'un verdict de culpabilité prononcé à l'encontre de l'un ou de l'autre des manifestants préjugerait du sort des autres participants. Pour cause, les manifestants ne sont pas condamnés pour la commission d'une infraction commune dont le déroulement aurait été contesté, mais pour avoir adopté un comportement individuel différent. Ainsi, le comportement reproché aux différents manifestants pourrait par hypothèse consister en une entrave à la circulation publique, notamment en s'asseyant sur les voies du trafic automobile et des bus, l'injure d'un agent public ou encore la résistance physique aux agents publics qui tentaient de disperser la manifestation. Chaque cas doit être appréhendé individuellement. Au demeurant, les recourants ne démontrent pas que des prononcés - qui auraient déjà été rendus - mentionneraient leur identité, comporteraient des références personnelles les concernant ou feraient état de leur comportement individuel. Le simple fait qu'un comportement individuel semblable soit jugé dans une autre procédure n'implique pas nécessairement une violation de la présomption d'innocence et ainsi, ne saurait commander de joindre l'ensemble des causes concernant chaque manifestation (en ce sens, v. l'arrêt 6B_655/2022 précité consid. 1.2; v. également l'arrêt de la CourEDH Bauras c. Lituanie du 31 octobre 2017, § 52 à 56, dans le cadre duquel aucune violation de la présomption d'innocence n'a été constatée, alors que les deux co-prévenus, jugés séparément, étaient tous deux accusés d'un double meurtre, en qualité d'auteur principal, respectivement d'instigateur, et que l'établissement des faits dans la cause du premier était directement relevant pour la cause du second [§53]. La CourEDH a jugé une telle situation conforme à l'art. 6 par. 2 CEDH tant que l'autorité pénale, même si elle devait se prononcer sur l'implication factuelle du second co-prévenu, ne se prononçait pas directement et définitivement sur la culpabilité de celui-ci [§54]). Le grief soulevé doit être rejeté.
3.7. En définitive, il y a lieu de constater que la décision de la cour cantonale refusant de joindre les différentes procédures pénales résultant de la manifestation du 14 décembre 2019 repose sur des motifs objectifs. En outre, elle ne consacre pas de violation des droits de la défense ou de la présomption d'innocence. C'est pourquoi le grief des recourants doit être rejeté.
4.
Le recours doit être partiellement admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision (cf. supra consid. 2.5). Pour le reste, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable ou est sans objet. Au regard de la nature procédurale des vices examinés et dans la mesure où le Tribunal fédéral n'a pas traité la cause sur le fond, ne préjugeant ainsi pas de l'issue de celle-ci, il peut être procédé au renvoi sans ordonner préalablement un échange d'écritures (ATF 133 IV 293 consid. 3.4.2; arrêt 6B_679/2022 du 30 mars 2023 consid. 3).
Les recourants, qui obtiennent partiellement gain de cause, peuvent prétendre à des dépens réduits, à la charge du canton de Vaud (art. 68 al. 1 LTF). Puisqu'ils succombent partiellement, ils supporteront conjointement une partie des frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 5 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est partiellement admis, le jugement attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision. Pour le surplus, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable ou est sans objet.
2.
Une partie des frais judiciaires, arrêtée à 1'500 fr., est mise à la charge conjointe des recourants.
3.
Le canton de Vaud versera aux recourants une indemnité totale de 1'500 fr. à titre de dépens réduits pour la procédure devant le Tribunal fédéral.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois.
Lausanne, le 19 octobre 2023
Au nom de la Ire Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Juge présidant : Denys
Le Greffier : Barraz