2C_636/2023 18.07.2024
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_636/2023
Arrêt du 18 juillet 2024
IIe Cour de droit public
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Ryter.
Greffier : M. Dubey.
Participants à la procédure
A.________,
recourant,
contre
Municipalité de B.________,
représentée par Me Patrick Michod, avocat,
intimée,
C.C.________,
représenté par Me Aurore Gaberell, avocate.
Objet
Interdiction de postuler d'un avocat,
recours contre la décision incidente du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 27 octobre 2023 (AC.2023.0174).
Faits :
A.
A.a. Le 4 octobre 1999, la Municipalité de B.________ a accordé à D.D.________, E.D.________ et C.D.________ l'autorisation de construire une villa de deux logements sur la parcelle n° vvv sise sur son territoire.
Par décision du 8 février 2002, la Municipalité a constaté que la villa n'était pas conforme à l'autorisation de construire. Le permis d'habiter a été délivré le 17 décembre 2002 et le délai de mise en conformité a été reporté au 28 février 2003.
A.b. Le 6 novembre 2019, faisant état d'un conflit familial, C.D.________ a dénoncé l'existence de trois logements (dont un dans les combles) et de quatre cuisines dans la villa.
Le 9 mars 2021, F.D.________ et D.D.________ ont reproché au Syndic et au Vice-syndic de la commune de s'être impliqués dans le conflit et d'avoir pris position en faveur de C.D.________ (devenu entre-temps C.C.________).
Par décision du 13 avril 2021, la Municipalité a indiqué qu'elle avait accepté la proposition de ceux-ci de ne plus traiter ce dossier et fixé la date du 5 mai 2021 pour procéder à l'inspection de la villa.
F.D.________ et D.D.________, par l'intermédiaire de Me A.________, ont saisi la Direction générale des affaires institutionnelles et des communes du canton de Vaud en demandant l'annulation de la visite fixée au 5 mai 2021 et la récusation de l'ensemble des membres de la Municipalité. La cause a été transmise au Tribunal cantonal du canton de Vaud, comme objet de sa compétence.
La visite de la villa a eu lieu le 5 mai 2021.
Le 31 mai 2021, la Municipalité a constaté la non-conformité de la villa avec les permis de construire et d'habiter et a ordonné sa mise en conformité jusqu'au 30 novembre 2021 sous la menace des peines prévues à l'art. 292 CP.
Agissant par l'intermédiaire de Me A.________, F.D.________ et D.D.________ ont également saisi le Tribunal cantonal d'un recours contre la décision du 31 mai 2021.
Par arrêt AC.www du 2 septembre 2022, le Tribunal cantonal a rejeté le recours concernant la récusation des membres de la Municipalité. Le recours de F.D.________ et D.D.________, représentés par Me A.________, auprès du Tribunal fédéral contre ce prononcé a été rejeté par arrêt 1C_537/2022 du 7 février 2023, avec la mention "à la limite de la témérité" (consid. 4).
Par arrêt AC.xxx du 2 septembre 2022, le Tribunal cantonal a partiellement admis le recours formé par l'intermédiaire de Me A.________ contre l'ordre de remise en état. La décision du 31 mai 2021 était annulée et la cause renvoyée à la Municipalité pour nouvelle décision. Le recours de F.D.________ et D.D.________, agissant toujours par l'intermédiaire de Me A.________, au Tribunal fédéral contre ce prononcé a été rejeté par arrêt 1C_538/2022 du 7 février 2023.
A.c. Par nouvelle décision du 24 avril 2023, la Municipalité de B.________ a constaté la non-conformité de la villa avec le permis de construire délivré le 4 octobre 1999 à D.D.________, E.D.________ et C.D.________ et a ordonné sa mise en conformité jusqu'au 31 octobre 2023 sous la menace des peines prévues à l'art. 292 CP.
Le 30 mai 2023, F.D.________ et D.D.________ ont, par l'intermédiaire de leur conseil Me A.________, recouru auprès du Tribunal cantonal contre la décision municipale en concluant à son annulation (enregistré sous le numéro d'ordre AC.2023.0174).
Le 21 août 2023, les recourants ont, toujours par l'intermédiaire de Me A.________, requis la révision de l'arrêt AC.xxx du 2 septembre 2022 (enregistré sous le numéro d'ordre AC.yyy).
A.d. Le 7 septembre 2023, le conseil de C.C.________ a déposé une requête devant le Tribunal cantonal tendant à ce qu'il soit fait interdiction à Me A.________ de représenter ses clients F.D.________ et D.D.________.
A l'appui de cette requête, le conseil de C.C.________ a produit une ordonnance pénale du 25 août 2023 du Ministère public central reconnaissant Me A.________ coupable de diffamation et d'injure à l'encontre de C.C.________ et de sa compagne et le condamnant à une peine pécuniaire de 30 jours-amende avec sursis, le montant du jour-amende étant fixé à 80 fr., ainsi qu'à une amende de 480 fr. pour les avoir traités de manière péremptoire et sans nuance de " pervers narcissiques qui (font) des manoeuvres, ment (ent) et (ont) commis une extorsion financière: malades qui devraient se faire expertiser; (et) qui exercent un harcèlement continu envers (s) es clients". Il ressort de cette ordonnance pénale que Me A.________ a admis avoir tenu de tels propos, mais nié leur caractère injurieux ou attentatoire à l'honneur. Il a également indiqué que, bien qu'étant dépourvu de toute compétence dans le domaine de la psychiatrie, mais se fondant sur une discussion avec un expert-psychiatre rencontré dans une autre affaire dans laquelle il défendait un pédophile, il avait décelé chez C.C.________ " tous les troubles qui convergent vers le pervers narcissique " se fondant essentiellement pour poser son " diagnostic " sur la lecture de plusieurs de ses écrits laissant transparaître " un malaise (...) une déviance et une obsession ". Il en ressort également qu'il estimait que ces " gens (étaient) des malades mentaux ", qu'il avait requis la mise en oeuvre d'une expertise psychiatrique dans le cadre d'une des procédures opposant les parties. Il ressort de l'ordonnance en cause que cette réquisition avait été rejetée tant par le Ministère public que par le Tribunal d'arrondissement.
Le 15 septembre 2023, Me A.________ s'est déterminé sur la demande d'interdiction de postuler, contestant l'aspect pénal des propos tenus et niant que ceux-ci puissent justifier une interdiction de procéder. Il a également précisé avoir fait opposition à l'encontre de l'ordonnance pénale rendue le 25 août 2023.
Le 19 octobre 2023, le conseil de C.C.________ a transmis au Tribunal cantonal une copie de l'ordonnance rendue le 12 octobre 2023 par le Président du Tribunal d'arrondissement de la Côte dans la cause pénale PE20.zzz par laquelle il était interdit à Me A.________ de représenter F.D.________ et D.D.________ en raison des propos retenus dans l'ordonnance pénale du 25 août 2023.
B.
Par décision incidente du 27 octobre 2023, le Tribunal cantonal a admis la requête en interdiction de postuler déposée le 7 septembre 2023 par C.C.________ à l'encontre de Me A.________ et fait interdiction à celui-ci de représenter les recourants F.D.________
et D.D.________ notamment dans la procédure cantonale AC.2023.0174.
C.
Le 13 novembre 2023, Me A.________, agissant pour lui-même, a déposé auprès du Tribunal fédéral un recours en matière de droit public contre la décision incidente rendue le 27 octobre 2023 par le Tribunal cantonal, dont il demande l'annulation. Il a joint à son recours une requête d'effet suspensif.
Par ordonnance du 28 décembre 2023, la Présidente de la IIe Cour de droit public a refusé d'accorder l'effet suspensif.
Le 8 janvier 2024, Me A.________ a demandé la récusation de la Présidente de la IIe Cour de droit public et l'annulation de l'ordonnance du 28 décembre 2023.
Par ordonnance du 17 janvier 2024, la IIe Cour de droit public a rejeté la demande récusation et la conclusion tendant à l'annulation de l'ordonnance du 28 décembre 2023.
La Municipalité de B.________ renvoie aux considérants de la décision incidente du Tribunal cantonal. C.C.________ conclut au rejet du recours.
Le 3 février 2024, Me A.________ a déposé ses observations sur la réponse de C.C.________.
Par courrier du 19 février 2024, C.C.________ a répondu aux observations de Me A.________. Son courrier a été transmis pour information aux parties à la procédure. Le 8 mars 2024, le conseil de C.C.________ a adressé un courrier spontané au Tribunal fédéral.
Considérant en droit :
1.
La présente cause concerne une décision incidente d'interdiction de postuler prise par une dernière instance cantonale contre un avocat dans une procédure de mise en conformité d'un immeuble. Cette matière relève du droit public au sens de l'art. 82 let. a LTF.
La décision incidente d'interdiction de postuler ne met pas un terme au litige de fond en matière de droit des constructions. En revanche, elle présente pour l'avocat évincé un caractère final au sens de l'art. 90 LTF, de sorte que le recours de celui-ci est recevable sous cet angle (arrêts 1B_476/2022 du 6 décembre 2022 consid. 1; 1B_632/2020 du 17 mars 2021 consid. 1; 1B_191/2020 du 26 août 2020 consid. 1).
Dirigé contre une décision rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause ne tombant pas sous le coup de l'une des exceptions prévues à l'art. 83 LTF, le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF) par le destinataire de l'arrêt attaqué, qui a qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Il est par conséquent recevable.
2.
Le litige porte sur la violation des devoirs professionnels de l'avocat par le recourant et l'interdiction de postuler qui lui a été signifiée pour ce motif par l'autorité en charge de la procédure de recours AC.2023.0174 en matière de droit de la construction.
3.
3.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral et du droit international (cf. art. 95 let. a et b, ainsi que 106 al. 1 LTF), sous réserve des exigences de motivation figurant aux art. 42 et 106 al. 2 LTF.
3.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours en matière de droit public ne peut servir à critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause.
Le recourant conteste avoir demandé l'interdiction de postuler du conseil de C.C.________ en 2021 (mémoire de recours, p. 5 ch. 3). Il ne démontre pas en quoi ce fait aurait été arbitrairement retenu par l'instance précédente dans la décision attaquée. Le grief est par conséquent irrecevable.
Le Tribunal fédéral fondera son arrêt sur les faits figurant dans la décision attaquée.
3.3. En vertu de l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté, à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. Il appartient à la partie recourante de démontrer que les conditions en sont remplies (ATF 143 V 19 consid. 1.1). En dehors du cas prévu par l'art. 99 al. 1 LTF, les nova ne sont pas admissibles, qu'il s'agisse de faits ou moyens de preuve survenus postérieurement à la décision attaquée (ATF 144 V 35 consid. 5.2.4) ou d'éléments que les parties ont négligé de présenter à l'autorité précédente (ATF 143 V 19 consid. 1.2; 136 II 497 consid. 3.3; 136 III 123 consid. 4.4.3).
En l'occurrence, dans ses observations du 3 février 2024, le recourant fait part au Tribunal fédéral, selon ses propres termes, d'un " fait nouveau " ultérieur à la décision attaquée, en lien avec les procédures pénales en cours. De même, dans ses observations du 19 février 2024, C.C.________, en réponse au courrier du 3 février 2024, évoque aussi des faits nouveaux également postérieurs à la décision attaquée. Enfin, C.C.________ a encore adressé un courrier spontané daté du 8 mars 2024 au Tribunal fédéral avec une annexe.
Les faits mis en exergue dans tous ces courriers sont nouveaux ("echte nova") et par conséquent irrecevables.
4.
Dans un grief qu'il convient d'examiner en premier lieu, puisqu'il peut conduire à l'admission du recours sans avoir à examiner les griefs visant l'interdiction de postuler litigieuse, le recourant, invoquant une violation de l'art. 12 LLCA, se plaint de l'incompétence de l'instance précédente à raison de la matière. Il soutient que l'interdiction de postuler qui lui a été signifiée revient à une " interdiction d'exercer dans toutes les procédures D.________ [...] sans lien avec l'objet des procédures visées ". Cette interdiction devait par conséquent être prononcée par la Chambre des avocats en application des art. 1 let. a et 55 de la loi vaudoise du 9 juin 2015 sur la profession d'avocat (LPav/VD; BLV 177.11).
4.1. L'art. 12 LLCA fait partie de la Section 3 intitulée "Règles professionnelles et surveillance disciplinaire". Parmi les "Règles professionnelles" que doit respecter l'avocat figurent celle qui veut que l'avocat exerce sa profession avec soin et diligence (art. 12 let. a LLCA) et celle qui veut qu'il l'exerce en toute indépendance (art. 12 let. b LLCA). Celui qui, en violation des obligations énoncées à l'art. 12 LLCA, accepte ou poursuit la défense d'intérêts contradictoires doit se voir dénier par l'autorité la capacité de postuler. La loi sur les avocats ne désignant pas l'autorité compétente habilitée à empêcher l'avocat confronté à un conflit d'intérêt de plaider, les cantons sont compétents pour désigner celle-ci. Ainsi, l'injonction consistant en l'interdiction de représenter une personne dans une procédure peut être prononcée, selon les cantons, par l'autorité de surveillance des avocats ou par l'autorité judiciaire saisie de la cause (ATF 147 III 351 consid. 6.2; 138 II 162 consid. 2.5.1 et les références).
L'art. 12 LLCA, en lien avec l'art. 17 LLCA, réglemente également la surveillance disciplinaire. La jurisprudence a toutefois précisé que l'interdiction de postuler faite à un avocat, qu'elle soit prononcée par une autorité disciplinaire ou judiciaire, n'est pas une sanction disciplinaire, dès lors, notamment, qu'elle ne figure pas dans le catalogue des sanctions de l'art. 17 LLCA (ATF 138 II 162 consid. 2.5.1 et les références).
Dans le chapitre VI intitulé "Discipline", l'art. 55 al. 1 LPav/VD relatif à la procédure disciplinaire prévoit que le président de la Chambre des avocats du canton de Vaud ouvre la procédure disciplinaire d'office ou sur requête. Il apparaît ainsi qu'une sanction disciplinaire contre un avocat entre dans la compétence de la Chambre des avocats. En revanche, selon la jurisprudence, c'est bien à l'autorité en charge de la procédure que revient la compétence de statuer d'office et en tout temps sur la capacité de postuler d'un avocat (ATF 147 III 351 consid. 6; 141 IV 257 consid. 2.2), comme l'a relevé à bon droit l'instance précédente dans la décision attaquée.
4.2. En l'occurrence, le recourant perd de vue qu'il s'est vu signifier une interdiction de postuler par l'autorité en charge de la procédure de recours AC.2023.0174 et non pas une sanction disciplinaire. Il entrait donc bien dans la compétence de l'instance précédente de prononcer l'interdiction de postuler du recourant dans la procédure qu'elle dirigeait. Le fait, par ailleurs, que le recourant soit aussi interdit de représenter ses clients dans la procédure pénale cantonale PE20.zzz, comme cela ressort des faits retenus dans la décision attaquée qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), ne permet pas de conclure qu'il s'agirait d'une sanction disciplinaire, contrairement à ce qu'affirme le recourant qui considère être frappé d'une " interdiction d'exercer dans toutes les procédures D.________". Enfin, la question de savoir si les faits survenus dans une procédure pénale antérieure autorisaient l'instance précédente, chargée d'une procédure de recours en matière de droit des constructions, à prononcer une interdiction de postuler relève de l'application sur le fond de l'art. 12 LLCA et sera examinée ci-dessous (cf. consid. 7).
4.3. Le grief de violation de la compétence matérielle doit par conséquent être rejeté.
5.
Invoquant l'art. 6 CEDH, le recourant reproche à l'instance précédente d'avoir violé son droit d'être entendu en ce qu'elle aurait omis d'examiner le dossier pénal principal et omis de lui donner la possibilité d'expliquer l'absence de toute faute de sa part. Il soutient que le dossier pénal aurait dû être requis du Ministère public conformément à l'art. 31 LPA/VD, de sorte qu'un échange d'écritures sur les griefs que l'autorité intimée entendait retenir à son encontre soit organisé.
En l'occurrence, il ressort de la décision attaquée que l'instance précédente a dûment donné la possibilité au recourant de s'exprimer sur le contenu de l'ordonnance pénale du 25 août 2023. Celui-ci s'est en effet déterminé, le 15 septembre 2023, sur la demande d'interdiction de postuler, a contesté l'aspect pénal des propos tenus et a nié que ceux-ci puissent justifier une interdiction de procéder. Il a également précisé avoir fait opposition à l'encontre de l'ordonnance pénale rendue le 25 août 2023. Au surplus, du moment que le recourant a eu l'occasion de se prononcer sur l'ordonnance pénale du 25 août 2023, qui est fondée sur les éléments figurant au dossier pénal, l'instance précédente pouvait renoncer à requérir sa production du Ministère public sans violer le droit d'être entendu du recourant.
Le grief de violation du droit d'être entendu tiré de l'art. 6 CEDH doit par conséquent être rejeté.
6.
Invoquant l'art. 6 § 2 CEDH et la jurisprudence de la Cour EDH, le recourant soutient que la décision d'interdiction de postuler prononcée dans la procédure de recours AC.2023.0174 en matière de droit des constructions viole la présomption d'innocence. Le recourant est d'avis que l'interdiction de postuler qui lui a été imposée résulte directement de sa condamnation par ordonnance pénale du Ministère public du 25 août 2023, contre laquelle il a pourtant fait opposition.
6.1. L'art. 6 § 2 CEDH dispose que toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.
6.2. En l'occurrence, il résulte de la décision attaquée que le recourant a fait l'objet d'une ordonnance pénale du 25 août 2023 et que les faits qui y figurent ont été repris par l'instance précédente à l'appui de la décision d'interdiction de postuler litigieuse. Le recourant soutient que l'instance précédente ne pouvait pas, sans violer la présomption d'innocence, se fonder sur l'ordonnance du 25 août 2023 pour lui interdire de postuler parce qu'il s'est opposé à celle-ci et qu'il n'est par conséquent pas condamné pénalement.
Le recourant perd de vue que l'instance précédente a expressément pris soin de préciser qu'il avait intégralement reconnu les faits retenus dans l'ordonnance pénale du 25 août 2023 et qu'il n'en contestait que leur qualification juridique, de sorte qu'il n'importait pas qu'il se soit opposé à l'ordonnance pénale pour des considérations juridiques, puisque l'appréciation juridique, éventuellement pénale, des faits ne la liait pas. Elle a du reste ajouté en préambule de ces considérations qu'elle n'était pas habilitée à trancher la question de savoir si les propos tenus étaient, ou non, constitutifs d'une infraction pénale (arrêt attaqué, consid. 2d.).
6.3. Par conséquent, étant exempte d'indications qui laissent supposer une éventuelle culpabilité pénale du recourant, la décision attaquée ne viole pas la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 § 2 CEDH. Le recours est rejeté sur ce point.
7.
Le recourant conteste se trouver dans un "conflit concret d'intérêt" dans la procédure qui oppose ses mandants à la Municipalité de B.________ et dans laquelle C.C.________ est uniquement un tiers intéressé. Selon lui, l'interdiction de postuler dans la procédure pénale ne l'empêche pas de défendre ses clients dans la présente procédure de droit des constructions, sans quoi la décision attaquée s'apparente à une procédure disciplinaire pour laquelle l'instance précédente n'est pas compétente.
7.1. A cet égard, il convient de rappeler que les manquements de l'avocat aux obligations professionnelles prévues par l'art. 12 LLCA peuvent faire l'objet d'une procédure disciplinaire et déboucher sur le prononcé des sanctions énoncées par l'art. 17 LLCA. Ils peuvent également avoir pour effet de priver l'avocat de sa capacité de postuler et donc de le priver du droit de représenter une partie dans une procédure civile, pénale ou administrative (cf. parmi d'autres arrêts: ATF 138 II 162 consid. 2.4 et 2.5). Les avocats doivent en effet nécessairement posséder la capacité de postuler pour représenter les parties en justice et effectuer valablement des actes de procédure. Hormis les conditions de capacité d'être partie, liée à la jouissance des droits civils (art. 11 CC), et de capacité d'ester, liée à l'exercice des droits civils (art. 12 CC), l'avocat doit être autorisé par la loi à représenter des parties en justice et ne pas être frappé par un motif d'incapacité, parmi lesquels figurent les manquements aux obligations qui lui sont imposées par l'art. 12 LLCA (cf. Marie-Laure Percassi, op. cit., p. 278 ss; ATF 147 III 351 consid. 6.1.3; 138 II 162 consid. 2.5.1).
La décision relative au pouvoir de postuler de l'avocat vise par conséquent à garantir la bonne marche du procès et entre dans la catégorie des décisions relatives à la conduite du procès (ATF 147 III 351 consid. 6.3 et les références). Elle n'a pas pour fonction de punir disciplinairement un comportement illicite de l'avocat. Une telle décision revêt en effet une portée limitée à la procédure pour laquelle elle est prononcée, ne serait-ce qu'en raison de la compétence fonctionnelle restreinte de la direction de la procédure en cours, par opposition à celle disciplinaire de l'autorité cantonale de surveillance des avocats indépendante de toute autre procédure matérielle et peut être prononcée à chaque fois que des manquements aux obligations de l'art. 12 LLCA risquent de nuire à la bonne marche du procès.
7.2. En l'occurrence, quoi qu'en pense le recourant, il n'est pas d'emblée exclu que les motifs qui ont fondé l'interdiction de postuler prononcée par ordonnance du 12 octobre 2023 dans le procès pénal PE20.zzz puissent également déboucher sur une interdiction de postuler dans la procédure de droit des constructions en cause en l'espèce. Il suffit que les conditions pour prendre cette décision soient réalisées, ce qu'il convient d'examiner ci-dessous.
8.
8.1. L'art. 12 LLCA soumet l'avocat à des règles professionnelles parmi lesquelles figurent notamment l'obligation d'exercer sa profession avec soin et diligence (let. a), en toute indépendance (let. b).
Selon l'art. 12 let. a LLCA, l'avocat doit exercer sa profession avec soin et diligence. Cette disposition constitue une clause générale qui permet d'exiger de l'avocat qu'il se comporte correctement dans l'exercice de sa profession. Sa portée n'est pas limitée aux rapports professionnels de l'avocat avec ses clients, mais comprend aussi les relations avec les confrères et les autorités (ATF 144 II 473 consid. 4.1 et les réf. cit.).
L'art. 12 let. b LLCA prévoit notamment que l'avocat exerce son activité professionnelle en toute indépendance. L'indépendance est un principe essentiel de la profession d'avocat et doit être garantie tant à l'égard du juge et des parties, que du client (cf. ATF 145 II 229 consid. 6.1). Celui qui s'adresse à un avocat doit pouvoir admettre que celui-ci est libre de tout lien, de quelque nature que ce soit et à l'égard de qui que soit, qui pourrait restreindre sa capacité de défendre les intérêts de son client, dans l'accomplissement du mandat que ce dernier lui a confié (arrêt 1B_191/2020 du 26 août 2020 consid. 4.1.2 et les réf. cit.). L'obligation d'indépendance ancrée à l'art. 12 let. b LLCA exige ainsi de l'avocat qu'il se montre, au titre de "serviteur du droit" (cf. ATF 111 Ia 101 consid. 4 p. 105; 106 Ia 103 consid. 6b p. 104 s.; arrêt 2C_1180/2013 du 24 octobre 2014 consid. 4.1.2) digne de confiance dans les relations avec les autorités judiciaires et administratives, ce qui suppose notamment qu'il conserve une certaine indépendance vis-à-vis de son mandant sous peine de risquer de perdre sa position d'interlocuteur critique de son client, qui est indispensable à celui-ci pour éviter des procédés inutiles, dommageables ou sans objet (ATF 130 II 87 consid. 4.1; 111 Ia 101 consid. 5d; arrêts 2C_782/2015 du 19 janvier 2016 consid. 5.2; 2C_1180/2013 du 24 octobre 2014 consid. 4.1.2; 7B.216/2004 du 16 décembre 2004 consid. 3.3; 2A.293/2003 du 9 mars 2004 consid. 2).
8.2. Les règles susmentionnées visent avant tout à protéger les intérêts des clients de l'avocat, en leur garantissant une défense exempte de conflit d'intérêts. Elles tendent également à garantir la bonne marche du procès, en particulier en s'assurant qu'aucun avocat ne soit restreint dans sa capacité de défendre l'un de ses clients (ATF 145 IV 218 consid. 2.1; 141 IV 257 consid. 2.1; arrêts 5A_124/2022 du 26 avril 2022 consid. 4.1.1; 1B_191/2020 du 26 août 2020 consid. 4.1.2).
8.3. Le Tribunal fédéral revoit librement le point de savoir s'il y a eu violation des règles professionnelles en fonction du comportement concret de la personne mise en cause compte tenu de la situation qui se présentait à elle au moment des faits (ATF 144 II 473 consid. 4.2). Cette jurisprudence rendue en matière disciplinaire vaut également en matière d'interdiction de postuler de l'avocat.
8.4. En l'occurrence, le Tribunal cantonal a vu, à juste titre, dans les faits relatés par l'ordonnance pénale du 25 août 2023 un risque que le bon déroulement de la procédure de recours en matière de droit des constructions qui oppose les frères D.________ à la Municipalité de B.________ soit perturbé par l'implication personnelle et émotionnelle de leur avocat, ainsi que par son manque de recul par rapport à ses clients. Ce constat résulte également, comme le souligne à juste titre l'instance précédente, des nombreuses requêtes et recours du recourant, parfois à la limite de la témérité, ainsi que de sa tentative en 2021 déjà d'empêcher le conseil de C.C.________ de postuler. Il s'agit bien là d'une violation du devoir d'indépendance de l'avocat au sens de l'art. 12 let. b LLCA.
Il convient d'ajouter à cela l'animosité manifeste du recourant envers C.C.________. Les faits qui ressortent de l'ordonnance pénale du 25 août 2023 revêtent une gravité suffisante au sens de la jurisprudence pour constituer une violation du devoir général de diligence de l'avocat envers les autres parties à la procédure. En effet, le recourant ne dispose d'aucune compétence l'autorisant à formuler les "diagnostiques" relatifs à la santé mentale de C.C.________, dont il se prévaut du reste encore, de manière réitérée, dans son recours en matière de droit public. Un tel comportement constitue une violation du devoir de diligence de l'avocat au sens de l'art. 12 let. a LLCA.
8.5. Les objections que le recourant formule à l'encontre de ces constats sont inopérantes.
8.5.1. Il prétend n'avoir pas tenté d'obtenir l'interdiction du conseil de C.C.________ en 2021. Mais il n'a pas établi que cet élément de fait aurait été constaté de manière arbitraire par l'instance précédente (cf. consid. 3.2.1 ci-dessus).
Il persiste à soutenir qu'il ne manifeste aucune animosité envers C.C.________, tout en prenant expressément ses clients pour témoins (mémoire de recours, p. 6 let. C : "mes clients le savent" s'agissant de la santé mentale de C.C.________). A cela s'ajoute qu'il présente dans le chapitre II de son mémoire de recours un tableau détaillé du conflit qui oppose ses clients à C.C.________ et son opinion sur la santé mentale de celui-ci. Quant à l'animosité envers C.C.________, elle est manifeste (cf. consid. 8.4 ci-dessus) et renforce le constat de manque de recul du recourant par rapport à ses clients. Il persiste en effet jusque dans le mémoire de recours déposé auprès du Tribunal fédéral à se poser en expert psychiatre de la santé mentale de C.C.________ sans en avoir le titre, alors qu'il connaît, à tout le moins depuis la notification de l'ordonnance pénale du 25 août 2023, les motifs du rejet par le Ministère public et le Tribunal de première instance de sa réquisition tendant obtenir une expertise psychiatrique de C.C.________ et de sa compagne. Il démontre par ce comportement une fois encore son manque de recul par rapport à ses clients et donc son manque d'indépendance en violation de l'art. 12 LLCA.
8.5.2. Enfin, rappelant que l'interdiction de postuler vise à garantir la bonne marche d'un procès, le recourant soutient qu'il n'y aurait pas de conflit d'intérêt concret entre lui et ses clients dans la procédure en matière de droit de la construction ni de perte d'indépendance. A son avis, il pourrait lui être interdit de postuler dans une procédure (pénale, en l'occurrence), sans que cela ne l'empêche de poursuivre la défense de ses clients dans la procédure administrative de droit des constructions. Il perd toutefois de vue que les conflits entre ses clients et C.C.________ ont pour origine l'existence de trois logements et de quatre cuisines dans une villa dans laquelle seuls deux logements ont été autorisés. Il s'agit bien là de la procédure principale sur laquelle se sont greffés des procédures pénales et de multiples développements de la procédure administrative qui ont démontré de façon concrète, comme l'a jugé à juste titre le Tribunal cantonal, que le recourant avait perdu toute indépendance par rapport à ses clients et qu'il mettait ainsi en péril la bonne marche de la procédure de droit des constructions. C'est par conséquent à bon droit qu'il lui a été interdit de postuler. L'objection du recourant doit donc être écartée.
9.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours.
10.
Succombant, le recourant supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Obtenant gain de cause avec l'aide d'une mandataire professionnelle, C.C.________ a droit à des dépens qui seront mis à charge du recourant qui succombe (art. 68 al. 1 LTF). En revanche, la Municipalité de B.________, qui obtient gain de cause dans l'exercice de ses attributions officielles, n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Une indemnité de 2'000 fr., à payer à titre de dépens à C.C.________, est mise à charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué au recourant, à la mandataire de C.C.________, au mandataire de la Municipalité de B.________, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Office fédéral de la justice OFJ.
Lausanne, le 18 juillet 2024
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : F. Aubry Girardin
Le Greffier : C.-E. Dubey