2C_631/2023 13.09.2024
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
2C_631/2023
Arrêt du 13 septembre 2024
IIe Cour de droit public
Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux
Aubry Girardin, Présidente, Ryter et Kradolfer.
Greffière : Mme Joseph.
Participants à la procédure
1. A.________,
2. B.________,
3. C.________,
tous les trois représentés par Me Blaise Christe, juriste,
recourants,
contre
Service de la population du canton du Jura,
rue du 24-Septembre 1, 2800 Delémont.
Objet
Refus de prolongation de l'autorisation de séjour et renvoi de Suisse,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour administrative, du 6 octobre 2023 (ADM 44/2023 et ADM 56/2023).
Faits :
A.
A.a. A.________, née en 1986, ressortissante marocaine, est arrivée en Suisse illégalement en 2014. Depuis le 1er mai 2016, elle a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour (permis B) au titre du regroupement familial avec son époux, D.________, ressortissant français titulaire d'une autorisation de séjour UE/AELE avec activité lucrative dès le 1er mai 2016, pour une durée de 5 ans.
De leur mariage, en 2006 au Maroc, sont nés cinq enfants. L'aîné, B.________ est né en France en 2012, puis sont nés en Suisse, C.________ en 2015, E.________ en 2018, F.________ en 2020 et G.________ en 2022.
A.________ émarge à l'aide sociale depuis 2016, et ce pour un montant s'élevant à plus de 110'000 fr. (état en mars 2022).
A.________ vit au domicile conjugal à U.________ (JU), avec quatre des enfants. Quant à son époux et leur fils aîné, ils se sont constitués un domicile à V.________, dans le canton de Berne, en raison de la scolarisation de B.________ dans ce canton (adresse pour les courriers et subventions). Le Tribunal cantonal a retenu que les époux n'étaient toutefois pas séparés, conformément à ce qu'ils avaient expliqué.
Le 30 avril 2021, le permis de séjour de A.________ est arrivé à échéance. A cette date également, le permis de séjour de son époux, D.________, est arrivé à échéance.
B.
Après que le Service de la population de la République et canton du Jura (ci-après: le Service cantonal) lui ait demandé plusieurs fois, en vain, de faire les démarches nécessaires les 1er février 2019, 29 janvier 2021 et 12 novembre 2021, A.________ a déposé, le 17 février 2022, une demande de prolongation de son autorisation de séjour.
Par décision du 22 septembre 2022, le Service cantonal a rejeté la demande de prolongation de l'autorisation de séjour de A.________, ce qui a été confirmé par décision sur opposition du 28 février 2023. Le Service cantonal a retenu que, comme l'époux ne disposait plus d'une autorisation de séjour valable, A.________ ne pouvait plus faire valoir de titre de séjour découlant du regroupement familial. En outre, A.________ ne se trouvait pas dans un cas d'extrême gravité.
L'intéressée a recouru contre la décision sur opposition du 28 février 2023. Elle a par ailleurs complété son recours, notamment par courrier posté le 7 octobre 2023 et reçu par le Tribunal cantonal de la République et canton du Jura (ci-après: le Tribunal cantonal) le 9 octobre 2023.
Par arrêt du 6 octobre 2023, le Tribunal cantonal a rejeté le recours. Après avoir écarté le grief de la violation du droit d'être entendu, il a considéré en substance qu'A.________ ne pouvait pas se prévaloir d'un droit de séjour dérivé au sens de l'art. 3 par. 1 let. a Annexe I de l'ALCP puisque son époux ne disposait plus d'un titre de séjour originaire depuis le mois de mai 2021. En outre, A.________ ne se trouvait pas dans un cas individuel d'extrême gravité (art. 30 al. 1 let. b LEI). Dans sa motivation, l'arrêt du 6 octobre 2023 a mentionné le courrier reçu le 9 octobre 2023, en indiquant qu'il ne contenait aucun élément permettant de mettre en doute l'issue du litige.
C.
Contre cet arrêt, A.________ (ci-après aussi: la recourante 1) ainsi que ses deux enfants aînés, B.________ et C.________ (ci-après aussi: les recourants 2 et 3), déposent un "recours" contre l'arrêt du Tribunal cantonal du 6 octobre 2023. Ils concluent principalement à son annulation et à l'octroi d'autorisations de séjour. Subsidiairement, ils demandent que la décision du 6 octobre 2023 soit annulée et le dossier retourné au Tribunal cantonal pour qu'il leur octroie des autorisations de séjour. Ils ont par ailleurs requis l'effet suspensif au recours ainsi que le bénéfice de l'assistance judiciaire limitée aux frais.
Par ordonnance du 13 avril 2023, la Présidente de la II e Cour de droit public a renoncé provisoirement à exiger une avance de frais et dit qu'il sera statué ultérieurement sur l'assistance judiciaire.
Le Tribunal cantonal indique n'avoir aucune remarque à formuler et conclut au rejet du recours. Le Service cantonal formule des observations et conclut au rejet du recours. Le Secrétariat d'État aux migrations dépose des déterminations et conclut au rejet du recours dans la mesure où il est recevable.
A.________, B.________ et C.________ ont déposé une réplique, le 6 février 2024, et leur représentant a joint une note d'honoraires.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 148 I 160 consid. 1).
1.1. Les recourants n'ont pas précisé quel recours ils entendaient déposer. L'absence d'intitulé ne porte pas à conséquence si les conditions de recevabilité du recours dont la voie est ouverte sont remplies (cf. ATF 138 I 367 consid. 1.1; arrêt 2C_568/2023 du 17 janvier 2024 consid. 3).
1.2. Le recours formé par B.________ et C.________, visant l'octroi d'un titre de séjour, est d'emblée irrecevable car les enfants de A.________ n'étaient pas parties à la procédure devant l'instance précédente, ni d'ailleurs devant l'autorité administrative, et ne prétendent pas avoir été privés de la possibilité d'y prendre part. Le fait que leur mère ait, dans son courrier au Tribunal cantonal du 7 octobre 2023, invoqué un droit de ses enfants de demeurer en Suisse afin de terminer leur scolarité ne suffit pas à admettre une participation de ceux-ci à la procédure. La qualité de partie ne peut ainsi pas leur être reconnue pour la première fois devant le Tribunal fédéral, les conditions de l'art. 89 al. 1 let. a LTF n'étant pas remplies (cf. arrêts 2C_382/2023 du 20 juillet 2023 consid. 5.2; 2C_575/2021 du 19 juillet 2021 consid. 3). Le recours est donc irrecevable en ce qui les concerne.
A cela s'ajoute que le Tribunal fédéral est lié par l'objet de la contestation. Or celui-ci concerne, depuis les premières décisions de l'autorité administrative, la prolongation de l'autorisation de séjour de la seule recourante 1. Les conclusions tendant à l'octroi d'un tel titre pour les recourants 2 et 3 dépassent ainsi l'objet de la contestation et ne sont donc pas admissibles (cf. ATF 142 I 155 consid. 4.4.2; 133 V 19 consid. 1.1; arrêt 2C_329/2024 du 2 juillet 2024 consid. 4.1).
1.3. Encore faut-il examiner si le recours de A.________, qui conclut à l'octroi d'une autorisation de séjour pour elle-même, est recevable en tant que recours en matière de droit public. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, un tel recours est irrecevable à l'encontre des décisions en matière de droit des étrangers qui concernent une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit.
1.3.1. En l'espèce, la recourante 1 prétend de manière plausible que deux de ses enfants, B.________ et C.________, de nationalité française et marocaine, bénéficient d'un droit originaire à une autorisation de séjour sur le fondement de l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP (RS 0.142.112.681) qui leur permettrait de terminer leur scolarité en Suisse. La mère des enfants pourrait ainsi bénéficier d'un droit de séjour dérivé de celui de ses enfants (cf. arrêts 2C_330/2023 du 2 avril 2024 consid. 1.2.2; 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 1.1). Le recours échappe à la clause d'irrecevabilité de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, la question de savoir si les conditions de tels droits sont effectivement réunies relevant du fond (cf. ATF 139 I 330 consid. 1.1). Partant, la voie du recours en matière de droit public est en principe ouverte.
1.3.2. En revanche, selon les faits constatés qui lient le Tribunal fédéral et que la recourante 1 ne remet pas en question sous l'angle de l'arbitraire, son époux, qui bénéficiait d'une autorisation de séjour UE/AELE, n'en possède plus depuis le mois de mai 2021. La recourante 1 ne peut donc pas se prévaloir d'un droit dérivé à ce titre (cf. art. 3 al. 1 let. a, al. 2 let. a et al. 4 Annexe I ALCP, RS 0.142.112.681; art. 7.1.1 de l'Ordonnance sur la libre circulation des personnes entre la Suisse et l'Union européenne et ses États membres, entre la Suisse et le Royaume-Uni, ainsi qu'entre les États membres de l'Association européenne de libre-échange, Ordonnance sur la libre circulation des personnes, OLCP, RS 142.203). Celle-ci ne le remet pas en cause.
En outre, la recourante 1 ne rend pas vraisemblable qu'elle peut se prévaloir d'un droit sur le fondement de l'art. 8 CEDH qu'elle invoque. Sous l'angle du droit à la vie familiale, l'art. 8 CEDH tend à ce que la famille ne soit pas séparée, mais n'octroie pas le droit de séjourner dans un État déterminé (cf. ATF 144 I 91 consid. 4.2; arrêt 2C_56/2024 du 8 mai 2024 consid. 1.3). En l'occurrence, comme l'époux de la recourante 1 ne bénéficie plus d'un titre de séjour UE/AELE, la décision attaquée, qui refuse un droit de séjour dérivé à la recourante 1 parce que son époux n'en a plus, ne saurait porter atteinte à la vie familiale. Compte tenu de la durée de séjour de la recourante 1 en Suisse, qui n'y réside légalement que depuis 2016, et du fait qu'elle ne saurait se prévaloir d'une intégration exceptionnelle compte tenu de sa forte dépendance à l'aide sociale, elle ne peut pas non plus déduire de droit de l'art. 8 CEDH en lien avec sa vie privée (cf. ATF 149 I 207 consid. 5.3.1 à 5.3.4; 146 I 185 consid. 5.2; 144 I 266 consid. 3.9), étant précisé que le point de savoir si la recourante 1 peut déduire un droit dérivé de demeurer en Suisse d'un éventuel droit de séjour de ses enfants sera examiné sous l'angle de l'application de l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP.
Enfin, l'art. 30 al. 1 let. b LEI n'ouvre pas la voie du recours en matière de droit public, parce qu'il ne confère aucun droit en raison de sa formulation potestative (cf. art. 83 let. c ch. 2 LTF) et parce que les dérogations aux conditions d'admission sont expressément exclues de cette voie de droit (art. 83 let. c ch. 5 LTF). C'est ainsi à raison que la recourante 1 ne se prévaut pas de cette disposition.
1.3.3. Pour le surplus, l'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF) rendue par une autorité cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF). Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites par la loi (art. 42 LTF), le recours de la recourante 1 est ainsi recevable, en tant que recours en matière de droit public.
2.
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique d'office le droit fédéral (art. 106 al. 1 LTF). Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite toutefois que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 140 III 86 consid. 2). La motivation du recours doit exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Pour satisfaire à cette obligation, la partie recourante doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi elle estime que l'autorité précédente a méconnu le droit; il n'est pas indispensable qu'elle indique expressément les dispositions légales ou les principes de droit qui auraient été violés; il suffit qu'à la lecture de son exposé, on comprenne clairement quelles règles de droit auraient été, selon elle, transgressées par l'autorité cantonale (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 140 III 86 consid. 2; 133 IV 286 consid. 1.4).
Les griefs de violation des droits fondamentaux sont soumis à des exigences de motivation accrues (art. 106 al. 2 LTF). La partie recourante doit mentionner les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés (cf. ATF 149 III 81 consid. 1.3; 148 I 127 consid. 4.3; 146 I 62 consid. 3).
Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, le recours devant le Tribunal fédéral ne peut pas être formé pour violation du droit cantonal (ou communal) en tant que tel. Il est uniquement possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal ou communal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à un autre droit constitutionnel (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 142 III 153 consid. 2.5).
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 148 I 160 consid. 3). La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2).
3.
Dans un grief d'ordre formel, qu'il convient d'examiner en premier lieu, la recourante 1 se prévaut de l'art. 29 al. 1 Cst. Elle invoque un déni de justice, le Tribunal cantonal n'ayant pas statué sur les conclusions qu'elle aurait formulées dans sa prise de position du 7 octobre 2023, relatives à la délivrance d'autorisations de séjour en faveur de ses deux enfants aînés. En outre, elle indique que l'arrêt n'est pas signé par la Présidente de la Cour de sorte qu'il est douteux que cette dernière ait pris connaissance du courrier posté le 7 octobre 2023 reçu par le Tribunal le 9 octobre 2023, soit postérieurement à la date de l'arrêt attaqué du 6 octobre 2023, et pourtant mentionné dans celui-ci.
3.1. Une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst. si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (cf. ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; 135 I 6 consid. 2.1; arrêt 2C_907/2022 du 16 décembre 2022 consid. 7.1).
En outre, si une autorité est composée d'un certain nombre de membres, tous doivent - sous réserve d'une disposition légale contraire - participer à la décision (cf. art. 30 al. 1 Cst.). L'autorité qui statue en formation incomplète commet un déni de justice formel (ATF 137 I 340 consid. 2.2.1; 129 V 335 consid. 3.1; 127 I 128 consid. 4b; arrêt 2C_460/2023 du 31 mai 2024 consid. 5.1.1).
3.2. En l'espèce, l'arrêt cantonal attaqué est daté du 6 octobre 2023. La recourante 1 a fait parvenir des observations le 7 octobre 2023. L'arrêt attaqué les mentionne néanmoins, tout en indiquant qu'elles n'apportent aucun élément pertinent. En tant que telle, la mention du courrier postérieurement à la date de l'arrêt attaqué dans la motivation n'est pas en soi constitutif de déni de justice. La recourante 1 ne se plaint au surplus pas de l'application arbitraire d'une disposition de droit cantonal qui le prohiberait. En outre, l'arrêt indique qu'il est rendu par trois juges, dont les noms sont mentionnés. Le fait que la signature, qui comporte le nom de la Présidente, soit signé p.o. ne saurait signifier que celle-ci n'était pas au courant de ce courrier, ni les autres juges du reste. Enfin, savoir si c'est à juste titre que les juges ont considéré que ce courrier - dans lequel la recourante 1 invoquait nouvellement un droit dérivé de celui de ses enfants aînés pour obtenir la prolongation de son titre de séjour et concluait nouvellement à l'octroi d'un titre de séjour pour ces deux mêmes enfants - n'était pas pertinent, ce que la recourante 1 conteste également sous l'angle d'une considération manifestement inexacte des faits, relève du droit et sera examiné ci-après (cf. infra consid. 5).
3.3. Le grief de violation de l'art. 29 al. 1 Cst. doit dès lors être rejeté.
4.
4.1. Le litige porte sur le refus de prolonger l'autorisation de séjour de la recourante 1.
4.2. Dans son arrêt, le Tribunal cantonal a retenu que cette dernière ne pouvait plus faire valoir son droit au séjour au titre du regroupement familial avec son époux, de qui elle indiquait ne pas être séparée, sur le fondement de l'art. 3 al. 1 let. a, al. 2 let. a et al. 4 Annexe I ALCP. En effet, l'autorisation de séjour de celui-ci était échue depuis mai 2021. Or, retenant que l'existence du droit de séjour de la recourante 1 était exclusivement liée à celui de son époux, le Tribunal cantonal a constaté que le droit de celle-ci s'était éteint. Ensuite, il a examiné si la recourante 1 pouvait se prévaloir d'un cas d'extrême gravité au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI et conclu que tel n'était pas le cas, au vu des différents éléments pris en compte (durée de son séjour en Suisse, intégration sociale et professionnelle, ainsi que celle des enfants, âge des enfants, liens avec son pays d'origine). Il a ainsi rejeté le recours.
5.
La recourante 1 ne conteste pas cette analyse, mais reproche au Tribunal cantonal de ne pas avoir examiné l'application de l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP, en lien avec ses deux enfants aînés (les recourants 2 et 3 nés respectivement en 2012 et 2015). A ce titre, elle a exposé qu'ils étaient âgés de 11 et 8 ans, qu'ils suivaient l'école obligatoire et qu'ils résidaient en Suisse au moment où leur père, ressortissant UE/AELE, exerçait une activité lucrative. Ses enfants seraient en outre particulièrement bien intégrés. La recourante 1 affirme dès lors qu'ils bénéficieraient d'un droit de séjourner en Suisse, afin de terminer leur scolarité, de sorte qu'elle jouirait, pour sa part, d'un droit dérivé à demeurer dans le pays auprès d'eux.
5.1. Selon l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP, "les enfants d'un ressortissant d'une partie contractante qui exerce ou non, ou qui a exercé une activité économique sur le territoire de l'autre partie contractante, sont admis aux cours d'enseignement général, d'apprentissage et de formation professionnelle dans les mêmes conditions que les ressortissants de l'État d'accueil, si ces enfants résident sur son territoire". Cette réglementation a été reprise de l'art. 12 du Règlement (CEE) n°1612/68 au titre de l'acquis communautaire et correspond presque littéralement au texte de celui-ci (arrêts 2C_185/2019 du 4 mars 2021 consid. 6.1; 2C_815/2020 du 11 février 2021 consid. 4.1).
Dans l'arrêt de principe du 17 septembre 2002 C-413/99 Baumbast (Rec. 2002 p. I-7091), la Cour de justice des Communautés européennes [actuellement: Cour de justice de l'Union européenne; ci-après: la CJUE] a interprété l'art. 12 du règlement (CEE) no 1612/68 et a retenu que les enfants d'un citoyen de l'Union européenne qui se sont installés dans un État membre alors que leur parent exerçait des droits de séjour en tant que travailleur migrant dans cet État membre sont en droit d'y séjourner afin d'y poursuivre des cours d'enseignement général, peu importe que les parents des enfants concernés aient entre-temps divorcé, que seul l'un d'entre eux soit citoyen de l'Union européenne ou que le travailleur migrant ait à son tour quitté le pays ou que les enfants eux-mêmes ne disposent pas de la citoyenneté européenne (point 63).
Le Tribunal fédéral a déduit de l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP, interprété en tenant compte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, que les enfants d'un ressortissant d'une partie contractante au sens de cette disposition jouissent d'un droit indépendant de leurs parents à demeurer dans l'État d'accueil, afin d'y terminer leur formation, lorsque l'on ne peut raisonnablement pas exiger d'eux qu'ils retournent dans leur pays d'origine pour achever celle-ci (cf. ATF 142 II 35 consid. 4.1; 139 II 393 consid. 4.2; arrêts 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 7.1; 2C_19/2021 du 21 mai 2021 consid. 4.3.1). Cette jurisprudence implique que l'enfant ait déjà commencé à s'intégrer dans le pays d'accueil, ce qui a été nié pour des enfants en bas âge (cf. ATF 139 II 393 consid. 4.2.2; arrêts 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 7.1; 2C_19/2021 du 21 mai 2021 consid. 4.3.1). Cette jurisprudence rendue en lien avec l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP s'applique même si un seul des parents est citoyen de l'Union européenne (ATF 142 II 35 consid. 4.3; arrêt 2C_185/2019 du 4 mars 2021 consid. 6.1).
Si les conditions de l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP sont réunies, le parent qui exerce la garde de l'enfant bénéficie alors également d'un droit de séjour à titre dérivé, indépendamment de ses moyens d'existence (cf. ATF 142 II 35 consid. 4.2; 139 II 393 consid. 3.3; arrêts 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 7.1; 2C_19/2021 du 21 mai 2021 consid. 4.3.1). Le droit de présence dérivé du parent suppose toutefois que celui-ci exerce effectivement le droit de garde sur l'enfant (cf. ATF 139 II 393 consid. 4.2.5).
La jurisprudence du Tribunal fédéral rendue en lien avec l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP concerne principalement des cas où les parents de l'enfant sont séparés, respectivement divorcés. Toutefois et contrairement à ce qu'a invoqué le Secrétariat d'État aux migrations dans ses observations, le Tribunal fédéral a aussi exceptionnellement appliqué la disposition précitée à des parents mariés, qui n'étaient pas séparés; ceux-ci étaient toutefois tous deux ressortissants d'un État membre de l'UE et devaient tous deux quitter la Suisse. Il s'agissait ainsi d'une situation bien particulière (cf. arrêt 2C_815/2020 du 11 février 2021 consid. 4).
5.2. En l'espèce, l'arrêt entrepris n'examine pas l'application de l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP aux deux enfants aînés de la recourante 1, car il n'envisage pas la problématique d'un éventuel droit dérivé de la mère issu de cette disposition. Il s'agit d'une question de droit que le Tribunal cantonal aurait dû examiner d'office, peu importe que la recourante 1 n'ait pas indiqué ce point ou ne l'ait indiqué que tardivement, soit dans son courrier du 7 octobre 2023 (cf. supra consid. 3.2).
Dans une telle situation, le Tribunal fédéral peut examiner l'argumentation juridique, même nouvelle, de la recourante 1, à condition que les faits de l'arrêt attaqué soient suffisants (ATF 136 V 362 consid. 4.1; 134 III 643 consid. 5.3.2), ce qui est le cas en l'espèce.
5.2.1. En l'occurrence, on peut douter que la recourante 3, âgée de 8 ans lorsque l'arrêt entrepris a été rendu et qui était donc au début de sa scolarité obligatoire, ait commencé une formation qu'elle ne serait pas en mesure de continuer ailleurs qu'en Suisse, cela d'autant que l'on ne se trouve pas dans un cas où les autorités cantonales auraient créé ou toléré une situation ayant permis la scolarisation de l'enfant (cf. arrêts 2C_1016/2021 du 20 décembre 2022 consid. 3.2; 2C_471/2022 du 12 octobre 2022 consid. 4.3; 2C_185/2019 du 4 mars 2021 consid. 8.2; 2C_669/2015 du 30 mars 2016 consid. 6.3; 2C_792/2013 du 11 février 2014 consid. 4.2). La question n'a cependant pas besoin d'être tranchée, comme on le verra (cf. infra consid. 5.2.3).
5.2.2. La situation est différente pour ce qui est du recourant 2, âgé de 11 ans, qui se trouve à la limite de pouvoir se prévaloir de l'art. 3 par. 6 Annexe I ALCP, à tout le moins au regard de son âge. Toutefois, rien n'indique que le recourant 2, de nationalité française, qui parle le français et participe à des activités extra-scolaires, ne serait pas en mesure de se réintégrer en France, ce qui conduirait alors à lui nier un droit de demeurer en Suisse sur la base de cette disposition (cf. ATF 139 II 393 consid. 4.2; arrêts 2C_621/2021 du 27 juillet 2022 consid. 7.3; 2C_815/2020 du 11 février 2021 consid. 4.6). A cela s'ajoute encore que, selon l'arrêt entrepris, la recourante 1 vit à U.________, dans le canton du Jura. Pour sa part, le recourant 2 est scolarisé dans le canton de Berne et y est domicilié avec son père. Ce domicile distinct, qui a pour conséquence que la famille ne relève a priori pas des mêmes autorités administratives, a été constitué, selon les faits de l'arrêt attaqué qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), notamment dans le but de toucher des subsides. Dans ces circonstances, la situation du recourant 2 ne peut permettre à sa mère de l'invoquer pour en tirer un droit dérivé de demeurer en Suisse issu de l'ALCP.
5.2.3. Quoi qu'il en soit, il ressort des faits constatés que le mari de la recourante 1, qui dispose de la nationalité française, était titulaire d'une autorisation de séjour UE/AELE avec activité lucrative valable dès le 1er mai 2016. Or, la famille est arrivée en Suisse illégalement en 2014 déjà, ce que la recourante 1 a elle-même indiqué. En outre, si l'aîné des enfants, le recourant 2, est né en France en 2012, sa soeur, la recourante 3, est toutefois née en Suisse en 2015. Il en découle que les recourants 2 et 3 ne se sont pas installés en Suisse lorsque leur père exerçait des droits de séjour en tant que travailleur migrant, ce qui constitue pourtant également une condition pour pouvoir bénéficier d'un droit en application de la jurisprudence Baumbast précitée (cf. supra consid. 5.1).
5.3. Dans ces circonstances, la recourante 1 ne peut pas se prévaloir d'un droit dérivé de séjourner en Suisse découlant de l'art. 3 al. 6 Annexe I ALCP en lien avec ses deux enfants. Son grief est rejeté.
6.
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure de sa recevabilité.
Succombant, la recourante 1 doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). A titre exceptionnel, il sera toutefois renoncé à les percevoir, afin de tenir compte de sa situation financière (art. 66 al. 1, 2ème phr. LTF). La demande de dispense du paiement d'une avance de frais devient ainsi sans objet. Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux recourants, au Service de la population du canton du Jura, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour administrative, et au Secrétariat d'État aux migrations.
Lausanne, le 13 septembre 2024
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : F. Aubry Girardin
La Greffière : M. Joseph