9C_241/2024 21.10.2024
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
9C_241/2024
Arrêt du 21 octobre 2024
IIIe Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Parrino, Président,
Stadelmann et Beusch.
Greffière : Mme Perrenoud.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par M e Christophe Misteli, avocat,
recourante,
contre
Philos Assurance Maladie SA,
rue des Cèdres 5, 1920 Martigny,
intimée.
Objet
Assurance-maladie,
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton
de Vaud du 19 mars 2024 (AM 17/23 - 8/2024).
Faits :
A.
A.________, née en 1972, a travaillé en qualité d'employée agricole pour le compte de l'Association B.________ (ci-après: l'employeur) du 1er janvier 2014 au 31 octobre 2020. À ce titre, elle était assurée auprès de Philos Assurance Maladie SA (ci-après: Philos), dans le cadre d'un contrat d'assurance collective, pour des indemnités journalières en cas de maladie. À compter du 1er novembre 2020, elle a été assurée auprès du même assureur, à titre individuel. La prime mensuelle a été fixée à 178 fr. 45, puis à 190 fr. 35 dès le 1er janvier 2021.
Entre-temps, les 6 juillet 2019 et 10 janvier 2020, l'employeur a successivement annoncé à Philos que A.________ avait présenté une incapacité de travail du 13 juin au 21 juillet 2019, puis à compter du 7 janvier 2020. L'assureur-maladie a versé des indemnités journalières à l'assurée jusqu'au 15 décembre 2021. Il a résilié la couverture d'assurance pour cette date par décision du 16 décembre 2021, car l'assurée avait épuisé son droit aux prestations (perception de 730 indemnités journalières dans une période de 900 jours; cf. art. 11 ch. 2 let. e, en relation avec l'art. 7 ch. 1 des conditions générales d'assurance [CGA] applicables à la police d'assurance). Par décision du 9 août 2022, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud a reconnu le droit de A.________ à une rente entière d'invalidité à compter du 1er décembre 2020. Il a également versé à Philos un montant de 26'047 fr. 35 en raison de la surindemnisation de l'assurée pour la période allant du 1er décembre 2020 au 15 décembre 2021. À la suite du remboursement de la surindemnisation, Philos a révisé sa décision du 16 décembre 2021; elle a "réactivé" la couverture d'assurance à partir du 16 décembre 2021 et reporté la date d'épuisement du droit aux prestations d'assurance au 16 octobre 2027, sous réserve de toute modification de la situation de l'assurée dans l'intervalle (décision de révision du 21 novembre 2022, confirmée sur opposition le 4 mai 2023).
B.
Statuant le 19 mars 2024 sur le recours formé par A.________ contre la décision sur opposition du 4 mai 2023, le Tribunal cantonal du canton du Vaud, Cour des assurances sociales, l'a rejeté.
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt. Elle conclut principalement à sa réforme en ce sens que Philos est condamnée à lui verser des indemnités journalières dès le 16 décembre 2021 et jusqu'à l'épuisement de ses droits, et ce avec libération du paiement des primes, subsidiairement, moyennant le versement d'une prime mensuelle d'au maximum 31 fr. 30. À titre subsidiaire, l'assurée requiert l'annulation de l'arrêt entrepris et le renvoi de la cause à la juridiction cantonale pour nouvelle décision et nouveaux calculs dans le sens des considérants.
Considérant en droit :
1.
Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il statue par ailleurs sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Le recourant qui entend s'en écarter doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées sinon un état de fait divergent ne peut pas être pris en considération.
2.
Compte tenu des motifs et conclusions du recours, est seul litigieux, en instance fédérale, le point de savoir si c'est à bon droit que la juridiction cantonale a admis que la recourante demeure tenue de s'acquitter des primes fixées par l'assureur-maladie intimé (en l'occurrence une prime mensuelle de 190 fr. 35), tant qu'elle n'a pas résilié sa police d'assurance ou épuisé définitivement son droit aux indemnités journalières. La recourante requiert dès lors la libération du paiement des primes. À titre subsidiaire, elle demande que la prime mensuelle soit réduite à 31 fr. 30.
La recourante ne conteste pas la conclusion de l'instance précédente quant à l'obligation de Philos de lui verser une indemnité journalière réduite de 12 fr. 22, dès le 1er février 2022 et jusqu'à l'épuisement de son droit aux prestations d'assurance, le 16 octobre 2027, compte tenu de la surindemnisation (d'un montant de 26'047 fr. 35) entraînée par le versement ultérieur d'une rente de l'assurance-invalidité à compter du 1er décembre 2020 (cf. art. 72 al. 5 LAMal; cf. aussi ATF 125 V 106 consid. 2).
3.
3.1. La recourante fait en substance valoir qu'elle ne bénéficie plus d'une couverture d'assurance "au sens strict", étant donné qu'elle est en "incapacité de travail complète" et qu'elle s'est déjà intégralement acquittée de la prime d'assurance pour la période de perception des indemnités journalières de 730 jours prévue par l'art. 7 ch. 1 des CGA applicables (ouverte jusqu'au 15 décembre 2021 à la suite de son incapacité de travail survenue le 10 juin 2019, puis le 7 janvier 2020). L'instance précédente ne pouvait dès lors pas considérer qu'elle était tenue de s'acquitter d'une prime entière jusqu'à l'épuisement de son droit aux indemnités journalières, le 16 octobre 2027. Selon la recourante, pareille conclusion reviendrait à ne pas respecter les règles d'équivalence prévues à l'art. 72 al. 5 LAMal, car les primes seraient complètement disproportionnées par rapport au montant des prestations et donc sans lien avec un risque assuré; autrement dit, l'assureur serait ainsi autorisé à facturer des primes sans contre-prestation adéquate.
3.2.
3.2.1. L'argumentation de la recourante est mal fondée. Quoi qu'elle en dise, en cas d'épuisement partiel du droit aux prestations selon l'art. 72 al. 4 et 5 LAMal, la loi ne prévoit pas le droit de l'assuré de payer des primes réduites (cf. arrêt 9C_790/2018 du 9 avril 2019 consid. 3.4.4), comme l'a dûment exposé la juridiction cantonale. Certes, en cas de réduction des indemnités journalières pour cause d'incapacité partielle de travail (art. 72 al. 4 LAMal) et de surindemnisation (art. 72 al. 5 LAMal), la durée de l'indemnisation doit être prolongée jusqu'au moment où la personne assurée a perçu l'équivalent des indemnités journalières auxquelles elle aurait eu droit durant la période minimale de 720 jours (selon l'art. 72 al. 3 LAMal, respectivement de 730 jours selon les CGA applicables en l'occurrence), en fonction du taux de l'incapacité partielle de travail et à défaut de surindemnisation (cf. ATF 127 V 88 consid. 1d; 125 V 106 consid. 2b et 2c). Cela étant, la prolongation des délais relatifs à l'octroi des indemnités journalières en fonction de la réduction (conformément à l'art. 72 al. 4-5 LAMal) ne signifie pas que le montant des primes doit être diminué, voire qu'aucune prime ne doit plus être prélevée. Comme le fait valoir l'intimée, le rapport d'équivalence doit en effet être réalisé entre le montant de la prime (en l'occurrence 190 fr. 35 dès le 1er janvier 2021) et le montant assuré (correspondant à 730 indemnités journalières complètes d'un montant de 74 fr. 35 chacune, conformément au certificat d'assurance 2021).
3.2.2. Dans ce contexte, on rappellera que le droit aux prestations d'un assureur-maladie est lié à l'affiliation (ATF 125 V 106 consid. 3) et que l'indemnité journalière n'est versée que si la prime a aussi été payée pour la période correspondante (cf. Évaluation du système d'assurance d'indemnités journalières en cas de maladie et propositions de réforme, Rapport du Conseil fédéral du 30 septembre 2009 en réponse au postulat 04.3000 de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national, du 16 janvier 2004, p. 12). Par ailleurs si le législateur a adopté des dispositions légales minimales impératives qui encadrent la pratique de l'assurance facultative d'une indemnité journalière (cf. art. 67 à 77 LAMal), notamment quant à la durée du droit à l'indemnité (art. 72 al. 3 LAMal), à la réduction de la prestation en cas d'incapacité partielle de travail (art. 72 al. 4 LAMal) et à la surindemnisation (art. 72 al. 5 LAMal), la réglementation d'autres aspects relève de la liberté contractuelle des parties (cf. arrêt K 74/02 du 16 avril 2004 consid. 2.1 et les références). Or s'agissant des primes des assurés, l'art. 76 LAMal prévoit que l'assureur en fixe le montant (al. 1 LAMal) et qu'une réduction doit intervenir si un délai d'attente est applicable au versement de l'indemnité journalière (art. 76 al. 2 LAMal). Une obligation de l'assureur de réduire le montant des primes d'assurance dans une hypothèse autre que celle visée à l'art. 76 al. 2 LAMal, notamment en cas de prolongation du versement des indemnités journalières par suite de surindemnisation selon l'art. 72 al. 5 LAMal, n'est ainsi pas prévue par la loi. Une telle obligation ne découle par ailleurs pas des CGA applicables en l'espèce. Sur ce point, on constate, à la suite de l'instance précédente, que l'art. 24 ch. 1 des CGA donne la possibilité à l'assureur d'adapter annuellement le taux des primes en fonction de l'évolution des sinistres, sans prévoir une telle adaptation dans le cas de la réactivation du versement d'indemnités journalières à la suite de surindemnisation. À cet égard, la recourante ne saurait rien tirer en sa faveur de l'art. 24 ch. 2 des CGA. S'il réserve une adaptation immédiate du taux de prime lors de l'entrée en vigueur de nouvelles circonstances, celles-ci englobent les cas de fusion, de scission ou d'absorption, soit des circonstances qui concernent l'assureur. Ne sont donc pas visés les "cas de diminution importante du risque" comme il en va, selon la recourante, lorsque la durée de versement des indemnités journalières a été prolongée conformément à l'art. 72 al. 5 LAMal. Le recours est mal fondé.
4.
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires afférents à la présente procédure (art. 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique.
Lucerne, le 21 octobre 2024
Au nom de la IIIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Parrino
La Greffière : Perrenoud