7B_518/2024 24.10.2024
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
7B_518/2024, 7B_553/2024
Arrêt du 24 octobre 2024
IIe Cour de droit pénal
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Abrecht, Président,
Koch, Hurni, Kölz et Hofmann.
Greffier : M. Valentino.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Maîtres Nicolas Rouiller et Alban Matthey, avocats,
recourant,
contre
7B_518/2024
David Bouverat,
juge pénal fédéral, p.a. Tribunal pénal fédéral, Cour des affaires pénales, Viale Stefano Franscini 7, 6500 Bellinzone,
intimé,
et
7B_553/2024
1. Nathalie Zufferey Franciolli,
2. Giorgio Bomio-Giovanascini,
3. Patrick Robert-Nicoud,
juges pénaux fédéraux, p.a. Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, Viale Stefano Franscini 7, 6500 Bellinzona,
intimés.
Objet
Récusation,
recours contre la décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral du 15 mars 2024 (BB.2023.183 [7B_518/2024]) et contre celle de la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral du 11 avril 2024 (CR.2024.3 [7B_553/2024]).
Faits :
A.
Par acte d'accusation du 25 avril 2023, le Ministère public de la Confédération a renvoyé A.________ en jugement devant la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral (ci-après: la Cour des affaires pénales) pour les infractions de gestion déloyale, escroquerie et blanchiment d'argent aggravé.
À cette même date, la Cour des affaires pénales a annoncé aux parties la composition de la cour appelée à statuer dans la cause, alors référencée sous le numéro SK.2023.24.
B.
B.a. Le 24 octobre 2023, A.________ a adressé une demande de récusation contre le juge dirigeant la procédure SK.2023.24, David Bouverat.
Le 27 octobre 2023, celui-ci a transmis la demande de récusation à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (ci-après : la Cour des plaintes) avec ses observations, en concluant à son rejet. La cause a été enregistrée auprès de cette autorité sous le numéro BB.2023.183.
A.________ a répliqué le 10 novembre 2023.
Le 15 novembre 2023, le juge David Bouverat a persisté dans ses conclusions.
Par décision du 15 mars 2024, la Cour des plaintes, composée des juges Nathalie Zufferey, Patrick Robert-Nicoud et Giorgio Bomio-Giovanascini, a rejeté la demande de récusation; en substance, elle a estimé qu'il n'y avait aucun élément permettant de mettre en doute l'impartialité du juge dirigeant la cause SK.2023.24. En bas de la dernière page de cette décision figurait la mention selon laquelle il n'existait aucune voie de droit ordinaire contre celle-ci.
B.b. Par pli du 27 mars 2024, A.________ a sollicité auprès de la Cour des plaintes la récusation des juges Nathalie Zufferey, Patrick Robert-Nicoud et Giorgio Bomio-Giovanascini dans le cadre de la procédure BB.2023.183.
Le 2 avril 2024, la Cour des plaintes a transmis cette écriture à la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral (ci-après: la Cour d'appel) comme objet de sa compétence et en a informé A.________. La cause a été enregistrée sous le numéro CR.2024.3.
Le même jour, le Président de la Cour d'appel a annoncé sa récusation et a transmis la demande de récusation du 27 mars 2024 à la Vice-présidente de la Cour d'appel, laquelle a annoncé la composition de la Cour aux parties.
Les 4, 5 et 9 avril 2024, les juges Nathalie Zufferey, Patrick Robert-Nicoud et Giorgio Bomio-Giovanascini ont remis à la Cour d'appel leur prise de position respective concernant la demande de récusation formée contre eux par A.________.
Par décision du 11 avril 2024, la Cour d'appel a considéré cette demande de récusation comme une demande de révision de la décision BB.2023.183 du 15 mars 2024 (cf. let. B.a supra) et n'est pas entrée en matière.
C.
C.a. Par acte du 3 mai 2024 (cause 7B_518/2024), A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre la décision de la Cour des plaintes du 15 mars 2024 (BB.2023.183 [cf. let. B.a supra]), en concluant à sa réforme en ce sens que la récusation du juge David Bouverat soit prononcée. À titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de la décision précitée et au renvoi de la cause au "Tribunal pénal fédéral en invitant le Président de la Cour des plaintes à tirer au sort des magistrats des Tribunaux cantonaux non intéressés dans la cause afin de former un collège pour juger de la cause (...), subsidiairement toute mesure est prise pour garantir la composition d'une autorité indépendante et impartiale".
C.b. Par acte du 15 mai 2024 (cause 7B_553/2024), A.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre la décision de la Cour d'appel du 11 avril 2024 (CR.2024.3 [cf. let. B.b supra]), en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants, "en l'invitant à mettre en oeuvre le droit de réplique de M. A.________ ". À titre subsidiaire, il conclut à la réforme de la décision précitée en ce sens que la récusation des juges Nathalie Zufferey, Patrick Robert-Nicoud et Giorgio Bomio-Giovanascini soit prononcée.
C.c. Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures dans la cause 7B_518/2024.
Invités à se déterminer sur le recours dans la cause 7B_553/2024, la Cour d'appel ainsi que les juges intimés Nathalie Zufferey, Patrick Robert-Nicoud et Giorgio Bomio-Giovanascini ont renoncé à déposer des observations.
Considérant en droit :
1.
Les recours dans les causes 7B_518/2024 et 7B_553/2024 sont déposés par un même recourant et traitent d'une même problématique, à savoir la récusation d'autorités pénales. Ils sont certes dirigés contre deux décisions distinctes, lesquelles ont en outre été rendues par des autorités différentes. Toutefois, les griefs soulevés se réfèrent à un même complexe de faits. Partant et pour des raisons d'économie de procédure, il se justifie de joindre ces causes et de statuer dans un seul arrêt (art. 24 al. 3 PCF, applicable par analogie vu le renvoi de l'art. 71 LTF).
2.
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 149 IV 9 consid. 2; ATF 146 IV 185 consid. 2).
Cause 7B_518/2024
3.
3.1. Le Tribunal fédéral connaît des recours contre les décisions rendues en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF). Selon l'art. 79 LTF, le recours est irrecevable contre les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, sauf si elles portent sur des mesures de contrainte. Cette notion se réfère, selon la jurisprudence, aux mesures investigatrices ou coercitives prises, à titre incident, au cours du procès pénal, telles que l'arrestation, la détention, le séquestre, la fouille, la perquisition. Le législateur a ainsi désiré éviter que l'effet de décharge voulu par le transfert des compétences au Tribunal pénal fédéral soit réduit à néant par l'ouverture systématique du recours au Tribunal fédéral. Ainsi, seules les mesures de contrainte telles que la mise et le maintien en détention provisoire et la saisie de biens peuvent faire l'objet d'un recours car il s'agit là de mesures graves qui portent atteinte aux droits fondamentaux (ATF 143 IV 85 consid. 1.2; 136 IV 92 consid. 2.1).
3.2.
3.2.1. En l'espèce, le recourant admet lui-même que, sous cet angle, la décision entreprise, qui émane de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral et concerne une demande de récusation d'un juge pénal fédéral, ne porte pas sur une mesure de contrainte au sens de l'art. 79 LTF, de sorte qu'elle n'est en principe pas attaquable par un recours ordinaire auprès du Tribunal fédéral en vertu du texte clair de cette disposition. Il n'apporte aucun élément permettant de déroger au texte clair de la loi et de "renverser" la jurisprudence rendue sur ce point. En particulier, dans l'arrêt 1B_331/2020 du 23 juillet 2020 auquel le recourant se réfère également, le Tribunal fédéral a retenu que le législateur fédéral n'avait pas jugé la problématique liée à la récusation d'un Procureur fédéral suffisamment importante pour justifier un contrôle juridictionnel subséquent par la Cour suprême de la Confédération et que cet avis liait le Tribunal fédéral. In casu, on ne voit pas en quoi le fait que la demande de récusation concerne un juge du Tribunal pénal fédéral et non un Procureur fédéral permettrait de s'écarter de cette jurisprudence.
3.2.2. Le recourant, qui se plaint d'une violation de l'art. 6 CEDH, sous l'angle du droit à un procès équitable, ne se prévaut d'aucune discrimination fondée sur un critère de distinction concernant une part essentielle de sa personne (cf. ATF 145 I 73 consid. 5.1), ni de circonstances comparables à celles en cause dans les arrêts de la CourEDH traitant des art. 6 et 14 CEDH combinés (cf. arrêt 6B_496/2022 du 27 octobre 2022 et les arrêts CourEDH cités, dans lesquels une discrimination dans l'accès à la justice a été admise lorsque la discrimination était fondée sur le sexe ou l'origine de l'intéressé[e], qui voyait son droit d'accès à un tribunal limité de manière contraire aux garanties conventionnelles).
3.2.3. Le recourant se réfère également en vain à l'art. 13 CEDH. Comme le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de le préciser dans l'arrêt 1B_331/2020 précité, le terme de recours doit être entendu dans un sens large. On n'entend pas par là un recours au sens technique par lequel on obtient une nouvelle décision dans un litige où une autorité s'est déjà prononcée. L'objet de l'art. 13 CEDH est de fournir un moyen au travers duquel les justiciables puissent obtenir, au niveau national, le redressement des violations de leurs droits garantis par la Convention, avant d'avoir à mettre en oeuvre le mécanisme international de plainte devant la Cour (arrêt 1B_331/2020 précité consid. 2 et les références citées).
Cette exigence est respectée en l'occurrence, dès lors que la Cour des plaintes est entrée en matière sur la demande de récusation et a statué sur les griefs présentés par le recourant. Ce dernier a ainsi eu la possibilité de présenter et de faire examiner au fond, par un tribunal répondant aux exigences d'indépendance et d'impartialité requises, les motifs de récusation qu'il entendait faire valoir contre l'intimé, ce qui suffit à satisfaire les garanties déduites de l'art. 6 par. 1 CEDH quant au droit d'accès à un tribunal et de l'art. 13 CEDH quant au caractère effectif de la voie de droit. Une voie de recours au Tribunal fédéral contre cette décision ne s'impose donc pas pour satisfaire aux exigences du droit conventionnel.
3.2.4. Enfin, les art. 29a et 30 al. 1 Cst., dont le recourant invoque la violation, n'imposent pas un double degré de juridiction, mais se bornent à exiger que la décision sur récusation soit prise par un organe judiciaire indépendant, qui jouit d'une pleine cognition en fait et en droit (ATF 133 IV 278 consid. 2.2). Tel est manifestement le cas de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, laquelle est entrée en matière sur la demande de récusation et a examiné la requête de récusation à l'aune de l'art. 56 let. f CPP. On rappellera que cette disposition a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus aux lettres précédentes de l'art. 56 CPP et assure au justiciable une protection équivalente à celle de l'art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH s'agissant des exigences d'impartialité et d'indépendance (ATF 143 IV 69 consid 3.2).
3.3. En définitive, il n'y a pas lieu de s'écarter de la jurisprudence constante selon laquelle le recours est irrecevable contre les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral en matière de récusation en vertu de l'art. 79 LTF.
Il s'ensuit que le recours interjeté contre la décision du 15 mars 2024 est irrecevable.
Cause 7B_553/2024
4.
Selon l'art. 80 al. 1 LTF, le recours est recevable contre les décisions prises par la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral. La décision attaquée est une décision de la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral par laquelle celle-ci a refusé d'entrer en matière sur une demande de révision d'une décision de la Cour des plaintes. Selon la jurisprudence, le recours en matière pénale est ouvert contre une telle décision (ATF 146 IV 185 consid. 2.1-2.3). Le fait que la décision de la Cour des plaintes du 15 mars 2024 - dont il a été considéré que le recourant demandait la révision (cf. let. B.b supra) - ne puisse pas faire l'objet d'un recours au Tribunal fédéral (cf. art. 79 LTF; cf. consid. 3 supra) n'y change rien (cf. arrêt 7B_599/2023 du 30 avril 2024 consid. 1).
Pour le surplus, les autres conditions de recevabilité étant réunies, il y a lieu d'entrer en matière.
5.
5.1. Dans un premier grief d'ordre formel, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, au motif que la Cour d'appel aurait violé son droit à la réplique (art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH). Il reproche à la Cour d'appel de lui avoir transmis les prises de position des intimés en même temps que la décision attaquée, ce qui l'aurait empêché de faire valoir son droit à la réplique.
5.2. Conformément aux art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH, les parties ont le droit d'être entendues. Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable, le droit d'être entendu comprend en particulier le droit, pour une partie à un procès, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre. Il appartient en effet aux parties, et non au juge, de décider si une prise de position ou une pièce nouvellement versée au dossier contient des éléments déterminants qui appellent des observations de leur part. Toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur faculté de se déterminer (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1; 142 III 48 consid. 4.1.1; arrêt 6B_1031/2021 du 28 novembre 2022 consid. 1.2).
5.3. En l'espèce, le grief du recourant apparaît d'emblée mal fondé. La Cour d'appel a certes statué sur la demande de récusation sans donner au recourant la possibilité de répliquer sur les prises de position des intimés. Peu importe toutefois, puisqu'il résulte de la décision attaquée qu'elle a considéré cette demande comme une demande de révision déposée contre la décision BB.2023.183 du 15 mars 2024. Dans la mesure où ladite demande de révision était manifestement irrecevable au sens de l'art. 412 al. 2 CPP, l'autorité précédente n'est pas entrée en matière et a, dès lors, renoncé à ordonner un échange d'écritures, ce qu'elle pouvait faire à ce stade (art. 412 al. 3 CPP a contrario). Le recourant n'invoque pas - et ne démontre a fortiori pas - que les dispositions du droit fédéral relatives à la procédure de révision auraient été violées. Peu importe à cet égard que la Cour d'appel ait invité les intimés à prendre position sur la demande de récusation (cf. art. 58 al. 2 CPP), ce qu'elle n'avait d'ailleurs pas l'obligation de faire vu l'issue de la cause (cf. sur ce point ATF 146 IV 185 consid. 6.6). Le fait que, dans la décision attaquée, cette autorité ait considéré la demande de récusation comme tardive et rappelé la jurisprudence relative aux motifs de récusation invoqués par le recourant n'est pas non plus déterminant, dans la mesure où elle n'a examiné ces éléments que par surabondance. Le recourant n'est donc pas fondé à se plaindre d'une violation de son droit à la réplique au sens de la jurisprudence précitée en relation avec sa demande de révision.
6.
6.1. Le recourant fait valoir qu'en assimilant sa demande de récusation à une demande de révision et en refusant ensuite d'entrer en matière sur celle-ci, en application de l'art. 60 al. 3 CPP en lien avec les art. 80 al. 1 et 410 al. 1 CPP, la Cour d'appel l'aurait privé de l'accès au juge. Il invoque à cet égard une violation des art. 6 et 13 CEDH, ainsi que des art. 29a et 30 Cst.
6.2.
6.2.1. A teneur de l'art. 56 let. f CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est tenue de se récuser lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention. Cette disposition a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus à l'art. 56 let. a à e CPP.
L'art. 56 let. f CPP correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 Cst. et 6 CEDH (ATF 148 IV 137 consid. 2.2; 143 IV 69 consid. 3.2). Il n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du magistrat est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération. Les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 148 IV 137 consid. 2.2; 143 IV 69 consid. 3.2). L'impartialité subjective d'un magistrat se présume jusqu'à preuve du contraire (ATF 136 III 605 consid. 3.2.1; arrêts 7B_189/2023 du 16 octobre 2023 consid. 2.2.1; 7B_156/2023 du 31 juillet 2023 consid. 2.1.1).
Conformément à l'art. 58 al. 1 CPP, la récusation doit être demandée sans délai, dès que la partie a connaissance du motif de récusation, c'est-à-dire dans les six ou sept jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation (arrêt 1B_36/2020 du 8 mai 2020 consid. 2.2 et les arrêts cités), sous peine de déchéance (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3).
6.2.2. Si le motif de récusation n'est découvert qu'après la clôture de la procédure, les dispositions relatives à la révision s'appliquent (art. 60 al. 3 CPP). Cette réglementation suit l'idée de base selon laquelle un tribunal perd sa compétence juridictionnelle en ce qui concerne une affaire déterminée dès qu'il a rendu sa décision (ATF 147 I 173 consid. 4.1 et les références citées; 144 IV 35 consid. 2; arrêt 6B_1055/2020 du 13 juin 2022 consid. 5.3.2). En principe, seule demeure possible la révision des décisions entrées en force (cf. art. 410 al. 1 CPP).
6.2.3. La Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral statue sur les affaires dont le CPP attribue la compétence à l'autorité de recours ou au Tribunal pénal fédéral (art. 37 al. 1 LOAP [loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération; RS 173.71]). En font notamment partie les décisions de récusation selon l'art. 59 al. 1 let. b CPP. Les autres compétences de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral sont réglées à l'art. 37 al. 2 LOAP. Les art. 121 à 129 LTF s'appliquent par analogie à la révision, à l'interprétation et à la rectification des prononcés rendus par la Cour des plaintes en vertu de l'art. 37 al. 2 LOAP (art. 40 al. 1 LOAP). En revanche, les dispositions du CPP sont en principe applicables à la révision des décisions de la Cour des plaintes rendues en application de l'art. 37 al. 1 LOAP (cf. art. 39 al. 1 LOAP). La Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral statue sur les appels et les demandes de révision (art. 38a LOAP).
6.2.4. Selon l'art. 410 al. 1 CPP, la révision peut être demandée par toute personne lésée par un jugement entré en force, une ordonnance pénale, une décision judiciaire ultérieure ou une décision rendue dans une procédure indépendante en matière de mesures.
Aux termes de l'art. 80 al. 1 CPP, les prononcés qui tranchent des questions civiles ou pénales sur le fond ainsi que les décisions judiciaires ultérieures indépendantes et les décisions de confiscation indépendantes revêtent la forme de jugements. Les autres prononcés revêtent la forme de décisions, lorsqu'ils émanent d'une autorité collégiale, ou d'ordonnances, lorsqu'ils sont rendus par une seule personne. Ces "autres prononcés" ne sont en principe pas susceptibles de révision (ATF 141 IV 269 consid. 2.2.2; arrêts 6B_1055/2020 précité consid. 5.3.3; 6B_442/2021 du 30 septembre 2021 consid. 4.2).
6.2.5. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, l'art. 60 al. 3 CPP (récusation pour des motifs découverts ultérieurement) n'est applicable qu'aux prononcés pénaux sur le fond rendus à l'issue de la procédure principale (au sens de l'art. 410 al. 1 CPP) clôturée et entrée en force (ATF 146 IV 185 consid. 6.5; arrêts 7B_599/2023 du 30 avril 2024 consid. 2; 6B_1055/2020 précité consid. 5.3.4; 6B_30/2018 du 21 juin 2018 consid. 1.2). Selon l'ATF 146 IV 185 précité, il convient de distinguer les motifs de récusation et de révision, d'une part, et les prononcés susceptibles de faire l'objet d'une révision, d'autre part. L'art. 60 al. 3 CPP autorise certes des motifs de récusation découverts ultérieurement (en tant que motifs de révision), mais n'étend pas les jugements et les prononcés de fond susceptibles de faire l'objet d'une révision (au-delà des art. 410 al. 1 et 80 al. 1 CPP) aux ordonnances et aux décisions (ATF 146 IV 185 consid. 6.4 et les références doctrinales citées; critique : RIEDO/MEILE, ZBJV 12/2021, pp. 739 ss; arrêt 6B_1055/2020 précité consid. 5.3.4).
6.3. En l'espèce, la Cour d'appel a considéré que dans la mesure où la demande de récusation du 27 mars 2024 était postérieure à la décision (non sujette à recours) BB.2023.183 du 15 mars 2024, seule la voie extraordinaire de la révision demeurait ouverte. En l'absence de procédure spéciale (à distinguer de la procédure régie par le CPP), il convenait donc d'interpréter la "demande de récusation" déposée par le recourant comme une demande de révision de la décision BB.2023.183 et de déterminer si cette décision était susceptible de faire l'objet d'une révision selon les règles du CPP (art. 410 ss CPP; ATF 146 IV 185 consid. 6.5).
Sur ce dernier point, la Cour d'appel a retenu que la décision BB.2023.183 du 15 mars 2024, rendue par la Cour des plaintes en application de l'art. 59 al. 1 let. b CPP, portait sur une demande de récusation à l'égard du juge David Bouverat. Elle ne tranchait pas une question pénale sur le fond et ne constituait donc pas un jugement. Il s'agissait au contraire d'une décision au sens de l'art. 80 al. 1, 2 e phr., CPP, laquelle n'était pas susceptible de révision (ATF 146 IV 185 consid. 6.1 ss). Au demeurant, indépendamment de l'issue de la procédure devant la Cour des plaintes, la procédure ouverte contre le recourant était pendante devant l'autorité de première instance. Aussi, la cause n'avait pas été définitivement tranchée à ce stade. Pour ce motif déjà, la voie de la révision n'était pas ouverte contre la décision de la Cour des plaintes BB.2023.183 du 15 mars 2024 et la demande de révision formée par le recourant était dès lors manifestement irrecevable (art. 412 al. 2 CPP).
6.4.
6.4.1. Cette appréciation ne prête pas le flanc à la critique. En effet, en l'occurrence, aucune procédure au fond au sens de l'art. 410 al. 1 CPP (en relation avec l'art. 80 al. 1, 1re phr., CPP) n'a été clôturée. La décision BB.2023.183 du 15 mars 2024 constitue une décision rendue dans le cadre de la procédure de première instance qui ne met pas fin à la procédure (art. 59 al. 1 let. b en relation avec l'art. 80 al. 1, 2e phr., CPP), et la demande de récusation déposée ultérieurement est dirigée contre des juges pénaux fédéraux ayant précédemment participé à la procédure de récusation (contre le juge David Bouverat; cf. art. 59 al. 1 let. c CPP). Or, comme relevé ci-avant, les ordonnances et décisions incidentes ne sont en principe pas susceptibles de révision, seuls l'étant les jugements au fond entrés en force selon l'art. 410 al. 1 CPP. Le cas d'espèce est similaire à celui jugé dans l'ATF 146 IV 185 précité, où il était question de la révision de décisions de récusation prises contre le Procureur général de la Confédération en raison de la découverte ultérieure de motifs de récusation contre l'un des juges du Tribunal pénal fédéral ayant pris part à ces décisions. Cela étant, il n'y a pas lieu, in casu, de s'écarter de cette jurisprudence selon laquelle l'art. 60 al. 3 CPP (récusation pour des motifs découverts ultérieurement) n'est applicable qu'aux prononcés pénaux de fond rendus à l'issue de la procédure principale (au sens de l'art. 410 al. 1 CPP) clôturée et entrée en force. Partant, c'est à juste titre que la Cour d'appel a considéré la demande de récusation déposée par le recourant comme une demande de révision et qu'elle a appliqué les dispositions procédurales de l'art. 410 al. 1 CPP en relation avec l'art. 60 al. 3 CPP. Le refus d'entrer en matière prononcé par cette autorité est donc conforme au droit fédéral.
6.4.2. Le recourant soutient que l'application de l'art. 60 al. 3 CPP en lien avec les art. 80 al. 1 et 410 al. 1 CPP le priverait de l'accès au juge au sens des art. 6 et 13 CECH.
Cette critique est vaine. Conformément à la jurisprudence, si la partie connaît un motif de récusation concernant le membre d'une autorité, elle doit l'invoquer sans tarder, peu importe qu'elle ignore si la personne en question sera appelée à statuer (cf. ATF 139 III 120 consid. 3.2.1 s'agissant des juges; arrêts 1B_420/2020 du 28 octobre 2020 consid. 3.2 et 6B_851/2018 du 7 décembre 2018 consid. 4.1.3 s'agissant des procureurs). En l'occurrence, à l'appui de sa demande de récusation formée le 27 mars 2024, le recourant invoquait les rapports professionnels entre le juge de la Cour des affaires pénales David Bouverat et les juges de la Cour des plaintes qui avaient statué sur sa demande (dont les noms lui avaient été communiqués lors de la notification de la décision du 15 mars 2024), ainsi que la collaboration plus étroite entre certains d'entre eux et le juge Bouverat. Or, c'est à tout le moins depuis début novembre 2023, soit depuis la saisine de la Cour des plaintes - à laquelle il a lui-même transmis sa réplique sur les observations du juge David Bouverat ensuite de sa demande de récusation déposée contre ce dernier le 24 octobre 2023 - que le recourant savait que cette demande serait traitée par ladite autorité; les noms des membres de la Cour des plaintes étant publics (cf. www.bstger.ch, rubriques "Le Tribunal/Les Cours"), il devait donc faire valoir à ce moment-là son motif de récusation contre les juges pénaux fédéraux de la Cour des plaintes concernés (si ce n'est contre l'ensemble de cette autorité), même s'il ignorait la composition exacte de la Cour appelée à statuer sur sa demande.
On n'est donc pas dans le cas de figure où le recourant n'aurait pris connaissance du motif de récusation qu'après la clôture de la procédure de récusation concernant les juges intimés, de sorte qu'il ne saurait se prévaloir d'une violation des garanties de l'accès au juge en raison d'une application des art. 60 al. 3, 80 al. 1 et 410 al. 1 CPP contraire au droit. Le comportement du recourant consistant à se prévaloir de motifs de récusation plusieurs mois après la saisine de l'autorité de recours apparaît même contraire à la bonne foi procédurale, d'autant plus qu'il admet lui-même ne pas ignorer la jurisprudence publiée à l'ATF 146 IV 185 précité.
Au vu de ces éléments, la critique - toute générale - du recourant, selon laquelle l'application de cette jurisprudence au cas d'espèce (application dont il a déjà été démontré qu'elle est conforme au droit [cf. consid. 6.4.1 supra]) impliquerait que des motifs de récusation soulevés contre un juge de la Cour des plaintes et découverts ultérieurement ne pourraient jamais être examinés, est également vaine.
6.5. Le rejet de ces griefs entraîne le rejet du recours, sans qu'il y ait besoin d'examiner les autres moyens, formels ou matériels, soulevés par le recourant en relation avec la motivation surabondante de la Cour d'appel.
Frais
7.
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Les causes 7B_518/2024 et 7B_553/2024 sont jointes.
2.
Le recours dans la cause 7B_518/2024 est irrecevable.
3.
Le recours dans la cause 7B_553/2024 est rejeté.
4.
Les frais judiciaires afférents au recours 7B_518/2024, arrêtés à 800 fr., et ceux afférents au recours 7B_553/2024, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral.
Lausanne, le 24 octobre 2024
Au nom de la IIe Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Abrecht
Le Greffier : Valentino