5A_557/2024 23.10.2024
Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_557/2024
Arrêt du 23 octobre 2024
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président,
von Werdt et Bovey.
Greffier : M. Piccinin.
Participants à la procédure
1. A.________,
2. B.________ SA,
3. C.________ SA,
tous les trois représentés par Me Robert Fox, avocat,
recourants,
contre
1. Fondation D.________,
2. E.________,
tous les deux représentés par
Me Laurent Pfeiffer, avocat,
intimés.
Objet
séquestre (vraisemblance de la créance, sûretés),
recours contre l'arrêt de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 3 juin 2024 (KE23.037170-240195/240167 118).
Faits :
A.
A.a. Le 31 juillet 2023, sur requête de Fondation D.________ (ci-après: la Fondation) et E.________, la Juge de paix du district de Lavaux-Oron (ci-après: la juge de paix ou la première juge) a rendu trois ordonnances de séquestre distinctes, dirigées respectivement contre A.________, la société B.________ SA (ci-après: B.________ SA) et la société C.________ SA (ci-après: C.________ SA), chacune pour une créance de 12'887'741 fr. 95 plus intérêts à 5 % l'an dès le 1er janvier 2009, indiquant le cas de séquestre de l'art. 271 ch. 4 LP et portant sur quinze objets à séquestrer mentionnés dans la requête de séquestre.
A.b. Les trois débiteurs ont formé opposition au séquestre, par lettres de leur conseil du 16 août 2023. Par écriture du 13 septembre 2023, ils ont conclu à la fourniture d'une sûreté d'un montant de 2'000'000 fr. par E.________, subsidiairement solidairement avec la Fondation, ou d'un montant et selon des modalités à fixer à dire de justice; à titre principal, ils ont conclu à l'annulation des ordonnances de séquestre scellées contre eux et à la libération de l'ensemble des biens séquestrés; à titre subsidiaire, ils ont conclu à ce que ces ordonnances de séquestre soient réduites à un montant global de 500'000 fr., subsidiairement à un montant à fixer à dire de justice.
A.c. Par prononcé du 15 janvier 2024, la juge de paix a notamment rejeté les oppositions au séquestre (I) et a astreint la Fondation et E.________ à fournir des sûretés d'un montant de 1'200'000 fr. sous forme de garantie bancaire, dans un délai de dix jours dès la notification de la décision, ce sous peine de caducité du séquestre (II).
A.d. Par acte du 12 février 2024, A.________, B.________ SA et C.________ SA ont recouru contre ce prononcé en concluant principalement à son annulation, la cause étant renvoyée à l'autorité inférieure pour nouvelle décision dans le sens des considérants; à titre subsidiaire, ils ont conclu à sa réforme en ce sens que les oppositions déposées le 13 septembre 2023 sont admises, que les ordonnances de séquestre scellées le 31 juillet 2023 sont annulées et qu'ordre est donné à l'Office des poursuites du district de Lavaux-Oron de libérer l'ensemble des biens séquestrés.
Par acte du 8 février 2024, la Fondation et E.________ ont également recouru contre le prononcé du 15 janvier 2024 en concluant principalement à la réforme du chiffre II de son dispositif en ce sens qu'ils sont dispensés de fournir des sûretés.
A.e. Par arrêt du 3 juin 2024, expédié le 22 juillet 2024, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud a notamment rejeté le recours de A.________, B.________ SA et C.________ SA (I), a admis celui de la Fondation et E.________ (II), et a réformé le prononcé attaqué en ce sens que le ch. II de son dispositif est supprimé, et a confirmé le prononcé entrepris pour le surplus (III).
B.
Par acte posté le 29 août 2024, A.________, B.________ SA et C.________ SA exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 3 juin 2024, en concluant principalement à sa réforme en ce sens que les oppositions déposées le 13 septembre 2023 sont admises (I), que les ordonnances de séquestre rendues par la Juge de paix du district de Lavaux-Oron le 31 juillet 2023 sont annulées et qu'ordre est donné à l'Office des poursuites du district de Lavaux-Oron de libérer l'ensemble des biens séquestrés propriété de A.________, de B.________ SA et de C.________ SA dans le cadre des affaires précitées, les biens et les comptes étant tous restitués et laissés à la libre disposition de A.________, de B.________ SA et de C.________ SA (II), et que la Fondation et E.________ sont astreints à fournir des sûretés d'un montant d'au moins 1'200'000 fr., sous forme de garantie bancaire, dans un délai de dix jours dès la notification de la décision, ce sous peine de caducité du séquestre (III). À titre subsidiaire, ils concluent à ce que la cause soit renvoyée à l'autorité cantonale pour une nouvelle décision dans le sens des considérants.
Des déterminations n'ont pas été requises.
Considérant en droit :
1.
Le recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF) par une autorité cantonale supérieure statuant sur recours (art. 75 LTF). La valeur litigieuse atteint au moins 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). Les recourants, qui ont été déboutés de leurs conclusions par l'autorité précédente, ont qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).
2.
2.1. La décision sur opposition au séquestre rendue par l'autorité judiciaire supérieure (art. 278 al. 3 LP) porte sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 135 III 232 consid. 1.2; parmi plusieurs: arrêts 5A_352/2024 du 17 septembre 2024 consid. 2; 5A_951/2023 du 10 juillet 2024 consid. 2); le recourant ne peut donc se plaindre que d'une violation de ses droits constitutionnels (ATF 144 III 145 consid. 2). Le Tribunal fédéral n'examine un tel grief que si, conformément au principe d'allégation, il a été invoqué et motivé (art. 106 al. 2 LTF), à savoir expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1). Le recourant ne peut se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en procédure d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition, notamment en se contentant d'opposer sa thèse à celle de l'autorité précédente; les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 142 III 364 consid. 2.4; 140 III 264 consid. 2.3 et les références). En particulier, une décision ne peut être qualifiée d'arbitraire (art. 9 Cst.) que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 145 II 32 consid. 5.1; 144 I 170 consid. 7.3; 141 III 564 consid. 4.1); il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 148 III 95 consid. 4.1; 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; 144 I 113 consid. 7.1, 170 consid. 7.3; 142 II 369 consid. 4.3).
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ne peut obtenir la rectification ou le complètement des constatations de fait de l'arrêt cantonal que s'il démontre la violation de droits constitutionnels, conformément au principe d'allégation susmentionné (cf. supra consid. 2.1), étant précisé qu'en matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 148 I 127 consid. 4.3; 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF; ATF 141 IV 249 consid. 1.3.1; 140 III 264 consid. 2.3 et les références).
3.
Les recourants se plaignent d'arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'application du principe de la transparence (levée du voile social; Durchgriff).
3.1.
3.1.1. Le juge du séquestre statue en se basant sur la simple vraisemblance des faits. Les faits à l'origine du séquestre sont rendus vraisemblables lorsque, se fondant sur des éléments objectifs, le juge acquiert l'impression que les faits pertinents se sont produits, mais sans qu'il doive exclure pour autant la possibilité qu'ils se soient déroulés autrement (ATF 138 III 232 consid. 4.1.1). Le point de savoir si le degré de vraisemblance requis par le droit fédéral est atteint dans le cas particulier ressortit à l'appréciation des preuves (ATF 138 III 232 consid. 4.1.1; 130 III 321 consid. 5 et les références). La décision d'opposition au séquestre n'est susceptible que d'un recours au sens des art. 319 ss CPC, de sorte que l'autorité cantonale n'intervient, sous réserve de nova voire de pseudo-nova (cf. art. 278 al. 3 LP réservé par l'art. 326 al. 2 CPC), que si le juge de première instance a retenu de manière arbitraire la simple vraisemblable des faits (art. 320 let. b CPC; arrêts 5A_810/2023 du 1er février 2024 consid. 4.1.1, publié in SJ 2024 p. 544; 5A_582/2012 du 11 février 2013 consid. 3.1).
S'agissant de l'application du droit, le juge du séquestre procède à un examen sommaire du bien-fondé juridique, c'est-à-dire un examen qui n'est ni définitif, ni complet, au terme duquel il rend une décision provisoire (ATF 138 III 232 consid. 4.1.1). L'autorité cantonale de recours examine avec une pleine cognition la violation du droit fédéral (art. 320 let. a CPC; arrêt 5A_582/2012 précité consid. 3.2 et la référence).
3.1.2. Conformément à l'art. 271 al. 1 LP, seuls les biens du débiteur, soit les choses et droits qui lui appartiennent juridiquement, et pas seulement économiquement, peuvent être frappés par un séquestre. Doivent à l'inverse être considérés comme biens de tiers tous ceux qui, en vertu des normes du droit civil, appartiennent à une personne physique ou morale autre que le débiteur; en principe, seule l'identité juridique est déterminante en matière d'exécution forcée (arrêts 5A_208/2023 du 10 juillet 2024 consid. 5.1; 5A_113/2018 du 12 septembre 2018 consid. 8.1, non publié aux ATF 144 III 541, mais in RSPC 2019 n° 2217 p. 177 et in Pra 2019 n° 98 p. 966).
Dans des circonstances particulières, un tiers peut toutefois être tenu des engagements d'un débiteur avec lequel il forme une identité économique. Il en va ainsi dans l'application du principe de la transparence (art. 2 al. 2 CC en lien avec l'art. 272 al. 1 ch. 3 LP; arrêt 5A_925/2012 et 5A_15/2013 du 5 avril 2013 consid. 9.1, publié in SJ 2013 I 463). Ce principe suppose, tout d'abord, qu'il y ait identité des personnes conformément à la réalité économique ou, en tout cas, la domination économique d'un sujet de droit sur l'autre; il faut ensuite que la dualité soit invoquée de manière abusive, c'est-à-dire pour en tirer un avantage injustifié (ATF 144 III 541 consid. 8.3.2 et les références). Plus précisément, s'agissant de cette condition de l'abus de droit, il n'y a pas de définition spécifique au Durchgriff. On généralise seulement, de jurisprudence constante, qu'il n'y a pas besoin que la fondation elle-même de la personne morale poursuive des buts abusifs, mais qu'il suffit que la personne morale soit utilisée de manière abusive ou de se prévaloir de manière abusive de la dualité juridique pour ne pas remplir des obligations légales ou contractuelles. On exige également une accumulation de comportements différents et extraordinaires en ce sens qu'il en résulte une machination et atteinte qualifiée d'un tiers. Ainsi, toute confusion de patrimoines ne constitue pas un cas d'application du principe de la transparence. Les cas où les sphères et patrimoines du sociétaire et de la personne morale sont confondus constituent un indice qui peut conduire à lever le voile social, mais il faut encore que, dans le cas concret, il en résulte un abus de droit (ATF 144 III 541 consid. 8.3.2 et les références; sur le tout: arrêts 5A_10/2021 du 1er juillet 2021 consid. 3.4.2.2; 5A_824/2020 du 12 février 2021 consid. 3.3.2.2).
3.2. En l'espèce, la cour cantonale a retenu qu'il résultait du dossier que A.________ était prévenu de gestion déloyale et faux dans les titres. Il lui était en substance reproché d'avoir géré les avoirs de la Fondation sans respecter le cadre du mandat de gestion, soit en opérant des investissements très importants dans des catégories de produits structurés ne présentant pas une garantie de capital suffisante, ainsi que dans des produits financiers non autorisés, de sorte que la Fondation aurait essuyé de lourdes pertes. II lui était également fait grief d'avoir perçu des rétrocessions à l'insu de la Fondation, d'avoir multiplié les transactions afin d'augmenter ses revenus sous forme de commissions (barattage) et d'avoir prélevé des frais supérieurs à ceux qui avaient été convenus. Il résultait par ailleurs du dossier pénal que dans le cadre de son activité délictueuse, A.________ avait créé plusieurs sociétés, et notamment la société F.________, qu'il dominait économiquement. L'intéressé était d'ailleurs administrateur président avec signature individuelle des sociétés recourantes. Il ressortait en outre du registre des actionnaires que l'actionnariat de la société B.________ SA était composé de membres de la famille de A.________, à savoir G.________, H.________, I.________ et J.________, tandis que celui de la société C.________ SA était composé de K.________ et L.________ SA, dont A.________ était l'administrateur. Ces différents éléments suffisaient pour retenir, au stade de la vraisemblance en tout cas, l'application du principe de la transparence, A.________ ayant apparemment, au travers de relations familiales, la mainmise sur les sociétés recourantes, dont l'indépendance ne semblait être invoquée que pour se soustraire à l'exécution forcée.
3.3. Les recourants " rappellent " notamment que A.________ n'est pas actionnaire des sociétés B.________ SA et C.________ SA, mais simplement leur administrateur et qu'il n'est par ailleurs pas le seul à disposer d'une signature individuelle, M.________ détenant le pouvoir de signature individuelle en sa qualité d'administrateur, ce que l'autorité cantonale avait arbitrairement écarté de sa motivation. Les recourants relèvent encore, " par surabondance ", que s'il est vrai que les actionnaires des sociétés recourantes sont liés par des relations familiales, les personnes membres de l'actionnariat ne sont en revanche pas les mêmes entre les sociétés. Il en allait de même des sièges des sociétés recourantes, de leur domaine d'activité, de leurs clients et de leurs employés. Dans ces circonstances, les simples liens familiaux ne pouvaient démontrer, selon les recourants, une quelconque forme de dépendance entre les sociétés B.________ SA et C.________ SA et A.________, si bien que l'on ne se trouvait pas dans l'un des cas envisagés par l'ATF 144 III 541, " notamment ".
Les recourants exposent en outre que B.________ SA et C.________ SA sont des sociétés ayant un fonctionnement propre et un siège en Suisse. La dualité entre les recourants n'était " ainsi " pas invoquée pour éviter une exécution forcée. Ils " rappellent " que B.________ SA est défenderesse dans le cadre de la procédure au fond. Appliquer le principe de la transparence, même au stade de la vraisemblance, revenait à violer ses droits de partie et, de surcroît, à créer un cas de séquestre qui n'est pas prévu par la loi, ainsi qu'à contourner les dispositions légales de la LP. Le même raisonnement valait " mutatis mutandis " pour C.________ SA. L'ensemble des biens et des actifs des sociétés précitées devait donc échapper à la mise sous mains de la justice.
Selon les recourants, les faits retenus par l'autorité cantonale ne sauraient " en tout état de cause " justifier que l'on retienne le principe de la transparence dans le cas d'espèce, dès lors que, selon la jurisprudence, ce principe ne trouvait application que dans des circonstances exceptionnelles. Or, seul le recourant vit à l'étranger, alors que les sociétés recourantes sont des sociétés anonymes suisses. Les intimés n'avaient nullement établi que le recourant avait transféré de manière abusive des biens aux sociétés recourantes dans le but de leur porter préjudice. Si les sociétés recourantes étaient réellement des sociétés écrans, la présente procédure et celle au fond devraient uniquement concerner le recourant. Pourtant, tel n'était pas le cas puisque " les actions " avaient été ouvertes contre les sociétés recourantes également, qui ont " bel et bien " qualité de partie. L'autorité cantonale s'était bornée à constater que le recourant disposait d'une signature individuelle et que l'actionnariat de B.________ SA et C.________ SA était notamment composé des membres de sa famille. On peinait à comprendre pour quelle raison ces circonstances étaient exceptionnelles. En ce sens, les biens de chaque société suisse, dont l'administrateur disposerait d'une signature individuelle et vivrait à l'étranger, seraient forcément frappés d'un séquestre, selon la motivation de l'arrêt entrepris. Bien que seule l'exigence de la vraisemblance soit requise à ce stade, une telle motivation " reflétait un raccourci dans la réflexion ", raccourci qui plus est arbitraire. Le raisonnement de l'autorité cantonale contrevenait ainsi au sentiment de justice et d'équité, " frisant même l'inégalité de traitement ".
3.4. Il résulte de la jurisprudence susrappelée (cf. supra consid. 3.1.2) que l'application du principe de la transparence suppose, premièrement, qu'il y ait identité de personnes, conformément à la réalité économique, ou en tout cas la domination économique d'un sujet de droit sur l'autre. Il faut, deuxièmement, que la dualité soit invoquée de manière abusive, c'est-à-dire pour en tirer un avantage injustifié. Tel est notamment le cas si l'identité économique absolue entre le débiteur et le tiers n'est ni contestable ni sérieusement contestée et que la dualité des sujets n'est invoquée qu'aux fins de se soustraire abusivement à l'exécution forcée.
La cour cantonale a considéré, au stade de la vraisemblance, que ces conditions étaient en l'occurrence réunies, retenant que le recourant formait une unité économique avec les sociétés recourantes et que celui-là s'était prévalu abusivement de la dualité formelle existant avec celles-ci, notamment en vue de se soustraire aux prétentions des intimés.
S'agissant de la première condition, aucun arbitraire au sens susrappelé (cf. supra consid. 2.1) ne saurait être retenu dans la mesure où, selon la jurisprudence, la mainmise d'une personne juridique sur une société anonyme ne se traduit pas nécessairement par la possession de l'ensemble ou de la majorité des actions de cette société. D'autres formes de dépendance sont en effet envisageables, notamment au travers de relations familiales ou amicales (arrêts 4A_384/2008 du 9 décembre 2008 consid. 4.1, publié in SJ 2009 I p. 424; 5P.127/2003 du 4 juillet 2003 consid. 2.2), comme l'a retenu en l'espèce la cour cantonale sans être contredite sur ce point d'une manière argumentée, conforme au principe d'allégation (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1). Les recourants s'en tiennent en effet à opposer, de manière appellatoire, leur propre point de vue, exposé de surcroît " par surabondance " alors que la question apparaît en l'occurrence décisive.
Reste encore à savoir si c'est sans arbitraire que la cour cantonale a considéré qu'il pouvait être fait abstraction de la personnalité juridique formelle des sociétés recourantes en raison de circonstances particulières dénotant l'existence d'un abus. Bien que leur motivation soit relativement succincte, il apparaît que les juges cantonaux ont, pour l'essentiel, repris les indices retenus par la première juge (cf. arrêt attaqué, consid. V.b.cc in initio), dont le raisonnement a notamment été reproduit dans la partie en fait de l'arrêt querellé (cf. arrêt attaqué, consid. 2). En rejetant le grief des recourants relatif à l'application du principe de la transparence, force est d'admettre qu'ils ont confirmé la décision de la juge de paix non seulement dans son résultat mais également dans ses motifs. Or cette magistrate a fait application du principe de la transparence en raison de l'implication des sociétés recourantes dans la gestion de fortune litigieuse résultant non seulement du fait de l'existence des conventions produites mais également des montages économiques réalisés par le recourant, rendus vraisemblables par les pièces au dossier et la multiplication des sociétés que celui-ci contrôlait. À cela s'ajoutait que les expertises produites démontraient que le fonds N.________ avait été créé par et pour le recourant à travers la société F.________ dont il était le bénéficiaire économique - autrement dit que ce fonds était un instrument articulé autour du recourant pour lui permettre d'investir les avoirs de ses clients en s'affranchissant des instructions des mandants, encaisser des ristournes et des rétrocommissions et se faire rémunérer et rémunérer une collaboratrice en toute opacité - et que ce fonds appartenait à la structure panaméenne F.________ qui appartenait elle-même à la O.________ SA, soit B.________ SA. S'agissant de la qualité de partie de C.________ SA, la juge de paix a relevé que le séquestre pénal portait notamment sur un objet mobilier propriété de cette société et que la Chambre patrimoniale cantonale du canton de Vaud, autorité saisie de l'action au fond, avait rejeté une requête de division de cause présentée par cette société. On ne saurait dès lors considérer, comme le font les recourants, que la cour cantonale n'aurait tenu compte d'aucune circonstance exceptionnelle justifiant qu'il soit fait en l'espèce abstraction de la dualité juridique et, partant, application du principe de la transparence. En s'abstenant de discuter, conformément au principe d'allégation (art. 106 al. 2 LTF), la portée des indices énumérés ci-dessus, que la cour cantonale a en définitive fait siens, même si elle n'en a rappelé que certains dans la partie en droit de son arrêt traitant du grief relatif au principe de la transparence, la critique des recourants, insuffisamment motivée, manque sa cible. Le Tribunal de céans ne peut donc que constater que la cour cantonale a sans arbitraire retenu que l'indépendance juridique des sociétés recourantes conduit, dans le cadre d'un examen fondé sur la vraisemblance, à un abus de droit.
4.
En lien avec la suppression des sûretés, les recourants se plaignent d'une violation arbitraire (art. 9 Cst.) de l'art. 273 al. 1 LP ainsi que d'une violation de leur droit d'être entendus (art. 29 al. 2 Cst.), sous l'aspect du droit à une décision motivée.
4.1. En vertu de l'art. 273 al. 1 LP, le créancier répond du dommage qu'un séquestre injustifié peut causer tant au débiteur qu'aux tiers; le juge peut l'astreindre à fournir des sûretés.
Le droit fédéral règle les conditions et le contenu des sûretés prévues par l'art. 273 al. 1 LP. Le séquestrant peut être astreint - tant par l'ordonnance elle-même (art. 274 al. 2 ch. 5 LP) qu'à un stade ultérieur - de fournir des sûretés lorsque la créance ou le cas de séquestre sont douteux (ATF 112 III 112 consid. 2a; 93 I 278 consid. 5a), ou que la créance a perdu de sa vraisemblance par rapport au moment où le séquestre a été autorisé (ATF 113 III 94 consid. 6 et les références). L'autorité de séquestre apprécie librement s'il se justifie d'imposer une garantie (ATF 112 III 112 consid. 2c), dont le Tribunal fédéral ne revoit la fixation que sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst., en relation avec l'art. 98 LTF; arrêt 5A_807/2016 du 22 mars 2017 consid. 5.1 et les arrêts cités).
Les sûretés de l'art. 273 al. 1 LP sont destinées à garantir la prétention en dommages-intérêts du débiteur (ou du tiers) qui découle de l'indisponibilité frappant ses biens (ATF 113 III 94 consid. 9, 10a et 11a; arrêt 5A_165/2010 du 10 mai 2010 consid. 2.3.2, publié in Pra 2011 no 21 p. 144). La responsabilité pour le dommage causé est une responsabilité causale légale. Elle présuppose que le séquestré ait subi un préjudice, que le séquestre fût illicite et qu'il y ait un rapport de causalité entre le séquestre et le dommage. Le montant des sûretés dépend du dommage éventuel dont est menacé le débiteur en cas de séquestre injustifié (ATF 113 III 94 consid. 12; 93 I 278 consid. 5b). Parmi les éléments pertinents pour apprécier ce dommage éventuel figurent la durée prévisible du procès en validation de séquestre ainsi que les intérêts des emprunts que le débiteur peut devoir contracter pour pallier la privation de ses avoirs (ATF 113 III 94 consid. 11a et 11b; arrêt 5A_165/2010 précité consid. 2.3.1 à 2.3.3). Il appartient au débiteur de rendre vraisemblable l'éventuel dommage résultant du séquestre (ATF 126 III 95 consid. 5c).
4.2. En l'espèce, la cour cantonale a constaté que la première juge avait fixé le montant des sûretés à 1'200'000 fr., soit approximativement 10 % du montant du séquestre. Ce montant n'était dès lors pas fondé sur un dommage établi par les recourants. Ceux-ci s'étaient d'ailleurs bornés sur ce point à des allégations toutes générales et avaient invoqué des pièces insuffisantes, à savoir la pièce 1006, irrecevable et relative au surplus aux charges d'exploitation de B.________ SA d'il y a trois ans (2021), et la pièce 1007, soit un échange de courriels avec une banque. Ils n'avaient ainsi pas établi les éléments du dommage auquel les exposerait l'indisponibilité de leurs avoirs. Pour ces motifs, le moyen des recourants tendant à l'augmentation des sûretés devait être rejeté et le recours des créanciers séquestrants admis, le prononcé attaqué étant réformé en ce sens que le chiffre Il de son dispositif est supprimé.
4.3. Les recourants considèrent que la cour cantonale " cède à l'arbitraire " lorsqu'elle affirme qu'ils n'ont pas établi leur dommage. Ils lui reprochent d'avoir " purement et simplement " écarté la " prétendue créance de base ", alors que celle-ci s'élèverait à plus de 12'000'000 fr., soit, " à l'évidence ", un montant " plus que conséquent ". De surcroît, il serait, selon eux, " manifeste " qu'un tel séquestre, " qui plus est injustifié ", avait pour effet de priver les sociétés séquestrées des moyens leur permettant de poursuivre leurs activités et de couvrir leurs charges salariales, sociales et même fiscales. Les recourants font également grief à la cour cantonale d'avoir arbitrairement omis de tenir compte de la durée de la procédure. En effet, déjà en 2024, B.________ SA s'était vue refuser le renouvellement du taux fixe pour cinq ans de 2.35 %, en raison du séquestre de ses avoirs. La banque P.________ avait ainsi conditionné la poursuite de son financement à un taux d'intérêts variable de 2.95 %. À la période précitée, la société subissait déjà un surcoût de 0.6 %, correspondant à un montant minimum de 41'000 fr. Dans ces circonstances, tout portait à craindre que le préjudice subi du fait du " séquestre injustifié " ne ferait qu'accroître. Les éléments précités, dont notamment la pièce 1007, n'avaient nullement été pris en considération par la cour cantonale, ce de manière arbitraire et en violation du droit d'être entendu, ainsi que de la jurisprudence. Les recourants ajoutent qu'" [e]n tout état de cause ", le principe du dommage aurait au moins dû être apprécié à l'aune de l'art. 42 al. 2 CO.
4.4. Une telle motivation, essentiellement appellatoire, ne saurait valablement remettre en cause les motifs de l'arrêt attaqué. Cela étant, il est de jurisprudence constante que les sûretés doivent être calculées en tenant compte du dommage éventuel résultant ou qui pourrait résulter du séquestre pour le débiteur, et non pas en tenant compte du montant de la créance sur laquelle se fonde le séquestre (ATF 126 III 95 consid. 5c). Les considérations des recourants sur le montant " plus que conséquent " de la " prétendue créance de base " sont sans aucune pertinence. Quant au fait que la banque P.________ a conditionné la poursuite du financement de la société B.________ SA à un taux d'intérêts variable de 2.95 %, il ne permet pas de retenir que les recourants auraient allégué et rendu vraisemblable, ainsi qu'ils en avaient la charge, qu'ils auraient dû emprunter pour pallier la privation de la créance séquestrée ou avoir manqué des affaires (cf. arrêts 5A_757/2010 du 20 avril 2011 consid. 3.2.2; 5P.262/1995 du 19 septembre 1995 consid. 4c). C'est donc sans arbitraire et sans violer le droit d'être entendu des recourants que la cour cantonale a considéré que la pièce 1007 était insuffisante. Pour ce qui est de l'application de l'art. 42 al. 2 CO, il n'apparaît pas que les recourants auraient invoqué la violation de cette disposition en instance cantonale, de sorte que leur critique sur ce point ne saurait être entendue, faute d'épuisement matériel des instances (art. 75 al. 1 LTF; ATF 143 III 290 consid. 1.1). Au demeurant, ils ne démontrent nullement que les conditions pour que le dommage soit équitablement déterminé par le juge seraient en l'espèce réunies (cf. à ce sujet, OGer ZH, 3.5.2019, in ZR 2019 p. 215 consid. V.2 et V.4.3). Autant que recevable, la critique doit être rejetée.
5.
En définitive, le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les recourants, qui succombent, supporteront solidairement les frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens aux intimés, qui n'ont pas été invités à répondre (art. 68 al. 1 LTF).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 30'000 fr., sont mis solidairement à la charge des recourants.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 23 octobre 2024
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Herrmann
Le Greffier : Piccinin