Art. 29 al. 2 Cst. ; 25 al. 2, 48 al. 1 lit. c PA ; 45, 50, 54 LDA

L’ubiquité des œuvres, le nombre d’utilisateurs et d’utilisations, de même que le progrès technique contraignent les auteurs à recourir à une société de gestion collective. Celle-ci agit comme intermédiaire entre les ayants droit et les utilisateurs, sur la base de tarifs négociés approuvés par la CAF (consid. 4.2.1). La société répartit les redevances perçues en se fondant sur un règlement approuvé par l’IPI, selon les prescriptions de l’art. 49 LDA (consid. 4.2.2). Les règles de l’art. 45 LDA protègent les ayants droit et les utilisateurs. Les sociétés de gestion agissent à titre fiduciaire et, pour cette raison, elles sont tenues d’administrer leurs affaires selon les règles d’une gestion saine et économique, ce qui implique de renoncer à tout arbitraire, de procéder selon des règles fixes et de minimiser les frais de gestion. L’obligation d’agir selon des règles déterminées et selon le principe d’égalité de traitement a pour corollaire d’exercer les tâches de manière transparente et prévisible. De là découle le devoir d’établir des règles de répartition et des tarifs. Si les sociétés de gestion ont l’interdiction de viser un but lucratif, c’est parce qu’elles sont au service des ayants droit originaires et qu’elles doivent leur reverser tout l’argent perçu, après couverture des frais. Enfin, l’obligation de conclure des contrats de représentation réciproque selon l’art. 45 al. 4 LDA a pour but d’offrir aux ayant droit suisses une gestion simple de leurs droits à l’étranger (consid. 4.2.3). Le contrôle de la Confédération sur les sociétés de gestion concerne d’une part les tarifs, d’autre part la conduite des affaires. Le premier est exercé par la CAF et porte sur les rapports externes de la société avec les utilisateurs, le second est du ressort de l’IPI et concerne avant tout les relations internes de la société avec ses membres (consid. 4.2.5). La surveillance de la CAF s’étend à l’équité du tarif, mais l’autorité reconnaît une certaine liberté de disposition et une certaine autonomie aux sociétés de gestion. En revanche, le contrôle de l’IPI est limité à la légalité (consid. 4.2.6). L’abus, l’excès ou le non-exercice du pouvoir d’appréciation relèvent du contrôle de la légalité (consid. 4.2.7). Avec la révision totale de la LDA en 1989, la surveillance de l’Etat sur les sociétés de gestion a été renforcée (consid. 4.3.1). Elle doit assurer la protection des ayants droit et des utilisateurs et une gestion des droits efficiente ; mais au surplus, l’autonomie privée des sociétés doit être préservée (consid. 4.3.2). L’ampleur des coûts totaux de gestion ne dit encore rien sur le respect de l’obligation d’agir économiquement selon l’art. 45 al. 1 LDA. C’est la finalité des moyens investis qui doit être conforme aux normes légales. Si ce n’est pas le cas, la gestion ne saurait être économique au sens de l’art. 45 al. 1 LDA. En l’espèce, les versements litigieux aux anciens directeurs ne peuvent être justifiés par une clause statutaire tolérant des frais administratifs allant jusqu’à un quart des recettes perçues. En effet, il est douteux que l’IPI ait approuvé cette clause, qui ne figure pas dans le règlement de répartition. La question peut toutefois rester ouverte : lesdits versements ont été effectués dans le seul intérêt des trois anciens directeurs, ce qui n’est pas conforme au but des normes réglant la gestion collective et n’est donc pas économique (consid. 4.3.3). Le fait que la recourante soit une coopérative n’y change rien : son autonomie privée n’existe que dans le cadre des dispositions légales. Même s’il était usuel, dans l’économie privée, que l’employeur prenne à sa charge les parts de cotisations sociales dues par ses cadres, cela ne serait pas compatible avec la situation particulière de la recourante et les tâches publiques qu’elle accomplit (consid. 4.3.4). Le respect de la gestion saine et économique est d’autant plus important que la recourante est en position de monopole, ce qui empêche les ayants droit de mandater une autre entité (consid. 4.3.5). Les anciens directeurs sont eux-mêmes responsables de la couverture de prévoyance professionnelle insuffisante qu’ils ont tolérée pendant 20 ans. Par les versements complémentaires subséquents, ils sont mieux traités que si la couverture avait été adéquate dès le départ. La recourante ne prouve pas les raisons qui auraient justifié une prise en charge par l’employeur des parts de cotisations dues par l’employé. L’IPI devait intervenir d’office vu que la gestion n’a pas été saine et économique (consid. 4.3.6). Les mécanismes de contrôle interne de la recourante n’étaient pas suffisants, car le Conseil d’administration avait lui-même décidé des versements litigieux. De plus, l’Assemblée générale n’a pas été informée de manière transparente et l’organe de contrôle n’avait pas à vérifier ces versements. Enfin, le cercle des ayants droit protégés par l’art. 45 LDA est plus large que celui des seuls membres de la recourante (consid. 4.3.7). Il y a en l’espèce une faute qualifiée dans l’exercice du pouvoir d’appréciation, qui devait être sanctionnée par l’IPI dans le cadre de son contrôle de la légalité des actes de gestion (consid. 4.3.9).