Un ressortissant gambien cherchant à être protégé des persécutions qu’il subirait dans son pays d’origine en raison de son homosexualité dépose plusieurs demandes d’asile en Suisse. Débouté à plusieurs occasions par le SEM et le TAF, l’intéressé fait l’objet d’une décision d’expulsion vers la Gambie, dont la législation pénalise les relations homosexuelles. La Cour EDH examine la compatibilité de ce renvoi avec le principe de non-refoulement découlant de l’art. 3 CEDH. La non-connaissance, par les autorités gambiennes, de l’orientation sexuelle de l’intéressé ne saurait écarter le risque de traitement contraire à l’art. 3 CEDH. Effectivement, ladite orientation pourrait encore être découverte par celles-ci dans le futur. La simple pénalisation de l’homosexualité dans l’Etat d’origine ne suffit toutefois pas à établir l’existence d’un risque de traitements contraires à l’art. 3 CEDH, et ce quand bien même les peines prévues à cet égard s’avèreraient très sévères. Il découle de la jurisprudence antérieure de la Cour EDH et de la CJUE, donc la Cour EDH tient compte ici, qu’il convient encore d’examiner si de telles lois sont réellement appliquées, ce qui n’est plus le cas en Gambie. Le risque de traitements prohibés émanant d’actes individuels de certains officiers étatiques ne peut néanmoins pas être écarté. En outre, la discrimination sociétale basée sur l’identité sexuelle en Gambie est une réalité bien établie. Un risque de traitements prohibés émanant d’acteurs privés doit donc être admis. Concernant ce dernier point, la Cour relève le manque de volonté des autorités gambiennes de protéger les personnes homosexuelles de persécutions émanant de particuliers, ce qu’elle met en lien avec le fait que l’homosexualité soit toujours pénalisée par la législation du pays africain. Il découle de ce qui précède que les autorités helvétiques n’ont pas examiné de façon suffisante le risque de traitements contraires à l’art. 3 CEDH émanant d’acteurs non-étatiques en Gambie et le caractère défaillant de la protection étatique contre de tels actes. Un renvoi sans une nouvelle évaluation de ces éléments violerait l’art. 3 CEDH.