Un ressortissant étranger né en Suisse et titulaire d’une autorisation d’établissement fait l’objet d’une expulsion pénale (art. 66a al. 1 let. h CP) d’une durée de cinq ans en raison de la commission d’actes à caractère sexuel sur une mineure. Ces actes lui valent également une condamnation à douze mois de peine privative de liberté avec un sursis de trois ans. Le requérant, adulte de trente-huit ans sans enfants, invoque la protection de sa vie privée (art. 8 CEDH devant les juges de Strasbourg. S’agissant d’un étranger ayant passé l’intégralité de sa vie en Suisse, de solides raisons doivent être avancées afin de justifier son éloignement. La Cour commence par souligner que les infractions dont le requérant s’est rendu coupable ont été commises récemment. La tolérance dont fait normalement preuve la Cour à l’égard des personnes ayant commis des infractions pendant leur adolescence n’a dès lors pas sa place ici. Elle constate également que, si la peine prononcée (douze mois de peine privative de liberté avec un sursis de trois ans) est relativement légère, elle est tout de même supérieure à celle prononcée dans l’affaire Shala c. Suisse, où la peine en question s’élevait à cinq mois et demi, assortie d’un sursis (cf. arrêt de la CourEDH, Shala c. Suisse du 15 novembre 2012, requête no 52873/09). Or, dans cette dernière affaire, la Cour a jugé que l’expulsion du territoire suisse pour une durée de dix ans n’a pas emporté violation de l’article 8 de la Convention. Les infractions commises par le requérant sont considérées comme graves par la Cour, qui relève que l’intégrité sexuelle constitue un bien juridique particulièrement important. En outre, le passé judiciaire du requérant (quatre condamnations au total), le risque de récidive (photos à caractère pédopornographique trouvées sur son téléphone), l’absence de liens sociaux, culturels, familiaux ou professionnels particuliers ainsi que les faibles perspectives de réinsertion (homme âgé de trente-huit ans, n’ayant jamais exercé d’activité professionnelle et ne disposant d’aucune formation) plaident en défaveur de l’intéressé. Concernant ce dernier point, la Cour se rallie à l’avis du TF qui juge que l’activité de serveur exercée par le requérant dans le cadre de l’assistance de probation ou la formation en « permaculture » suivie durant six mois ne sont pas susceptibles de déboucher sur une véritable insertion professionnelle. Partant, une violation de l’art. 8 CEDH ne saurait être retenue.

Dans l’arrêt ultérieur Z c. Suisse, dont les faits sont très similaires, la Cour conclut également à une non-violation de l’art. 8 CEDH alors que le requérant entretient bien des liens sociaux, culturels et familiaux importants avec la Suisse. A cet effet, elle relève de nouveau la gravité des infractions portant atteinte à l’intégrité sexuelle des mineurs mais également les perspectives positives d’intégration du requérant dans son Etat d’origine en cas de renvoi (cf. arrêt de la Cour EDH, Z c. Suisse du 22 décembre 2020, Requête no 6325/15).