ATF 148 I 145 (f)

2021-2022

Responsabilité de l’Etat pour une détention dans des conditions illicites. Le litige dont il est question, à savoir un cas de responsabilité de l’Etat de Vaud en lien avec les conditions de détention provisoires régnant dans l’une de ses prisons, relève du droit public, quand bien même le droit cantonal vaudois place l’action en responsabilité contre l’Etat de Vaud dans la compétence des autorités judiciaires civiles. La IIe Cour de droit public du TF est compétente pour traiter d’un cas de reconnaissance d’une éventuelle responsabilité de l’Etat pour un acte de procédure pénale sur la base du droit public cantonal ; il convient donc, d’entente avec la Cour de droit pénal, de réviser l’ancienne pratique d’après laquelle cette dernière se chargeait de telles causes (consid. 1.1). La question de l’indemnisation d’une éventuelle détention dans des conditions illicites avant jugement ne relève plus que du droit cantonal ordinaire en matière de responsabilité de l’Etat lorsque la procédure pénale est achevée. Tel est le cas en l’espèce, puisque le recourant a entamé ses démarches judiciaires en vue de son indemnisation par l’Etat après son jugement de condamnation (consid. 3.2). Le délai de prescription relatif d’un an prévu par l’art. 7 LRECA/VD pour se prévaloir d’une créance en responsabilité contre l’Etat de Vaud est très bref. A l’instar du délai de l’art. 60 CO, il ne court que lorsque le lésé peut se faire une idée précise de l’importance de l’atteinte dans son ensemble, même si certains actes antérieurs suffisaient déjà à fonder une action ; dans le cadre d’une situation évolutive, le délai de prescription ne court pas avant le terme de l’évolution (consid. 6.3-6.5). Le raisonnement poursuivi par l’instance inférieure aboutit à une application extrêmement stricte des règles en matière de prescription, allant à l’encontre de la jurisprudence établie et restreignant de manière importante le droit fondamental d’accès à la justice des détenus garanti par les art. 30 al. 1 Cst. et 6 CEDH. La motivation à la base de l’arrêt attaqué s’avère ainsi arbitraire (consid. 10).