(C. c. Aktiengesellschaft B.B. Erben, C.B., A.) [affaire connexe à celle traitée dans l’arrêt TF 4A_90/2021 du 9 septembre 2021, résumé ci-dessus]. Recours contre la sentence préjudicielle rendue le 14 janvier 2021 par un Tribunal arbitral avec siège à Zoug. Contrat de consortium contenant une clause d’arbitrage obligeant les parties à entreprendre une tentative de conciliation, devant un conciliateur de leur choix, avant l’introduction d’une éventuelle procédure d’arbitrage, tout accord issu d’une telle conciliation devant être assimilé à une sentence d’accord-parties « au sens de la procédure civile ». A la suite de divergences entre les parties, une procédure de liquidation avait été engagée, et une réunion avait été tenue avec le liquidateur, durant laquelle les parties n’étaient pas parvenues à trouver un accord. Par la suite, les demanderesses (sociétés B.B. et C.B.) avaient entamé une procédure d’arbitrage, procédant à la désignation de leur arbitre en vue de la constitution du tribunal de trois membres prévue par la convention d’arbitrage. Faute de désignation d’un arbitre par les défendeurs, les demanderesses avaient saisi le Président du Tribunal cantonal de Zoug afin qu’il procède à la nomination d’un arbitre en lieu et place des défendeurs. Seul le défendeur 1 avait participé à la procédure devant le Tribunal cantonal. Une fois la décision de nomination publiée au Journal officiel du Canton de Zoug, le défendeur 2 avait demandé une restitution de délai pour faire valoir ses objections, restitution qui lui avait été refusée par une décision contre laquelle il avait recouru, en vain, devant le Tribunal Supérieur du Canton de Zoug. Une fois constitué, le Tribunal arbitral a décidé de limiter la suite de la procédure à la question préalable de la compétence, « y compris la question de la réalisation d’une tentative de conciliation au sens [du Contrat de consortium] ». Après avoir tenu audience, le Tribunal a rendu la sentence attaquée, dans laquelle il s’est déclaré compétent pour connaître du litige entre les parties. Le recourant (défendeur 2) reproche au Tribunal de s’être déclaré à tort compétent, au motif qu’aucune tentative de conciliation valable n’avait été mise en œuvre au préalable, contrairement à ce qui était prévu « en des termes impératifs » par le contrat. Le Tribunal arbitral a constaté que le contrat stipulait en effet qu’une tentative de conciliation devait impérativement être effectuée par les parties, sans cependant prescrire une procédure précise ou d’autres exigences ou délais à observer à cette fin. Dès lors, c’est à bon droit que le Tribunal a conclu, en vertu d’une interprétation objectivée de la convention d’arbitrage (faute d’avoir pu établir la volonté réelle et commune des parties à ce sujet), que toute tentative de trouver une solution à l’amiable par le biais d’un conciliateur désigné par les parties, comme cela avait été fait en l’espèce devant le liquidateur, suffisait à remplir l’obligation de conciliation préalable prévue par le contrat (consid. 3). Quoi qu’il en soit, le Tribunal a retenu, à juste titre, que le recourant avait assumé un comportement contraire à la bonne foi en refusant de participer au processus de liquidation pour ensuite exciper de l’absence de tentative de conciliation. Il sied également de relever que, durant l’arbitrage, les défendeurs ont encore refusé la proposition des demanderesses d’organiser une nouvelle tentative de conciliation (sans l’intervention du Tribunal) en lieu et place de l’audience d’instruction prévue par le calendrier procédural. Dans ces circonstances, l’interdiction de l’abus de droit (art. 2 CC) fait obstacle aux objections du recourant quant au prétendu non-épuisement du préalable de conciliation (consid. 4).
Antonio Rigozzi, Erika Hasler