il s’agit de déterminer si une personne accidentée invalide à 41 % des suites de l’accident, qui s’est vu reconnaître le droit à des séances de physiothérapie après la fixation de la rente en application de l’art. 21 al. 1 let. c LAA, voit son droit maintenu après qu’elle a atteint l’âge de référence AVS, ou si, au contraire, l’assureur LAA était en droit de mettre un terme à cette prestation à ce moment-là. Le litige porte sur l’interprétation de la condition du besoin « pour conserver sa capacité résiduelle de gain » posée par l’art. 21 al. 1 let. c LAA. Il s’agit de savoir si cette condition suppose que l’on puisse encore exiger de la personne assurée qu’elle exploite effectivement sa capacité résiduelle de gain, ce qui n’est plus le cas lorsqu’elle a atteint l’âge de référence. Le TF rappelle dans un premier temps le champ d’application respectif des quatre hypothèses permettant, selon l’art. 21 LAA, de maintenir le droit à la prise en charge de traitements médicaux après que le droit à la rente a été fixé, étant précisé que l’art. 19 LAA prévoit en principe la fin du droit au traitement médical au moment de la fixation de la rente (consid. 3.3 et 4). Il mentionne ensuite les différentes affaires dans lesquelles il a eu à juger de situations proches, mais non identiques, aucun précédent n’ayant donc tranché clairement la question (consid. 5.1). Il mentionne la maigre littérature à ce sujet, et son caractère controversé (consid. 5.2). Il procède ensuite à l’interprétation de l’art. 21 al. 1 let. c LAA. Le TF constate d’abord que le texte de la loi est clair et qu’il n’exige pas que la personne assurée mette effectivement en œuvre sa capacité de travail résiduelle pour donner droit à la prise en charge du traitement (consid. 6.1). Les travaux préparatoires ne sont d’aucune utilité, pas plus que la LAMA qui ne contenait pas de disposition équivalente (consid. 6.2). D’un point de vue systématique, l’art. 21 al. 1 let. c LAA doit être lu en lien avec les art. 18, 19 et 22 LAA. L’octroi de la prise en charge du traitement médical après la stabilisation de l’état de santé est une prestation de durée, qui est en principe protégée au titre de droit acquis. Cette prestation est ainsi comparable à la rente, qui est protégée après l’âge de référence AVS, puisqu’il n’est alors plus possible de la réviser (art. 22 LAA). Si l’on admettait le contraire pour les frais de traitement, cela voudrait dire qu’on aurait des situations dans lesquelles la prise en charge du traitement est supprimée, mais pas le droit à la rente. Les trois autres hypothèses visées par l’art. 21 al. 1 LAA, en particulier par la let. d qui s’adresse aux personnes totalement invalides (100 %), ne prévoient pas la fin du droit au traitement à l’âge de référence ; il serait ainsi étranger de faire de la let. c une exception. S’agissant de déterminer le sens et le but de la norme, le TF discute différents arguments allant dans les deux sens pour, finalement, juger qu’il serait contradictoire de demander aux personnes ayant atteint l’âge de référence de prouver que si elles avaient été en bonne santé, elles auraient continué de travailler au-delà de cet âge, alors qu’il n’est pas exigé des personnes qui ne l’ont pas encore atteint qu’elles mettent en œuvre leur capacité de travail résiduelle pour avoir droit à la prise en charge du traitement sous l’angle de l’art. 21 al. 1 let. c LAA. L’argument décisif reste cependant le non-sens d’une différence de traitement entre les personnes totalement invalides et les personnes partiellement invalides. Pour les premières en effet, la condition est que le traitement permette le maintien de l’état de santé. En l’absence d’indices permettant de conclure à une claire volonté du législateur de traiter différemment ces deux situations, il n’y a pas lieu de le faire. La prise en charge du traitement médical après la fixation de la rente en application de l’art. 21 al. 1 let. c LAA n’est donc pas limitée à l’âge de référence AVS (consid. 6.3.5 et 6.4).
Anne-Sylvie Dupont, Guy Longchamp, Isabella Jorge