Art. 34 CPC
Procédure ; compétence à raison du lieu. Selon l’interprétation jurisprudentielle de l’art. 34 al. 1 CPC, qui correspond à l’art. 19 par. 2 let. a CL 2007, le for peut se trouver dans un lieu où l’employeur n’a aucune sorte d’établissement ni installation fixe (consid. 6). Le for du lieu habituel de l’activité convenue répond à un but de protection du travailleur à titre de partie socialement la plus faible ; c’est pourquoi celui-ci ne peut pas y renoncer valablement par une convention antérieure à la naissance du différend (art. 35 al. 1 let. d CPC, art. 21 par. 1 CL 2007). Il n’est certes pas garanti au travailleur qu’un lieu d’activité habituel, avec le for correspondant, doive être identifié et reconnu, quelles que soient les circonstances particulières de ses propres tâches. On doit néanmoins n’envisager qu’avec retenue la situation singulière où aucun for du lieu habituel de l’activité ne serait disponible. Concrètement, il ne conviendrait pas de retenir que, parce que l’activité administrative d’un collaborateur du service extérieur est globalement secondaire du point de vue quantitatif, ce travailleur ne puisse pas agir en justice là où il pratique régulièrement cette activité, avec ce résultat qu’il ne puisse agir qu’au siège de l’employeuse alors que son travail n’a aucun lien effectif avec ce lieu-ci. En particulier dans la présente contestation, rien ne justifie que le demandeur soit contraint d’ouvrir action dans le canton de Zurich, ou de renoncer à son action, alors que son activité se pratiquait exclusivement en Valais (consid. 9).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 6 CEDH ; 7 et 11 CNUIJE
Procédure ; immunité de juridiction. L’octroi de l’immunité souveraine à un Etat dans une procédure civile poursuit le but légitime d’observer le droit international afin de favoriser la courtoisie et les bonnes relations entre Etats grâce au respect de la souveraineté d’un autre Etat (point 54). Un Etat étranger peut renoncer, notamment par le biais de clauses contractuelles, à son droit d’immunité devant les tribunaux d’un autre Etat (point 57). Le Tribunal fédéral pouvait présumer que, par la clause « Pour toute contestation et pour ce qui n’est pas prévu ou précisé dans le présent contrat, les parties auront recours à l’avis du service du protocole local compétent, et pour autant que les usages diplomatiques le permettent, à la compétence du pouvoir judiciaire local. », la condition d’un consentement exprès prévue par l’art. 7 par. 1 b) de la CNUIJE faisant défaut, et qu’il s’ensuivait que la République du Burundi n’avait pas renoncé à son immunité de juridiction (point 59). Lorsqu’un lien avec l’Etat du for fait défaut, ce dernier n’est plus fondé à revendiquer la prépondérance de sa législation du travail et de sa juridiction en la matière face à un Etat employeur étranger, malgré le lien territorial que constituent le lieu du recrutement de l’employé et le lieu où le travail doit être accompli conformément au contrat (point 61). Or, en l’espèce, la requérante avait sa résidence non pas en Suisse mais en France voisine (point 62). Il en découle que les circonstances de la présente affaire tombent dans le champ d’application de l’art. 11 par. 2 e) de la CNUIJE eu égard au fait que la requérante était ressortissante de l’Etat employeur au moment où l’action a été engagée et qu’elle n’a jamais eu sa résidence permanente dans l’Etat du for (point 63). Considérant les faits de l’espèce et les tâches effectivement confiées à la requérante au sein de la mission permanente, il y a un chevauchement complexe entre les actes jure imperii et jure gestionis accomplis par celle-ci (point 50). En toute hypothèse, la requérante ne se trouve pas dans une situation d’absence d’autre recours, puisque la République du Burundi a indiqué qu’elle pourrait saisir sa juridiction administrative (point 64).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann