Congé immédiat ; manquement grave. Les principes jurisprudentiels développés au regard de l’art. 337 CO ne sont pas sans autre transposables aux rapports de travail de droit public. En ce domaine, le licenciement se fait en général par voie de décision motivée et il est souvent précédé d’une enquête, en particulier quand il s’agit d’étayer ou d’infirmer des soupçons. L’intéressé bénéficie en outre des garanties propres à la procédure administrative, en particulier du droit d’être entendu. Des motifs objectifs (droit d’être entendu, spécificités de la procédure administrative) peuvent justifier selon les cas d’accorder à l’employeur de droit public un délai de réaction plus long qu’en droit privé, mais celui-ci ne doit pas pour autant laisser traîner les choses (rappel de jurisprudence, consid. 4.2.2). En l’espèce, le licenciement immédiat prononcé par la Ville de Genève doit être annulé et l’huissier du musée réintégré dans ses fonctions, le fait qu’il ait eu une altercation avec un usager n’étant pas suffisant au vu de sa grande ancienneté, de sanctions administratives précédentes trop anciennes pour être liées. On peut par ailleurs imaginer que les tentatives de suicide de sa fille, si elles ne l’empêchaient en principe pas d’accomplir ses obligations professionnelles et n’excusent pas son comportement, ont joué un rôle dans sa réaction face à un visiteur qui tenait absolument à se faire servir un café dans un restaurant fermé en raison des restrictions sanitaires dues au Covid-19 et qui a lui-même admis être sorti de ses gonds. On notera encore que selon un rapport évoqué par la Cour cantonale, le vaccin contre le Covid-19 reçu par le recourant la veille de l’altercation peut – au vu des effets indésirables répertoriés de ce vaccin – avoir joué un rôle prépondérant dans l’insomnie et l’épisode d’agitation qui s’en sont suivis (consid. 7.2.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Licenciement ; vaccination obligatoire, militaire ; le licenciement d’un militaire de l’armée suisse ayant refusé de se faire vacciner contre le covid-19 reposait sur des motifs objectivement suffisants, l’obligation de vaccination étant proportionnée, dès lors qu’il s’agissait de pouvoir détacher immédiatement l’intéressé à l’étranger. Selon l’art. 20 al. 1 LPers, l’employé est tenu d’exécuter avec soin le travail qui lui est confié et de défendre les intérêts légitimes de la Confédération et de son employeur. S’agissant du personnel militaire, cette obligation est inhérente à la structure et à la mission de l’armée, l’art. 32 al. 2 LAAM disposant que les militaires doivent obéissance à leurs supérieurs dans les affaires relevant du service. La désobéissance à un ordre – pour autant que celui-ci reste dans les limites du contrat et de la loi – peut constituer à tout le moins un motif objectivement suffisant de résiliation du contrat de travail lorsque l’injonction ou la prescription concerne des intérêts importants de l’employeur (consid. 3.2). La gravité de l’atteinte à un droit fondamental se détermine selon des critères objectifs et la vaccination constitue une atteinte légère, inoffensive et peu douloureuse à l’intégrité corporelle (consid. 3.4.2). Dans le cadre d’un tel rapport de puissance publique spécial, a fortiori lorsque la personne y a librement adhéré, une base légale matérielle, telle qu’une ordonnance, est suffisante si elle peut être rattachée à une base légale formelle même générale (consid. 3.4.4). En l’espèce, l’art. 7 al. 1 OPers-PPOE constitue une base légale suffisante à la mesure en cause, laquelle peut être imposée au personnel des forces spéciales indépendamment des prévisions de l’art. 35 LAAM, qui vise quant à lui à lutter contre des affections transmissibles ou graves en prévenant un risque élevé d’infection (consid. 5.1). Le recourant ne conteste pas que la mesure litigieuse soit apte à atteindre le but visé, soit assurer la disponibilité opérationnelle immédiate du personnel militaire du DRA10 pour des engagements au pied levé à l’étranger dans l’intérêt de la Suisse et ne démontre pas que ce but aurait pu être atteint par une mesure moins incisive (consid. 5.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Fonction publique ; égalité de traitement ; contrats en chaîne ; abus de droit ; handicap ; discrimination. Selon la jurisprudence cantonale genevoise, lorsque l’autorité d’engagement maintient artificiellement une employée ou un employé dans un statut d’auxiliaire par des contrats successifs ininterrompus pour éluder les garanties offertes par la loi aux titulaires d’un emploi fixe, elle commet un abus de droit et la personne concernée doit être considérée comme un membre du personnel régulier (consid. 3.5). La règle de l’art. 8 Cst. interdit toute mesure étatique défavorable à une personne et fondée sur le handicap, sauf si cette mesure répond à une justification qualifiée (rappel de jurisprudence, consid. 4.1). L’interdiction de discrimination de l’art. 5 par. 1 CDPH est directement justiciable (rappel de jurisprudence, consid. 4.2). En l’espèce, les faits que la recourante a allégués et qu’elle a offert de prouver en instance cantonale sont de nature à influer sur la décision à rendre, dans la mesure où il pourrait en résulter que l’intimé se serait écarté, en raison de préjugés liés au handicap de la recourante, d’une pratique administrative qui l’aurait conduit à engager cette dernière à titre pérenne après trois ans comme auxiliaire. C’est donc en violation de l’art. 29 al. 2 Cst. que la Cour cantonale a rejeté les réquisitions de la recourante tendant à l’audition comme témoin de sa médecin traitante, qui pourrait établir les propos tenus par le médecin-conseil de l’intimé, et à la production des pièces qui permettraient d’établir une pratique administrative que les juges cantonaux ont considéré à tort comme d’emblée non pertinente du fait que la recourante n’avait selon le droit cantonal aucun droit à la prolongation de son contrat ni à être engagée dans un autre poste au sein de l’intimé. En effet, s’il devait s’avérer que c’est en raison de préjugés liés au handicap de la recourante (en lien éventuellement avec sa grossesse) que l’intimé s’est écarté d’une pratique administrative consistant à nommer fonctionnaires les auxiliaires ayant occupé un poste sans interruption depuis trois ans (cf. art. 47 al. 3 RPAC) s’ils donnent satisfaction – étant précisé que l’intimé ne conteste pas que des postes correspondant au profil de la recourante étaient ouverts au moment du départ de celle-ci, qui avait alors recouvré une capacité de travail de 50% –, cela serait de nature à constituer une discrimination au sens de l’art. 8 al. 2 Cst. et des art. 5 et 27 par. 1 CDPH, voire au sens de l’art. 3 al. 2 LEg. Il y aurait alors lieu d’examiner les conséquences juridiques d’un tel constat, étant rappelé que la recourante conclut principalement à sa réintégration au sein du personnel de l’intimé avec les aménagements raisonnables nécessaires et subsidiairement au paiement d’une indemnité correspondant à vingt-quatre mois de traitement (consid. 6.2.2). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Christine Sattiva Spring publiée in Newsletter droitdutravail.ch août 2022.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Droit collectif ; reconnaissance syndicale ; loyauté. Le refus des Hôpitaux de reconnaître l’association comme partenaire social pour défaut de loyauté est confirmé. Dès lors que les syndicats ont le droit de défendre les intérêts de leurs membres, le fait qu’un syndicat soit ou ait été en conflit avec l’employeur, voire avec un autre partenaire social, n’est pas suffisant pour retenir un manque de loyauté, pour autant que son comportement reste ou soit demeuré loyal à cette occasion (consid. 6.2). Les condamnations pénales de deux des représentants de l’association constituaient en l’espèce des éléments pertinents pour examiner le critère de la loyauté et ce, même si ces condamnations ne la concernaient pas directement et que l’une d’elles remonte à plusieurs années (consid. 6.5). Lorsque la procédure de reconnaissance est en cours, le futur partenaire social n’a pas à faire pression pour obtenir son statut et les droits qui vont avec, à moins que l’employeur tarde à se prononcer sans motif (consid. 6.5). Le critère de distinction, en l’occurrence l’absence de loyauté, est objectif et de nature à justifier la différence de traitement dénoncée (consid. 7). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par la Prof. Karine Lempen publiée in Newsletter droitdutravail.ch février 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Licenciement collectif ; notion d’établissement ; les licenciements prononcés dans des établissements proches géographiquement doivent être comptabilisés séparément. Chaque office de poste (qui est une filiale) est un « établissement » au sens de l’art. 335d CO, à savoir une structure organisée, qui est dotée en personnel, en moyens matériels et immatériels qui permettent d’accomplir les objectifs de travail et qui bénéficie d’une certaine autonomie, sans que cette autonomie ne doive être financière, économique, administrative, juridique ou ne nécessite la compétence de décider seule d’un licenciement collectif (consid. 5.6).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Egalité femmes-hommes ; discrimination à l’embauche ; degré de preuve. L’art. 6 LEg (allègement du fardeau de la preuve) ne s’applique pas à l’embauche. La personne qui allègue une discrimination à l’embauche doit donc établir qu’elle n’a pas été engagée en raison d’un motif discriminatoire et, en application de l’art. 8 CC, elle doit prouver l’existence de ce motif et son caractère causal dans la décision du refus d’embauche (consid. 2.2). Au vu de la difficulté – voire de l’impossibilité dans la plupart des cas – d’apporter une preuve stricte d’une discrimination à l’embauche, le juge peut se satisfaire d’une preuve fondée sur une vraisemblance prépondérante : le contenu de l’offre d’emploi, la motivation écrite du refus d’embauche, un comportement contradictoire de l’employeur constituent autant d’indices pertinents (consid. 2.4). En faisant abstraction, sans explication, de l’avis des experts de la Commission cantonale de conciliation en matière d’égalité entre les sexes dans les rapports de travail, dont le rapport constitue incontestablement un moyen de preuve pertinent dans un litige portant sur la question d’une discrimination à l’embauche, la Cour cantonale a fait preuve d’arbitraire (consid. 4.4). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Anne Roux-Fouillet publiée in Newsletter droitdutravail.ch avril 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Licenciement abusif ; mobbing ; discrimination. Si le mobbing a provoqué chez le travailleur une baisse de rendement ou une période de maladie et s’il a été toléré par l’employeur en violation de son obligation résultant de l’art. 328 al. 1 CO, celui-ci ne peut pas en tirer argument pour licencier le travailleur, parce que cela reviendrait à invoquer ses propres fautes, soit l’absence de mesures efficaces contre le mobbing, pour en tirer avantage au détriment du travailleur, ce qui est contraire à la bonne foi (rappel de jurisprudence, consid. 4.1). Est rejeté le recours de l’employeuse contre l’arrêt cantonal ayant confirmé sa condamnation à une indemnité de cinq mois de salaire pour licenciement abusif : l’absence de prise de mesures durables et efficaces pour faire cesser la situation de mobbing dont le demandeur était victime (discrimination et racisme), en violation de son devoir de protéger la personnalité de son employé découlant de l’art. 328 CO. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Stéphanie Fuld publiée in Newsletter droitdutravail.ch janvier 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Procédure ; compétence ratione loci ; lieu de travail ; télétravail. Le « lieu où le travailleur exerce habituellement son activité professionnelle » est celui où se situe effectivement et concrètement le centre de l’activité concernée, les circonstances du cas concret étant décisives (tant du point de vue quantitatif que qualitatif). Lorsque le travailleur est occupé simultanément dans plusieurs endroits, prévaut celui qui se révèle manifestement central, du point de vue de l’activité fournie. La recherche de ce lieu doit se faire en fonction des liens effectifs que le travailleur a entretenus avec un certain endroit. Le lieu de travail prédéfini dans le contrat cède le pas devant le lieu où le travailleur a effectivement exercé son activité de façon habituelle. En d’autres termes, la manière dont la relation de travail s’est effectivement déroulée prime sur l’accord théorique préalable, que les parties sont libres de modifier. La seule réserve concerne le cas où le contrat n’est pas venu à chef ou n’a pas été suivi d’effet (consid. 4.2). En cas de travail à distance, par informatique et téléphone, l’endroit (ou les endroits) où était accomplie cette activité est certes digne de considération. Toutefois, il s’agit d’un élément parmi d’autres, voué à s’insérer dans l’appréciation globale des éléments quantitatifs et qualitatifs permettant de désigner le lieu habituel de l’activité (consid. 4.5). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Nathalie Bornoz publiée in Newsletter droitdutravail.ch décembre 2022.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Prohibition de concurrence ; validité ; clientèle. Une clause de prohibition de concurrence fondée sur la connaissance de la clientèle ne se justifie que si l’employé, grâce à sa connaissance des clients réguliers et de leurs habitudes, peut facilement leur proposer des prestations analogues à celles de l’employeur et ainsi les détourner de celui-ci. Ce n’est que dans une situation de ce genre que, selon les termes de l’art. 340 al. 2 CO, le fait d’avoir connaissance de la clientèle est de nature, par l’utilisation de ce renseignement, à causer à l’employeur un préjudice sensible. A l’inverse, lorsque l’employé noue un rapport personnel avec le client en lui fournissant des prestations qui dépendent essentiellement des capacités propres à l’employé, le client attache de l’importance à la personne de l’employé pour lequel il éprouve de la confiance et de la sympathie ; le client attache plus d’importance aux capacités personnelles de l’employé qu’à l’identité de l’employeur (consid. 4.2). En l’espèce, la clause de non-concurrence d’un directeur de société n’est pas valable. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Marie-Christine Balzan publiée in Newsletter droitdutravail.ch mars 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Location de services ; plateforme numérique Uber Eats ; compte tenu de la structure de la plateforme mise en place, Uber n’est pas un simple intermédiaire entre les acteurs (consid. 6.2). L’existence d’une relation de travail doit être examinée pour chaque plateforme en fonction du modèle économique mis en place (consid. 6.4). Les livreurs de la plateforme Uber Eats sont évalués tant par les restaurateurs que par les destinataires. Une évaluation moyenne insuffisante peut conduire à un avertissement, voire à l’exclusion de la plateforme si la note ne s’améliore pas dans le délai imparti. Ce système de notation constitue un moyen de contrôle des livreurs, qui les place dans une relation de subordination à l’égard de la plateforme (consid. 6.5.1). La géolocalisation des livreurs constitue un moyen de contrôle de leur activité et pas seulement d’attribution des livraisons (consid. 6.5.2). Enfin, le contrat contient d’autres consignes exposant le livreur à des restrictions d’accès voire à la désactivation de son compte, démontrant un contrôle strict sur la manière dont est exécutée la prestation. Ces éléments sont caractéristiques d’un lien de subordination (consid. 6.5.3). Au vu de ce qui précède, l’existence d’un rapport de subordination propre à la relation de travail entre Uber et les livreurs est confirmée (consid. 6.5.4). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Sabrine Magoga-Sabatier publiée in Newsletter droitdutravail.ch octobre 2022.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Congé abusif ; déclaration de volonté ; interprétation ; congé-représailles. La résiliation du contrat de travail est une manifestation de volonté unilatérale par laquelle une partie déclare mettre fin de son propre chef aux rapports de travail. Ce faisant, elle exerce un droit formateur qui déploie ses effets dès qu’il parvient au destinataire : le principe de réception fait foi. La loi ne requiert aucune forme particulière, mais la volonté exprimée doit être claire et exempte d’incertitudes. En l’espèce, le courriel du 2 août 2017 (« Je dois donc vous annoncer que vous allez recevoir un courrier de licenciement d’ici demain. ») ne saurait être interprété objectivement comme un licenciement. Au vu de la missive qui a suivi ce courriel et du contexte du cas d’espèce, il ne constituait pas l’exercice (anticipé) du droit de résilier le contrat, mais un simple avis, une communication d’intention (consid. 4.4). Les constatations factuelles excluent la thèse d’un congé-représailles abusif au sens de l’art. 336 CO. Peu importe qu’il n’ait pas été précédé d’un avertissement et que l’employeuse ait opéré des déductions sur salaire dont le bien-fondé n’a pas été établi. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Christine Sattiva Spring publiée in Newsletter droitdutravail.ch janvier 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Congé abusif ; indemnité ; impôt. L’indemnité pour licenciement abusif est exonérée d’impôt. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par le Prof. Thierry Obrist et Leila Oufqir publiée in Newsletter droitdutravail.ch mai 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Congé abusif ; fin des rapports de travail ; motif réel ; arbitraire ; travailleur âgé ; indemnité à raison des longs rapports de travail. Pour résoudre la question juridique d’un éventuel abus de droit, il faut établir au préalable le motif réel du congé, opération qui relève de l’appréciation des preuves. Du moment que le motif réel du licenciement a été établi, la partie qui conteste l’appréciation des juges inférieurs doit en démontrer l’arbitraire (rappel de jurisprudence). En l’espèce, la Cour cantonale a sanctionné le manque d’égards de l’Etat employeur vis-à-vis d’une employée qui lui avait consacré l’essentiel, pour ne pas dire la totalité de sa vie active (âgée de 62 ans et au bénéfice d’une ancienneté de 39 ans). On ne discerne pas, dans le contexte en cause, ce qui eût pu dispenser l’employeur d’organiser un entretien préalable et de rechercher d’autres solutions (consid. 4). L’indemnité légale « à raison de longs rapports de travail » est plafonnée à huit mois de salaire (art. 339c al. 2 CO). Les parties sont libres de fixer une indemnité plus élevée « par accord écrit » (art. 339c al. 1 CO). Cette clause doit être signée par la partie qui souscrit une telle obligation, à savoir l’employeur. Vu la portée que revêt, en droit suisse, l’exigence de la forme écrite – soit une condition de validité de l’acte juridique (art. 11 CO) –, la production de l’acte écrit n’est pas indispensable et la preuve de celui-ci peut être apportée par n’importe quel moyen (consid. 5).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Le laps de temps dont dispose l’employé selon l’art. 336b CO pour s’opposer au congé est un délai de péremption. En maxime des débats, même lorsque le juge intervient d’office, les parties doivent lui soumettre les données factuelles et les preuves nécessaires. La charge d’alléguer et de prouver l’absence de péremption porte, en principe, sur celui qui invoque le droit soumis à un délai de péremption, puisque le respect de cette exigence est un élément constitutif de droit et une condition de l’exercice de l’action. Dans certaines circonstances, la non-péremption d’un droit est un fait implicite, soit un fait contenu dans un allégué que le demandeur ne doit alléguer et prouver que si la partie adverse l’a contesté (par ex. pour l’avis des défauts en matière de contrat de vente ou d’entreprise). En matière de droit du travail, le législateur nourrit l’espoir – peut-être chimérique – que l’auteur du congé reviendra sur sa décision et préférera maintenir le rapport de travail plutôt que de payer une indemnité : il appartient au salarié de montrer que les conditions participant au fondement de son droit sont réunies et partant, d’alléguer et de prouver les circonstances factuelles dont le juge pourra inférer le droit à un dédommagement pour le congé abusif, qui présuppose une opposition valable. Le cas échéant, le juge devra interpréter la missive – la loi requiert la forme écrite – pour décider s’il y a eu opposition au sens de l’art. 336b CO. Ceci justifie une allégation en bonne et due forme, assortie d’une offre de preuve (consid. 4.2). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par le Prof. François Bohnet et Me Gaëtan Corthay publiée in Newsletter droitdutravail.ch août 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Congé abusif ; opposition. L’opposition de l’art. 336b CO a pour but de permettre à l’employeur de prendre conscience que son employé conteste le licenciement et le considère comme abusif ; elle tend à encourager les parties à engager des pourparlers et à examiner si les rapports de travail peuvent être maintenus. Dans cette perspective, le droit du travailleur de réclamer l’indemnité pour licenciement abusif s’éteint si le travailleur refuse l’offre formulée par l’employeur de retirer la résiliation. Il n’y a pas d’opposition lorsque le travailleur s’en prend seulement à la motivation de la résiliation, ne contestant que les motifs invoqués dans la lettre de congé, et non à la fin des rapports de travail en tant que telle. La condition de l’opposition en temps utile selon l’art. 336b CO demeure, lors même que l’issue de discussions avec l’employeur paraît illusoire compte tenu de son attitude (rappel de jurisprudence, consid. 4.1 et 4.2). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Werner Gloor publiée in Newsletter droitdutravail.ch juin 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Salaires ; licenciement ; forme ; actes concluants ; rémunération convenable. La résiliation d’un contrat de travail n’est pas soumise à une forme particulière. Les parties peuvent cependant convenir de donner une forme spéciale à un contrat pour lequel la loi n’en exige pas (art. 16 CO). Les parties peuvent en tout temps convenir de supprimer la forme réservée. Aucune forme particulière n’est requise en vertu de la loi pour convenir de l’adoption ou de la suppression d’une forme spéciale, de sorte que l’art. 12 CO ne trouve pas application. L’accord peut résulter d’actes concluants (consid. 3.1.2). En l’espèce, en ne soulevant pas d’emblée le vice de forme au moment où le licenciement lui était signifié, le travailleur a ratifié par actes concluants la suppression de l’exigence de forme que les parties avaient jusque là réservée pour toute modification contractuelle. Sa rétractation, intervenue un mois plus tard, après la consultation d’un nouvel avocat, est le fruit d’un comportement contradictoire contraire au principe de la bonne foi, étant précisé que le licenciement n’est pas protégé par une exigence de forme particulière à laquelle le travailleur ne saurait renoncer (consid. 3.3). L’idée à la base de l’art. 349a al. 2 CO est d’éviter que l’employeur n’exploite le voyageur en lui promettant exclusivement ou principalement des commissions qui se révèlent par la suite insuffisantes. Une provision est convenable si elle assure au voyageur un gain qui lui permette de vivre décemment, compte tenu de son engagement au travail (Arbeitseinsatz), de sa formation, de ses années de service, de son âge et de ses obligations sociales. La rémunération du voyageur dépend très étroitement des conditions que l’employeur lui fixe pour pouvoir négocier ou conclure des affaires. On doit aussi tenir compte, comme ligne directrice, des usages de la branche (consid. 4.3). En l’espèce, si le travailleur avait perçu une rémunération faible en vertu de son contrat, ce n’était pas en raison d’une fixation de commissions ne permettant pas d’obtenir une rémunération convenable pour son activité et le temps qu’il y a consacré, mais bien en raison de son incapacité à réaliser des affaires. Dès lors qu’en vertu du même contrat, les collègues du travailleur pouvaient, eux, réaliser un revenu nettement supérieur au sien, les conditions prévues par le contrat de travail ne sont pas en cause. En outre, les prestations fournies n’étaient pas en corrélation avec les instructions reçues (consid. 4.4 et 4.5).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Congé immédiat injustifié ; salaires ; justes motifs ; escroquerie ; droits d’option ; plan d’intéressement ; responsabilité. C’est sans violer le droit fédéral que le Tribunal cantonal a jugé dépourvu de justes motifs le licenciement immédiat d’un salarié de banque qui avait été victime d’une escroquerie au détriment de la banque (consid. 4). La prétention reconventionnelle des défenderesses, correspondant au montant de l’escroquerie subie (CHF 530’000) est rejetée, une violation par le demandeur de son devoir de diligence pour ne pas avoir vérifié un paiement qu’il n’avait pas à vérifier et qui avait passé tous les filtres ne pouvant être retenue (consid. 8). L’attitude des défenderesses, qui invoquent, après l’échéance du délai initialement prévu, que le demandeur n’aurait pas exercé valablement ses droits d’options, alors qu’il avait manifesté clairement en procédure son intention de les exercer, est abusive (consid. 7.2.3). Pour des raisons procédurales, la prétention du salarié en dommages-intérêts en lieu et place de la délivrance des actions qui lui sont dues en vertu des deux plans de participation est rejetée (consid. 7.3). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Marie-Thérèse Guignard publiée in Newsletter droitdutravail.ch novembre 2022.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Vacances ; salaire afférent. En cas d’emploi à temps plein auprès du même employeur, l’inclusion exceptionnelle du salaire afférent aux vacances dans le salaire global au motif que le salaire dû varie d’un mois à l’autre est exclue. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Diane Tettü Pochon publiée in Newsletter droitdutravail.ch juin 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Protection de la personnalité ; lanceur d’alerte et liberté d’expression. La protection de la liberté d’expression sur le lieu de travail constitue une ligne constante et bien établie de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, qui a progressivement dégagé une exigence de protection spéciale dont doivent pouvoir bénéficier, à certaines conditions, les fonctionnaires ou employés qui divulguent, en infraction des règles qui leur sont applicables, des informations confidentielles obtenues sur leur lieu de travail (§112). Les termes de l’opération de mise en balance à effectuer entre les intérêts concurrents en jeu ont été affinés : au-delà du seul préjudice causé à l’employeur, c’est l’ensemble des effets dommageables que la divulgation litigieuse est susceptible d’entraîner qu’il convient de prendre en compte pour statuer sur le caractère proportionné de l’ingérence dans le droit à la liberté d’expression des lanceurs d’alerte (§148). La divulgation litigieuse s’est faite au prix d’un vol de données et de la violation du secret professionnel qui liait le requérant. Ceci étant, la Cour relève l’importance relative des informations divulguées, eu égard à leur nature et à la portée du risque s’attachant à leur révélation. Au vu des constats quant à l’importance, tant à l’échelle nationale qu’européenne et du débat public sur les pratiques fiscales des multinationales auquel les informations divulguées par le requérant ont apporté une contribution essentielle, l’intérêt public attaché à la divulgation de ces informations l’emporte sur l’ensemble des effets dommageables (§185 ss). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Hélène Ecoutin-Dupuy publiée in Newsletter droitdutravail.ch avril 2023.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Neïda de Jesus, Adrien Nastasi
Existence d’un rapport de travail ; chauffeurs VTC et Uber. Dans la mesure où Uber détermine unilatéralement le prix des courses et que les chauffeurs ne sont plus libres d’organiser leur travail librement une fois connectés à l’application, étant déconnectés s’ils refusent trop fréquemment des courses ou s’ils font l’objet de plainte de la part des utilisateurs via le système de notation, les chauffeurs font l’objet d’un contrôle et d’une surveillance caractéristiques d’une relation de subordination (consid. 10.2). Le libre aménagement des horaires par les chauffeurs n’exclut pas une relation de travail mais plaide pour un contrat de travail sur appel improprement dit. De plus, le refus répété de courses entraînant une désactivation du compte des chauffeurs, porte atteinte à la liberté de ces derniers (consid. 10.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Qualification ; contrat d’entreprise ; contrat de mandat ; contrat de spectacle ; chef d’orchestre. En principe, des instructions qui ne se limitent pas à de simples directives générales sur la manière d’exécuter la tâche, mais qui influent sur l’objet et l’organisation du travail et instaurent un droit de contrôle de l’ayant droit, révèlent l’existence d’un contrat de travail plutôt que d’un mandat (consid. 5.1.3.1). Constituent des éléments typiques du contrat de travail le remboursement des frais encourus par le travailleur, et le fait que l’employeur supporte le risque économique et que le travailleur abandonne à un tiers l’exploitation de sa prestation, en contrepartie d’un revenu assuré. La dépendance économique du travailleur est un aspect typique du contrat de travail. Est déterminant le fait que, dans le contexte de la prestation que le travailleur doit exécuter, d’autres sources de revenus sont exclues et qu’il ne puisse pas, par ses décisions entrepreneuriales, influer sur son revenu. Un indice pour une telle dépendance réside dans le fait qu’une personne travaille pour une seule société. Cet indice est renforcé lorsque les parties conviennent d’une interdiction d’exercer toute activité économique similaire (consid. 5.1.3.2). Le montant de la rémunération n’est pas déterminant dans l’examen de la dépendance économique : est notamment déterminante l’exclusion contractuelle d’autres sources de revenus, ce qu’indiquent notamment le fait de travailler pour une seule société et une interdiction contractuelle d’exercer toute activité économique similaire (consid. 5.4.2.2). L’employeuse ne saurait tirer argument du fait que le contrat litigieux contient des clauses contraires au droit (semi-)impératif du travail pour remettre en cause la qualification dudit contrat. Cela reviendrait à inverser conditions et conséquences de ladite qualification. Il convient, dans un premier temps, de déterminer la nature de la convention d’après l’aménagement objectif de la relation contractuelle. Ce n’est que dans une seconde étape que la validité des clauses convenues par les parties peut être examinée au regard des dispositions relativement impératives qui sont, cas échéant, applicables. A défaut, il suffirait d’introduire une clause contraire au droit impératif pour éviter la qualification qui s’imposerait sinon à la relation contractuelle (consid. 5.4.2.3). En l’espèce, le contrat du chef d’orchestre est un contrat de travail : le statut précédent d’indépendant du prestataire n’est pas décisif, tout comme le fait qu’il ait été représenté par un agent et dispose de ses propres assistants. La dénomination de la rémunération de l’intimé (« cachet » et non « salaire ») et son montant ne sont pas davantage déterminants, dans la mesure notamment où la qualification utilisée par les parties ne lie pas le tribunal (consid. 5.4.2.1). En outre, la dépendance économique est présente dès lors que les parties sont convenues, sous la menace d’une peine conventionnelle, d’une interdiction pour le prestataire de se produire en Suisse romande pendant la durée du contrat et pour une période totale de près de deux ans (consid. 5.4.2.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Congé immédiat ; tardiveté. En l’espèce, n’est pas tardif le licenciement immédiat d’une travailleuse prononcé trois mois après les faits reprochés mais quelques jours après le retour en Suisse du Président de la société (consid. 3). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Werner Gloor publiée in Newsletter droitdutravail.ch décembre 2021.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Congé immédiat ; congé soupçon. L’employeur peut justifier un congé-soupçon de deux manières : soit par l’accomplissement d’une enquête objective, soit par la preuve obtenue, après coup, que les faits soupçonnés sont avérés. L’interprétation de la jurisprudence proposée en l’espèce par la Cour tessinoise, selon laquelle le simple défaut – formel – d’enquête par l’employeur entacherait nécessairement la décision de licenciement immédiat d’un vice incompatible avec l’existence de justes motifs, est rejetée. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Aurélien Witzig publiée in Newsletter droitdutravail.ch juin 2022.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Congé abusif ; cadre dirigeant ; travailleur âgé ; obligation de protection. En droit privé du travail, il n’existe pas d’obligation d’entendre le travailleur avant de le licencier, ni de le prévenir à l’avance. Il n’est pas non plus requis de l’employeur qu’il procède à un examen de la proportionnalité, en ce sens que des mesures plus douces devraient toujours être prises avant une résiliation. Pour les travailleurs âgés et fidèles, l’employeur a un devoir de protection particulier, qui se mesure selon les circonstances (consid. 4.3.2). En l’espèce, il s’agissait d’un cadre dirigeant. Sa fonction supérieure implique que, malgré son âge avancé et sa grande ancienneté, il n’était pas nécessaire de l’entendre avant de le licencier (consid. 4.3.3), ni de l’informer des avis négatifs des collaborateurs à son égard (consid. 4.3.4). Son licenciement n’est dès lors par abusif quant à la façon dont il a été donné. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me Christine Sattiva Spring publiée in Newsletter droitdutravail.ch septembre 2021.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Droit collectif ; liberté syndicale. La Suisse a violé l’art. 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales garantissant à toute personne le droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association. Les restrictions litigieuses ne remplissent pas les conditions d’une ingérence étatique autorisée parce qu’elles étaient disproportionnées. La question de la qualité de la loi pour restreindre cette liberté reste ouverte alors que l’existence de but légitime n’est pas contestée. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par le Prof. Jean-Philippe Dunand publiée in Newsletter droitdutravail.ch juin 2022.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Autorisation obligatoire ; existence d’une relation de travail. Un contrat de travail lie les livreurs avec la société Uber Eats. L’attribution des missions sans choix par le livreur, la fixation unilatérale des prix et la dépendance économique des livreurs à l’égard de la plateforme ainsi que le contrôle exercé par Uber Eats par le biais à la fois de la géolocalisation du système de notation des livreurs sont des éléments propres au lien de subordination caractéristique du contrat de travail. Malgré la possibilité pour les livreurs de refuser une livraison et de se connecter ou non, il existe tout de même un contrat de travail sur appel improprement dit (consid. 6.6.1). L’autorisation de faire concurrence à Uber Eats en exerçant une activité pour une plateforme concurrente pendant le service ne constitue rien de plus qu’une dérogation au régime légal de l’art. 321a al. 3 CO (consid. 6.6.2). Néanmoins, bien qu’il existe une relation de travail entre les livreurs et Uber Eats, l’activité déployée par cette dernière n’est pas soumise à autorisation au sens de l’art. 12 LSE. En effet, l’abandon de l’essentiel du pouvoir de direction à l’entreprise locataire est absent de l’activité litigieuse. Les restaurateurs ne transmettent aux livreurs que des directives raisonnables en lien avec la livraison des plats qui ne constituent pas un pouvoir de direction. Les livreurs ne sont pas engagés par les restaurateurs et n’utilisent pas non plus leur matériel. Partant, il n’existe pas de location de service entre les restaurateurs et Uber Eats (consid. 7.5 et 7.6).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Protection de la personnalité ; champ d’application de la LTr ; ménages privés. L’exception d’application de la LTr aux ménages privés selon l’art. 2 al. 1 lit. g LTr ne s’applique que dans les cas où le travailleur concerné est directement engagé par le ménage privé, et non en présence de relations tripartites dans lesquelles une société place des employés dans des ménages privés. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Dr Jean Christophe Schwaab publiée in Newsletter droitdutravail.ch février 2022.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Allégation. L’admission des faits et moyens de preuve nouveaux à l’ouverture des débats principaux : l’étau se resserre. Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par le Prof. François Bohnet publiée in Newsletter droitdutravail.ch novembre 2021.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Convention collective de travail ; commission paritaire ; recours. Est irrecevable le recours dirigé contre une décision d’une Commission paritaire nationale instituée par une CCT, dès lors qu’une telle décision ne saurait être assimilée à une sentence arbitrale et n’émane pas d’une autorité cantonale de dernière instance.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Protection de la personnalité ; données personnelles ; traitement. Constituent des données au sens de l’art. 328b CO (en lien avec l’art. 3 let. a LPD) tous les renseignements, indications ou notes concernant la personne du travailleur, ses relations et ses activités, qu’elles portent sur sa vie privée ou professionnelle. La notion de « traitement » vise notamment la démarche de l’employeur qui prend intentionnellement connaissance, ou qui collecte des données personnelles d’un de ses employés. La simple transmission de données personnelles constitue une communication au sens de l’art. 3 let. f LPD, et partant un traitement de données selon l’art. 3 let. e LPD (consid. 4.2.2). L’art. 328b CO introduit une présomption de licéité du traitement de données lorsqu’elles « portent sur les aptitudes du travailleur à remplir son emploi ou sont nécessaires à l’exécution du contrat ». Il concrétise ce fait justificatif dans le domaine des rapports de travail en désignant deux situations qui autorisent a priori le traitement de données. De façon générale, la doctrine admet qu’un traitement de données s’inscrivant dans le champ de l’art. 328b CO (donc a priori licite) doit néanmoins respecter les principes généraux de la LPD, en particulier la bonne foi et la proportionnalité. Ce dernier principe commande de mettre en balance l’intérêt de l’auteur du traitement des données et celui de la personne concernée par ce traitement. Lorsque le traitement de données n’entre pas dans le cadre de l’art. 328b CO, il est présumé illicite et doit pouvoir se fonder sur un autre motif justificatif au sens de l’art. 13 LPD. La doctrine distingue selon que l’employeur a interdit, autorisé ou toléré l’utilisation de la messagerie électronique et du téléphone portable professionnels à des fins privées. La marge de manœuvre de l’employeur serait plus large lorsqu’il a interdit l’utilisation privée de ces moyens de communication, parce qu’il est alors légitimé à contrôler si l’employé respecte ses directives. Des limites doivent être posées. D’aucuns précisent que même en cas d’interdiction, l’employeur doit en principe s’abstenir de prendre connaissance du contenu des courriels privés ou des conversations téléphoniques privées de l’employé. Selon la doctrine, la nécessité de recueillir des preuves en prévision d’un procès portant sur la fin des rapports de travail peut entrer dans le champ de l’art. 328b CO. L’autorité précédente a toutefois jugé qu’il existait d’autres moyens d’investigation moins intrusifs permettant d’atteindre le but recherché par l’employeuse, qui pouvait notamment recueillir des renseignements auprès des employés et les faire auditionner comme témoins. Ce faisant, elle a brandi le principe de proportionnalité et soupesé les intérêts en cause, considérant que celui de l’employeuse à récolter des preuves pour se défendre n’était pas prépondérant dans cette affaire de nature patrimoniale et ne justifiait pas pareille intrusion dans la vie intime de l’intéressé. En jetant en pâture jusque dans son recours des pans de la vie intime de l’employé pour défendre ses intérêts financiers, l’employeuse ne réussit qu’à démontrer son absence totale d’égard pour la personnalité de l’intimé (consid. 4.2.4). L’octroi d’une indemnité pour tort moral était en l’espèce justifié (consid. 4.2.5). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par Me David Raedler publiée in Newsletter droitdutravail.ch octobre 2021.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Gratification ; procédure ; gratification convenue ; fixation du montant ; classement faute d’objet ; valeur litigieuse ; décision finale. Dans le cas d’une gratification convenue, dont les objectifs et la formule de calcul ont été fixés et contractualisés, l’employeuse se réservant une part d’évaluation subjective, cette dernière n’a pas le droit de la supprimer entièrement en invoquant un nouveau motif, en l’occurrence les mauvais résultats financiers de l’entreprise (consid. 4.3). Le classement faute d’objet de la prétention en justice relative au bonus 2018 est une décision finale au sens de l’art. 308 al. 2 CPC, si bien que l’appel est ouvert lorsque la valeur litigieuse utile est atteinte. La valeur des conclusions toujours litigieuses au moment de la décision de première instance est déterminant pour l’ouverture à appel, indépendamment de la valeur de la conclusion ayant fait l’objet d’une décision de classement. C’est donc à tort que l’instance cantonale n’est pas entrée en matière sur l’appel contre la décision de classement. L’affaire doit donc être renvoyée à l’instance précédente pour un nouvel examen (consid. 6). Cet arrêt a fait l’objet d’une analyse par le Prof. François Bohnet et Me Aurélien Witzig publiée in Newsletter droitdutravail.ch avril 2022.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
CTT-Edom/GE ; salaires, contrat-type de travail ; vacances ; preuve ; missions étrangères ; domestiques privés ; législation applicable ; disposition impérative ; vacances pendant le délai de congé, salaire des vacances. Pour prouver avoir payé les salaires dus, l’employeuse ne peut se borner à prouver avoir ouvert un compte au nom de l’employée et y avoir déposé de l’argent, d’autant que l’employeuse avait conservé la carte bancaire correspondante (consid. 3). Aux termes de l’art. 27 al. 2 LEH, le Conseil fédéral règle notamment, dans la mesure où le droit international le permet, les conditions de travail et de salaire des domestiques privés autorisés à accompagner une personne bénéficiaire au sens de l’art. 2 al. 2 let. a et b LEH. Conformément à l’art. 2 al. 2 ODPr, le domestique privé est engagé par l’employeur sur la base d’un contrat de travail de droit privé. L’art. 28 ODPr précise que les relations de travail sont régies par le droit suisse, en particulier par l’ODPr et le CO (al. 1) et que le contrat de travail ne peut déroger aux dispositions de l’ODPr au détriment du domestique privé (al. 2 ; cf. ég. art. 10 al. 2 3e phr. ODPr). Il doit s’agir d’un contrat écrit, établi selon le modèle rédigé par le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), dont la signature conditionne la délivrance de l’autorisation d’entrée et de la carte de légitimation du domestique privé. Les conditions de travail et de salaire font l’objet des art. 28 à 53 ODPr. L’art. 43 al. 1 ODPr prescrit un salaire mensuel net en espèces de CHF 1’200.- au minimum, le salaire en nature et les autres éléments à charge de l’employeur étant décrits à l’art. 44 ODPr. L’art. 45 ODPr prévoit l’exonération fiscale du domestique privé (consid. 4.1). L’ODPr est une norme spéciale qui prévaut sur les CTT que les cantons sont tenus d’édicter pour le personnel de maison en vertu de la règle générale de l’art. 359 al. 2 CO, ce que l’art. 1 al. 2 ODPr précise expressément (consid. 4.2). En l’espèce, il n’y a pas place pour l’application du CTT-Edom/GE à la relation contractuelle des parties, entièrement soumise aux règles de l’ODPr. Contrairement à ce que la Cour cantonale a jugé, la charge plus ou moins grande que peut représenter la garde d’un enfant à domicile selon son état de santé n’est pas un critère pertinent pour déterminer le droit applicable. Il en résulte que les calculs de la Cour cantonale doivent être rectifiés sur la base du salaire convenu ainsi que des dispositions de l’ODPr et du CO (cf. art. 28, 42 à 44, 48 et 50 al. 5 ODPr) (consid. 4.2). Lorsque l’employeuse est en retard dans le paiement de salaires échus, l’employée est en droit de refuser sa prestation (art. 82 CO par analogie) et l’employeuse reste tenue de lui verser son salaire (art. 324 al. 1 CO par analogie) (rappel de jurisprudence, consid. 5.2). En annonçant qu’elle prendrait ses vacances pendant le délai de congé, l’intimée renonçait par avance à une créance résultant d’une disposition impérative de la loi pendant la durée du contrat, ce qui est prohibé par l’art. 341 al. 1 CO (consid. 5.2.2). Le salaire afférent aux vacances (art. 329d al. 1 CO) doit être calculé sur la base du salaire complet ; en particulier, les indemnités versées à titre d’heures supplémentaires ou pour du travail effectué de nuit ou le dimanche seront prises en compte pour autant qu’elles revêtent un caractère régulier et durable. A la fin des rapports de travail, une éventuelle indemnité pour vacances non prises doit également être calculée sur la base du salaire complet (rappel de jurisprudence, consid. 6.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Heures supplémentaires ; vacances ; fonction dirigeante élevée ; indemnité pour vacances non prises. En l’espèce, le travailleur occupait une fonction dirigeante élevée au sens de l’art. 9 OLT 1. En effet, il dirigeait la section des sports nautiques, soit une partie essentielle de l’offre par laquelle l’employeuse se positionnait sur le marché ; il accomplissait des tâches d’importance stratégique (achats, budget, investissement, développement, RH) ; il était généralement suivi par le directeur général et le Conseil d’administration dans les décisions très importantes et totalement libre dans les décisions moins importantes ; il était directement subordonné au directeur général et gagnait à peine moins qu’un membre de la direction de l’entreprise (consid. 3.4). Tous ces éléments, pris dans leur ensemble et dans le déroulement effectif de la relation de travail, attestent d’une fonction dirigeante élevée (consid. 3.4.3). La façon de calculer l’indemnité pour vacances non prises est une question de droit (consid. 5.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Congé abusif ; vacances ; contrats en chaîne ; délai de congé ; indemnité. N’est pas arbitraire la décision de la cour cantonale selon laquelle les relations contractuelles liant l’employeuse et une salariée, enseignante de français, entre le deuxième et le troisième contrat de travail conclus respectivement les 22 août 2016 et 21 juin 2017, n’ont jamais cessé et qu’aucune nouvelle période probatoire n’a dès lors commencé à courir à la suite de la signature du troisième et dernier contrat de travail (consid. 3). La cour cantonale n’a pas enfreint le droit fédéral en retenant que le congé était abusif, puisqu’il avait été signifié en réaction aux prétentions salariales émises de bonne foi par la salariée (consid. 4.3). L’indemnité de licenciement abusif octroyée, située dans la fourchette haute, n’est pas critiquable (consid. 4.4). En règle générale, le salaire relatif aux vacances doit être versé au moment où celles-ci sont prises et il n’est pas admissible d’inclure l’indemnité de vacances dans le salaire total. L’indemnité de vacances peut exceptionnellement être incluse dans le salaire total, lorsque, outre la nécessité objective due à une activité irrégulière (première condition), la part du salaire global destinée à l’indemnisation des vacances est mentionnée clairement et expressément dans le contrat de travail lorsqu’il est conclu par écrit (deuxième condition), ainsi que sur les décomptes de salaire périodiques (troisième condition). La simple indication selon laquelle l’indemnité afférente aux vacances est comprise dans le salaire total ne suffit donc pas ; la part représentant cette indemnité doit être fixée en pourcentage ou en chiffres et cette mention doit figurer aussi bien dans le contrat de travail écrit que dans les décomptes de salaire. Si les conditions ci-dessus ne sont pas réunies, l’employeur doit payer le salaire afférent aux vacances. Que l’employé ait pris ses vacances en nature n’y change rien (rappel de jurisprudence, consid. 5.1).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Adrien Nastasi
Certificat de travail ; prescription ; l’action en délivrance ou en rectification du certificat de travail se prescrit par dix ans (art. 127 CO) (consid. 6.9). Sont réservés les cas d’abus de droit, par exemple si l’employé attend expressément le décès de la personne compétente ou la destruction des documents pertinents pour demander un certificat de travail ou la rectification de celui-ci. Il en va autrement d’un employé qui démissionne de son travail car il a trouvé un nouvel emploi et ne prête pas attention à se voir délivrer un certificat de travail (ou à son contenu), en pensant ne pas en avoir besoin ; il se fait toutefois licencier six ans plus tard par son nouvel employeur et se rend compte de la nécessité d’obtenir un certificat de travail de son ancien employeur (au contenu correct) pour compléter son dossier de candidature. Dans ce cas, il n’y a en principe pas d’abus de droit (consid. 6.8).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Convention collective de travail ; concurrence déloyale, légitimation active ; une association patronale a la légitimation active, sur le fondement de l’art. 10 al. 2 let. a LCD, d’agir contre des médias ayant critiqué la façon d’appliquer, par l’un des membres de l’association, une convention collective de travail.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Fonction publique ; droit public ou droit privé, statut, nature des rapports de travail ; la Cst. féd. ne règle pas la nature juridique des rapports de travail des employés des collectivités publiques. Les motifs qui plaident en faveur du rapport de droit public résident notamment dans la nature particulière de l’Etat et des tâches exercées par son personnel, les contraintes constitutionnelles qui pèsent sur l’Etat employeur, ainsi que l’absence de besoin d’un recours au droit privé. Aussi bien la doctrine majoritaire privilégie-t-elle le droit public pour régler les rapports de travail du personnel de l’Etat tout en admettant, avec plus ou moins de restrictions, la possibilité de recourir aux contrats de droit privé pour certains salariés. Il n’existe donc pas d’exclusion générale du recours au droit privé pour réglementer les rapports de travail du personnel étatique (rappel de jurisprudence, consid. 3.1). Pour sa part, le TF, sans se prononcer sur le point de savoir si les cantons peuvent de manière générale soumettre les rapports de travail qui les lient à des collaborateurs au droit privé, a précisé qu’un tel engagement de droit privé suppose en tous les cas qu’il trouve un fondement dans une réglementation cantonale (ou communale) claire et sans équivoque et qu’il ne soit pas exclu par le droit applicable. Pour déterminer si un rapport juridique relève du droit privé ou du droit public, on ne peut pas se fonder sur la qualification juridique utilisée par les parties ; ce qui est décisif, c’est le contenu réel du rapport de droit. Si une autorité est partie audit rapport de droit, le droit public est présumé applicable ; en outre, les conditions d’engagement dans le secteur public sont en principe fixées par des décisions soumises à acceptation (rappel de jurisprudence, consid. 3.2). Aux termes de l’art. 130 Cst./JU, l’Eglise réformée évangélique du Jura (EREJU) est reconnue collectivité de droit public. Conformément à l’art. 131 al. 2 Cst./JU, l’EREJU s’est donné une Constitution. En l’espèce, les parties ont conclu un contrat de travail qui était expressément stipulé conclu « selon les bases légales du Code des obligations ». L’art. 42 al. 3 de l’ordonnance concernant les ecclésiastiques de l’EREJU permet à une paroisse d’engager un collaborateur paroissial dont l’engagement se conclut selon le droit civil. Il s’agit là d’une base légale claire permettant l’engagement de certains collaborateurs selon le droit privé. Il n’y a rien d’insoutenable à compter les concierges/sacristains comme des collaborateurs pouvant être engagés selon le droit privé, à la différence des personnes assumant un ministère pastoral ou diaconal, dont le statut est exhaustivement réglé par l’ordonnance concernant les ecclésiastiques. A l’instar de celle d’un responsable de déchetterie, la tâche d’un concierge/sacristain n’a pas une nature telle qu’elle ne pourrait être confiée qu’à une personne soumise à un statut de droit public (consid. 5.2.1).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Congé immédiat ; justes motifs ; le jugement du TAF est annulé en tant qu’il confirme l’existence de justes motifs de résiliation immédiate des rapports de travail et la cause est renvoyée à l’autorité précédente pour nouvelle décision :
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Egalité hommes-femmes ; harcèlement sexuel ; selon les procédés utilisés, plusieurs incidents peuvent être nécessaires pour constituer une discrimination au sens de l’art. 4 LEg ; la répétition d’actes ou l’accumulation d’incidents n’est toutefois pas une condition constitutive de cette forme de harcèlement sexuel (consid. 3.1.1). La prétention à l’indemnité en cas de harcèlement sexuel, prévue par l’art. 5 al. 3 LEg, se dirige toujours vers l’employeur et ne dépend ni d’une faute de sa part, ni d’un dommage matériel ou d’un tort moral éprouvé par la victime du harcèlement. L’indemnité est fixée en fonction de toutes les circonstances, c’est-à-dire en équité selon l’art. 4 CC. Les circonstances à prendre en considération se rapportent en particulier à la gravité de la violation et à l’importance de l’atteinte à la personnalité causée par le harcèlement sexuel compte tenu de son intensité et de sa durée. Une faute de l’employeur peut également jouer un rôle lors de la fixation de l’indemnité, notamment si l’on peut admettre qu’il avait des raisons de craindre un comportement importun d’un de ses employés, par exemple en raison des antécédents de celui-ci, ou s’il a été dûment informé des faits. L’indemnité revêt en effet un caractère pénal ; son aspect punitif vise à rendre un manque de prévention du harcèlement sexuel économiquement inintéressant pour les entreprises ; n’ayant pas le caractère de dommages-intérêts, ni celui de réparation morale, l’indemnité introduite à l’art. 5 al. 3 LEg est un droit supplémentaire à distinguer d’une éventuelle indemnité pour tort moral au sens de l’art. 49 CO (consid. 3.3.1). Parmi les éléments à prendre en considération pour fixer l’indemnité au sens de l’art. 5 al. 3 LEg figurent avant tout la nature du harcèlement sexuel subi, son intensité et sa durée. Si une intention de nuire peut peser comme facteur de gravité du harcèlement sexuel, l’absence d’une telle intention ne saurait en atténuer le caractère inadmissible : sauf lorsqu’il s’agit d’établir l’existence d’un chantage sexuel, la motivation de l’auteur est sans pertinence pour la qualification du harcèlement sexuel (consid. 3.3.4). Casuistique des montants accordés par les juges (consid. 3.3.2). En l’espèce, les propos tenus à l’encontre de l’employée étaient par exemple : « Si elle a réussi, c’est parce qu’elle a couché ! » ; « Pour moi, les femmes sont biologiquement faites pour fonder un foyer, s’occuper de la cuisine, de l’aspirateur et des devoirs... » ; « Moi, ma femme, il est exclu qu’elle conduise ma voiture ! » ; ou encore « Elle ferait mieux de retourner aligner les catalogues dans une agence de voyages plutôt que de nous faire chier dans notre caserne ! ». Ces actes de harcèlement verbal et non physique (avec violence ou menace) sont une circonstance objective justifiant de considérer que ces actes n’atteignent pas un niveau de gravité comparable à celui des agressions sexuelles. Cela étant, le montant d’un mois de salaire octroyé par le TAF est insuffisant et la cause doit lui être renvoyée pour qu’il calcule un nouveau montant. L’atteinte à la personnalité inhérente au harcèlement sexuel doit avoir une certaine gravité objective pour que la victime ait droit à une réparation du tort moral au sens de l’art. 5 al. 5 LEg. En règle générale, une atteinte à la personnalité provoquée par des remarques et plaisanteries sexistes ne présente pas ce degré de gravité (consid. 4.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Heures supplémentaires, vacances ; compensation en nature, libération de l’obligation de travailler, solde ; le salaire normal, qui sert de base au calcul de l’indemnité pour heures supplémentaires, comprend tous les éléments composant la rémunération obligatoirement due par l’employeur, y compris le treizième salaire et les diverses indemnités prévues contractuellement en relation avec le travail. Les parties peuvent prévoir que le treizième salaire sera exclu du calcul (consid. 4.2). La CCT pour les métiers de la carrosserie prévoit de manière claire, en matière d’indemnisation des heures supplémentaires, de se référer à la pratique de l’entreprise. En l’espèce, celle-ci n’a pas été établie. Il convient dès lors d’appliquer la règle de droit dispositif de l’art. 321c al. 3 CO pour calculer la rétribution des heures supplémentaires effectuées (consid. 4.5). Lorsque le travailleur est libéré de l’obligation de travailler durant le délai de congé, les heures supplémentaires ne peuvent être compensées par un congé qu’avec l’accord du travailleur. En l’absence d’accord, si la période de libération de l’obligation de travailler se prolonge, le refus du travailleur de compenser ses heures supplémentaires peut être constitutif d’un abus de droit. Il convient de faire preuve de retenue pour admettre un tel abus, car lorsque le contrat est résilié, le travailleur doit bénéficier du temps nécessaire pour rechercher un nouvel emploi. Il s’agira d’apprécier les circonstances au cas par cas, en particulier le rapport existant entre la durée de la libération et le nombre d’heures supplémentaires à compenser (consid. 5.2). En l’espèce, les heures supplémentaires correspondaient à 3,54 jours de travail et la période de libération hors incapacité au moins à 37 jours ouvrés. La compensation en nature était exigible au vu des circonstances du présent cas et du pouvoir d’appréciation dont dispose la Cour cantonale (consid. 5.4). Le solde de vacances, correspondant à un peu moins de la moitié de la libération de l’obligation de travailler, reste dans des limites admissibles, au vu de la marge d’appréciation en la matière, et des circonstances bien particulières du cas d’espèce (consid. 6.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Heures supplémentaires ; cadre dirigeant, fonction dirigeante élevée ; les heures supplémentaires selon l’art. 321c CO doivent être distinguées du travail supplémentaire selon les art. 9, 12 et 13 LTr. La fonction de cadre dirigeant implique que l’horaire applicable usuellement dans l’entreprise n’est en principe pas applicable, notamment en ce que ces cadres sont largement libres de décider de leurs horaires de travail. En l’absence de réglementation explicite du temps de travail, ils n’ont donc droit à une compensation des heures supplémentaires que s’ils se voient confier des tâches supplémentaires en plus de leurs fonctions contractuelles ou si l’ensemble du personnel effectue un nombre important d’heures supplémentaires sur une longue période. La LTr n’est pas applicable aux travailleurs qui exercent une fonction dirigeante élevée, car ils n’ont pas besoin d’une protection de droit public et doivent rester disponibles pour l’employeur du point de vue temporel (consid. 4.1). Les simples associés d’une Sàrl n’occupent pas nécessairement une fonction dirigeante élevée. Ce qui est essentiel, c’est l’image globale de l’activité effectivement exercée au regard de la structure de l’entreprise, indépendamment de la fonction ou de la formation de la personne concernée. Etant donné que les pouvoirs de décision doivent être évalués différemment selon la position et la responsabilité dans l’entreprise, en fonction de la taille et de l’organisation de celle-ci, les circonstances du cas à évaluer dans son ensemble restent déterminantes (consid. 4.7.1).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Salaires ; assurance collective, assurance de sommes ou assurance de dommage ; l’assurance de sommes garantit une prestation prédéfinie lors de la conclusion du contrat, qui doit être versée si l’événement assuré survient, sans égard à ses conséquences pécuniaires et à l’existence d’un possible dommage. En revanche, dans une assurance contre les dommages, les cocontractants font de la perte patrimoniale effective une condition autonome du droit aux prestations ; une telle assurance vise à compenser totalement ou partiellement un dommage effectif. Le critère de distinction ne réside pas dans le but, mais bien dans les conditions de la prestation d’assurance. L’assurance de sommes permet à l’assuré de cumuler les prétentions en versement des indemnités journalières prévues par le contrat d’assurance avec d’autres prétentions découlant du même événement dommageable. La surindemnisation est possible ; conformément à l’art. 96 LCA, les droits que l’ayant droit aurait contre des tiers en raison du sinistre ne passent pas à l’assureur. L’assurance de dommages, en revanche, est gouvernée par le principe indemnitaire ; pour éviter le cumul, l’art. 72 LCA a institué un droit de recours de l’assureur à l’encontre du tiers responsable. Savoir si l’on est en présence d’une assurance de sommes ou de dommages dépend en définitive du contrat d’assurance et des conditions générales. L’expression « incapacité de gain » n’est pas déterminante dans la mesure où elle est parfois utilisée comme un synonyme de l’incapacité de travail. Les règles usuelles d’interprétation des contrats sont applicables. Lorsque l’interprétation ainsi dégagée laisse subsister un doute sur leur sens, les conditions générales doivent être interprétées en défaveur de leur auteur, conformément à la règle dite des clauses ambiguës. Divers auteurs constatent que les assurances collectives conclues par une entreprise pour le personnel sont typiquement des assurances de dommages. L’employeur a en effet l’obligation de verser, pour un temps limité, le salaire du travailleur empêché de travailler pour cause de maladie (art. 324a CO). Pour autant qu’elle offre des prestations équivalentes, une assurance collective couvrant tout le personnel de l’entreprise peut libérer cette dernière d’une telle obligation, le risque lié à l’incapacité de travail étant alors assumé par l’assureur (cf. art. 324a al. 4 CO) (consid. 5.2.3). En l’espèce, l’autorité précédente n’a pas enfreint le droit fédéral en considérant que l’assurance en question était une assurance de dommages (consid. 5.2.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Incapacité de travailler ; assurance perte de gain maladie, indemnités, preuve du dommage ; dans une affaire où une assurance collective pour perte de gain en cas de maladie n’avait octroyé des indemnités journalières à un travailleur (cadre avec un haut salaire) licencié, puis tombé malade durant le délai de congé, qu’à hauteur des indemnités qu’il aurait perçues de la part de l’assurance chômage, soit 70 % du gain maximal annuel pertinent pour cette assurance, c’est à bon droit que le juge cantonal a refusé de condamner l’assurance à verser davantage, dès lors que l’assuré n’avait pas prouvé qu’il serait resté capable de travailler après la fin de son rapport de travail, étant observé qu’il n’existe pas de présomption factuelle selon laquelle l’assuré continuerait à percevoir son revenu antérieur lorsque l’incapacité de travailler est postérieure à la notification du licenciement – contrairement à la situation où l’incapacité de travail précède la notification du licenciement (consid. 3.3). Il revenait donc à l’assuré de prouver, par des indices concrets, qu’il aurait, selon une vraisemblance prépondérante (soit à hauteur de 75 % de probabilité selon la doctrine), commencé une nouvelle activité professionnelle et quel aurait été le montant du salaire alors perçu (consid. 4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Procédure ; cumul d’actions ; lorsqu’il dispose de plusieurs prétentions contre le même défendeur fondées sur des conglomérats de faits différents, le demandeur peut choisir de les réunir dans un seul acte procédural (cumul objectif d’actions, art. 90 CPC) ou de les invoquer dans des procès distincts. En matière de dommage, lorsque la demande tend à l’allocation de divers postes du dommage, le juge n’est lié que par le montant total réclamé dans les conclusions. Il peut ainsi allouer davantage pour un des éléments du dommage et moins pour un autre, sans violer le principe de disposition. Les limites dans lesquelles ce type de compensation entre les différents postes du dommage peut être opéré doivent être fixées de cas en cas, au vu des différentes prétentions formulées par le demandeur (consid. 4.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Directive 2000/78/CE ; protection de la personnalité ; discrimination ; l’interdiction de porter toute forme visible d’expression des convictions politiques, philosophiques ou religieuses sur le lieu de travail peut être justifiée par le besoin de l’employeur de se présenter de manière neutre à l’égard des clients ou de prévenir des conflits sociaux. Toutefois, cette justification doit répondre à un besoin véritable de l’employeur et, dans le cadre de la conciliation des droits et intérêts en cause, les juridictions nationales peuvent tenir compte du contexte propre à leur Etat membre et notamment des dispositions nationales plus favorables en ce qui concerne la protection de la liberté de religion.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Protection de la personnalité, procédure ; protection des données ; le TF n’est pas entré en matière sur le recours d’un candidat, écarté de son emploi en raison d’informations contenues dans une base de données, contre l’arrêt cantonal ayant fait interdiction à la banque recruteuse de lui fournir des informations provenant de cette base de données, des tiers risquant d’être identifiés.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Congé abusif, heures supplémentaires ; restructuration, preuve, chauffeur ; une restructuration d’entreprise ne doit pas nécessairement se faire au profit de personnel plus qualifié. Aussi le congé n’est-il pas abusif du fait que le travailleur a été remplacé par un travailleur moins qualifié (consid. 4.3). Ni l’art. 46 LTr, ni l’OLT 1 ne prévoient un renversement du fardeau de la preuve en matière d’heures de travail accomplies. Un tel renversement n’est envisageable qu’en cas d’entrave à la preuve constitutive d’un abus de droit, soit par exemple lorsque l’employeur détruit le moyen de preuve pour empêcher le travailleur d’établir celle-ci. Un tel abus ne résulte pas du seul fait que l’employeur n’a pas satisfait à son devoir d’enregistrement. Ceci dit, l’état de nécessité probatoire et le comportement de l’employeur peuvent être pris en compte dans l’appréciation des preuves (consid. 5.1.2). Dans les affaires concernant des chauffeurs, au regard des obligations de contrôle et d’enregistrement échéant à l’employeur (cf. art. 16 OTR 1), il n’est pas réaliste d’exiger du travailleur qu’il tienne lui-même un décompte exact de ses heures supplémentaires. Le chauffeur peut établir, en particulier par témoins, si et dans quelle mesure approximative il avait accompli des heures supplémentaires (consid. 5.1.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Congé abusif ; motif ; n’est, en l’espèce, pas abusif le licenciement notifié à une salariée à la suite de plusieurs altercations violentes avec d’autres collaboratrices. L’employeuse n’a pas failli à ses devoirs, dès lors que, dès la première altercation, l’employée avait été prévenue que son comportement n’était pas tolérable, que l’employeuse avait pris soin de déplacer la collaboratrice en conflit de manière à éviter les contacts entre l’employée et celle-ci et, partant, les disputes, et que l’employeuse avait organisé une réunion entre les protagonistes, leur hiérarchie et les ressources humaines, en leur signifiant que leur attitude n’était pas tolérable et qu’un nouvel incident aurait des conséquences. Dans de telles circonstances, et au vu notamment des traits de caractère des intéressées, dont en particulier ceux de l’employée, on ne saurait soutenir que l’employeuse aurait pu ou dû faire davantage. Par ailleurs, l’employée avait eu tout loisir de modifier son comportement.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Vacances ; rémunération incluse et versée mensuellement ; la rémunération relative aux vacances ne peut être versée concomitamment avec le salaire mensuel qu’en cas d’activité irrégulière et à condition d’être clairement et expressément séparée du salaire de base, tant dans le contrat de travail écrit que dans chacun des bulletins de salaire. Un emploi à plein temps n’est pas nécessairement exclusif d’une activité irrégulière (rappel de jurisprudence). La cause doit être renvoyée à l’instance cantonale pour qu’elle examine si l’activité était régulière ou non.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 340 CO, Art. 340a CO
Clause de non-concurrence ; destiné à la publication ; étendue ; genre d’affaires ; clientèle ; secrets de fabrication ou d’affaires. Une clause de non-concurrence ne peut pas interdire toute activité, mais seulement une activité concurrente ; elle ne peut donc pas s’étendre au-delà du domaine d’activité de l’employeur (consid. 3.5.2). L’interdiction d’accomplir « toute activité concurrente » remplit l’exigence de forme de l’art. 340a CO ; en l’espèce, elle est suffisamment déterminée, ou au moins suffisamment déterminable par les méthodes d’interprétation générales (consid. 3.6). Un poste en marketing, même lié à la planification, à la mise en œuvre et au contrôle des activités de l’entreprise, ne suffit pas pour interdire toute activité dans une entreprise concurrente sur le fondement de la connaissance d’éléments techniques, organisationnels ou financiers que l’employeur voudrait maintenir secrets (consid. 4.1.2). En l’espèce, la Cour cantonale n’a pas suffisamment établi le lien de causalité naturelle entre la connaissance de la clientèle par la travailleuse et le potentiel dommage considérable pour l’employeur (consid. 4.1.3). En particulier, elle n’a pas établi le degré de connaissance des habitudes des clients, qui permettrait à la travailleuse de proposer des prestations analogues à celles de son ancienne employeuse (consid. 4.1.1).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 328 CO, Art. 4 LEg
Egalité hommes femmes ; harcèlement sexuel. L’art. 328 al. 1 CO impose à l’employeur de protéger et respecter, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur. Il doit en particulier veiller à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu’ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes. Le harcèlement sexuel peut prendre différentes formes : remarques sexistes, commentaires grossiers ou embarrassants, usage de matériel pornographique, attouchements, invitations gênantes, avances accompagnées de promesses de récompense ou de menaces de représailles. Bien que l’art. 4 LEg ne se réfère qu’à des cas d’abus d’autorité, la définition englobe tous les comportements importuns de caractère sexuel, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées. En définitive, le harcèlement sexuel sur le lieu de travail n’est pas forcément en rapport avec la sexualité (consid. 3.1). En l’espèce, c’est à bon droit que la Cour cantonale a retenu l’existence d’un harcèlement sexuel : après plusieurs années de collaboration respectueuse, le directeur avait avoué à son employée les sentiments qu’il éprouvait pour elle et lui avait proposé d’entretenir une relation intime, dès mars 2014. Malgré le refus qu’elle lui a d’emblée signifié, il s’est montré insistant et a fait pression sur elle en utilisant sa position de supérieur hiérarchique pour parvenir à ses fins durant toute l’année 2014. Exténuée par cette pression, l’employée s’est retrouvée en incapacité de travail dès la mi-janvier 2015.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 115 LTF let. b, Art. 116 LTF
Procédure ; qualité pour recourir. Sont irrecevables les recours, tant d’une fonctionnaire que du Conseil d’Etat genevois, à l’encontre d’un arrêt de la Cour de justice annulant un arrêté du Conseil d’Etat en matière de traitement des fonctionnaires. Il ne se justifie pas de reconnaître à la collectivité publique, en raison de son seul statut d’employeur, la qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire dans le domaine du droit de la fonction publique.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 9 Cst.
Licenciement ; motifs. On ne saurait imputer de faute grave à un fonctionnaire, en ce qu’il aurait épandu du « Roundup » de manière abusive, dans la mesure où le supérieur hiérarchique de l’intimé a validé la manière d’épandre le produit en cause, quand bien même les dosages n’avaient pas été respectés. Le fait que la commune invoque l’attitude du fonctionnaire lorsqu’il a procédé à l’épandage (depuis le véhicule, en tenue de vacancier) pour justifier sa décision met en évidence l’absence de griefs graves et indiscutables de licenciement.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 224 CPC
Procédure ; heures supplémentaires ; action partielle. Lorsque le travailleur introduit une action partielle en paiement d’un certain nombre d’heures supplémentaires, tout en mentionnant expressément qu’il introduira ensuite une seconde action pour les heures supplémentaires restantes, l’employeur peut répondre par une demande reconventionnelle en constatation qu’il ne doit rien au titre de l’ensemble des heures supplémentaires, en raison des compensations entre les années qui peuvent survenir.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 50 CPC, Art. 128 CPC
Procédure ; récusation ; amende disciplinaire. La décision consécutive à une demande de récusation ne s’inscrit pas dans les mesures ordinairement nécessaires à la préparation et à la conduite rapide du procès civil. Il ne s’agit pas d’une ordonnance d’instruction aux termes des art. 319 let. b et 321 al. 2 CPC, mais d’une des « autres décisions » visées par l’art. 319 let. b CPC (consid. 3.2). Le prononcé infligeant une amende disciplinaire, en particulier celle prévue par l’art. 128 al. 3 CPC pour la répression de procédés téméraires, se présente fréquemment comme un élément accessoire ou additionnel dans une décision portant aussi sur d’autres mesures, voire dans une décision finale. Lorsque ces mesures sont elles aussi contestées, il s’impose d’admettre que la voie et le délai de recours applicables auxdites mesures le sont aussi à l’amende (consid. 4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 30 Cst., Art. 6 CEDH, Art. 14 Pacte ONU II
Procédure ; publicité des débats. Les discussions transactionnelles menées dans le cadre d’un procès civil ne sont pas soumises au principe de la publicité de la justice, car elles ne font pas partie de l’activité juridictionnelle du tribunal.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 60 CO, Art. 127 CO
Protection de la personnalité ; procédure ; responsabilité de l’employeur ; prescription. Doit être cassé l’arrêt cantonal ayant jugé que l’action intentée par la veuve et les enfants d’un travailleur décédé d’une maladie professionnelle due à l’amiante était prescrite. En effet, il n’est pas possible de déterminer le moment exact où la maladie s’est développée : l’acte dommageable a donc duré durant toute la relation de travail. Ce n’est qu’avec la fin de cette relation que l’acte dommageable a cessé et que la prescription a commencé à courir (consid. 6).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 3 CEDH, Art. 8 CEDH, Art. 14 CEDH, Art. 177 CP, Art. 180 CP, Art. 181 CP, Art. 261bis CP
Protection de la personnalité ; homophobie. La CourEDH a jugé que, lorsqu’une personne soutient de manière défendable qu’elle a subi un harcèlement à caractère raciste, notamment des insultes et des menaces physiques, les Etats se doivent, en vertu de l’art. 8 CEDH, de prendre toutes les mesures raisonnables pour déterminer s’il existait un mobile raciste et si des sentiments de haine ou des préjugés fondés sur l’origine ethnique avaient pu jouer aussi un rôle dans les événements, cela même lorsque le traitement n’atteint pas le degré de gravité requis par l’art. 3 CEDH. Selon la jurisprudence de la CourEDH, l’orientation sexuelle relève de la protection de l’art. 14 : insulter ou ridiculiser une personne en raison de son orientation sexuelle constitue une discrimination aussi grave que celles fondées sur la race, l’origine ou la couleur (consid. 3.1.1). En droit interne, l’extension de la norme antiraciste de l’art. 261bis CP aux discriminations fondées sur l’orientation sexuelle, adoptée par le Parlement le 14 décembre 2018, traduit la volonté de réprimer de la même manière les actes discriminatoires fondés sur l’appartenance raciale, ethnique ou religieuse, et ceux fondés sur l’orientation sexuelle (consid. 3.1.2). Les expressions, gestes ou images dépréciatifs portant sur l’orientation sexuelle peuvent être constitutifs d’injure (art. 177 CP), dans la mesure où ils expriment le mépris. En outre, celui qui aura volontairement fait redouter à sa victime la survenance d’un préjudice réalise l’infraction de menace au sens de l’art. 180 CP. Enfin, le droit suisse réprime la contrainte par « stalking » (art. 181 CP), soit la persécution obsessionnelle d’une personne durant une période prolongée (consid. 3.1.2). En l’espèce, le Ministère public genevois n’aurait pas dû refuser d’entrer en matière sur la plainte déposée par un employé qui avait indiqué :
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 18 CO, Art. 319 CO, Art. 57 CPC
Conclusion ; procédure ; simulation ; compétence ; faits doublement pertinents. En l’espèce, la preuve du versement effectif d’un salaire n’ayant pas été rapportée et l’activité exercée n’ayant pas excédé les services habituellement rendus entre concubins, l’autorité cantonale pouvait, sur cette seule base, conclure sans arbitraire que l’accord par lequel un homme âgé indiquait engager son amie en qualité d’assistante personnelle et d’aide pour les problèmes de la vie quotidienne ne reflétait pas la volonté réelle des parties, nonobstant les apparences créées. Le raisonnement de la demanderesse, qui conteste qu’il y ait eu simulation, adopte une prémisse erronée, à savoir que la preuve d’une simulation nécessiterait d’établir le mobile précis des cocontractants ; dans le présent contexte, la cour d’appel pouvait retenir sans arbitraire que la volonté réelle des parties n’était pas de conclure un contrat de travail, sans qu’il soit nécessaire de connaître leur mobile précis, étant entendu que la simulation d’un contrat de travail pouvait conférer des avantages à l’un et/ou l’autre des signataires de l’accord (consid. 4.4.3). Rappel de jurisprudence concernant les faits de double pertinence. Définition : Les faits doublement pertinents sont des faits déterminants non seulement pour la compétence du tribunal mais aussi pour le bien-fondé de l’action. Lorsqu’un canton – tel le canton de Genève – institue une juridiction spécialisée pour connaître des litiges découlant d’un contrat de travail, ledit contrat constitue un fait doublement pertinent. Procédé : Le juge saisi examine sa compétence sur la seule base des allégués, moyens et conclusions de la demande, sans tenir compte des contestations du défendeur et sans procéder à aucune administration de preuves. Les faits allégués (censés établis) doivent être concluants, c’est-à-dire permettre juridiquement d’en déduire le for invoqué par le demandeur. Si la qualification du rapport contractuel pose une question délicate de délimitation, celle-ci devra être élucidée lors de l’examen du bien-fondé de la prétention au fond, en même temps que celle de savoir si un contrat a réellement été passé. Conséquence : Si, en fonction de l’examen restreint aux éléments précités, le juge arrive à la conclusion qu’il n’est pas compétent, il doit rendre une décision d’irrecevabilité. En revanche, s’il admet sa compétence au regard des allégations du demandeur, le juge procède alors à l’administration des preuves puis à l’examen du bien-fondé de la prétention au fond. S’il conclut finalement que le fait doublement pertinent censé fonder sa compétence n’est pas réalisé, il doit rejeter la demande par une décision sur le fond, revêtue de l’autorité de chose jugée. Ainsi, le tribunal des prud’hommes doit rejeter la demande si, en examinant le fond, il constate l’inexistence d’un contrat de travail. Exception : Il est fait exception à l’application de la théorie de la double pertinence notamment en cas d’abus de droit de la part du demandeur (consid. 5.2). En l’espèce, les instances cantonales se sont appuyées sur les preuves administrées et sur une instruction complète pour en déduire que les parties n’étaient pas liées par un contrat de travail. Or, dans une telle constellation, la jurisprudence prescrit de rendre une décision de fond et de rejeter la demande, par un jugement revêtu de l’autorité de chose jugée (consid. 5.3). Lorsque la demande contient des prétentions de droit commun et d’autres fondées sur une compétence spéciale, le principe iura novit curia emporte une attraction de compétence vers la juridiction spécialisée. Par conséquent, un tribunal prud’homal institué par le droit cantonal ne peut refuser d’étendre son examen aux moyens de droit fédéral invoqués concurremment avec le droit particulier qui fonde sa compétence spéciale (consid. 5.4). Dans le cas présent, le nœud du litige était bel et bien le contrat de travail. Par attraction, la juridiction spécialisée, tenue d’appliquer d’office le droit fédéral (art. 57 CPC), est aussi compétente pour examiner si certaines conclusions peuvent s’appuyer sur un autre fondement juridique que le contrat de travail. En conséquence, la Cour de justice ne pouvait pas, sous couvert d’une compétence spécialisée pour les litiges découlant d’un contrat de travail, refuser de connaître des autres questions soulevées en appel, en particulier celle portant sur le point de savoir si un autre fondement pouvait justifier l’indemnité spéciale réclamée par la demanderesse (consid. 5.5).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 334 CO, Art. 337c Co
Congé immédiat ; contrat de durée minimale. Un contrat de durée minimale, déploie, pendant la durée minimale convenue, les effets propres au contrat de durée déterminée, en ce sens qu’il ne peut être mis fin aux rapports de travail par un congé ordinaire pour un terme antérieur à celui de l’échéance de la durée minimale fixée conventionnellement. Pour l’employeur, la seule possibilité de mettre unilatéralement un terme au contrat de travail durant cette période est la résiliation immédiate pour justes motifs au sens de l’art. 337 CO (consid. 4.1). Même si l’employeur résilie le contrat pour la fin d’un mois en respectant un délai de préavis, cette circonstance ne fait pas obstacle à la qualification de congé extraordinaire (consid. 4.2). Justifiée ou non, une telle résiliation extraordinaire met fin au contrat en fait et en droit le jour même où elle est communiquée (consid. 4.1). Qu’elle soit ordinaire ou immédiate, la résiliation consiste en l’exercice d’un droit formateur et, à ce titre, elle revêt en principe un caractère irrévocable. Des exceptions sont possibles : la partie qui a résilié le contrat peut revenir sur sa déclaration si le cocontractant est d’accord avec cette révocation ou s’il a contesté la validité de la résiliation et, ce faisant, manifesté sa volonté de maintenir le contrat (rappel de jurisprudence, consid. 4.1). En confirmant la fin du contrat pour la fin du mois en cours, malgré la proposition de la travailleuse de maintenir la relation contractuelle, l’employeuse a en l’espèce définitivement mis fin à la relation. Une éventuelle révocation de la résiliation n’entrait alors plus en ligne de compte, puisque le contrat avait déjà pris fin. Les tentatives ultérieures de l’employeuse de faire revenir la travailleuse ne peuvent constituer que des offres de conclure un nouveau contrat de travail. Or, rien dans l’attitude de l’employée ne permet d’admettre qu’elle aurait accepté de conclure un nouveau contrat (consid. 4.2). En l’espèce, l’employeuse a motivé le licenciement par une perte de confiance mutuelle, sans faire état de manquements particuliers de la part de la recourante ou d’autres circonstances justifiant un congé extraordinaire. Il est manifeste que l’intimée ne disposait pas de justes motifs pour mettre un terme prématuré au contrat de travail (consid. 5.1). Comme l’indemnité fondée sur un congé-représailles a la même nature juridique que l’indemnité fondée sur l’art. 337c al. 3 CO à laquelle la recourante a finalement droit, force est de conclure que la Chambre des prud’hommes a violé le droit fédéral en rejetant la prétention correspondante de l’employée (consid. 5.2.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 321c CO al. 3, Art. 337c CO al. 3
Congé immédiat ; heures supplémentaires ; montant de l’indemnité ; imprévision ; acceptation par actes concluants. En confirmant l’indemnité fixée par la juridiction de première instance à deux mois de salaire, soit un tiers du montant maximum prévu par l’art. 337c al. 3 CO, le Tribunal cantonal a pris en compte les éléments pertinents du cas d’espèce, à savoir en première ligne le licenciement immédiat de l’intimée par la recourante quelques heures après avoir remarqué l’absence de cette dernière alors que la relation de travail avait duré presque 3 ans et demi ainsi que la faute concomitante de l’intimée n’ayant pas informé son employeur de son état de santé (consid. 5.2). Il ressort de l’arrêt entrepris que l’intimée a été amenée à travailler un nombre d’heures excédant notablement ce qui était prévisible au moment de la conclusion du contrat. En détaillant l’étendue des tâches confiées à l’intimée, sources d’une charge jugée excessive pour celle-ci, et le caractère imprévisible de cette surcharge, l’autorité précédente a correctement appliqué les conditions de la théorie de l’imprévision. L’employeuse ne peut rien tirer à cet égard de la clause contractuelle selon laquelle les heures supplémentaires sont compensées par le salaire et les vacances, la clausula rebus sic stantibus permettant précisément au juge d’adapter le contrat (consid. 6.2.2.3). S’il est vrai que les travaux supplémentaires donnant droit à une rémunération spéciale ne sauraient s’étendre sur une longue durée sans que l’employeur donne son approbation, pareil accord peut résulter d’actes concluants. En l’occurrence, l’autorité précédente a estimé que la recourante ne pouvait ignorer le fait que l’intimée accomplissait des heures supplémentaires (consid. 6.2.2.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 333 CO
Transfert des rapports de travail ; fraude à la loi. En l’espèce, l’employeur ne parvient pas à critiquer valablement les constatations de la Cour cantonale aux termes desquelles il y a eu transfert d’entreprise. Par conséquent, n’est pas remis en question le raisonnement de la Cour selon lequel le premier licenciement de la travailleuse visait à faire échec au transfert du rapport de travail et que, partant, l’ancienneté de la travailleuse au sein du nouvel employeur devait être prise en compte depuis le début du premier contrat.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 19 LTr
Jours fériés ; autorisation de travailler. En application de l’art. 89 al. 2 let. d LTF, combiné avec l’art. 58 LTr, les associations des employeurs et des travailleurs intéressés ont, de par la loi, qualité pour recourir au TF contre les décisions des autorités cantonales et fédérales rendues en application de la LTr (rappel de jurisprudence, consid. 1.2). L’interdiction de travailler les jours fériés, qui avait au départ une justification religieuse, répond désormais également – voire prioritairement – à un but de politique sociale. Au sens de la législation, les jours fériés ne sont pas seulement des jours « analogues » aux dimanches, censés être fêtés, mais bien des jours « identiques » à ceux-ci qui visent aussi à accorder aux travailleurs un temps libre supplémentaire (consid. 3.1). Les dérogations au principe général de l’interdiction de travailler les dimanches et les jours fériés doivent en toute hypothèse être interprétées restrictivement et non pas extensivement, quand bien même les habitudes des consommateurs auraient subi une certaine évolution depuis l’adoption de la règle. Il n’appartient en effet pas au juge d’interpréter de manière large et contraire à l’esprit de la loi les exceptions au travail dominical, car cela reviendrait à vider de sa substance le principe de l’interdiction de travailler le dimanche expressément inscrit à l’art. 18 LTr. La même circonspection doit prévaloir s’agissant des dérogations à l’interdiction de travailler un jour férié (consid. 3.4). Une ouverture dominicale peut être autorisée notamment lorsque l’on peut constater une étroite corrélation entre, d’une part, l’animation résultant d’un marché de Noël, manifestation d’envergure organisée depuis plusieurs années avec le concours de nombreux commerces locaux et, d’autre part, l’animation due à l’ensemble de l’activité commerciale de la place, qu’il existe une véritable tradition d’ouverture dominicale des commerces liée à cet événement et que la dérogation permet de parer aux effets d’une âpre concurrence étrangère (consid. 3.5). Il semble arbitraire d’assouplir l’interdiction de travailler un jour férié uniquement parce qu’il tombe sur une journée qui est d’ordinaire ouvrable : la fonction des jours fériés protégés par l’art. 20a LTr est précisément d’offrir la même protection que les dimanches, mais un autre jour de semaine. Si un canton considère qu’il n’est plus nécessaire d’assurer une tranquillité « dominicale » lors de certains jours considérés comme « fériés », il incombe à son législateur – et non au juge – d’intervenir et d’abolir le ou les jours fériés devenus désuets (consid. 3.7). Le régime restrictif devant prévaloir en matière d’autorisation de travailler les dimanches et les jours fériés en application de l’art. 19 al. 3 LTr n’empêche pas le développement de manifestations culturelles ou sportives, mais uniquement de celles qui présentent un caractère essentiellement commercial (consid. 3.8).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Camille Zimmermann
Art. 321a, 340 ss CO
Clause de non-concurrence ; sollicitation de clientèle. La connaissance de la clientèle n’est pas un secret d’affaires que le travailleur doit maintenir secret après la fin du contrat de travail (consid. 3.1.1). Lorsqu’un employé envisage de se mettre à son compte ou de fonder avec d’autres une entreprise concurrente, il est en soi légitime qu’il puisse entreprendre des préparatifs avant que le contrat de travail ne prenne fin ; son devoir de fidélité lui interdit cependant de commencer à concurrencer son employeur, de débaucher des employés ou de détourner de la clientèle avant la fin de la relation de travail. La limite entre les préparatifs admissibles et un véritable détournement de la clientèle n’est pas toujours facile à tracer (rappel de jurisprudence, consid. 3.1.2). Le courrier à l’en-tête du nouvel employeur adressé par l’employé à l’un ou l’autre des clients dont il avait la gestion au sein de son précédent employeur a été envoyé après la fin de son contrat de travail ; il ne saurait, de ce fait, constituer une violation de son devoir de fidélité (consid. 3.2). La Cour cantonale a pu juger qu’au même titre que le fait de confier sa santé à un médecin ou ses problèmes juridiques à un avocat, la relation nouée entre un gestionnaire de patrimoine et un client reposait sur une confiance absolue. Ce rapport se construit au fil du temps et se renforce non seulement par les résultats obtenus, mais également par la disponibilité du gérant, sa capacité à rassurer le client et à régler d’éventuels problèmes (consid. 4.2). De même, elle n’a pas versé dans l’arbitraire en retenant que les clients attachaient plus d’importance aux capacités personnelles de l’employé qu’à l’identité de la banque. En définitive, c’est à bon droit que la Cour cantonale a conclu qu’exploiter la seule connaissance de la clientèle ne suffisait pas pour causer un préjudice sensible à l’employeur et que le préjudice subi découlait au contraire, de manière prépondérante, des capacités personnelles de l’intimé. La clause de non-concurrence n’était donc pas valable (consid. 4.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 1 CC
CCT/Secteur principal de la construction ; convention collective ; champ d’application. Lorsqu’une partie invoque une mauvaise interprétation des dispositions normatives d’une convention collective, même indépendamment d’une norme d’extension de la CCT, elle invoque ce faisant l’application de l’art. 1 CC (consid. 2). Savoir quelles activités s’exercent dans une entreprise ou dans un département indépendant d’une entreprise, et dans quelle mesure, est une question de fait. A l’inverse, est une question de droit le point de savoir laquelle des activités identifiées confère à l’entreprise son caractère distinctif, autrement dit selon quels critères elle doit être assignée à un secteur industriel particulier (consid. 6). En l’espèce, la CCT pour le secteur principal de la construction n’est pas applicable à l’employeur.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 3 LEg
Egalité hommes femmes ; discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. Une discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ne constitue pas une discrimination prohibée au sens de la loi sur l’égalité.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 8, 9 et 49 Cst.
Fonction publique ; vacances ; congé maternité. N’est pas inconstitutionnelle la législation fribourgeoise qui disposait que les vacances scolaires des enseignants ne peuvent pas être rémunérées en sus lorsqu’elles tombent en même temps qu’un congé maternité.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 9 Cst.
Ordonnance sur le personnel de la ville de Zurich ; licenciement ; rétrogradation. Est illicite le licenciement d’une fonctionnaire dont il avait été jugé qu’elle avait été illicitement rétrogradée d’une fonction supérieure à une fonction inférieure.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 28 Cst.
Grève ; interdiction. L’interdiction de la grève à l’ensemble du personnel de soins du canton de Fribourg est illégale. S’agissant des restrictions à l’exercice du droit de grève, le Tribunal fédéral a considéré dans une affaire concernant des fonctionnaires du canton de Genève, que la grève ne saurait paralyser le service public dans les domaines essentiels que sont, par exemple, le maintien de l’ordre public, la protection des biens et des personnes, la lutte contre le feu ou les soins requis par les malades dans les hôpitaux. Par rapport à l’exigence d’un service minimum prévue par le droit genevois, il a indiqué que le principe de la proportionnalité empêchait que, sous couvert de ce service minimum, la grève soit interdite à des fonctionnaires dont la présence n’était en réalité pas absolument nécessaire (consid. 4.3.2). L’admissibilité constitutionnelle d’une interdiction légale du droit de grève pour certaines catégories de personnes dépend surtout du point de savoir si ces personnes fournissent des services essentiels sous l’angle de l’intérêt public (consid. 4.4.3.1). En l’espèce, la portée et les effets de l’interdiction de grève au personnel de soins ne sont pas dans un rapport raisonnable avec le résultat escompté du point de vue de l’intérêt public (consid. 4.4.3.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 9, 13 LTr ; 25 OLT1
Heures supplémentaires ; travail supplémentaire ; compensation. Il n’est pas possible de renoncer par contrat à la compensation du temps supplémentaire selon l’art. 13 al. 2 LTr ; une compensation par un congé équivalent est toutefois possible avec l’accord du travailleur. Un tel accord n’est pas soumis à une condition de forme. Il importe de savoir si l’employeur était informé du travail supplémentaire, s’il savait ou aurait dû savoir qu’un tel travail supplémentaire était exécuté et s’il aurait eu la possibilité de l’éviter par des mesures organisationnelles (consid. 4.3.2). En l’absence de ratification du travail supplémentaire, il y a déchéance du droit à compensation si l’employeur ne pouvait pas savoir que du travail supplémentaire non compensé était effectué et qu’il n’a pas eu la possibilité de prendre des mesures organisationnelles pour éviter le travail supplémentaire (consid. 4.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 34 CPC
Procédure ; compétence à raison du lieu. Selon l’interprétation jurisprudentielle de l’art. 34 al. 1 CPC, qui correspond à l’art. 19 par. 2 let. a CL 2007, le for peut se trouver dans un lieu où l’employeur n’a aucune sorte d’établissement ni installation fixe (consid. 6). Le for du lieu habituel de l’activité convenue répond à un but de protection du travailleur à titre de partie socialement la plus faible ; c’est pourquoi celui-ci ne peut pas y renoncer valablement par une convention antérieure à la naissance du différend (art. 35 al. 1 let. d CPC, art. 21 par. 1 CL 2007). Il n’est certes pas garanti au travailleur qu’un lieu d’activité habituel, avec le for correspondant, doive être identifié et reconnu, quelles que soient les circonstances particulières de ses propres tâches. On doit néanmoins n’envisager qu’avec retenue la situation singulière où aucun for du lieu habituel de l’activité ne serait disponible. Concrètement, il ne conviendrait pas de retenir que, parce que l’activité administrative d’un collaborateur du service extérieur est globalement secondaire du point de vue quantitatif, ce travailleur ne puisse pas agir en justice là où il pratique régulièrement cette activité, avec ce résultat qu’il ne puisse agir qu’au siège de l’employeuse alors que son travail n’a aucun lien effectif avec ce lieu-ci. En particulier dans la présente contestation, rien ne justifie que le demandeur soit contraint d’ouvrir action dans le canton de Zurich, ou de renoncer à son action, alors que son activité se pratiquait exclusivement en Valais (consid. 9).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 6 CEDH ; 7 et 11 CNUIJE
Procédure ; immunité de juridiction. L’octroi de l’immunité souveraine à un Etat dans une procédure civile poursuit le but légitime d’observer le droit international afin de favoriser la courtoisie et les bonnes relations entre Etats grâce au respect de la souveraineté d’un autre Etat (point 54). Un Etat étranger peut renoncer, notamment par le biais de clauses contractuelles, à son droit d’immunité devant les tribunaux d’un autre Etat (point 57). Le Tribunal fédéral pouvait présumer que, par la clause « Pour toute contestation et pour ce qui n’est pas prévu ou précisé dans le présent contrat, les parties auront recours à l’avis du service du protocole local compétent, et pour autant que les usages diplomatiques le permettent, à la compétence du pouvoir judiciaire local. », la condition d’un consentement exprès prévue par l’art. 7 par. 1 b) de la CNUIJE faisant défaut, et qu’il s’ensuivait que la République du Burundi n’avait pas renoncé à son immunité de juridiction (point 59). Lorsqu’un lien avec l’Etat du for fait défaut, ce dernier n’est plus fondé à revendiquer la prépondérance de sa législation du travail et de sa juridiction en la matière face à un Etat employeur étranger, malgré le lien territorial que constituent le lieu du recrutement de l’employé et le lieu où le travail doit être accompli conformément au contrat (point 61). Or, en l’espèce, la requérante avait sa résidence non pas en Suisse mais en France voisine (point 62). Il en découle que les circonstances de la présente affaire tombent dans le champ d’application de l’art. 11 par. 2 e) de la CNUIJE eu égard au fait que la requérante était ressortissante de l’Etat employeur au moment où l’action a été engagée et qu’elle n’a jamais eu sa résidence permanente dans l’Etat du for (point 63). Considérant les faits de l’espèce et les tâches effectivement confiées à la requérante au sein de la mission permanente, il y a un chevauchement complexe entre les actes jure imperii et jure gestionis accomplis par celle-ci (point 50). En toute hypothèse, la requérante ne se trouve pas dans une situation d’absence d’autre recours, puisque la République du Burundi a indiqué qu’elle pourrait saisir sa juridiction administrative (point 64).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 196, 272 al. 1, 280, 281 al. 4 CPP
Protection de la personnalité ; vidéosurveillance. La police ne peut pas, en accord avec la direction d’une entreprise, installer un dispositif de vidéosurveillance à l’insu des employés. De tels dispositifs techniques de surveillance ne peuvent être ordonnés que par le Ministère public et autorisés par le Tribunal des mesures de contrainte. L’entreprise n’est pas autorisée à donner son accord en lieu et place de ses employés. Les informations recueillies par ce moyen ne sauraient être exploitées.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 101 et 328 CO
Protection de la personnalité ; accident ; responsabilité de l’employeur. En l’espèce, la responsabilité de l’employeur n’est pas engagée dans un cas où une employée avait perdu conscience et s’était blessée au visage dans son bureau, et alors qu’une collègue l’avait laissée seule sans la mettre immédiatement en position latérale, ceci car elle était partie alerter un groupe d’employés formés aux premiers secours, qui se trouvaient à 13 secondes du lieu de l’accident (consid. 3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 32 ss, 814 CO
Conclusion ; représentation de l’employeur. Peuvent signer un contrat de travail ou une modification de ce contrat avec un employé, les organes (sociaux) exécutifs qui disposent du pouvoir de représentation, ainsi que toutes les personnes qui peuvent valablement représenter la Sàrl dans les actes juridiques avec des tiers de mandat (consid. 3.1). Un courrier, non daté, portant l’engagement de payer le salaire de l’employée jusqu’à sa retraite, signé par le seul vice-président exécutif, est impropre à engager la société, cette dernière n’ayant jamais ratifié ultérieurement l’acte défectueux ; par ailleurs, il n’a pas été constaté que les statuts autoriseraient une délégation et aucun élément ou indice ne permet d’affirmer que le gérant se serait vu octroyer la compétence de procéder à une sous-délégation (consid. 4.1). Une représentation civile portant spécifiquement sur la conclusion du courrier est également exclue, la relation entre le gérant et le vice-président exécutif étant (prétendument) régulière et durable (consid. 4.2). N’est pas valable un avenant, prévoyant un délai de résiliation de six mois, lorsqu’il n’a été signé, du côté de l’employeuse, que par un représentant disposant de la signature collective à deux (consid. 5.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 717 et 725 CO
Salaires ; indemnité de départ. Un avenant prévoyant une indemnité de départ d’un montant de deux ans de salaire est valable, même s’il a été signé dans un contexte de contrats croisés entre ceux devant en bénéficier, à savoir le directeur général et le directeur financier – par ailleurs actionnaires de la société holding (consid. 5). Cette indemnité de départ n’est pas illicite, dès lors que la société n’était pas cotée en bourse et que les bénéficiaires étaient également actionnaires uniques (consid. 6).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 9 de l’Annexe I ALCP
Salaires ; monnaie étrangère ; euro ; discrimination ; libre-circulation. Le paiement du salaire en euro est possible en Suisse (consid. 2). Une travailleuse de nationalité allemande, habitant en Allemagne et travaillant en Suisse, entre dans le champ d’application de l’art. 9 Annexe I de l’ALCP (consid. 2.2). En vertu de l’al. 4 de cet article, les travailleurs européens ne doivent pas être discriminés. Les discriminations, tant directes qu’indirectes, sont interdites (consid. 2.3). Cette disposition est directement applicable en droit suisse (consid. 2.4). Selon la jurisprudence de la CJUE, cette règle contraint également les employeurs privés (consid. 2.5.1). Des discriminations peuvent toutefois être justifiées pour des raisons d’ordre public, de sécurité ou de santé (consid. 2.5.4). En l’espèce, une modification de la monnaie du salaire du franc suisse à l’euro fut proposée contractuellement sous la menace d’un congé-modification en cas de refus. Comme l’interdiction de discrimination des ressortissants communautaires relève prioritairement d’une approche relevant de l’économie et non des droits de l’homme, il ne saurait en être fait un usage abusif. Or, l’ex-travailleuse utilise l’interdiction de non-discrimination de manière contraire à son but en la soulevant plusieurs années plus tard et alors que la discrimination procédait de motifs économiques qui devaient permettre de lui garantir sa place de travail (consid. 3.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 2 al. 2 CC
Salaires ; travail de nuit ; abus de droit. Il n’y a pas abus de droit de la part du travailleur à réclamer l’indemnité supplémentaire pour travail de nuit seulement à la fin des rapports de travail (consid. 3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 34c LPers ; 10 Leg ; 330a CO
Licenciement ; certificat de travail ; égalité entre hommes et femmes ; congé-représailles. En l’espèce, il n’y avait pas congé-représailles d’une greffière du Tribunal administratif fédéral qui avait préalablement initié une procédure en matière d’égalité (consid. 4). Une absence de la travailleuse pendant la moitié de la durée de l’emploi doit être mentionnée sur le certificat de travail (consid. 5.3.1). La cause de l’absence, en l’occurrence une maladie liée au poste et maternité, peut être mentionnée dans le certificat de travail (consid. 5.3.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 328, 336 CO ; 4 LEg
Congé abusif ; égalité hommes femmes ; harcèlement sexuel. Les remarques sexistes et les commentaires grossiers ou embarrassants entrent dans la définition du harcèlement sexuel. Bien que l’art. 4 LEg ne se réfère qu’à des cas d’abus d’autorité, la définition englobe tous les comportements importuns de caractère sexuel, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées. Le mécanisme d’allègement du fardeau de la preuve prévu par l’art. 6 LEg ne s’applique pas en matière d’harcèlement sexuel (rappel de jurisprudence, consid. 3.1). En l’espèce, la comparaison d’une travailleuse avec Mistinguett, faite par un supérieur, à une seule reprise et sans que l’on connaisse la teneur précise de son propos, ne saurait s’apparenter à du harcèlement sexuel (consid. 3.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 336 CO
Congé abusif ; motif réel du congé ; égards nécessaires. Est abusif le licenciement d’une éducatrice dans une institution pour handicapés, dès lors, d’une part, que l’employeuse avait invoqué comme motif de congé l’altercation survenue entre l’employée et une résidente, alors que tel n’était pas le motif réel du congé, la véritable raison du licenciement consistant dans l’activité syndicale de l’employée, instigatrice, en sa qualité de représentante du personnel, de nombreuses revendications qui s’étaient révélées sources de tensions entre les parties, et, d’autre part, que l’employeuse avait mis un terme au contrat de travail sans faire preuve des égards nécessaires et en portant atteinte aux droits de la personnalité de la travailleuse. En effet, vu l’importance des accusations formulées à l’encontre de l’employée, il incombait à l’employeuse à tout le moins de l’entendre, voire de confronter les deux protagonistes de l’altercation, ce qu’elle n’avait pas fait (consid. 2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 335b CO
Congé en temps inopportun ; période d’essai ; grossesse. La succession immédiate ou rapprochée de deux contrats de travail, tout comme l’apprentissage suivi d’un contrat de travail sont deux situations dans lesquelles il ne doit y avoir qu’une seule période probatoire d’au maximum trois mois (consid. 4.1.2). Il en va de même pour un stage (consid. 4.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 329 et 329d al. 2 CO
Vacances ; délai de congé. En règle générale, l’interdiction de remplacer les vacances par des prestations en argent s’applique aussi après la résiliation des rapports de travail. Ce principe n’est toutefois pas absolu puisque, une fois le contrat dénoncé, le travailleur doit chercher un autre emploi et l’employeur doit lui accorder le temps nécessaire pour ce faire (art. 329 al. 3 CO) ; cette recherche étant incompatible avec la prise effective de vacances, il faut examiner dans chaque cas, au vu de l’ensemble des circonstances, telles que la durée du délai de congé, la difficulté à trouver un autre travail et le solde de jours de vacances à prendre, si l’employeur pouvait exiger que les vacances soient prises pendant le délai de congé ou s’il doit les payer en espèces à la fin des rapports de travail. Si le salarié, comme dans le cas présent, a été libéré de l’obligation de travailler jusqu’au terme du contrat, le point de savoir si le solde de vacances non prises doit être indemnisé en espèces repose sur le rapport entre la durée de la libération de l’obligation de travailler et le nombre de jours de vacances restants. Il faut en particulier que, durant cette période, le salarié congédié, en plus de ses vacances, ait suffisamment de temps à consacrer à la recherche d’un nouvel emploi (rappel de jurisprudence, consid. 4.1). En l’espèce, la cour cantonale a estimé que le travailleur avait disposé du temps nécessaire pour trouver un nouvel emploi. Savoir si le temps disponible pour chercher du travail était ou non suffisant est une question d’appréciation que le Tribunal fédéral ne revoit qu’avec réserve (consid. 4.5).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Lauretta Eckhardt, Camille Zimmermann
Art. 340 CO
Clause de non-concurrence ; connaissance de la clientèle. En matière de mise en œuvre d’une clause de non-concurrence pour connaissance de la clientèle, les capacités propres du travailleur doivent être prises en considération (consid. 2.2). La clause de non-concurrence ne saurait lier le travailleur lorsque fait défaut un rapport de causalité entre la connaissance de la clientèle et un dommage potentiel considérable pour l’employeur (consid. 2.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 340c al. 2, 322d CO
Clause de non-concurrence ; salaires ; motifs justifiés de démission ; qualification d’un bonus. S’être vu retirer abruptement une de ses responsabilités représente un motif justifié de démission propre à emporter la cessation de la clause de non-concurrence du travailleur démissionnaire (consid. 2). La Cour cantonale pouvait, sans violer le droit fédéral, qualifier de salaire contractuel un bonus dont le contrat stipulait certes que le mode de calcul pouvait être modifié, mais qui avait été payé selon le même mode de calcul pendant plusieurs années (consid. 3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 25 CCT pour l’artisanat du métal
Convention collective de travail ; heures supplémentaires ; temps de travail ; pauses. Même si l’art. 25 al. 8 de la CCT pour l’artisanat du métal prévoit que le temps de travail peut être interrompu par des pauses non rémunérées et que l’heure de la pause et sa durée sont fixées par l’employeur, les juges cantonaux ont eu raison de considérer qu’en l’espèce, la pause-café se déroulant directement après le début du travail dans l’attente que le matériel nécessaire au travail soit apporté – et que, par conséquent, la durée de la pause dépendait du moment où le matériel arrivait et que la pause elle-même pouvait être interrompue à tout moment –, le travailleur se tenait à disposition de l’employeur durant tout ce moment, qui valait temps de travail (consid. 6). Les juges cantonaux n’ont pas méconnu l’interdiction de l’abus de droit en ne considérant pas comme manifestement abusif de la part du travailleur le fait d’avoir attendu la fin du rapport de travail pour réclamer le paiement d’heures supplémentaires, en l’absence d’allégation de l’employeur que de telles heures supplémentaires fussent demeurées inconnues de lui (rappel de jurisprudence, consid. 7.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 8 Cst. ; 3 LEg
Egalité hommes-femmes, rémunération discriminatoire. C’est à tort que la Cour suprême du canton de Schaffhouse avait admis une discrimination fondée sur le sexe à propos de la rémunération des enseignantes maternelles cantonales qui exercent cette fonction de longue date. La cause est renvoyée à la juridiction cantonale pour qu’elle examine si les enseignantes maternelles employées de longue date sont rémunérées de manière discriminatoire par rapport aux enseignantes employées depuis plus récemment (consid. 6 et 7).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 8 Cst. ; 3 LEg
Egalité entre hommes et femmes ; discrimination indirecte. Peut rester ouverte la question de savoir si constitue une discrimination indirecte liée à la qualité de femme enceinte la prise en compte des absences liées à la maternité dans la période de six mois nécessaire à l’évaluation des salariés pour décider d’une éventuelle augmentation de salaire. En effet, la cause doit être renvoyée à la juridiction précédente puisque, pour une des années litigieuses, l’employeur a tout de même été en mesure d’effectuer une évaluation, alors que la salariée avait été absente pendant plus de six mois (consid. 7.2). En revanche, pour l’autre année litigieuse, durant laquelle la salariée a été absente pendant plus de 300 jours, et à supposer même que la prise en compte de cette période d’absence soit constitutive d’une discrimination indirecte liée à la qualité de femme enceinte de la salariée, les juges précédents ont eu raison de juger qu’elle répondait en l’occurrence à un motif objectivement fondé. En effet, une période de référence de deux mois à peine apparaît insuffisante pour permettre une évaluation suffisamment fiable et servir de fondement à une augmentation salariale. Le refus des intimés d’augmenter le salaire de la recourante pour 2011 n’apparaît dès lors pas critiquable (consid. 7.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 5, 9 et 29 Cst.
Fonction publique ; harcèlement. Est licite le licenciement d’un fonctionnaire qui a – de manière répétée, autant oralement que par écrit – menacé, insulté et blessé ses collègues, qui s’est mis dans des situations où il ne parvenait plus à distinguer sa vie privée de sa vie professionnelle dans ses relations avec des employés placés sous sa subordination et qui a harcelé d’autres employées.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 9 Cst. ; 21 LPAC/GE
Fonction publique ; congé abusif ; lacunes de l’employé connues dès l’engagement. Ce n’est pas parce que la hiérarchie connaissait les lacunes d’un employé dès son engagement qu’elle ne peut pas le licencier : les dispositions sur le licenciement de la LPAC/GE permettent justement à l’employeur de ne pas garder en fonction un employé s’il se révèle après l’engagement qu’il n’a pas été capable de remédier à son manque d’expérience et de répondre aux exigences du poste, d’autant plus quand un soutien pour l’aider à s’adapter à son nouveau poste lui a été fourni (consid. 5.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 64a OPers
Heures supplémentaires ; horaire de travail fondé sur la confiance. L’art. 64a al. 3 OPers, qui dispose que « les employés rangés dans les classes de salaire 24 à 29 peuvent, en accord avec leur supérieur hiérarchique, appliquer l’horaire de travail fondé sur la confiance » n’exprime qu’une possibilité et laisse un pouvoir d’appréciation à l’autorité. Pour ces cadres concernés, il n’existe donc pas de droit à un horaire de travail fondé sur la confiance (consid. 8).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 17 et 179quater CP
Procédure, enregistrement à l’insu de l’employeur. Le fait pour une travailleuse d’enregistrer son supérieur à son insu pour prouver qu’il lui a fait des avances d’ordre sexuel constitue une violation de la sphère privée de ce dernier.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 322 et 342 CO ; 22 LEtr ; 22 OASA
Procédure ; salaires ; travail au noir. Lorsque l’employeur n’a pas requis d’autorisation du service compétent pour l’engagement d’un travailleur étranger, le juge civil appelé à statuer sur les prétentions salariales de ce dernier est compétent pour déterminer le caractère usuel du salaire convenu. En l’espèce, la Cour cantonale a procédé correctement en se référant aux salaires minimaux prévus par un contrat-type de travail. Le fait qu’elle se soit référée à un contrat-type valaisan ne porte pas préjudice à l’employeur dès lors que les salaires vaudois ne sauraient être inférieurs aux salaires valaisans (consid. 3.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 341 CO ; 353 CPC
Procédure ; arbitrabilité. Les prétentions auxquelles le travailleur ne peut pas valablement renoncer selon l’art. 341 al. 1 CO ne sont pas susceptibles d’arbitrage (consid. 2.2.2). La possibilité offerte par l’art. 353 al. 2 CPC d’exclure l’application du CPC et de convenir que les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont applicables en lieu et place n’est pas admissible en droit du travail (consid. 2.3.3). Lorsque la clause d’arbitrage couvre l’ensemble des prétentions du travailleur, elle est partiellement nulle (art. 20 al. 2 CO). Dans un tel cas, on doit en principe partir de l’idée que, si les parties avaient connu ce vice, elles n’auraient pas du tout conclu la clause compromissoire, de telle sorte que celle-ci tombe intégralement (consid. 2.3.4). Après la fin du délai de protection de l’art. 341 CO, toutes les prétentions du travailleur sont arbitrables (consid. 2.3.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 8 CEDH
Protection de la personnalité ; surveillance des communications électroniques ; vie privée. La Cour européenne des droits de l’Homme a jugé qu’en l’espèce, la surveillance des communications électroniques du travailleur a emporté violation du droit au respect de la vie privée et de la correspondance, dès lors que le travailleur n’avait été informé ni de la nature ni de l’étendue de cette surveillance, ni du degré d’intrusion dans sa vie privée et sa correspondance, et que n’ont pas été déterminées les raisons spécifiques qui auraient justifié la mise en place des mesures de surveillance, ni si l’employeur aurait pu faire usage de mesures moins intrusives pour la vie privée et la correspondance du travailleur, ni encore si l’accès au contenu des communications avait été possible à son insu.
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Art. 328 CO
Protection de la personnalité ; employeur portant atteinte à la personnalité d’une travailleuse. Les juges cantonaux pouvaient retenir sans arbitraire une violation de l’art. 328 CO à l’encontre d’un dentiste devenant de plus en plus exigeant et irascible, puis « infernal ». Il importe peu que le comportement du dentiste ne réponde pas en tous points à la définition du harcèlement psychologique et qu’il n’ait pas nécessairement cherché à isoler et exclure l’employée en particulier. Le fait que le dentiste ait pu avoir une attitude tout aussi critiquable à l’encontre d’autres collaboratrices n’est évidemment pas propre à exclure une atteinte à la personnalité de l’employée intimée. En revanche, à l’instar du mobbing, le comportement de l’employeur doit être apprécié dans son ensemble, de sorte que même si chaque acte pris isolément peut apparaître tolérable, et même si les manquements ont été crescendo au fil de la relation contractuelle, les juges cantonaux pouvaient conclure sans arbitraire que le comportement pris dans sa globalité portait atteinte à la personnalité de l’employée. Dans ce contexte, peu importe que la demande inconvenante de masser la nuque et les épaules du dentiste réponde ou non à la notion de harcèlement sexuel, qui ne paraît pas avoir été arbitrairement méconnue (consid. 8.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 156, 322d CO
Gratification ; bonus ; objectifs. La clause contractuelle qui stipule qu’au salaire « s’ajoute un bonus annuel de CHF 10’000.- » et que « le versement de ce bonus est conditionné aux objectifs fixés chaque année » représente en l’espèce une gratification entièrement facultative (consid. 3.3.3). Le fait que l’employeuse se soit abstenue de fixer chaque année des objectifs particuliers alors que le versement du bonus était conditionné à de tels objectifs ne signifie pas qu’elle aurait renoncé par actes concluants à subordonner le paiement de cette rétribution à toute condition y compris celle, élémentaire, de la bonne et fidèle exécution des tâches correspondant au cahier des charges de l’employée (consid. 3.4.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 77 et 335b CO
Conclusion, temps d’essai, computation. Le temps d’essai au sens de l’art. 335b CO commence en principe au jour du début effectif du rapport de travail (et non au jour du début contractuellement prévu si cette date diffère de l’entrée en fonction effective) (consid. 4.4.1). Lorsque le contrat de travail est conclu le jour de l’entrée en fonction, ce jour n’est pas compté dans la computation des délais selon l’art. 77, al. 1 CO (consid. 4.4.3). Le Tribunal fédéral laisse ouverte la question de savoir comment doit être compté le temps d’essai lorsque le contrat de travail est conclu avant le jour de l’entrée en fonction (consid. 4.4.3).
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Art. 10 al. 3 let. c, 19 al. 1, 34b al. 1 let. c et al. 2 LPers ; 336c al. 1 let. b CO ; 6 al. 2 LTr
Licenciement ; inaptitude à travailler en open space ; absence de motifs objectivement suffisants de licenciement ; indemnité compensatrice. Dans cet arrêt, non destiné à publication aux ATAF, le Tribunal administratif fédéral (le Tribunal) a donné raison à une employée de l’Office fédéral de l’informatique (l’OFIT) qui contestait sa résiliation ordinaire pour inaptitude à travailler en espace ouvert. Elle demandait, certificat médical à l’appui attestant qu’elle faisait partie des 20% des gens trop sensibles au travail en espace ouvert, à pouvoir travailler dans un bureau cloisonné ou à effectuer ses tâches professionnelles à domicile. Cette demande avait été refusée par l’employeur qui avançait que tous les employés évoluaient dans un espace ouvert, y compris le directeur, et que les tâches de l’employée ne pouvaient être effectuées à distance. Le Tribunal a considéré que l’employeur aurait dû donner la possibilité à son employée d’effectuer la moitié de son travail à domicile. Il a accordé à l’employée une indemnité de six mois de salaire, la résiliation s’avérant illicite par défaut de l’employeur d’avoir pris toutes les mesures raisonnables au vu de la situation de son employée.
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 336, 336a CO
Congé abusif ; congé-représailles. Lorsque les juges cantonaux se sont forgé une conviction sur la véritable raison du licenciement, il n’y a plus de place pour une éventuelle violation de l’art. 8 CC (consid. 4.2). En l’espèce, les juges cantonaux sont arrivés correctement à la conclusion que le licenciement représentait un congé-représailles en raison, d’une part, de la coïncidence de dates entre les revendications du travailleur, formulées de bonne foi et en partie fondées, et son licenciement, et d’autre part, de l’absence de preuve de la nécessité pour l’employeur de procéder à une restructuration impliquant la suppression du poste du travailleur en question (consid. 4.4 et 4.5). L’indemnité pour congé abusif a été correctement établie à environ cinq mois de salaire (consid. 5).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 336 CO
Congé abusif; tort moral ; droit d’être entendu. N’est pas abusif le licenciement d’un pilote qui a annoncé être malade pour pouvoir se rendre à un enterrement, car il s’agit d’un manquement grave au sens de la CCT applicable (consid. 5 et 6).
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Art. 5, 9, 29 Cst. ; 61 LPers/VD ; 337 CO
Fonction publique ; congé immédiat ; indication volontairement inexacte du temps de travail ; publication d’une vidéo sur un réseau social. L’indication volontairement inexacte du temps de travail introduit dans le système de timbrage représente une violation grave du devoir de fidélité de l’employé. Le point de savoir si un tel comportement justifie une résiliation immédiate des rapports de travail dépend de l’ensemble des circonstances, en particulier du caractère répété du manquement, de la durée des rapports de travail et du fait qu’il devait être connu du salarié qu’une fraude ou une manipulation dans ce domaine n’était pas tolérée (consid. 3.6.2). Il est pour le moins douteux qu’une tricherie de timbrage qui se produit une fois au cours d’une durée d’environ quinze années des rapports de service puisse constituer — même pour un cadre et à l’aune de l’arbitraire — un juste motif de résiliation (consid. 3.6.3). Le fait de publier sur Facebook un enregistrement vidéo dans lequel on voit certains collaborateurs délibérément filmés en train de fumer dans les locaux, et la recourante ainsi qu’une de ses collègues se moquer d’un supérieur hiérarchique nommément désigné, tout en ironisant sur l’interdiction de fumer, est un manquement grave qui est de nature à entraîner une perte de confiance de la part de l’employeur. A cela s’ajoute que d’autres fonctionnaires, régulièrement en contact avec le public, étaient reconnaissables sur la vidéo et qu’ils n’ont peut-être pas donné leur accord à une publicité qui pouvait se révéler gênante pour eux. Un tel comportement de la recourante doit être apprécié d’autant plus sévèrement au regard de la position hiérarchique qu’elle occupait (consid. 3.6.4). L’attitude de la recourante, appréciée dans son ensemble, dénote une volonté de ne pas se plier aux injonctions et avertissements de l’employeur et un comportement irrespectueux à l’égard d’un supérieur, d’autant moins admissible que l’intéressée ne s’est pas moquée de celui-ci dans un cercle restreint, mais au travers d’une publication sur un réseau social largement accessible et mise en ligne pendant plusieurs jours (consid. 3.6.5).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 324a CO
Incapacité de travailler ; perte de gain ; accord dérogatoire. Une clause stipulant que « la perte de gain en cas de maladie est assurée à 80% dès le troisième jour » déroge, au détriment du travailleur, à l’art. 324a al. 1 CO. Faute d’améliorer la protection du travailleur, une telle clause ne saurait être interprétée comme une convention complétant le régime légal de base. Seul un accord dérogatoire au sens de l’art. 324a al. 4 CO peut entrer en considération (consid. 3.2.1). Même quand la forme écrite n’est pas respectée par les parties à propos de tous les points essentiels du régime dérogatoire (à savoir les risques couverts, le pourcentage du salaire assuré, la durée des prestations, les modalités de financement des primes et, le cas échéant, le délai d’attente) – un renvoi aux conditions générales étant suffisant –, les parties peuvent convenir par actes concluants d’un régime dérogatoire globalement plus favorable au travailleur que le régime de base. En l’espèce, il ne saurait y avoir actes concluants dès lors qu’aucun prélèvement sur le salaire à titre de participation à une prime d’assurance perte de gain n’avait été opéré (consid. 3.2.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 321e CO
Sanctions : clause pénale ; sanction disciplinaire. Lorsque le contrat de travail prévoit une clause pénale en cas de violation de ses obligations par le travailleur, une telle clause ne peut être mise en œuvre que si elle respecte les conditions de l’art. 321e CO. Pour ne pas avoir été liée en l’espèce à l’existence d’une faute du travailleur ou à un dommage effectif de l’entreprise, la clause pénale est nulle. Une sanction disciplinaire – soit une peine qui vise non pas à réparer le dommage de l’employeur mais uniquement à sanctionner le travailleur – est admissible en droit du travail. Toutefois, une telle sanction doit être suffisamment précise pour qu’on puisse déterminer quelle infraction est sanctionnée par quelle peine. En outre, le montant de la sanction doit être proportionné. Faute d’une telle précision en l’espèce, la sanction disciplinaire n’est pas valable.
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Art. 329c al. 2 CO
Vacances ; moment de l’annonce des vacances. Aux termes de l’art. 329c al. 2 CO, l’employeur fixe la date des vacances en tenant compte des désirs du travailleur dans la mesure compatible avec les intérêts de l’entreprise ; s’il s’abstient de prendre en considération les désirs du travailleur ou qu’il ordonne la prise de vacances sans laisser un délai suffisant au travailleur, ce dernier peut refuser de prendre ses vacances ; le travailleur doit exercer son droit de refus sans retard et proposer ses services durant la période de vacances initialement prévue par l’employeur, faute de quoi il est réputé avoir accepté de les prendre (consid. 2.1).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 329d CO
Vacances ; versement du salaire afférent aux vacances. Trois conditions doivent être remplies pour que le salaire afférent aux vacances puisse ne pas être versé au moment où les vacances sont prises : une nécessité objective due à une activité irrégulière, la mention claire et expresse de la part du salaire global destinée à l’indemnisation des vacances, tant dans le contrat de travail (lorsqu’il est conclu par écrit), que sur les décomptes de salaire périodiques (rappel de jurisprudence, consid. 3.1). En l’espèce, deux des conditions définies par la jurisprudence pour admettre l’inclusion de l’indemnité de vacances dans le salaire total ne sont pas remplies : d’une part, l’activité de l’employé, fixée à 42,5 heures par semaine, est régulière ; d’autre part, le contrat de travail écrit ne mentionne pas la part du salaire global destinée à l’indemnisation des vacances, un défaut que ne sauraient pallier l’envoi des décomptes de salaire comprenant cette mention et l’absence de réaction de l’employé à réception de ceux-ci (consid. 3.4). Rien ne laissant supposer que l’employé intimé, qui ne touchait aucune rémunération lorsqu’il ne travaillait pas, disposait des ressources suffisantes et ne subissait aucune pénalisation salariale pendant ses vacances, sa prétention – même élevée un an et demi après les faits – n’est pas abusive (consid. 4.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 321a, 328 CO.
En projetant un film décrivant son employeuse comme allant vers un naufrage, à l’instar du Titanic, à cause du départ d’une de ses directrices, un apprenti de 24 ans s’est rendu coupable d’une satire ridiculisant son employeuse et, partant, a manqué à son devoir de fidélité au sens de l’art. 321a al. 1 CO (consid. 3.3). C’est sans arbitraire que l’instance cantonale a pu conclure que cet apprenti ne pouvait pas bénéficier d’une protection accrue en raison de son âge (consid. 3.3). Comme il n’a subi aucun préjudice dans sa formation qui serait dû à sa libération de l’obligation de travailler quelques semaines avant ses examens professionnels, l’apprenti n’a pas droit à une réparation morale (consid. 3.6).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 357 CO.
Les clauses définissant à quelle catégorie de travailleurs s’applique une convention collective sont des clauses dites normatives, qui s’interprètent comme une loi (consid. 3.2). La volonté des parties à la convention collective revêt plus de poids que celle du législateur. Encore faut-il se demander, pour protéger la confiance des parties individuelles n’ayant pas participé à l’élaboration de la convention, si la volonté contractuelle dégagée selon les principes d’interprétation des contrats résiste à une interprétation objective fondée sur la lettre de la clause normative, son sens et sa raison d’être (rappel de jurisprudence) (consid. 3.2). Les clauses d’une convention collective relatives au salaire sont des clauses impératives, de sorte que les parties ne pouvaient pas y déroger dans un sens défavorable à la travailleuse, sous peine de nullité (art. 357 al. 2 CO) (consid. 3.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 10 LPers ; 31a OPers.
Il n’y a pas mobbing lorsque le recourant n’expose pas, par le biais d’exemples concrets, en quoi il aurait été victime d’actes hostiles de la part de son supérieur visant à l’isoler ou le marginaliser, ce d’autant plus lorsque le recourant a continué à travailler encore plusieurs années sous la responsabilité d’un autre chef dont il a souligné à plusieurs reprises le style de gestion clair, la bonne communication et l’ouverture d’esprit à son égard (consid. 5.2). Le congé ne saurait être qualifié d’illicite au sens de l’art. 10 LPers lorsqu’un employé n’a jamais répondu aux attentes de son employeur après la période d’essai et que cette situation a perduré nonobstant les formations offertes pour combler ses lacunes, l’encadrement accru dont il a bénéficié et, finalement, l’attribution de tâches de formation censées correspondre davantage à ses points forts (consid. 5.3). S’il veut se prévaloir d’une violation de l’art. 31a OPers (relatif à la période de protection contre les congés en cas d’incapacité de travailler), l’employé doit prendre position sur les considérations qui ont conduit les juges précédents à retenir qu’il connaissait les motifs de la résiliation avant le début de son incapacité de travail (consid. 6).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 9 et 29a Cst. ; 110 et 111 LTF ; 4 LPA/GE.
En cas d’attaque relative à des actes commis dans l’exercice de leurs fonctions, les fonctionnaires cantonaux – à l’exception des magistrats dont le risque d’atteinte à l’indépendance est plus élevé – dès lors qu’ils bénéficient de l’appui de leur hiérarchie au sein du pouvoir exécutif, ne bénéficient pas d’une prise en charge de leurs frais de défense (consid. 6.5).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 30 Cst. ; 6 CEDH.
Dans le cadre d’une procédure où un ancien professeur attaque en responsabilité l’université qui l’a employé, une juge cantonale suppléante, dès lors qu’elle se trouve dans un rapport d’emploi avec ladite université, se trouve objectivement dans une situation de partialité, peu important qu’elle n’appartienne pas à l’un des organes de l’université concernés par la procédure ou qu’elle exerce dans une autre faculté que celle où exerçait le demandeur (consid. 4.2).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 18, 321c CO.
Rappel de jurisprudence sur la différence entre heures supplémentaires et solde positif accumulé dans le cadre d’un horaire de travail flexible: les parties peuvent convenir que le travailleur, dans un cadre prédéfini, détermine librement la durée de son temps de travail journalier, pourvu qu’à l’issue d’une période de référence, il ait accompli le nombre d’heures contractuellement dues. Généralement, des heures de présence obligatoire (plages « bloquées ») doivent être respectées, le travailleur pouvant s’organiser librement le reste du temps. En contrepartie de cette autonomie, le travailleur doit spontanément compenser par un congé le solde de travail excédentaire qu’il a librement accumulé. S’il laisse croître ce solde positif dans une mesure importante, il assume le risque de ne pas pouvoir le compenser en cas de résiliation du contrat, laquelle peut survenir en tout temps. Une indemnisation du travail effectué en plus n’entre en considération que si les besoins de l’entreprise ou des directives de l’employeur empêchent le travailleur de récupérer ses heures en dehors des plages bloquées, à l’intérieur de l’horaire de travail flexible ; il ne s’agit alors plus de solde positif dans l’horaire flexible, mais de véritables heures supplémentaires (consid. 4.2). Le travailleur mis au bénéfice d’un tel horaire de travail doit en principe compenser dans un délai raisonnable les heures qu’il a effectuées en supplément par un congé (consid. 4.3). Selon les prévisions contractuelles des parties, il ressort que le temps de travail théorique était de 156 heures par mois et que seules les heures supplémentaires le dépassant d’au moins 10 heures étaient compensées par un supplément de 25% (consid. 4.4). Compte tenu de ces éléments, le travailleur pouvait se prévaloir, uniquement pour 2008, d’un reliquat de 27,6 heures, soit – en tenant compte du supplément – un total de 34,5 heures. Or, il n’a pas été établi que les besoins de l’employeuse ou des directives de celle-ci auraient empêché le salarié de compenser ces 34,5 heures par du temps libre entre 2009 et 2012 (consid. 4.4 et 5).
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Art. 18, 356 CO.
Un plan social a pour fin d’atténuer les effets pour les travailleurs concernés par des licenciements pour motifs économiques. Si l’employeur conclut un plan social avec une organisation de travailleurs à la suite de négociations, il s’agit d’une forme particulière de convention collective au sens de l’art. 356 CO. Les travailleurs peuvent s’en prévaloir directement, de sorte que le plan social revêt dans cette mesure un caractère normatif. Si un plan social doit être traité comme une convention collective, les dispositions normatives qu’il contient doivent être interprétées comme une loi (consid. 3.1). Lorsqu’il est prévu que le plan social s’applique lorsqu’intervient « toute modification fondamentale du rôle correspondant à l’emploi pourvu par le collaborateur en raison de nouvelles exigences, le profil de rôle correspondant ayant donc été adapté », cela signifie que les tâches spécifiques liées à la fonction exercée jusque-là soient complètement transformées, en ce sens que la personne qui occupera le poste doit avoir des connaissances nouvelles que ne possédait pas l’ancien titulaire. Ce n’était pas le cas en l’espèce dès lors que la personne qui a remplacé le travailleur était un conseiller junior, ce dernier ne pouvant pas avoir les mêmes responsabilités que le recourant. En réalité, les responsabilités du recourant ont été distribuées entre deux collaborateurs plus qualifiés que le conseiller junior, mais dont il n’est pas établi qu’ils eussent été dotés de capacités spécifiques que n’aurait pas possédées le recourant (consid. 3.2).
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Art. 322a, 328b CO ; 163 CPC ; 2 LPD.
Prima facie, un recours immédiat au Tribunal fédéral fondé sur l’art. 93 LTF semble pouvoir être interjeté même lorsque le risque de préjudice irréparable menace des tiers et non le recourant lui-même (consid. 1.2). En l’espèce, un employé a intenté une action en paiement non chiffrée en faisant valoir qu’il lui manquait diverses pièces permettant de déterminer précisément le bonus auquel il prétend sur la base d’une convention. Dès lors que les conditions d’une action non chiffrée sont réalisées, l’administration des preuves telles que la demande de production de fiches de salaire et de calcul des bonus est licite (consid. 2.3). Une demande de production de certificats de salaire et de lettres attestant le montant du bonus et sa méthode de calcul se justifie même à l’égard d’employés non membres de l’équipe de l’employé requérant, dans la mesure où il s’agit de mieux comprendre la manière dont les bonus sont calculés au sein de l’entreprise (consid. 3.2). Le juge dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’application de l’art. 125 CPC (consid. 4.2). L’art. 322a 2 CO oblige l’employeur à laisser le travailleur consulter ses livres de comptabilité dans la mesure nécessaire. L’employeur doit certes protéger et respecter la personnalité des travailleurs (art. 328 CO), mais cette obligation ne fait pas obstacle à la divulgation des revenus de ces derniers ; l’employeur ne peut pas refuser de fournir ces données dans le cadre d’une procédure judiciaire entre employeur et travailleur, dans la mesure où le revenu des autres travailleurs au service de l’employeur est pertinent pour le jugement à rendre. La consultation de la comptabilité, garantie par l’art. 322a CO au travailleur partie à la procédure, implique d’ailleurs la divulgation de ces informations. En l’occurrence, les documents requis sont nécessaires pour fixer le montant dû à l’employée à titre de participation aux bénéfices. Point n’est besoin de déterminer si les documents litigieux sont « protégés par la loi » au sens de l’art. 163 al. 2 CPC. En effet, si tel devait être le cas, il faudrait de toute façon admettre, à l’instar de la Cour de justice, un intérêt prépondérant du demandeur à la manifestation de la vérité (consid. 5.3 et 5.4).
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Art. 9 Cst.
Dans une procédure où il s’agit de déterminer si un employé a été victime de harcèlement psychologique, le comportement d’un responsable (notamment son inflexibilité et sa rigueur) peuvent être appréhendées sans arbitraire en relation avec son rôle de gardien des procédures financières et le changement qu’il incarnait pour les personnes déjà en place (consid. 6.1). La déclaration d’un responsable selon laquelle « avec l’employé recourant, ça n’irait pas et qu’il aurait sa peau » peut constituer un indice de harcèlement dans la mesure où elle établirait une intention d’éviction. Toutefois, elle ne permet pas en tant que telle de faire apparaître comme insoutenable l’appréciation de la Cour cantonale selon laquelle l’employé concerné n’a pas été victime de harcèlement (consid. 6.2).
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Art. 319 CO.
Le contrat par lequel un consultant reçoit des missions ponctuelles est un contrat de mandat et non un contrat de travail, malgré la régularité du versement de la rémunération et la prise en charge des frais (consid. 2).
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Art. 11, 16, 319 et 333 CO.
Le régime d’interprétation des contrats que la jurisprudence tire de l’art. 18 CO vaut également pour déterminer entre quelles parties un contrat de travail a été conclu (consid. 7.1). L’employeur est la personne au service de laquelle le travail est fourni et qui, en tant que telle, a conclu le contrat de travail avec le travailleur. Même dans un groupe de sociétés, les rapports de travail ne sont noués en principe qu’avec une seule société (consid. 7.2). Lorsqu’un travailleur signe un contrat avec une société étrangère avant que la filiale suisse de cette société ne soit constituée, mais dans le but qu’il devienne le directeur de cette filiale et qu’il soit rémunéré par elle, ni le fait que la société mère ait pu soutenir, dans le cadre d’une procédure judiciaire à l’étranger, avoir été l’employeur de ce travailleur, ni le fait que cette même société mère ait indiqué à un tiers que le travailleur était son propre directeur, ni le fait que le travailleur ait été en contact hebdomadaire par courriels avec le président de son conseil d’administration, ni le fait que cette société mère ait pu accorder au travailleur un prêt gratuit pour lui permettre d’acheter ses propres actions, ni encore le fait que le travailleur ait eu pour tâche de développer en Suisse le réseau d’affaires de la société mère, ne sont des éléments décisifs pour établir la qualité d’employeur de cette société à la place de sa filiale (consid. 7.3.3). Lorsque la loi ne subordonne pas la conclusion du contrat à l’observation d’une forme particulière (art. 11 al. 1 CO) – ce qui est le cas du contrat de travail (art. 320 al. 1 CO) – une telle exigence peut néanmoins résulter de la convention des parties (cf. art. 16 al. 1 CO), laquelle peut résulter d’actes concluants. La présomption posée par l’art. 16 CO, selon laquelle la forme réservée est une condition de la validité du contrat, peut être renversée par la preuve que les parties ont renoncé, après coup, à la réserve de la forme, que ce soit expressément ou par actes concluants (consid. 7.3.1.2).
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Art. 322a CO.
Un système de « parts à rendement subordonné » (carried interests) peut représenter une rémunération variable obligatoire au sens de l’art. 322a CO (consid. 3). Les règles régissant un tel système de rémunération relèvent d’une interprétation des dispositions applicables entre les parties (consid. 4).
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Art. 50 s. LPers/VD.
N’est pas abusif le licenciement d’une agente qui fait suite à un avertissement sur son comportement (non contesté par elle), alors qu’elle faisait preuve d’un esprit d’opposition systématique à l’encontre de ses supérieurs, qu’elle ne s’était pas conformée à la décision de son supérieur de ne pas engager d’apprenti (allant jusqu’à accuser réception de dossiers de candidature), et qu’elle s’était opposée à la demande d’un supérieur de mettre à jour une liste d’adresses, ce qui avait conduit à une altercation, sans se montrer ouverte au coaching qui lui avait été proposé (consid. 5 – 7). Une agente ne saurait se prévaloir d’un tort moral lorsqu’elle a elle-même provoqué une réaction vive de son supérieur hiérarchique – sans toutefois qu’il ne fasse preuve d’un comportement menaçant ou agressif – dans un contexte où, à réitérées reprises, elle s’était opposée aux injonctions ou les avait négligées et où elle avait suivi ce supérieur dans son bureau alors que celui-ci lui avait dit que la discussion était close (consid. 8).
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Art. 336c CO.
Au sens de l’art. 336c 1 let. c CO, la grossesse débute au moment de la fécondation de l’ovule (conception de l’enfant) et non au moment de l’implantation de l’ovule fécondé dans l’utérus (consid. 2.3).
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Art. 337 CO.
Prise en compte de circonstances antérieures non connues de l’employeur au moment de licencier ; nature du nouveau motif invoqué. L’employeur peut se prévaloir de circonstances antérieures à la résiliation immédiate qu’il ne connaissait pas ou ne pouvait pas connaître au moment de licencier si, dans l’hypothèse où il les avait connues, celles-ci auraient fondées un juste motif de congé immédiat ; peu importe que le motif invoqué après coup soit ou non de même nature ou semblable au motif invoqué au moment de la résiliation (consid. 3-5).
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Art. 324a, 335 s. CO.
S’il opte pour la résiliation extraordinaire, l’employeur perd définitivement le droit à la résiliation ordinaire ; ainsi, même s’il réalise par la suite que la résiliation est dépourvue de justes motifs, il ne peut pas unilatéralement invalider sa déclaration. La résiliation extraordinaire étant un acte formateur, le juge ne peut pas non plus la convertir en une réalisation ordinaire même si elle devait se révéler injustifiée (l’inverse est possible en matière de résiliation de rapport de service relevant du droit public) (consid. 5.2). La suspension provisoire de travail sans salaire ne correspond à aucune fin de contrat de travail prévue par le droit privé suisse. Il y a lieu d’admettre, en l’absence d’accord de l’employé avec cette mesure, qu’elle équivaut à une résiliation immédiate pour justes motifs au sens de l’art. 337 al. 1 CO (consid. 6.1). Qu’il soit tardif, justifié ou injustifié, le congé immédiat met fin aux rapports de travail ; l’incapacité ultérieure du travailleur est sans incidence ; il n’a plus à offrir ses services. Par conséquent, une Cour cantonale erre lorsque, au motif que l’employé n’aurait pas pu offrir ses services en raison de sa maladie, elle applique le régime de l’art. 324a CO (consid. 6.1)
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 8 Cst.
De la garantie générale de l’égalité de traitement de l’art. 8 al. 1 Cst. découle l’obligation de l’employeur public de rémunérer un même travail avec un même salaire. Dans les limites de l’interdiction de l’arbitraire, les autorités disposent d’une grande marge d’appréciation, particulièrement en ce qui concerne les questions d’organisation et de rémunération. Le droit constitutionnel n’exige pas que la rémunération soit fixée uniquement selon la qualité du travail fourni, voire selon des exigences effectivement posées. Les inégalités de traitement doivent cependant être raisonnablement motivées, et donc apparaître objectivement défendables (consid. 5.2). En l’espèce, le directeur de la prison cantonale ne peut se plaindre qu’il est traité de manière inégale par rapport à des médecins de l’hôpital (consid. 5.5), notamment du fait que le législateur a estimé que les difficultés de recrutement seraient moindres pour les hauts fonctionnaires de l’administration générale que pour les médecins avec responsabilités hiérarchiques (consid. 5.4).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 329 CO.
Un travailleur malade, qui prétend bénéficier d’un solde de 32,67 jours de vacances – solde qu’il n’aurait pas pu compenser entièrement durant les deux mois de son délai de congé, compte tenu du temps nécessaire pour ses visites médicales et pour la recherche d’un nouvel emploi selon l’art. 329 al. 3 CO –, voit cette prétention lui être refusée par les juges à juste titre, dès lors qu’il n’a pas allégué avoir subi des examens médicaux durant cette période et qu’il a admis ne pas avoir voulu chercher un autre emploi (consid. 6.3).
Jean-Philippe Dunand, Aurélien Witzig, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 359a al. 2, 360a al. 1er, 360b al. 1er.
L’art 359a al. 2 précise qu’avant d’édicter un contrat type de travail, les cantons sont tenus d’obtenir l’avis des associations professionnelles et des sociétés d’utilité publique intéressées. Cependant, il ne s’agit que d’une prescription d’ordre et en aucun cas d’une disposition impérative qui pourrait, si non respectée, rendre le contrat type nul. Concernant l’existence d’un possible dumping salarial, la commission tripartite de l’art. 360b al. 1er possède un très large pouvoir d’appréciation à la détermination de sa potentielle existence, notamment en raison du fait que celle-ci possède un aspect à la fois politique et législatif.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 18 CO.
Une autorité cantonale qui rejette l’application d’une convention collective de travail acceptée par l’autorité inférieure (en l’espèce la CCT SOR) en faveur de l’application d’une autre convention (en l’espèce la CCT construction) afin de l’appliquer à une relation contractuelle donnée, sans toutefois statuer clairement sur le droit aux prétentions soulevées par le demandeur en vertu de la convention retenue, commet un déni de justice formel et s’expose à l’annulation de sa décision par l’autorité supérieure, soit ici le Tribunal fédéral.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 10 al. 3 let. e, 34c al. 1er let. b LPers ; 336 CO.
Le licenciement d’un salarié de plus de 50 ans travaillant dans un domaine spécialisé depuis un grand nombre d’années doit être considéré comme abusif lorsqu’il intervient dans le cadre d’une réorganisation de la structure employeuse, provoquée uniquement dans le but de le licencier, conservant par ainsi le poste sous une forme différente au sein de l’organisation hiérarchique sans pour autant le supprimer.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 29 al. 2 Cst. ; 10 al. 1er d, 29 et 30 al. 1er PA ; 10 al. 3 let. b et c, 14 al. 2 let. b et c, 34b al. 1er let. a, 34b al. 2, 34c al. 1er let. b LPers ; 336 CO.
La décision de ne pas reconduire un procureur fédéral dans ses fonctions sans aucun avertissement préalable à son attention doit être considérée comme ne comportant aucun motif objectivement suffisant. De la sorte, le ministère public se voit contraint d’indemniser le susnommé à raison d’un montant représentant un an de salaire brut.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 8 al. 3 Cst. ; 3 al. 2, 6, 13 al. 1er LEg ; 110 LTF ; § 45 VPO/BL ; 128, 130 al. 1er CO.
Le droit cantonal de procédure s’applique à des litiges concernant les discriminations salariales en droit public du travail.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 15 al. 1er OLT 1.
Ne peut être considéré, comme temps de travail, le service de piquet effectué par un employé tel un médecin d’hôpital à son propre domicile et non à son lieu de travail.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 3, 6 Leg.
Dans le cadre d’une potentielle discrimination salariale, il appartient à la partie invoquant une inégalité, soit le travailleur, de rendre vraisemblable son l’existence. Dans un second temps, si celle-ci s’avère l’être, la partie défenderesse, soit l’employeur, doit apporter des motifs objectifs justifiant une telle discrimination ou inégalité de salaire. Cependant, devant le Tribunal fédéral, celui-ci ne pouvant revoir les faits que sous l’angle de l’arbitraire, l’employeur ne pourra que démontrer que les preuves soutenant les faits ont été administrées de manière manifestement incorrecte par l’autorité inférieure.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 91 al. 2 et 243 CPC.
Le tribunal saisi de l’affaire en cause décide d’office du caractère patrimonial ou non du litige, sans qu’il puisse être tenu compte d’un potentiel accord préexistant des parties à ce sujet.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 5 al. 3 Cst.
Il est contraire à la bonne foi, pour un avocat remplaçant un autre avocat pour une même partie dans une même affaire, de défendre une position juridique totalement opposable et contraire à la position juridique mise en avant par le premier conseil.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 18, 336 al. 2 let. b CO ; 10 LPers.
Application d’une brochure interne d’une entreprise traitant du harcèlement sexuel et du mobbing qui prévoyait un délai de protection de six mois contre les congés survenant après la fin d’une procédure interne en protection de la personnalité stipulée par cette même brochure.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 328 al. 1er, 336 al. 1er CO.
Dans le cadre d’une dénonciation survenue contre un employé, celui-ci doit pouvoir se voir offrir la possibilité de se défendre. L’employeur doit, lui, prendre les dispositions nécessaires à l’éclaircissement de la situation avant de licencier la personne concernée, au risque de voir ce licenciement ordinaire considéré comme abusif, précision étant dite que l’impossibilité de l’employeur à justifier les faits reprochés ne saurait suffire à qualifier ledit congé d’abusif.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 18, 321e CO.
Dans le cadre d’une interprétation des clauses d’un contrat, si la réelle et commune intention des parties ne peut pas être décelée, il s’agit d’effectuer une approche objective par l’application de la théorie de la confiance, principe selon lequel il est recherché comment une déclaration, une attitude ou une clause pouvait et devait être comprise par autrui en vertu des règles de la bonne foi, mais également selon les circonstances entourant et précédant ces dites affirmations. À défaut d’y parvenir et en troisième lieu, la règle : « in dubio contra stipulatorem » trouve application et les déclarations ou clauses sont interprétées en défaveur de celui qui les a émises.
Le simple fait pour un directeur de ressources humaines de questionner lourdement et avec partialité un employé qu’il suspecte de vol ne peut être constitutif d’une violation du devoir de diligence envers son employeur. L’art. 321e CO ne peut ainsi se voir appliquer à son encontre.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 5 Cst. NE ; 9 Cst.
Il n’est pas possible de retenir qu’une relation de travail entre un employé et une entité employeur de droit privé relève du droit public même lorsque cette dernière tient par mandat l’exécution de tâches d’intérêt public. Une entité de droit public doit obligatoirement être partie à la relation pour que cette dernière se voie appliquer le droit public.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 1er et 6 CO.
Dans le cadre d’une modification des règles d’obtention du bonus en défaveur de l’employeur, une acceptation tacite de l’employé quant à ces dernières n’est admise que dans le cas où en vertu des règles de la bonne foi, une manifestation de volonté de ce même travailleur se révèle nécessaire pour souligner un refus. Elle le devient lorsqu’il est clair que le travailleur devait observer chez l’employeur qu’il s’attendait à une telle acceptation tacite, notamment au vu du fait que celui-ci n’a pris aucune mesure spéciale à son encontre.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 322d CO.
Afin de déterminer si un revenu peut être considéré comme étant un très haut revenu, c’est-à-dire un revenu dépassant cinq fois le salaire médian et donc échappant au principe d’accessoriété qui ne lui est désormais plus applicable en matière de gratification, il est nécessaire de se baser sur toutes les rémunérations ayant pénétré le patrimoine du travailleur, quelles qu’en soient leurs appellations ou leurs origines juridiques. C’est d’ailleurs la date de paiement qui sera déterminante à l’attribution d’une rémunération à telle ou telle période et non l’exercice auquel elle se rapporte.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 335 al. 1er, 336 al. 2 let. a, 336a1er et 2 CO.
Il incombe à l’employé de démontrer par des indices suffisants, afin de justifier d’un licenciement abusif, que l’employeur l’a licencié pour l’un des motifs prévus dans la loi (art. 336 al. 1er et 2 CO) ou pour un autre motif, mais d’une gravité similaire. Pour ce faire, il pourra notamment, mais pas uniquement, démontrer que les raisons avancées par l’employeur ne sont pas les causes réelles de son congé et prouver la proximité temporelle entre la notification du licenciement et la découverte du motif abusif par l’employeur. L’employeur devra par ailleurs et dans le même temps apporter des preuves justifiant ses propres motifs de licenciement. La détermination du motif du congé étant une question de fait, le Tribunal fédéral ne peut analyser la question que sous l’angle de l’arbitraire, et s’en tiendra donc généralement à ce qu’a retenu le Tribunal cantonal, à moins d’un établissement manifestement inexact des faits par ce dernier.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 336c CO ; 2 al. 2 CC.
Une employée peut être reconnue, sous réserve de circonstances particulières, comme n’agissant pas de bonne foi et commettant de ce fait un abus de droit en déclarant tardivement sa grossesse à son employeur et en soutenant conséquemment qu’un congé lui a été notifié en temps inopportun.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 337, 337c CO ; 105, 107 LTF.
Dans le cadre d’une demande d’indemnité suite à un licenciement immédiat en vertu de l’art. 337c, il n’appartient pas au Tribunal fédéral, en fait et en droit, de calculer et de fixer le montant à allouer au demandeur, mais à celui-ci de se déterminer sur la somme voulue et d’en justifier la demande en usant des faits retenus par le Tribunal cantonal, notre haute cour étant liée par ces derniers et ne pouvant les réexaminer que sous l’angle de l’arbitraire.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 337 CO.
De simples soupçons à la rupture du rapport de confiance entre l’employeur et l’employé suffisent à justifier d’un licenciement immédiat, à condition que ceux-ci soient justifiés par la suite, à défaut de quoi l’employeur se verra imputer un paiement d’indemnités pour absence de justes motifs. Le délai pour rendre un licenciement immédiat est tout au plus de deux-trois jours, à moins que l’état de fait ne soit pas clair et qu’il faille enquêter, auquel cas l’employeur doit prendre toutes les mesures adéquates pour éclaircir la situation.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 42 al. 2, 97 al. 1er LTF.
Dans le cadre d’indemnités résultant d’une résiliation de rapport de travail, tout montant de revenus d’une activité indépendante ou dépendante, ou d’indemnités de chômage d’un salarié, doit être imputé sur son salaire brut, octroyé par son contrat de travail, qu’il aurait dû recevoir jusqu’à la fin de ce dernier. Il n’est pas possible non plus de retenir un caractère accessoire de ces activités si celles-ci n’étaient pas entreprises par l’employé avant la résiliation de son contrat.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 39 al. 2, 41 al. 2 et 66 LPP ; 67 et 127 CO.
L’art. 66 al. 3 LPP précisant que l’employeur doit soustraire du salaire de son employé les cotisations que ce dernier doit à la prévoyance professionnelle, fonde l’employeur à réclamer lesdites cotisations qu’il aurait omises ou manqué de soustraire, quelles qu’en soient les raisons, et en respectant cependant le délai de prescription de cinq ans de l’art. 41 al. 2 LPP qui débute au terme de chaque mois pour lequel la cotisation aurait dû être versée.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 329d1er CO.
Un travailleur au salaire fixe et payé exclusivement à la commission sur ses affaires personnelles ne peut être contraint à recevoir uniquement son salaire fixe durant ses vacances, de manière à ce qu’il ne soit pas traité de manière différente suivant qu’il soit en vacances ou au travail. Celui-ci doit pouvoir recevoir un salaire complété par une somme égale à la moyenne des commissions perçues sur une période déterminée, sans jamais toutefois que celle-ci ne crée un accroissement du revenu comme il peut en être le cas dans certaines situations considérées comme des exceptions par la doctrine ; situations par exemple où l’absence de revenu du travailleur pendant ses vacances se compenserait par le fait qu’il puisse grouper des contrats avant ou après son retour de vacances. Il est en effet essentiel de souligner que le travailleur n’a en aucun cas le droit à un salaire supplémentaire.
Jean-Philippe Dunand, Patricia Dietschy-Marteney, Julien Billarant, Audrey Voutat
Art. 359a 1, 360a al. 1, 360b al. 3, 360d al. 1 CO ; 1a LECCT.
Le fait que la convention collective du travail temporaire exclue l’application des salaires minimums pour les travailleurs placés dans des entreprises de l’industrie chimique et pharmaceutique, de l’industrie des machines, de l’industrie graphique, de l’industrie horlogère, de l’industrie alimentaire et des produits de luxe, ainsi que dans les entreprises des transports publics, laisse la possibilité aux autorités cantonales ou fédérales de fixer, par un contrat-type impératif, des salaires minimaux pour de telles missions. Il faut toutefois qu’une sous-enchère abusive et répétée soit constatée dans chacune de ces branches, ce qui n’est en l’espèce pas le cas au Tessin dans l’industrie horlogère et les entreprises de transports publics.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 83 let. g LTF.
Les employés de la fonction publique peuvent parfois être engagés par un contrat de droit privé au sens des articles 319 ss du Code des obligations. C’est ce qu’a retenu le Tribunal fédéral concernant un responsable d’une déchetterie communale du canton de Fribourg, tout en niant la nécessité de requalifier le rapport de travail de cet employé.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 10 al. 3 let. e LPers.
En cas de licenciement en raison d’impératifs économiques et d’exploitations majeurs au sens de l’article 10 al. 3 let. e LPers, l’employeur fédéral peut être tenu de payer une indemnité pour résiliation injustifiée lorsqu’il n’a pas fait les efforts nécessaires de recherche pour proposer à l’employé un autre travail réputé raisonnablement exigible.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 3 let. d LTr ; 9 OLT 1.
Un employé qui gère seul, en alternance avec l’administrateur de la société employeuse, une épicerie de quartier n’exerce pas une fonction dirigeante élevée au sens de l’art. 9 OLT 1. Une telle fonction implique en effet une structure un tant soit peu complexe et hiérarchisée. Les petites structures ne peuvent ainsi pas contourner les prescriptions relatives au travail du dimanche et au travail de nuit en confiant la responsabilité de l’établissement au seul employé présent. Peu importe alors que l’employé exerce les mêmes tâches et perçoive la même rémunération (modeste) que l’administrateur de la société employeuse.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 19 LTr ; 6 al. 1 OTR 1 ; 356 CO.
En général, le travail dominical ponctuel donne lieu à un supplément de rémunération alors que le travail dominical régulier suppose que les inconvénients ont été pris en compte lors de la fixation du salaire. Il peut toutefois être instauré conventionnellement un régime plus favorable au travailleur. Ainsi, si la convention collective applicable prévoit que tout employé appelé à travailler le dimanche a droit à un supplément de salaire correspondant à 50% de son salaire horaire par heure de travail, la clause comprend apparemment le travail dominical régulier. En outre, la notion de personnel d’exploitation figurant dans une CCT d’entreprise du secteur de la distribution de produits laitiers et alimentaires frais comprend manifestement les chauffeurs-livreurs.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 328 CO.
Le comportement inadéquat d’une supérieure consistant à se montrer autoritaire, à contrôler de manière excessive ses subordonnés, à ouvrir elle-même le courrier qui leur était destiné sans les en avertir et à le leur transmettre parfois plusieurs jours après, à donner des instructions contradictoires et à adresser des reproches injustifiés, ne correspond pas à du mobbing au sens de la jurisprudence. Un tel comportement ne constitue ainsi pas une transgression à l’obligation de protéger la personnalité des collaborateurs et n’ouvre pas le droit à des dommages-intérêts en cas d’incapacité de travail découlant pourtant d’un licenciement prononcé dans ces circonstances.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 49, 328, 336 al. 1 let. d CO.
Il n’y a pas mobbing du fait qu’un supérieur est un homme difficile à cerner, imprévisible et pouvant se montrer très agressif, si son comportement ne vise pas une employée plus que les autres collaborateurs. Même s’il a une incidence sur l’état de santé de l’employée, un tel comportement ne justifie pas forcément une indemnité pour tort moral. Ne constitue pas non plus du mobbing, le fait pour un (autre) supérieur d’être « cassant », de parler avec des collaborateurs en présence de l’employée dans une langue que celle-ci ne comprend pas et de confier à d’autres collaborateurs qu’il aimerait voir l’employée quitter l’équipe.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 18, 319 CO.
Au sein d’un groupe de société, l’employeur peut être la société mère, la filiale, voire les deux sociétés. Dans le cas d’espèce, un employé d’une banque zurichoise, avait demandé sa mutation dans une filiale sise aux Bahamas. Un nouveau contrat de travail avait été conclu avec cette filiale, les personnes siégeant au sein des organes de la société mère et de la filiale étant toutefois identiques. Ladite filiale ayant été vendue à un autre groupe, l’employé a demandé sa réintégration en Suisse, ce que la banque zurichoise n’a pas souhaité. Actionnée par l’employé pour un solde de salaire relatif au travail effectué aux Bahamas, la banque a, avec succès, contesté sa qualité d’employeuse.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 6, 322, 322d, 329d2 CO.
L’acceptation tacite de modifications des conditions de travail défavorable au travailleur ne peut être admise que dans des situations où l’employeur devait s’attendre à une réaction du travailleur en cas de désaccord de sa part. De telles circonstances sont notamment réunies s’il est reconnaissable pour le travailleur qu’en cas de refus de sa part, l’employeur prendrait des mesures déterminées ou procéderait à son licenciement. La travailleuse, qui sait que son employeur résilie le contrat d’assurance troisième pilier qu’il avait contracté en sa faveur et qu’il s’était engagé à financer lui-même, est réputée accepter tacitement la modification de ses conditions de travail si elle ne fait pas part à son employeur de son opposition.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 333 et 336c CO.
Les licenciements prononcés dans le cadre d’un transfert d’entreprise sont en principe valables et peuvent être justifiés par des raisons économiques. Toutefois, selon la jurisprudence, le cédant ne peut pas résilier les contrats de tout ou partie de ses employés afin que ceux-ci concluent ensuite de nouveaux contrats avec le cessionnaire et perdent ainsi les avantages découlant de la durée des contrats initiaux. Néanmoins, si le premier employeur, au moment de prononcer le licenciement, ne sait pas s’il va transférer son entreprise ou simplement la fermer et que, finalement, il trouve un repreneur, qui réengage les travailleurs quelques jours après le terme de leur licenciement, il peut être considéré qu’il s’agit d’un nouveau contrat. En cas d’incapacité de travail due à une maladie survenant peu après ce réengagement, les travailleurs ne bénéficient d’une protection contre les congés en temps inopportun que pour la durée correspondant à la première année de service.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 329d CO ; 2 al. 2 CC.
Les vacances doivent en principe être prises en nature et l’indemnité y afférent doit être versée au moment de la prise des vacances. Cependant, en cas de travail à temps partiel irrégulier, il est possible de verser une indemnité relative aux vacances pour chaque heure de travail effectuée. Pour qu’une telle pratique soit valable, elle doit être prévue dans le contrat de travail et chaque fiche de salaire doit mentionner clairement la part du salaire relative à l’indemnisation des vacances. Si l’employé, qui sait que le salaire versé contient l’indemnité des vacances, a attiré l’attention de son employeur sur l’irrégularité formelle des fiches de salaire, il ne commet pas d’abus de droit à réclamer une nouvelle fois le paiement de ses vacances.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 330a CO
Certificat de travail ; contenu. Le choix de la formulation du certificat de travail appartient en principe à l’employeur et il lui est loisible d’adopter un style concis plutôt qu’empathique. Il n’y a pas de différence notable entre les expressions « à notre satisfaction » et « à notre entière satisfaction ».
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 360a CO
Sous-enchère salariale abusive et répétée. Les cantons peuvent instituer des contrat-types de travail avec salaires minimaux dans les branches ou les professions dans lesquelles il est constaté une sous-enchère abusive et répétée. La méthode tessinnoise consistant à qualifier de sous-enchère grave les salaires inférieurs à CHF 3’000.- et les salaires de 10% inférieurs au salaire de référence obtenu à l’aide du calculateur de salaire officiel est compatible avec le droit fédéral.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 337, 344 et 346 CO.
Le contrat d’apprentissage est un contrat de durée déterminée. Il peut être résilié de manière anticipée pour de justes motifs au sens des art. 346 et 337 CO. L’apprenti garagiste qui, chargé de prendre un véhicule chez un client, fait un détour de quelques kilomètres pour tester la puissance du moteur et ainsi assouvir sa passion pour le sport automobile commet une faute qui n’est pas grave au point de justifier une résiliation immédiate. Des avertissements oraux donnés une année auparavant et portant sur des erreurs dans l’exécution du travail ne suffisaient pas à justifier le licenciement, un rapport ayant, dans l’intervalle, reconnu que l’apprenti se montrait appliqué.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 18, 356, 357 CO
Clauses normatives ; dérogation ; forme. Lorsqu’une CCT prévoit la possibilité de déroger à la durée du travail en respectant une certaine forme (en l’occurrence un accord avec la représentation des travailleurs devant être passé par écrit), cette forme doit être respectée sous peine de nullité de l’accord. Le cas échéant, l’horaire hebdomadaire augmenté induit des heures supplémentaires devant être indemnisées.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 18, 357 et 357b CO
Licéité et effet normatif d’une clause d’effectivité ; exécution commune. Les clauses des conventions collectives de travail qui stipulent que les salaires effectifs doivent être augmentés d’un certain montant, sont licites, pour autant qu’elles ne restreignent pas de manière excessive la liberté des parties au contrat individuel de travail de négocier des conditions de travail plus favorables à celles prévues par la convention collective. Le travailleur et l’employeur doivent donc être libres de convenir contractuellement d’une diminution de salaire qui compenserait la hausse prévue, tout en respectant le salaire minimal fixé par la convention collective.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 356 CO ; 8 CC ; 56 CPC
Convention collective de travail dans la branche suisse des techniques du bâtiment ; champ d’application d’une convention collective de travail ; fardeau de la preuve ; devoir d’interpellation du juge. Il appartient au demandeur d’établir que la convention collective de travail dont il déduit des droits était applicable à sa relation de travail. L’absence d’allégations précises sur les faits entraînant l’applicabilité de la CCT n’est pas un manquement manifeste de nature à rendre la demande incomplète et de justifier une interpellation du juge.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 319 CO ; 27 LEH ; 5 et 17 OLEH ; 3 al. 2 ODPr
Personnel domestique au service d’un ambassadeur ; nature de la relation juridique ; incompétence des tribunaux suisses. Selon la législation et les principes applicables, le personnel domestique au service d’un ambassadeur peut être engagé par l’ambassadeur lui-même ou par l’Etat représenté. Dans la deuxième hypothèse, les rapports de travail peuvent être soumis au droit administratif de l’Etat en question, ou au droit privé, suisse ou étranger. Le fait que l’employé occupe une fonction subalterne n’implique pas automatiquement qu’elle soit au bénéfice d’un contrat de droit privé. Si l’engagement relève du droit public étranger, les tribunaux civils suisses sont incompétents et ce sont les voies de droit prévues par la législation étrangère qui s’appliquent.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 319 CO
Qualification d’un contrat ; gérant d’hôtel ; administrateur. Le critère du lien de subordination, décisif pour distinguer un contrat de mandat et un contrat de travail, doit s’examiner essentiellement sous l’angle organisationnel s’agissant de cadre exerçant une fonction dirigeante. Ainsi, une gérante d’hôtel peut être liée par un contrat de travail, et cela même si elle fait partie du conseil d’administration de la société exploitante.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 324 CO
Demeure de l’employeur ; travailleuse épouse de l’entrepreneur en situation de séparation ; démission par acte concluant ; exception d’inexécution. Une offre de service « pour la forme » n’est pas constitutive d’un cas de demeure de l’employeur si le travailleur ne démontre pas en quoi l’employeur empêchait l’exécution du travail.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 337 CO ; 95 lit. a LTF ; 29 Cst.
Lors d’un licenciement avec effet immédiat, l’employeur public dispose d’un délai de réflexion qui peut parfois être un peu plus long qu’en droit privé du travail. Par ailleurs, tout comme en droit privé, un délai social peut également être admis dans la fonction publique et ne doit pas être considéré comme arbitraire lorsque certaines conditions cumulatives sont réunies. La nécessité de pouvoir invoquer un juste motif de résiliation, de distinguer clairement le délai social du délai ordinaire de résiliation, de respecter l’intérêt public, et d’accorder avant tout le délai social dans l’intérêt de l’employé (et non de l’employeur) doit être clairement reconnaissable lors de la résiliation.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
§ 71 VRG/ZH
Procédure ; litispendance. Moment de l’ouverture de la litispendance lors d’une procédure administrative de première instance. Distinction entre les procédures civiles et administratives. Alors qu’en droit civil les parties déclenchent la procédure (lorsqu’elle est dominée par la maxime de disposition), la procédure de droit public peut être introduite d’office par l’administration. La question de la litispendance en procédure administrative ne dépend donc pas seulement du comportement du justiciable.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 28 Cst.
Demande de reconnaissance comme partenaire social. Un syndicat de la fonction publique peut se prévaloir de la liberté syndicale et n’est pas exclu de la titularité de l’art. 28 Cst. Bien que le Tribunal administratif fédéral ait refusé de reconnaître l’Union du personnel du domaine des écoles polytechniques fédérales (ci-après : UP EPF) comme partenaire au sein du domaine des EPF (notamment au motif que cette association n’était pas assez représentative), le Tribunal fédéral a conclu que l’UP EPF remplissait l’exigence numérique requise et que sa loyauté devait également être admise. Dès lors, sa demande de reconnaissance comme partenaire social des EPF devait être acceptée.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 44 LPers/FR ; 32 RPers/FR
Licenciement immédiat (pour justes motifs) ; avertissement préalable. Comme en droit privé du travail, les dispositions cantonales d’un statut de la fonction publique peuvent prévoir que la procédure de l’avertissement préalable ne soit pas indispensable lors d’un renvoi immédiat, lorsque les motifs invoqués à l’appui du licenciement sont de nature à rompre définitivement le rapport de confiance.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 5 al. 2 Cst.
Licenciement immédiat. Renvoi d’un policier d’une commune zurichoise, motif pris qu’il parquait depuis des années son véhicule privé devant le poste de police de manière non autorisée et sans l’avoir signalé. Par ses régulières infractions, cet agent de police a ébranlé la confiance qui pouvait être en lui placée, car il avait le devoir de respecter la loi, ainsi que son application.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 29 al. 2 Cst.
Droit d’être entendu ; respect/étendue. Les employés soumis au droit public bénéficient du « droit d’être entendu », notamment avant toute résiliation des rapports de service. En remettant en main propre une lettre de licenciement à son employée – sans que celle-ci n’ait pu s’exprimer au préalable –, l’employeur a commis une violation évidente de son droit d’être entendue.
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Art. 8 al. 1 Cst.
Traitement ; discrimination. En vertu de l’art. 8 al. 1 Cst., l’employeur public doit rémunérer un travail égal avec un même salaire. Néanmoins, dans le cadre de leur importante marge d’appréciation, les collectivités publiques sont autorisées à retenir des critères particuliers (p. ex. la formation de l’employé) lors du processus de classification des fonctions, afin de justifier objectivement d’éventuelles différences de traitement.
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Art. 13 et 14 LP ; 49 al. 1 Cst.
Sanction disciplinaire ; compétence. La compétence d’infliger une sanction disciplinaire à un employé chargé de l’application du droit des poursuites résulte de la compétence de l’autorité de surveillance LP et non de l’autorité d’engagement. Par ailleurs, seule l’une des sanctions prévues à l’article 14 al. 2 LP pouvait en l’espèce être prononcée (au détriment des mesures disciplinaires fondées sur le statut du personnel).
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Art. 328 et 341 CO
Dommage corporel ; responsabilité de l’employeur ; transaction extrajudiciaire ; impossibilité de renoncer. L’impossibilité légale de renoncer à toute créance découlant d’une norme impérative n’empêche pas la conclusion d’une transaction extrajudiciaire portant sur la réparation d’un dommage corporel subi par le travailleur dans le cadre de son emploi.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 59 et 88 CPC ; 335d, 335f, 335g CO ; 10 et 15 Loi sur la participation
Licenciement collectif ; consultation des travailleurs ; droit d’action du syndicat ; intérêt. A défaut d’une représentation élue des travailleurs existant avant une procédure de licenciement collectif, la procédure de consultation en cas de licenciement collectif n’offre aux travailleurs que la possibilité d’être consultés individuellement, mais non d’exiger la mise en place d’une représentation du personnel. Si l’employeur refusait une telle demande, cela n’aurait pas pour effet de rendre abusif les licenciements au sens de l’art. 336 al. 2 let. c CO. Les travailleurs ont néanmoins la faculté de confier à une représentation ad hoc la tâche de négocier avec l’employeur les conditions du licenciement collectif. Si l’employeur et les travailleurs s’entendent sur la désignation d’une représentation, un syndicat n’a plus d’intérêt à faire constater que l’employeur refuse de mettre en place une représentation des travailleurs.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 342 al. 2 CO ; 1 LTr
Champ d’application de la LTr ; travailleur occupé à l’étranger. Les travailleurs engagés par une entreprise sise en Suisse, mais dont l’activité a lieu à l’étranger, ne tombent pas sous le champ d’application de la loi sur le travail, même si leur contrat est soumis au droit suisse. Il en est ainsi d’un boulanger engagé par une entreprise suisse de soutien logistique aux militaires et autres organisations dans les zones de conflits, qui a travaillé dans un camp militaire en Afghanistan.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 18, 20a, 27 et 71 LTr ; 41 et 25 OLT2
Travail du dimanche ; zone touristique. Pour bénéficier du statut d’entreprise située en région touristique, une épicerie doit démontrer qu’elle se trouve dans une région touristique, qu’elle répond à des besoins spécifiques aux touristes et qu’elle est active durant la saison touristique.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 17b al. 1 LTr
Travail de nuit ; indemnisation. Le travailleur qui commence sa journée de travail avant 6 heures du matin accomplit du travail de nuit. L’employeur qui tolère un tel comportement doit indemniser le travail de nuit ainsi accompli.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 4, 5 al. 3, 6 LEg ; 8 CC
Harcèlement sexuel ; fardeau de la preuve ; mesures à prendre par l’employeur. La travailleuse qui se dit victime d’un harcèlement sexuel ne bénéficie pas de l’allègement du fardeau de la preuve tel que prévu à l’art. 6 LEg. Cela n’exclut toutefois pas que le juge soit convaincu d’un harcèlement sur la base d’indices. Par ailleurs, lorsque le harcèlement est le fait d’un organe, l’employeur ne peut pas se libérer en démontrant avoir pris des mesures appropriées.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 4 CPC ; 335 ss, 266 ss CO
Contrat de conciergerie ; règles applicables à la résiliation ; compétence à raison de la matière. La résiliation d’un contrat de conciergerie combinant des aspects du contrat de travail et du contrat de bail doit suivre les règles applicables à la prestation prépondérante. Cette dernière se détermine en premier lieu eu égard au critère économique. Si la rémunération du concierge est plus élevée que le loyer, ce sont les règles régissant la résiliation du contrat de travail qui sont applicables. Il revient alors aux tribunaux compétents en matière de contrat de travail de trancher le litige.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 340c al. 2 CO
Prohibition de concurrence ; motif justifié de résiliation. L’employeur qui sait que son employé prépare une activité concurrente alors que le contrat prévoit une interdiction de concurrence est au bénéfice d’un motif justifié de résiliation. Si dans de telles conditions, le travailleur donne son congé avec un délai plus long que celui prévu dans le contrat, il est légitime que l’employeur résilie à son tour le contrat avec un délai raccourci à la durée contractuelle minimale.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 340, 340c al. 2 CO
Prohibition de concurrence ; validité ; fin. La directrice d’un institut de beauté est valablement liée par une clause de non concurrence, dès lors qu’elle a connaissance de la clientèle et de certains secrets d’affaires. Elle ne peut se prévaloir d’un lien particulier avec ses clients, fondé sur ses capacités personnelles, comme cela est souvent le cas dans les professions libérales. Si le contrat de travail a été résilié d’un commun accord, cela n’entraîne pas d’office la fin de la prohibition de faire concurrence.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 8 et 9 LPD.
Les employés de banque sont en principe en droit d’obtenir des copies des documents les concernant qui ont été transmis aux autorités étrangères, en l’occurrence américaines. Dans la mesure où le nom des clients a été caviardé, la transmission des documents ne viole pas le secret bancaire. De plus, la pesée des intérêts en présence est favorable aux employés. L’intérêt de ceux-ci consiste d’une part dans leur possibilité de juger de l’opportunité d’entamer une procédure contre leur (ancien) employeur et d’autre part dans la faculté d’évaluer les risques qu’ils encourent s’ils devaient être confrontés aux autorités américaines. L’intérêt de l’employeur à la non divulgation à des tiers de noms de clients dont les anciens employés pourraient se rappeler malgré le caviardage ‑ ou des stratégies commerciales de la banque ‑ n’est pas concrètement démontré et paraît en outre déjà protégé par les devoirs contractuels des ex-employés et par leur propre soumission au secret bancaire. Quant à l’intérêt des tiers, il est préservé, en particulier si l’employeur est encore autorisé à caviarder le nom de tout tiers qui figurerait sur les documents à transmettre. Finalement, une exception à la communication écrite des données sous forme de simple consultation sur place des documents n’est pas de mise.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 12 LSE ; 26 et 29 OSE ; 321d CO.
Pour qualifier un contrat de location de services plutôt que de mandat, il convient de se fonder sur le contenu du contrat, la description du poste et l’activité exercée par le travailleur. La location de services induit notamment un transfert du pouvoir de direction de l’employeur en faveur du client. Une entreprise de soins à domicile qui fournit un service de garde pour lequel des travailleurs passent du temps chez les patients et se tiennent à leur disposition pour effectuer des tâches ménagères ou des soins de base selon leurs besoins peut ainsi être qualifiée d’entreprise de location de services et par conséquent être soumise à l’obligation d’obtenir une autorisation au sens de l’art. 12 LSE.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 42 al. 2, 156, 322b 1 et 322c al. 1 CO ; 8 CC.
Selon l’art. 322b CO, s’il est convenu que le travailleur a droit à une provision sur certaines affaires, celle-ci lui est acquise dès que l’affaire a été valablement conclue avec le tiers. L’art. 322c CO précise que si la tâche d’établir un relevé des provisions n’est pas déléguée au travailleur, l’employeur doit remettre au travailleur, à chaque échéance, un décompte indiquant les affaires qui donnent droit à une provision. A défaut d’établissement du décompte par l’employeur, le travailleur manquera de moyens de preuve à l’appui de ses prétentions. Il s’impose alors une application par analogie de l’art. 42 al. 2 CO (établissement des faits en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par le demandeur). Si le demandeur allègue et prouve tous les faits à la base de ses prétentions auxquels il a accès, le défendeur doit, pour être libéré, alléguer et prouver les faits aptes à mettre en doute les prétentions. En outre, lorsque l’employeur empêche le travailleur de réaliser les affaires qui lui donneraient droit à une provision, en l’espèce en imposant au travailleur un changement d’activité, il doit à son travailleur une provision, qui peut être calculée en prenant la moyenne des années précédentes.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 330a, 334 et 335 CO.
Le contrat d’engagement d’un enseignant dans une école de musique qui prévoit que la période probatoire dure trois ans et que le contrat se renouvelle d’année en année est un contrat de durée indéterminée. Ledit contrat prévoyait qu’une démission de l’enseignant devait intervenir au plus tard fin février pour le mois d’août (fin du semestre), mais était muet concernant l’annonce d’un éventuel non-renouvellement. Les délais de résiliation devant être les mêmes pour les deux parties, l’employeur devait également faire part du non-renouvellement du contrat avant la fin du mois de février, sous peine de voir le contrat être prolongé d’une année. L’arrêt rappelle par ailleurs qu’une prétention en rectification d’un certificat de travail doit être formulée de manière concrète et que la conclusion tendant à « la délivrance d’un certificat de travail conforme à la vérité » n’est pas recevable.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 328 et 336 al. 1 let. b CO
Résiliation abusive ; problèmes de santé ; mutation de lieu de travail. L’employeur qui, après avoir accepté de muter le travailleur dans un autre magasin du groupe pour des raisons d’ordre psychique, ne tient pas compte d’une expertise et place le travailleur dans un établissement qui ne lui convient pas, ne peut pas licencier le travailleur parce que celui-ci ne s’est pas présenté à son nouveau poste. L’employeur devant respecter la santé du travailleur, il ne peut le forcer à intégrer une succursale qui n’est pas compatible avec ses problèmes psychiques, en particulier s’il est à même de l’employer dans une autre succursale.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 328 et 336 CO.
L’obligation de protéger la personnalité de ses travailleurs impose à l’employeur de prendre des mesures appropriées pour gérer les conflits au travail. En présence de difficultés avec un travailleur âgé au service de l’entreprise depuis 10 ans, l’employeur devrait, avant de licencier cette personne, l’informer du licenciement envisagé et chercher une solution permettant de maintenir les rapports de travail. En l’absence de telles démarches, le licenciement peut être considéré comme abusif.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 333 et 336 CO
Résiliation abusive ; motif ; âge ; transfert d’entreprise. Le licenciement d’un enseignant du secteur privé âgé de 70 ans au motif que celui-ci avait atteint l’âge de la retraite depuis plusieurs années n’est pas abusif. Le fait que le licenciement intervienne quelques mois avant un transfert d’entreprise n’y change rien.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 336 al. 1 let. a CO ; 3 al. 1 LEg
Résiliation abusive ; motif. Il n’est pas arbitraire de considérer licite le licenciement d’une femme venant d’accoucher, alors qu’on lui avait déjà signifié son congé durant la grossesse, en raison de la non-atteinte d’objectifs, le premier congé ayant été reconnu comme nul par l’employeur.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 336 al. 2 let. b CO
Résiliation abusive ; représentant élu des travailleurs ; motifs ; causalité ; renversement du fardeau de la preuve. L’employeur qui licencie un représentant élu des travailleurs en cours de mandat supporte le fardeau de la preuve quant au motif de la résiliation et à la causalité entre ce motif et la résiliation. Si les représentants du personnel, dans le cadre d’une discussion avec l’employeur au sujet de la restructuration de la direction, se retirent de la discussion en arguant que la confiance est rompue, cela concerne les rapports entre les représentants et l’employeur, sans pour autant valoir dans les rapports de travail des travailleurs élus. Sans motif justifié, le congé est abusif.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 336c CO ; 8 CC.
Les circonstances entourant une incapacité de travail sont susceptibles de mettre en doute un certificat médical. Il en va ainsi lorsqu’une employée licenciée tombe en incapacité de travail de longue durée à quelques jours de la fin de son délai de congé et que, six mois après, lorsqu’elle est convoquée par le médecin-conseil de l’assureur d’indemnités perte de gain, elle annonce la fin de son incapacité de travail pour éviter une expertise, tout en faisant valoir une autre incapacité de travail en raison d’un accident domestique.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 18 et 336c CO.
Le courrier d’un employeur annonçant à son employée se trouvant en période de congé-maternité qu’il n’est pas possible de réduire le taux d’occupation à 50% en raison de son poste de responsable, que son taux d’occupation sera exceptionnellement baissé jusqu’à la fin de l’année et qu’il sera ensuite mis fin au contrat, ne constitue pas une résiliation, mais l’annonce d’une future résiliation.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 337 CO
Résiliation immédiate ; justes motifs. Le conducteur de véhicules scolaires, qui, pour aller faire des achats personnels, abandonne pendant 5 à 10 minutes son véhicule occupé par des écoliers adolescents en laissant le moteur en marche et les portes ouvertes commet une faute grave. Couplée à de nombreuses remises à l’ordre, cette faute était largement constitutive de justes motifs et légitimait l’employeur à résilier les rapports de travail avec effet immédiat.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 337 CO
Résiliation immédiate ; justes motifs ; fardeau de la preuve. L’employeur qui prononce un congé immédiat doit prouver les faits constitutifs de juste motif. Ainsi, s’il accuse son employée d’avoir détourné un client dont elle s’occupait principalement au profit d’une entreprise concurrente, il ne peut se contenter d’allégations et de témoignages indirects, qui, bien que démontrant que le client en question avait cessé de collaborer avec l’employeuse, ne prouvent pas que cela aurait eu lieu sur instruction de l’employée.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 337d CO
Abandon de poste ; comportement équivoque du travailleur ; principe de la confiance. Lorsqu’il ne ressort pas d’une déclaration explicite que le travailleur refuse consciemment, intentionnellement et définitivement de fournir sa prestation de travail, l’existence d’un abandon de poste doit être examinée en tenant compte de l’ensemble des circonstances et en application du principe de la confiance. Le travailleur qui, suite à une altercation avec l’employeur au sujet d’un décompte de vacances, rend ses clés de l’entreprise et rentre chez lui, mais revient travailler le jour même, puis tombe en incapacité de travail le lendemain et offre ses services pour la fin de cette incapacité de travail ne commet pas un abandon de poste.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 28 et 337 CO
Résiliation immédiate ; justes motifs. Le fait pour un travailleur d’avoir caché, lors d’un entretien d’embauche pour un nouvel engagement, qu’il se trouvait en situation de chômage partiel n’est pas constitutif chez l’employeur d’une erreur essentielle, ni d’un juste motif de licenciement immédiat.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 321a et 337 CO.
Le cadre qui prépare avec un collègue une activité concurrente en élaborant des business plans et en cherchant à débaucher des clients et des collaborateurs de l’employeur viole son devoir de fidélité, de sorte qu’il s’expose à un licenciement avec effet immédiat.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 18 et 337 CO
Résiliation immédiate ; interprétation d’une déclaration de volonté. Une résiliation immédiate ne peut être comprise qu’en présence d’une manifestation de volonté univoque. L’employé à qui il est donné l’ordre de quitter son lieu de travail sans attendre ne suffit pas à lui seul à reconnaître le caractère immédiat de la résiliation, car il pourrait également s’agir d’une simple libération de l’obligation de travailler. Néanmoins, l’ensemble des circonstances peut faire apparaître que l’employeur n’entendait pas simplement libérer le travailleur de son obligation de travailler. En l’espèce, l’employeur était en colère contre le travailleur, il ne lui a pas laissé le temps de terminer ses affaires courantes et ses propres difficultés financières rendaient peu crédible la thèse de la libération de l’obligation de travailler.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 330a et 337 CO
Résiliation immédiate ; justes motifs ; certificat de travail. Un acte agressif ou une menace de la part du travailleur peut, selon les circonstances, justifier ou non un licenciement immédiat. Il y a notamment lieu de prendre en compte le comportement de l’employeur, qui est à l’origine des tensions menant à une altercation. Il faut en outre examiner si le comportement du travailleur est dû à une perte de maîtrise ou s’il est intentionnel. Ainsi, le travailleur qui subit depuis près d’un an des reproches et des insultes inutiles de la part de l’employeur et qui, lorsque ce dernier lui interdit de prendre ses vacances deux jours avant la date prévue se met à briser de la vaisselle et pousse l’épouse de l’employeur de manière à la faire trébucher, ne commet pas une faute constitutive de juste motif de licenciement immédiat, compte tenu de l’attitude de l’employeur. Un tel comportement ne doit par ailleurs pas avoir de conséquences sur le contenu du certificat de travail.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 337c al. 3 CO ; 92 al. 1 LP
Saisissabilité de l’indemnité punitive et réparatrice due en cas de résiliation immédiate injustifiée. Les indemnités qui ne servent pas à réparer une atteinte à la santé sont saisissables (art. 92 al. 1 ch. 9 LP a contrario). Ainsi, l’indemnité due au travailleur en cas de résiliation immédiate injustifiée peut être saisie par l’office des poursuites compétent dans le cadre d’une poursuite contre le travailleur.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 336b CO.
Lorsque le travailleur conteste les motifs de la résiliation, sans toutefois contester le congé en lui-même, sa déclaration ne constitue pas une opposition valable au congé au sens de l’art. 336b Ainsi, si le travailleur écrit à son employeur en faisant référence à un autre courrier qu’il avait contesté le motif du licenciement, estimant qu’il s’agissait d’un congé de représailles, mais qu’il termine sa lettre en rappelant ses droits en matière d’indemnités journalières à l’échéance du contrat de travail, il ne fait pas formellement opposition au congé. Il ne peut alors prétendre à une indemnité pour licenciement abusif.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 322b CO
Plan d’intéressement ; qualité pour défendre ; groupe de sociétés. Au sein d’un groupe de sociétés, il est possible que certaines prestations soient assumées exclusivement par d’autres sociétés du groupe. Ainsi, à moins d’une promesse de porte-fort, les prétentions du travailleur découlant d’un plan d’intéressement conclu directement avec la société-mère ne peuvent être réclamées à la filiale, bien que celle-ci ait la qualité d’employeuse.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 18 et 322d CO
Indemnité de départ ; gratification ; retenues opérées par l’employeur. Lorsque l’employeur offre au travailleur licencié une indemnité de départ sous réserve que le délai de congé ne soit pas prolongé, la réalisation de cette condition donne droit au travailleur à cette indemnité, qui est une gratification stricto sensu au sens de l’art. 322d CO. Le montant est dès lors dû, sous réserve des déductions légales ou contractuelles valables. Si une retenue contractuelle est contestée, l’employeur ne peut pas la faire valoir de manière discrétionnaire.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 322 CO ; 17b LTr
Salaire minimum ; CCT Santé 21 ; travail de nuit. Les salaires minimums prévus par la CCT du secteur de la santé du canton de Neuchâtel (CCT21) concernent le travail régulier de jour et ne tiennent pas compte des inconvénients liés à un travail de nuit régulier. Par conséquent, la travailleuse engagée spécifiquement pour une activité nocturne et dont le contrat de travail renvoie aux salaires minimaux de la CCT21 a droit à une indemnité supplémentaire pour compenser les désavantages du travail de nuit.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 322 CO
Incapacité partielle de travail ; modification de salaire ; acceptation tacite. Le travailleur qui ne s’oppose pas au versement réduit de son salaire durant une procédure de recours intentée conjointement avec son employeur contre une décision de l’assurance accident n’est pas réputé consentir tacitement à une réduction de salaire.
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Art. 41, 97, 147 al. 2, 324a et 717 CO ; 159 CP.
Lorsqu’en présence d’un accord dérogatoire prévoyant des indemnités journalières en cas de maladie, l’employeur omet de payer les primes d’assurance, il est contractuellement responsable du dommage résultant du refus de l’assureur de verser les prestations d’assurance. Si le travailleur ne peut obtenir son dû en raison de l’insolvabilité subséquente de la société employeuse, il peut en actionner les administrateurs, sur la base des art. 41 CO et 159 CP. Un accord transactionnel qui serait intervenu entre la société employeuse et le travailleur ne libère pas les administrateurs, à moins que cela ait été stipulé dans l’accord.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 11, 13 et 324a CO.
La simple mention, dans une lettre d’engagement, d’une retenue sur salaire pour l’assurance perte de gain en cas de maladie ne vaut pas stipulation d’un régime dérogatoire à l’obligation de payer le salaire en cas de maladie. La forme écrite ne couvrant en effet pas les éléments essentiels, l’accord est nul. La nullité n’entraîne pas l’application d’un régime complémentaire, l’employeur ne pouvant être réputé avoir accepté un tel régime alors qu’il avait en vue de se libérer de son obligation de payer le salaire par la conclusion d’un régime dérogatoire. Dans un tel cas, le droit du travailleur à son salaire en cas de maladie se limite donc à la durée déterminée par les échelles bernoise, bâloise ou zurichoise. Il s’ensuit que le travailleur ne peut faire valoir de prétentions à l’encontre de son employeur en raison du refus de l’assureur de lui accorder des indemnités journalières au-delà de 90 jours (au lieu de 720) après la fin des rapports de travail en raison de son statut de frontalier.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 1 LECCT, art. 357 CO
Arrêté d’extension ; champ d’application d’une CCT ; secteur principal de la construction. En raison de l’activité de construction qu’elles déploient, les entreprises spécialisées dans l’installation de dispositifs de chauffage géothermique sont réputées appartenir au secteur du génie civil et tombent par conséquent dans le champ d’application de la convention collective de travail pour la retraite anticipée dans le secteur principal de la construction, étendue par arrêté du Conseil fédéral.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 112 et 357 CO
Effets de la CCT pour les travailleurs non syndiqués ; stipulation pour autrui. Une CCT d’entreprise qui prévoit qu’elle s’applique à tout son personnel (clause d’égalité de traitement) peut être invoquée devant les tribunaux par les employés non syndiqués de l’entreprise signataire. Bien qu’il s’agisse en principe d’une créance de nature contractuelle (à laquelle il pourrait être dérogé par accord des parties), il convient de lui attribuer un effet normatif, en appliquant l’art. 357 CO, du moins par analogie.
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Art. 357b CO
Convention collective nationale du secteur principal de la construction (CN) ; amende conventionnelle pour non-respect d’une CCT. Une commission paritaire est en droit d’infliger une amende conventionnelle à une entreprise qui refuse de collaborer à l’établissement des faits permettant de déterminer si elle est ou non soumise à la CCT en question. En l’occurrence, l’entreprise incriminée effectuait des travaux qui relevaient tant du domaine du gros œuvre que de celui du second œuvre, ce qui légitimait la commission paritaire du secteur principal de la construction à chercher à déterminer si l’entreprise était soumise à la CN. Se prétendant soumise à la CCT du second œuvre romand, l’entreprise n’a pas donné suite aux demandes de renseignements de la commission paritaire du secteur principal de la construction. La commission paritaire était alors en droit de lui infliger une amende.
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Art. 1, 320 al. 2 CO
Qualification du contrat ; présomption de la conclusion d’un contrat de travail ; acceptation tacite de l’absence de rémunération ; bénévolat. Un contrat de travail est réputé conclu lorsque l’employeur accepte pour un temps donné l’exécution d’un travail qui, selon les circonstances, ne doit être fourni que contre rémunération. Néanmoins, les parties peuvent convenir, même tacitement, que l’activité déployée ne sera pas rémunérée. On se trouve alors en présence d’un contrat de bénévolat et la relation entre les parties échappe aux règles du contrat de travail. C’est le cas en l’espèce pour une gynécologue qui prenait part à des activités du service hospitalier de dermatologie dans un but de formation, alors que des attestations d’activité non rémunérée lui avaient été délivrées et qu’elle n’avait jamais demandé à être payée durant plusieurs années.
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Art. 329 al. 3, 329a, 329d CO
But des vacances ; prise du solde de vacances durant le délai de résiliation. Le but des vacances est de permettre au travailleur de se reposer, de se délasser. Les vacances doivent autant que possible être prises en nature. Ce principe vaut a priori également pendant le délai de congé. Ce n’est que lorsque la prise de vacances se révèle impossible que le travailleur peut, à la fin du contrat, percevoir une indemnité en remplacement. En présence d’un long délai de congé et en l’absence du besoin pour le travailleur de chercher un nouvel emploi, l’employeur peut imposer la prise de vacances au travailleur. En l’occurrence, il a été admis que le travailleur, sans être libéré de l’obligation de travailler, a pu prendre 98.5 jours de vacances durant son délai de congé qui était de six mois. Le travailleur, qui occupait un poste de directeur, était proche de l’âge de la retraite et n’a pas fait de démarche pour rechercher un nouvel emploi. Il pouvait donc bénéficier de ses vacances tout à fait normalement.
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Art. 332 al. 1 CO
Inventions de service ; rémunération. Une invention faite par le travailleur dans le cadre de son activité est qualifiée d’invention de service. Pour déterminer si l’on est en présence d’une telle invention, il y a lieu de rechercher si celle-ci présente un rapport de connexité étroit avec l’activité du travailleur et si ce dernier est contractuellement obligé de déployer une activité inventive. Une telle obligation peut se déduire des circonstances, et notamment des directives données au salarié, de sa position hiérarchique, de sa rémunération ou des ressources qui sont mises à sa disposition. En l’occurrence, c’est bien le cas des inventions faites par un mécanicien de formation, responsable de fait de l’atelier, dont la rémunération a fortement augmenté après le dépôt de deux brevets par son employeur, qui pouvait disposer de l’aide d’autres collaborateurs et qui était en contact avec le département technique. Une invention de service ne donne en principe droit à aucune rémunération spéciale. Le TF laisse toutefois ouverte la question discutée en doctrine de savoir si une indemnité spéciale serait due lorsque les efforts déployés par le travailleur excèdent ce que l’on est raisonnablement en droit d’attendre de lui.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 9 al. 1 let. b, art. 13, 71 let. b LTr ; §§ 2 et 10 de la loi zurichoise sur les honoraires complémentaires des médecins ; rémunération du travail supplémentaire. Le travail supplémentaire effectué par un médecin en chef de l’Hôpital universitaire de Zurich (soumis aux articles 13 et 71 let. b LTr) ne peut pas être compensé par des indemnités (« participation au pool » d’honoraires) prévues par la législation zurichoise. La pratique de l’hôpital afférente aux médecins-chefs est donc contraire à la LTr.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 336c al. 1 let. c CO, art. 12 al. 3 LSt/NE
Licenciement d’une collaboratrice enceinte. Pas de protection particulière en cas de grossesse durant la période probatoire (deux ans) prévue dans la Loi neuchâteloise du 28 juin 1995 sur le statut de la fonction publique (LSt), ni de lacune à combler dans cette législation. Pas d’application par analogie du droit privé du travail (protection contre les congés en temps inopportun). Le droit de la fonction publique peut ainsi être plus défavorable que le droit privé sur ce point. Le cas échéant, il incombe au législateur cantonal de remédier à cette situation.
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Art. 6 LTr, art. 26 OLT3, art. 29 al. 1 Cst., art. 6 par. 1 CEDH
Utilisation abusive des moyens informatiques sur le lieu de travail ; moyens de preuve. L’employeur ne saurait installer un logiciel espion sur l’ordinateur de son employé, à l’insu de celui-ci, afin de vérifier les soupçons d’une utilisation excessive d’Internet à des fins étrangères aux devoirs de fonction pesant sur ce dernier. En agissant de la sorte, il viole le principe de la proportionnalité (pesée des intérêts entre la recherche de la vérité et la protection de la personnalité de l’employé). Illicite, le moyen de preuve obtenu est inutilisable en procédure ; la résiliation immédiate des rapports de travail du fonctionnaire concerné s’avère infondée.
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Art. 8 Cst., art. 1 al. 1, 6, 328, 335d, 356 CO
Délocalisation, plan social ; offre unilatérale de l’employeur ; égalité de traitement. Lorsqu’un plan social est proposé de manière unilatérale par l’employeur, cette proposition constitue une offre au sens juridique. Chaque travailleur à qui l’offre est soumise peut accepter le plan social, qui devient alors un complément à son contrat individuel de travail. L’employeur peut choisir, selon des critères raisonnables et non discriminatoires, quels sont les travailleurs qui peuvent bénéficier du plan social ainsi proposé. Les travailleurs à qui l’offre n’est pas soumise ne sauraient pour leur part s’en prévaloir.
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Art. 27, 28 LTr, art. 47 OLT 2
Travail du dimanche pour le personnel au sol du secteur de la navigation aérienne. Les entreprises que la loi autorise à travailler le dimanche sans autorisation (art. 27 LTr) peuvent bénéficier, en plus, de dérogations minimes accordées par le Seco aux conditions de l’art. 28 LTr. La dérogation tendant à diminuer le nombre annuel minimal de dimanches de congé de 26 à 20 ne saurait être qualifiée de minime. Néanmoins, les circonstances particulières du cas d’espèce amènent le TF à accorder une telle dérogation sur une période limitée.
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Art. 4, 18 LTr
Interdiction d’occuper du personnel le dimanche et les jours fériés ; entreprise familiale, personne morale. L’art. 4 LTr, qui soustrait du champ d’application de la loi les travailleurs qui font partie de la famille proche du chef d’entreprise, ne s’applique pas lorsque l’entreprise est une personne morale. Par conséquent, une station-service exploitée sous la forme d’une Sàrl est tenue de respecter l’interdiction d’occuper du personnel le dimanche ou les jours fériés, même si les travailleurs sont membres de la famille de l’un des associés gérants.
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Art. 17 al. 2, 17b LTr
Travail de nuit régulier. Le travailleur engagé pour un travail de nuit régulier n’a pas droit à un supplément de salaire en raison du travail nocturne, car le salaire convenu entre les parties est alors présumé tenir déjà compte des désavantages entraînés par le travail de nuit.
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Art. 163, 321a, 340, 340c CO
Devoir de fidélité ; prohibition de concurrence ; juste motif ; peine conventionnelle. L’obligation de fidélité résultant de l’art. 321a CO est susceptible d’être élargie contractuellement et sa violation peut être sanctionnée par une peine conventionnelle. Notamment, une clause de prohibition de concurrence peut prévoir qu’elle déploie ses effets pendant et après le contrat. Si en raison d’un motif justifié la résiliation du contrat rend caduque la clause de prohibition de concurrence après la fin des rapports de travail, l’interdiction de concurrence reste néanmoins valable jusqu’au terme du délai de congé.
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Art. 305, 321b CO
Obligation de restituer ; prêt à usage consenti par l’employeur. Lorsque l’employeur cède gratuitement l’usage d’une montre avec charge de restitution à son employé, sans que cela ait un lien direct avec l’accomplissement du travail, on est en présence d’un contrat indépendant de prêt à usage. Le travailleur ayant l’obligation de restituer l’objet, il supporte le fardeau de la preuve concernant cette remise. Dans l’hypothèse de la disparition de l’objet prêté, on ne saurait retenir qu’en ne prévoyant pas une procédure spéciale pour la restitution de l’objet, l’employeur ait commis une faute concomitante qui libérerait le travailleur de toute obligation de restitution. Le fait d’avoir remis un décompte final ainsi qu’un certificat de travail ne prive par ailleurs pas l’employeur du droit de réclamer l’objet prêté.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 42 al. 1, 49, 328 CO
Protection de la personnalité ; responsabilité de l’employeur ; faux renseignements ; dommages-intérêts ; tort moral. L’employeur est tenu de respecter la personnalité du travailleur même après la fin des rapports de travail. S’il fournit des renseignements défavorables et inexacts au sujet de son ancien collaborateur, il viole ses obligations contractuelles et engage sa responsabilité. La preuve du dommage incombe au lésé. A ce sujet, il suffit que le travailleur démontre qu’il aurait été engagé si l’ancien employeur n’avait pas fourni au futur employeur potentiel les renseignements incriminés. Point n’est besoin en revanche de démontrer que cet engagement aurait satisfait les deux parties sur le long terme. En ce qui concerne l’indemnité pour tort moral, elle n’est pas conditionnée par une atteinte à la santé psychique, des souffrances étant suffisantes.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 328 CO
Protection de la personnalité ; harcèlement psychologique ou difficulté d’adaptation à des conditions de travail plus exigeantes ? Il n’y a pas harcèlement psychologique du seul fait qu’un conflit existe dans les relations professionnelles, qu’il règne une mauvaise ambiance de travail, ou encore du fait qu’un supérieur hiérarchique n’a pas satisfait pleinement et toujours aux devoirs qui lui incombent à l’égard de ses collaborateurs.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 336, 336a, 336b CO
Protection étendue contre les licenciements découlant d’une convention collective de travail ; délai de péremption pour réclamer une indemnité ; action judiciaire d’un syndicat. Lorsqu’une convention collective de travail prévoit qu’ « il est interdit de discriminer ou de licencier un employé en raison de son activité exercée en qualité de représentant, de délégué syndical ou de membre des commissions du personnel des employés », il faut considérer, à défaut de sanction spécifique stipulée dans la CCT, qu’un tel congé n’est pas nul, mais abusif au sens de l’art. 336 CO. Il peut donc donner lieu à une indemnité de 6 mois de salaire au maximum, pour autant que le travailleur s’oppose au licenciement durant le délai de congé et qu’il actionne son employeur dans les 180 jours qui suivent la fin des rapports de travail. L’action en justice d’un syndicat ne sauvegarde pas le délai de péremption de 180 jours dont dispose le travailleur pour demander le paiement de l’indemnité pour résiliation abusive.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 336 CO
Motifs du congé ; manque de motivation ; licenciement d’un employé après 12 ans de service, à une année de la retraite. L’employeur doit avoir des égards envers une personne qui est depuis longtemps à son service et chercher une solution moins incisive que le licenciement, ce d’autant plus lorsque le travailleur fournit des prestations plus ou moins satisfaisantes. Le TF relève d’ailleurs à cet égard qu’il est « dans le cours ordinaire de la vie qu’un travailleur se trouvant à une année de la retraite puisse être moins motivé qu’un jeune ».
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 336 CO
Motifs du congé ; congé-modification. Le congé donné suite au refus du travailleur de conclure un nouveau contrat de travail redéfinissant ses fonctions en raison d’une restructuration due au rachat de la société employeuse n’est pas abusif en soi. Le TF rappelle ainsi sa jurisprudence selon laquelle le congé-modification n’est abusif qu’à certaines conditions, notamment lorsque l’employeur fait pression sur le travailleur en le menaçant de résiliation pour que celui-ci accepte des conditions de travail défavorables sans respecter le droit impératif.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 324a, 337, 337c CO
Résiliation immédiate ; incapacité de travail ; assurance d’indemnités journalières ; calcul du dommage. Lorsque le licenciement immédiat est injustifié, le travailleur a droit à ce qu’il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à l’expiration du délai de congé ordinaire. L’indemnité doit être fixée aussi concrètement que possible. Il est notamment nécessaire de prendre en compte les effets qu’aurait eus une incapacité de travail sur le droit au salaire, y compris l’éventuelle intervention d’une assurance perte de gain découlant d’un régime dérogatoire au sens de l’art. 324a CO.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 44, 321e, 341, 362 CO
Convention portant sur la réparation du dommage causé à l’employeur. Lorsque le travailleur se fait auteur de malversations au détriment de son employeur et des clients de celui-ci, il est tenu de réparer l’intégralité du dommage, ce qui comprend les frais liés à l’engagement d’une fiduciaire en vue de déterminer précisément le dommage. La convention prévoyant que l’employeur se charge lui-même des recherches et que les heures y relatives sont facturées au travailleur « à un tarif raisonnable », ne déroge donc pas à l’art. 321e CO et ne saurait dès lors être invalidée en application des art. 341 et 362 CO.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 322, 322b CO
Bonus ; principe de l’accessoriété ; salaire très élevé. Pour déterminer si un bonus constitue un élément du salaire ou une gratification, on peut notamment se fonder sur le caractère accessoire ou non de cette rétribution spéciale. Dans sa jurisprudence, le TF avait posé que la gratification ne peut avoir qu’une importance secondaire dans la rétribution du travailleur. Ainsi, pour les salaires élevés, n’est pas accessoire un bonus égal ou supérieur au salaire de base. Il en va toutefois encore différemment pour les salariés qui touchent un très haut salaire fixe (CHF 2 mio dans le cas d’espèce). Dans un tel cas, il n’est pas nécessaire d’accorder une protection pour les prestations accessoires et le principe de l’accessoriété n’est plus pertinent.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 322b, 340b al. 2, 349a al. 2 CO
Provisions ; rémunération convenable. Le travailleur rémunéré exclusivement ou principalement sous forme de provisions a droit à une rémunération convenable. L’art. 349a al. 2 CO, qui protège spécifiquement les voyageurs de commerce, doit être appliqué par analogie à tous les contrats individuels de travail. Un revenu mensuel net moyen de CHF 2’000.- pour une activité à plein temps ne représente pas une rémunération convenable au sens de cette disposition. Le travailleur a donc droit à un supplément de salaire que le juge fixera selon son appréciation.
Jean-Philippe Dunand, Nicolas Brügger, Héloïse Rosello
Art. 60 al. 3 LFPr, art. 72 et 83 LTF
Nature de la contribution de formation professionnelle rendue obligatoire par déclaration du Conseil fédéral. L’obligation de contribuer à un fonds en faveur de la formation professionnelle relève en principe du droit privé. Néanmoins, lorsque cette contribution est rendue obligatoire par le Conseil fédéral en application de l’art. 60 al. 3 LFPr, elle revêt un caractère administratif et doit être contestée devant le Tribunal fédéral par un recours en matière de droit public.
Art. 29a et 178 al. 3 Cst., art. 60 LFPr, art. 68a OFPr
Contribution de formation professionnelle déclarée obligatoire par le Conseil fédéral ; compétence décisionnelle de l’organisation du monde du travail ; action de droit administratif. Avec l’entrée en vigueur de l’art. 68a OFPr, le 1er janvier 2011, l’association (ou, le cas échéant, la fondation) chargée de percevoir une contribution de formation professionnelle déclarée obligatoire par le Conseil fédéral assume une tâche d’intérêt public et dispose par conséquent du pouvoir de rendre des décisions administratives. Ces décisions peuvent être contestées auprès de l’Office fédéral, du Tribunal administratif fédéral, puis finalement devant le Tribunal fédéral.
Art. 357b CO ; Convention nationale pour le secteur principal de la construction (CN)
Exécution commune ; peine conventionnelle ; légitimation active des commissions paritaires. Les commissions professionnelles paritaires locales au sens de l’art. 76 CN sont-elles légitimées à agir directement devant les tribunaux contre les contrevenants à la convention, en vue de les actionner en paiement d’une peine conventionnelle ou agissent-elles au nom des parties à la convention ? Le TF laisse la question ouverte. En revanche, les litiges portant sur le devoir de participer à un fonds en faveur de la formation professionnelle, étendu selon l’art. 60 al. 3 LFPr, sont de nature administrative et doivent être portés devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public.
Art. 329d al. 1 et art. 356c al. 1 CO
Calcul du salaire afférent aux vacances ; modification d’une convention collective de travail. Les suppléments versés pour le travail effectué la nuit, les jours fériés et en fin de semaine ne sont pris en compte pour calculer le salaire déterminant au sens de l’art. 329d al. 1 CO que s’ils ont un caractère durable et régulier. Un tribunal arbitral prévu dans une convention collective de travail n’a pas la compétence de modifier celle-ci.
Temps d’essai ; libération de l’obligation de travailler durant le délai de congé ; solde de vacances. On ne saurait considérer que le travailleur peut bénéficier de 5 jours de vacances lorsqu’il est congédié durant le temps d’essai et libéré de l’obligation de travailler durant le délai de congé de 7 jours.
Délai pour prononcer un licenciement immédiat. Dans la fonction publique, un licenciement immédiat peut difficilement être prononcé sans délai, en raison des particularités de la procédure de résiliation des rapports de travail de droit public. Ainsi, le licenciement immédiat d’un maître d’école intervenant 25 jours après les événements l’ayant déclenché n’est pas forcément tardif, puisque le droit d’être entendu du collaborateur a dû être respecté avant qu’une décision ne soit prise par la commission d’école.
Art. 42 al. 2 CO
Estimation en équité. Pour déterminer le nombre d’heures hebdomadaires de travail d’une personne qui s’occupe du ménage et prodigue des soins à une vieille dame, il peut être fait usage des données statistiques sur le temps consacré au travail domestique et familial récoltées dans le cadre de l’Enquête suisse sur la population active de l’OFS.
Obligation d’informer l’employeur ; abus de droit. Lorsqu’il est reconnaissable que le travailleur effectue des heures supplémentaires, l’employeur doit s’informer de leur nombre exact. Il n’est pas abusif que le travailleur réclame le paiement de ses heures supplémentaires six mois seulement après la fin des rapports de travail, alors qu’il ne l’avait pas fait pendant lesdits rapports.
Art. 5 al. 3 Cst., art. 9 et 28 LTr
Rétribution des heures supplémentaires ; renseignements erronés donnés à l’employeur par une autorité. L’employeur ne saurait se fonder sur des renseignements erronés reçus de l’office cantonal et du SECO, en se prévalant du principe de la bonne foi, pour contester les prétentions émises par un employé concernant ses heures supplémentaires. La protection de la confiance que l’on peut avoir dans les assurances données par l’administration ne produit d’effets que dans les rapports entre un particulier et les autorités, et non dans les rapports entre l’employeur et ses travailleurs.
Procédure de consultation ; résiliation abusive. Le licenciement du directeur d’atelier qui a été chargé de mener la procédure de consultation préalable à un licenciement collectif auprès de ses collaborateurs mais qui n’avait pas été informé que son propre contrat serait également résilié et qui n’avait par conséquent pas pu formuler lui-même des propositions dans la procédure de consultation viole les règles sur le licenciement collectif.
Plan social ; retraite anticipée. Lorsqu’un plan social est lacunaire sur des questions non essentielles, le juge le complètera en appliquant l’art. 2 al. 2 CO par analogie. Dans le cas d’espèce, il s’agissait de déterminer s’il y avait lieu de soustraire des prestations de retraite anticipée découlant du plan social les revenus que le travailleur retirerait d’une autre activité, ainsi que les prestations de l’assurance chômage.
Art. 6 et 51 LTr, art. 79 al. 1 OLT1
Protection de la santé psychique des travailleurs, procédure interne de gestion des conflits dans une entreprise. En vertu de l’art. 6 LTr les entreprises sont tenues de mettre en place une procédure de gestion des conflits, pour laquelle il est recommandé de désigner une personne de confiance ne se trouvant pas dans un rapport hiérarchique avec les intéressés. Les offices cantonaux peuvent dès lors imposer aux entreprises de mettre en place une telle procédure ou de démontrer, par une expertise technique, que la prévention est assurée par un autre moyen.
Art. 18 et 19 LTr, art. 27 OLT1
Travail pendant les jours fériés ; demande de dérogation. Les dérogations au principe général de l’interdiction de travailler le dimanche et les jours fériés doivent être accordées de manière restrictive. Une entreprise de vente en ligne ne saurait se prévaloir du fait que le Vendredi saint n’est pas un jour férié en France, pays avec lequel elle travaille principalement, pour obtenir une dérogation à l’interdiction de travailler durant ce jour férié.
Art. 3 LEg
Motifs justifiant objectivement une différence de salaire. Pour qu’un motif objectif puisse légitimer une différence de salaire, il faut qu’il influe véritablement et de manière importante sur la prestation de travail. En cas de litige, toutes les raisons invoquées par l’employeur doivent être examinées systématiquement et il y a lieu de déterminer si elles justifient objectivement une différence de salaire. Si certaines raisons sont fondées, il conviendra ensuite de déterminer dans quelle mesure ces motifs justifient une différence de rémunération.
Art. 340 al. 2 CO
Conditions de validité d’une clause de prohibition de faire concurrence. Lorsque l’employé noue un rapport personnel avec le client de sorte que celui-ci attache plus d’importance aux capacités personnelles de l’employé qu’à l’identité de l’employeur, la clause de prohibition de faire concurrence fondée sur la connaissance de la clientèle ne se justifie pas. C’est notamment le cas pour un animateur de séminaires de formation, dont la prestation se caractérise par une forte composante personnelle.
Circonstances entourant le congé. Le licenciement d’un employé trois mois seulement après son transfert en Suisse, avec sa famille, n’est pas abusif s’il repose sur des motifs de stratégie commerciale et qu’il respecte le délai de congé.
Motif du congé. Le congé donné en raison de difficultés relationnelles n’est pas abusif en soi. L’employée qui, par sa critique persistante des modalités qui lui sont imposées par sa hiérarchie et par l’insatisfaction qu’elle manifeste, provoque une altération du climat de travail, ne saurait se prévaloir d’un licenciement abusif.
Motif du congé ; représentant syndical. Le licenciement du président de la commission des représentants élus des travailleurs n’est pas forcément abusif, notamment lorsqu’il intervient dans le cadre d’un licenciement collectif justifié par des raisons économiques. La protection en faveur des représentants des travailleurs conférée par l’art. 336 al. 2 let. b CO n’est dès lors pas absolue.
Circonstances entourant le congé. Celui qui exerce son droit de mettre fin au contrat doit agir avec égards. Lorsque dans le contexte d’une résiliation, l’employeur accuse à la légère le travailleur d’une faute lourde, il porte atteinte à sa personnalité, ce qui est constitutif d’une résiliation abusive. Le travailleur était en l’occurrence accusé de maltraitance envers des pensionnaires d’une maison de retraite, et cela sans fondement.
Notion d’incapacité de travail. Le directeur reprenant le travail à 100 % après une longue incapacité de travail lors de laquelle il a dû suivre une chimiothérapie ne se trouve plus en incapacité de travail, même s’il n’est pas forcément apte à se charger de toutes les tâches de direction qu’il assumait auparavant. Il ne bénéficie dès lors pas de la protection contre les congés donnés en temps inopportun.
Objet de la protection. La résiliation par l’employeur d’un avenant au contrat de travail déterminant les conditions de travail d’un employé détaché en Suisse ne correspond pas à une résiliation des rapports de travail, du moins tant que perdure la relation de travail initiale. Ainsi, le travailleur détaché en Suisse qui se voit rappelé à sa place de travail initiale au siège de l’entreprise ne bénéficie pas de la protection contre les congés donnés en temps inopportun.
Justes motifs. Un conseiller financier qui se permet de signer en lieu et place de l’employeur, alors qu’il n’en avait pas le droit, une inscription à une formation continue pour un prix de CHF 6’800.-, se rend coupable d’une faute grave justifiant une résiliation immédiate.
Justes motifs. Pour déterminer s’il existait des motifs justifiant une résiliation immédiate, le juge doit tenir compte de l’ensemble des circonstances, y compris d’éventuels problèmes d’ordre privé du travailleur s’ils sont connus de l’employeur, cela en particulier lorsque les rapports de travail ont duré longtemps. In casu, la résiliation immédiate d’un infirmier-anesthésiste, qui, dans un état d’excitation dû à des problèmes au sein de son couple, craque et quitte son service suite à une remarque désobligeante de son supérieur a été jugée injustifiée.
Justes motifs. Le fait pour un employé de banque libéré de son obligation de travailler durant le délai de congé, de ne pas restituer des documents confidentiels à son employeur malgré une sommation constitue un juste motif de résiliation immédiate.
Requalification d’un accord de résiliation. Une convention de cessation immédiate des rapports de travail peut être considérée comme un licenciement immédiat si le travailleur n’est pas mis au bénéfice d’un délai de réflexion suffisant alors qu’il n’était pas conscient de ce à quoi il renonçait par son accord (délai de congé, protection en cas de maladie, pénalisation dans les prestations de chômage).
Justes motifs. Le collaborateur d’une banque, quelle que soit sa fonction, viole son devoir de fidélité s’il propose un nouveau client en sachant que la relation à créer nuira très probablement à la réputation ou à d’autres intérêts de l’employeur. Le collaborateur viole aussi le devoir de fidélité s’il intercède en faveur d’un client, même en marge de son activité habituelle, en sachant que l’opération favorisée par lui entraînera selon toute vraisemblance une perte pour l’employeur. De telles violations sont aptes à entraîner la rupture définitive du rapport de confiance nécessaire à la continuation des rapports de travail et ainsi justifier une résiliation immédiate.
Art. 464 CO
Devoir de fidélité accru du fondé de procuration. Lorsqu’en violation de l’interdiction explicite de faire concurrence, un fondé de procuration conclut des affaires pour son compte personnel, il est tenu de restituer à son employeur l’ensemble du gain réalisé par cette activité concurrente.
Art. 115 CO
Remise conventionnelle de dette. Lorsqu’à la fin des rapports de travail et malgré un licenciement avec effet immédiat, l’employeur verse sans aucune réserve le dernier salaire de l’employé, il est présumé avoir renoncé à toute prétention en dommages-intérêts, pour autant qu’il ait connaissance du dommage à ce moment.
Détermination du mode et de l’étendue de la réparation. L’ouvrier subalterne qui s’aperçoit que les prescriptions de fabrication édictées par un ingénieur de l’entreprise sont problématiques ne saurait s’en écarter de sa propre initiative. Il doit au contraire s’en référer à son supérieur. Dans le cas contratire, il viole son devoir de dilligence. En l’occurrence, croyant bien faire, le travailleur n’a pas respecté les instructions de l’ingénieur et les outils fabriqués étaient inutilisables. Du fait que le travailleur avait agi en croyant bien faire, sa faute a été qualifiée de moyenne et il a été condamné à réparer les deux tiers du dommage, consistant dans la perte de gain de l’employeur, entraînée par le retour de marchandises défectueuses.
Art. 18 et 322b CO
Rémunération variable ; interprétation du contrat ; principe de la confiance. Le sens d’un texte en apparence limpide n’est pas forcément déterminant. D’autres éléments du contrat, le but poursuivi par les parties ou d’autres circonstances peuvent faire apparaître que le texte de la clause ne reflète pas fidèlement le sens de l’accord conclu. Appliquant ce principe à une clause afférente à la rémunération variable d’un gérant de fortune, le Tribunal fédéral retient que les commissions à verser au travailleur devaient être calculées non pas sur le bénéfice généré par le fonds d’investissement, mais uniquement sur les commissions que touchait l’employeur sur ledit bénéfice.
Art. 322d CO
Gratification facultative ou élément du salaire ? Le versement régulier d’une gratification durant plusieurs années consécutives et sans aucune réserve quant à son caractère facultatif permet de conférer à cette dernière le caractère d’un salaire. Dans de telles circonstances, le tribunal n’a pas à examiner si la gratification présente un caractère accessoire par rapport au salaire.
Art. 293 LP
Transfert d’entreprise à l’occasion d’un sursis concordataire. En cas de transfert d’entreprise durant le sursis concordataire, le rapport de travail passe à l’acquéreur en application de l’art. 333 al. 1 CO. Dans un tel cas, l’ancien employeur répond solidairement des créances du travailleur jusqu’au moment où les rapports de travail auraient normalement pu prendre fin (art. 333 al. 3 CO).
Moment du transfert ; transfert des droits et obligations relatifs à la prévoyance professionnelle. Le transfert rétroactif des rapports de travail dans le cadre d’un transfert d’entreprise n’est en principe pas admissible. Par ailleurs, si le contrat de travail prévoit une couverture d’assurance qui relève d’un régime sous-obligatoire de prévoyance professionnelle, cette prévoyance doit être maintenue et continuée aux mêmes conditions par le nouvel employeur. Le rapport de prévoyance ne saurait ainsi prendre fin avant la date à laquelle la personne assurée a eu officiellement connaissance du transfert.
Conditions de l’opposition au transfert ; motifs de la démission. Le délai d’opposition commence à courir dès que le travailleur a connaissance du transfert d’entreprise. Lorsque le travailleur a donné sa démission avant l’annonce du transfert d’entreprise, on peut considérer que sa volonté de résiliation est indépendante du transfert. Il ne saurait dès lors prétendre que sa démission est motivée par le transfert, soit un motif économique, afin de ne pas rembourser des frais de formation que son employeur avait pris en charge de manière conditionnelle.
Selon le TF, l’employeur est tenu de mentionner, dans le certificat de travail, une maladie qui aurait eu une influence décisive sur les prestations ou le comportement d’un collaborateur. L’employeur est également tenu de mentionner les éventuels problèmes de santé peu compatibles avec l’exercice de telle ou telle profession. Le certificat doit aussi mentionner les absences prolongées, notamment quand leur durée était d’une certaine importance en comparaison avec la longueur des rapports de travail. Par contre, l’employeur n’a pas le droit de mentionner des problèmes de santé restés sans conséquence, le but étant toujours de refléter de manière réelle l’expérience acquise par l’employé pendant la durée du contrat (consid. 4).
Art. 28 CC, art. 41 CO, art. 7 al. 2 aLFors, art. 15 al. 2 CPC
Compétence à raison du lieu en cas de cumul d’actions pour cinq prétentions. Trois des prétentions sont déduites directement des rapports de travail alors que deux autres sont certes fondées sur le contrat de travail, mais également sur une atteinte illicite à sa personnalité (art. 28 CC et 41 CO), en raison d’un harcèlement psychologique. Se pose alors la question de l’application de l’art. 7 al. 2 aLFors. Pour ce faire, une analyse du nouveau droit est notamment faite (art. 15 al. 2 CPC) (consid. 5).
Art. 2 LDA, art. 6 LDA, art. 7 LDA
Cet arrêt traite de l’individualité d’une oeuvre (art. 2 LDA), du principe du créateur (art. 6 LDA) et du coauteur (art. 7 LDA). Le Répertoire des produits dangereux (ou Guide orange des sapeurs-pompiers genevois) est une oeuvre (consid. 4.2). La création d’une oeuvre dans le cadre d’un contrat de travail n’empêche pas l’employé d’acquérir le statut d’auteur. Est coauteur celui qui concourt de manière effective à la détermination définitive de l’oeuvre ou à sa réalisation (consid. 4.3).
Art. 5 CA, art. 341 al. 1 CO
Cet arrêt traite de l’exception d’arbitrage dans un conflit individuel du travail (art. 5 CA et art. 341 al. 1 CO). La clause compromissoire insérée dans le contrat individuel de travail n’est pas opposable au travailleur lorsque celui-ci fait valoir des créances protégées par l’art. 341 al. 1 CO, auxquelles il ne peut pas valablement renoncer (consid. 2-4).
Le droit d’obtenir des dommages et intérêts de la part d’un ex-employeur – coupable d’un fait dommageable – est soumis à la prescription de 10 ans (consid. 2). Dans le cas d’espèce, le TF a considéré qu’en cas d’exposition aux fibres d’amiante, le délai de prescription commençait à courir dès que le travailleur changeait d’emploi ou n’était plus exposé à cette substance cancéreuse.
Notion d’actions fondées sur le droit du travail (consid. 2.1). Par faits de double pertinence, il faut entendre les faits allégués par le demandeur qui sont déterminants pour la compétence, mais également pour le bien-fondé de l’action (consid. 2.3). Ces faits de double pertinence sont, pour le jugement de la compétence, présumés être vrais (consid. 2.3).
Compétence à raison du lieu en cas de cumul d’actions pour cinq prétentions. Trois des prétentions sont déduites directement des rapports de travail alors que deux autres sont certes fondées sur le contrat de travail, mais également sur une atteinte illicite à sa personnalité (art. 28 CC et 41 CO), en raison d’un harcèlement psychologique. Se pose alors la question de l’application de l’art. 7 al. 2 aLFors. Pour ce faire, une analyse du nouveau droit est notamment faite (art. 15 al. 2 CPC) (consid. 5).
Le chef de train, qui s’assied à côté d’une jeune passagère, qui lui parle de son travail, des vacances, du mariage et du célibat et qui prend congé d’elle en lui donnant un bisou sur chaque joue et en lui effleurant le genou, peut se faire licencier avec effet immédiat (consid. 3 et 4). En agissant de la sorte, le chef de train a désécurisé la jeune passagère alors que sa fonction l’oblige à garder une certaine distance avec les voyageurs, et veiller, par son comportement, à inspirer confiance. En outre, sa fonction l’oblige à être correct et constitue une « carte de visite » des CFF (consid. 5).
Une collaboratrice juridique employée par l’Office de l’économie et du travail du canton de Zurich a eu raison de résilier avec effet immédiat son contrat de travail suite à l’affaire de « la jeune fille pour enfants » (l’employée avait découvert un certain nombre d’irrégularités dans l’attribution de l’autorisation de travail de la jeune fille des enfants de l’ancien directeur du théâtre). L’employée avait été désavouée plusieurs fois par ses supérieurs hiérarchiques et s’était même vue retirer le dossier en cause. Selon le TF, on ne pouvait plus attendre de cette employée qu’elle continue à travailler dans ce contexte (consid. 1.3). Il a de ce fait rejeté la plainte du canton qui devra payer définitivement 12 mois de salaire à titre de dédommagement.
La liberté d’expression des employés publics peut être limitée par le devoir de fidélité, devoir qui s’étend aussi au comportement en dehors du service (consid. 3.2). La portée de ce devoir doit être délimitée par une pesée des intérêts. Il ne lie que l’employé public à la collectivité publique, et non le subordonné à son chef hiérarchique. Une critique publique n’est pas fondamentalement exclue, en particulier lorsqu’elle se rapporte au domaine d’activité propre de l’employé et qu’elle est indissociable d’une critique de la hiérarchie. L’employé doit s’imposer une certaine retenue dans la manière d’exercer la critique et n’en appeler à l’opinion publique que si des démarches internes ne produisent aucun résultat (consid. 3.2.1). En l’espèce, le parlement cantonal était compétent pour s’écarter, le cas échéant, d’une décision de principe prise par le gouvernement, concernant un sujet d’intérêt général et aussi le domaine d’activité propre du recourant. Aucune procédure interne à l’administration n’avait permis au recourant d’influencer cette décision ni de critiquer la solution adoptée. Son message n’était pas trompeur et il n’en ressortait pas que ses supérieurs hiérarchiques eussent violé leurs devoirs. Le recourant se manifestait dans un débat public et démocratique. Sa démarche était donc compatible avec le devoir de fidélité et les sanctions prises contre lui violent la liberté d’expression (consid. 3.3).
Art. 70 RPAC
Art. 70 du règlement du 11 octobre 1977 pour le personnel de l’administration communale (RPAC) de la Ville de Lausanne ; compétence de la juridiction cantonale de réformer une décision d’un employeur public en convertissant un licenciement avec effet immédiat en licenciement pour justes motifs avec préavis de trois mois (consid. 4.3).
Le chef de train, qui s’assied à côté d’une jeune passagère, qui lui parle de son travail, des vacances, du mariage et du célibat et qui prend congé d’elle en lui donnant un bisou sur chaque joue et en lui effleurant le genou, peut se faire licencier avec effet immédiat (consid. 3 et 4). En agissant de la sorte, le chef de train a désécurisé la jeune passagère alors que sa fonction l’oblige à garder une certaine distance avec les voyageurs, et veiller, par son comportement, à inspirer confiance. En outre, sa fonction l’oblige à être correct et constitue une « carte de visite » des CFF (consid. 5).
Le directeur d’une entreprise qui envoie à la candidate (pour un poste d’apprentie employée de commerce) deux jours après l’entretien un sms ayant le contenu suivant : « Salut Z., comment vas-tu ? ;-) Aurais-tu le temps et l’envie de venir demain avec moi au bord du lac pour te baigner ? Nous pourrions poursuivre notre entretien entre 4 yeux. Si ça te dit de passer ton dimanche dans l’eau avec moi, je peux venir te chercher à la gare. » se rend coupable de harcèlement sexuel et son comportement doit également être qualifié de discriminatoire (consid. 3.4). En tant qu’employeur, plus particulièrement en sa qualité de maître d’apprentissage, il se doit de respecter la personnalité de ses employés et d’avoir un comportement irréprochable à l’égard de ses apprentis (consid. 3.4).
Le directeur d’une entreprise qui envoie à la candidate (pour un poste d’apprentie employée de commerce) deux jours après l’entretien un sms ayant le contenu suivant : « Salut Z., comment vas-tu ? ;-) Aurais-tu le temps et l’envie de venir demain avec moi au bord du lac pour te baigner ? Nous pourrions poursuivre notre entretien entre 4 yeux. Si ça te dit de passer ton dimanche dans l’eau avec moi, je peux venir te chercher à la gare. » se rend coupable de harcèlement sexuel et son comportement doit également être qualifié de discriminatoire (consid. 3.4). En tant qu’employeur, plus particulièrement en sa qualité de maître d’apprentissage, il se doit de respecter la personnalité de ses employés et d’avoir un comportement irréprochable à l’égard de ses apprentis (consid. 3.4).
Art. 333 CO
Un patron qui licencie tout son personnel juste avant de vendre son entreprise à un tiers ne viole pas forcément l’art. 333 CO, notamment dans le cas où l’entreprise connaissait, avant la vente, des difficultés financières (consid. 4).
Art. 335f CO
Cet arrêt traite de la consultation de la représentation des travailleurs avant un licenciement collectif et des renseignements utiles à cet effet (art. 335f CO). Devoir de l’employeur de consulter la représentation des travailleurs avant un licenciement collectif (consid. 1). L’employeur viole les droits de participation des travailleurs s’il refuse de fournir des renseignements qui auraient permis concrètement à ces derniers de présenter des propositions de solutions additionnelles ou améliorées, dotées de chances de succès réalistes, permettant d’éviter les congés ou d’en atténuer les conséquences. Le but auquel tend la participation des travailleurs est par contre atteint si l’employeur examine sérieusement, avant de prononcer les licenciements, l’ensemble des alternatives entrant en ligne de compte (consid. 2).
Art. 335f CO
Une entreprise qui dissimule pendant longtemps les graves difficultés auxquelles elle est confrontée, tarde à engager une procédure de consultation et ne donne pas des informations assez précises au personnel pour que celui-ci puisse formuler des propositions plus en adéquation avec la réalité, viole l’art. 335f CO (consid. 5.3).
Art. 247 al. 2 let. a CPC, ancien art. 12 al. 2 LEg
Le principe de l’égalité salariale entre l’homme et la femme repose sur la notion du travail de valeur égale. Dans les contestations civiles en matière d’égalité salariale, quelle que soit la valeur litigieuse, la loi impose au juge de constater d’office l’ensemble des faits pertinents (consid. 5.2). Si à l’intérieur d’une entreprise, l’équivalence des diverses fonctions n’est pas immédiatement évidente ou n’est pas établie par d’autres moyens de preuve, le juge doit ordonner une expertise. Refuser d’ordonner une expertise demandée par une partie revient à violer l’ancien article 12 al. 2 LEg, et désormais l’article 247 al. 2 let. a CPC (consid. 5.2).
LEg
Dans le cas d’espèce, l’employée a été malade pendant un certain temps durant l’année 2006, dont deux mois où elle était totalement incapable de travailler. Après cette période de maladie, elle a annoncé à son employeur qu’elle était enceinte. D’octobre 2006 à mars 2007, l’employée avait une capacité de travail de 50%. Puis, elle a été totalement incapable de travailler jusqu’à son accouchement, le 6 avril 2007. A cette même période, l’entreprise vivait une importante réorganisation qui nécessitait une formation des employés et qui allait entraîner une réduction de 20% du personnel. En juin 2007, l’employée a informé son employeur qu’elle désirait allaiter son enfant après la reprise du travail et qu’elle entendait de ce fait travailler depuis son domicile jusqu’à la fin de l’allaitement. Le congé maternité a pris fin le 27 juillet 2007. L’employée a été totalement incapable de travailler pour cause de maladie du 17 juillet 2007 au 29 février 2008. Le 2 août 2007, l’employeur a résilié le contrat de travail de l’employée en question, qui s’est opposée à ce congé. Le TF a considéré qu’il ne s’agissait pas d’un congé discriminatoire puisqu’il n’a pas été établi que l’employeur avait licencié les mères de famille en priorité ou en donnant davantage congé aux femmes plutôt qu’aux hommes (consid. 5.2). Et du fait des nombreux mois d’absence de l’employée dans le cadre de la réorganisation, l’employeur disposait de motifs objectifs pour résilier le contrat de travail, ce qui enlève tout caractère discriminatoire au licenciement (consid. 5.2).
Le principe de l’égalité salariale entre l’homme et la femme repose sur la notion du travail de valeur égale. Dans les contestations civiles en matière d’égalité salariale, quelle que soit la valeur litigieuse, la loi impose au juge de constater d’office l’ensemble des faits pertinents (consid. 5.2). Si à l’intérieur d’une entreprise, l’équivalence des diverses fonctions n’est pas immédiatement évidente ou n’est pas établie par d’autres moyens de preuve, le juge doit ordonner une expertise. Refuser d’ordonner une expertise demandée par une partie revient à violer l’ancien article 12 al. 2 LEg, et désormais l’article 247 al. 2 let. a CPC (consid. 5.2).
Dans le cas d’espèce, l’employée a été malade pendant un certain temps durant l’année 2006, dont deux mois où elle était totalement incapable de travailler. Après cette période de maladie, elle a annoncé à son employeur qu’elle était enceinte. D’octobre 2006 à mars 2007, l’employée avait une capacité de travail de 50%. Puis, elle a été totalement incapable de travailler jusqu’à son accouchement, le 6 avril 2007. A cette même période, l’entreprise vivait une importante réorganisation qui nécessitait une formation des employés et qui allait entraîner une réduction de 20% du personnel. En juin 2007, l’employée a informé son employeur qu’elle désirait allaiter son enfant après la reprise du travail et qu’elle entendait de ce fait travailler depuis son domicile jusqu’à la fin de l’allaitement. Le congé maternité a pris fin le 27 juillet 2007. L’employée a été totalement incapable de travailler pour cause de maladie du 17 juillet 2007 au 29 février 2008. Le 2 août 2007, l’employeur a résilié le contrat de travail de l’employée en question, qui s’est opposée à ce congé. Le TF a considéré qu’il ne s’agissait pas d’un congé discriminatoire puisqu’il n’a pas été établi que l’employeur avait licencié les mères de famille en priorité ou en donnant davantage congé aux femmes plutôt qu’aux hommes (consid. 5.2). Et du fait des nombreux mois d’absence de l’employée dans le cadre de la réorganisation, l’employeur disposait de motifs objectifs pour résilier le contrat de travail, ce qui enlève tout caractère discriminatoire au licenciement (consid. 5.2).
Dans le cadre de l’interprétation objective de la volonté des parties, l’acceptation par l’employé d’une résiliation proposée par l’employeur ne permet pas, à elle seule, de conclure à l’existence d’une résiliation conventionnelle et, par là même, à la volonté implicite du travailleur de renoncer à la protection accordée par les articles 336ss CO (consid. 3). L’accord litigieux doit être interprété restrictivement ; il ne peut constituer une résiliation conventionnelle que dans des circonstances exceptionnelles, notamment lorsqu’est établie sans équivoque la volonté des deux parties de se départir du contrat (consid. 3).
Art. 336 CO
Dans le cadre de l’interprétation objective de la volonté des parties, l’acceptation par l’employé d’une résiliation proposée par l’employeur ne permet pas, à elle seule, de conclure à l’existence d’une résiliation conventionnelle et, par là même, à la volonté implicite du travailleur de renoncer à la protection accordée par les articles 336ss CO (consid. 3). L’accord litigieux doit être interprété restrictivement ; il ne peut constituer une résiliation conventionnelle que dans des circonstances exceptionnelles, notamment lorsqu’est établie sans équivoque la volonté des deux parties de se départir du contrat (consid. 3).
Art. 336 ss CO
Lorsque l’employeur licencie le travailleur pour plusieurs motifs, dont l’un au moins s’avère abusif, il devra démontrer qu’il aurait licencié le travailleur même s’il n’y avait pas eu de motif abusif (consid. 2.1.3).
Art. 336 ss CO
Le congé donné à un directeur ayant des troubles de la mémoire, un caractère « brouillon » et une certaine incapacité de décision qui ont nui gravement à la bonne marche de l’association, ne peut être qualifié d’abusif. En outre, il avait souffert d’un état dépressif pendant une longue durée, ce qui, en fait, avait privé l’association d’un directeur (consid. 2.6).
Art. 336 ss CO
Lorsque l’employé est irritable, a tendance à s’emporter facilement et crée un climat malsain dans l’entreprise, son licenciement peut difficilement être qualifié d’abusif (consid. 2.6). D’autant plus que dans le cas d’espèce, l’employé avait eu un premier entretien (qui avait mal tourné) avec le directeur et avait ensuite reçu un sévère avertissement par écrit (consid. 2.6).
Le congé donné à un directeur ayant des troubles de la mémoire, un caractère « brouillon » et une certaine incapacité de décision qui ont nui gravement à la bonne marche de l’association, ne peut être qualifié d’abusif. En outre, il avait souffert d’un état dépressif pendant une longue durée, ce qui, en fait, avait privé l’association d’un directeur (consid. 2.6).
Lorsque l’employeur licencie le travailleur pour plusieurs motifs, dont l’un au moins s’avère abusif, il devra démontrer qu’il aurait licencié le travailleur même s’il n’y avait pas eu de motif abusif (consid. 2.1.3).
Art. 335b al. 3 CO, art. 336c al. 1 let. c CO, art. 336c ss CO
Le temps d’essai est aménagé afin de permettre aux parties de préparer l’établissement de rapports de travail destinés à durer, en leur donnant l’occasion d’éprouver leurs relations de confiance, de déterminer si elles se conviennent mutuellement et de réfléchir avant de s’engager pour une plus longue période (consid. 3). L’art. 335b al. 3 CO prévoit la possibilité de prolonger le temps d’essai. Une telle prolongation ne peut toutefois avoir lieu que si le travail est interrompu par suite de maladie, d’accident ou d’accomplissement d’une obligation légale incombant au travailleur sans qu’il ait demandé de l’assumer. La liste énumérée par la loi est exhaustive et elle n’inclut pas l’octroi d’un congé non payé (consid. 3). Une prolongation du temps d’essai équivalente au congé non payé ne peut donc reporter l’échéance du temps d’essai au-delà du terme fixé à trois mois dans le cas d’espèce (consid. 3). Dès lors, le congé donné après le temps d’essai alors que l’employée est enceinte doit être considéré comme nul au sens de l’art. 336c al. 1 let. c CO (consid. 3).
Art. 337 al. 1 CO, art. 337c al. 3 CO, art. 337 ss CO, art. 328 CO, art. 49 CO
Il ressort clairement du texte de l’art. 337 al. 1 1ère phrase CO que le travailleur a également la faculté de résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs. Par contre, lorsque la résiliation émane du travailleur, celui-ci ne peut pas prétendre à une indemnité sur la base de l’art. 337c al. 3 CO. Toutefois, s’il y a eu atteinte à ses droits de la personnalité (art. 328 CO), il peut réclamer une indemnité pour tort moral aux conditions de l’article 49 CO (consid. 2.1.1). Dans le cas d’espèce, le travailleur a clairement désobéi à son entraîneur. Mais s’agissant d’une défaillance unique sur l’ensemble de la relation de travail, l’employeur ne pouvait pas l’exclure définitivement de l’équipe tout en continuant à lui verser son salaire. Selon le TF, le travailleur peut avoir un intérêt légitime à fournir effectivement la prestation prévue au contrat, c’est particulièrement le cas pour des artistes, des sportifs professionnels ou des chirurgiens. En l’occurrence, un footballeur professionnel jouant en première division doit, pour conserver sa valeur sur le marché du travail, non seulement s’entraîner régulièrement avec des joueurs de son niveau, mais aussi disputer des matchs avec des équipes du niveau le plus élevé possible (consid. 2.1.2).
Art. 337 ss CO
Un banquier a été licencié avec effet immédiat parce qu’il a menti sur son passé professionnel. Il avait notamment tu une période de chômage. Selon le TF, dans un tel cas, le licenciement avec effet immédiat était justifié car les mensonges du banquier ne permettaient plus la poursuite des rapports de confiance (consid. 3).
Art. 4 CC, art. 337 al. 3 CO, art. 337 ss CO
Lorsqu’il examine un cas de résiliation immédiate, le juge apprécie librement, selon les règles de l’équité (art. 4 CC), si le congé abrupt répond à de justes motifs (art. 337 al. 3 CO) (consid. 4). Les cocontractants ne peuvent pas restreindre le pouvoir d’appréciation que la loi confère au juge, et les motifs de résiliation conventionnels ont pour seule portée d’aider le juge à reconnaître, dans l’évaluation des circonstances, quelles étaient les attentes réciproques les plus importantes selon l’opinion commune des parties (consid. 4). L’exclusion imposée à un coureur cycliste pour une durée indéterminée et sans motif pertinent, est gravement contraire aux obligations contractuelles de l’employeur. En conséquence, le coureur cycliste avait le droit de résilier le contrat de travail avec effet immédiat (consid. 7).
Il ressort clairement du texte de l’art. 337 al. 1 1ère phrase CO que le travailleur a également la faculté de résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs. Par contre, lorsque la résiliation émane du travailleur, celui-ci ne peut pas prétendre à une indemnité sur la base de l’art. 337c al. 3 CO. Toutefois, s’il y a eu atteinte à ses droits de la personnalité (art. 328 CO), il peut réclamer une indemnité pour tort moral aux conditions de l’article 49 CO (consid. 2.1.1). Dans le cas d’espèce, le travailleur a clairement désobéi à son entraîneur. Mais s’agissant d’une défaillance unique sur l’ensemble de la relation de travail, l’employeur ne pouvait pas l’exclure définitivement de l’équipe tout en continuant à lui verser son salaire. Selon le TF, le travailleur peut avoir un intérêt légitime à fournir effectivement la prestation prévue au contrat, c’est particulièrement le cas pour des artistes, des sportifs professionnels ou des chirurgiens. En l’occurrence, un footballeur professionnel jouant en première division doit, pour conserver sa valeur sur le marché du travail, non seulement s’entraîner régulièrement avec des joueurs de son niveau, mais aussi disputer des matchs avec des équipes du niveau le plus élevé possible (consid. 2.1.2).
Un banquier a été licencié avec effet immédiat parce qu’il a menti sur son passé professionnel. Il avait notamment tu une période de chômage. Selon le TF, dans un tel cas, le licenciement avec effet immédiat était justifié car les mensonges du banquier ne permettaient plus la poursuite des rapports de confiance (consid. 3).
Lorsqu’il examine un cas de résiliation immédiate, le juge apprécie librement, selon les règles de l’équité (art. 4 CC), si le congé abrupt répond à de justes motifs (art. 337 al. 3 CO) (consid. 4). Les cocontractants ne peuvent pas restreindre le pouvoir d’appréciation que la loi confère au juge, et les motifs de résiliation conventionnels ont pour seule portée d’aider le juge à reconnaître, dans l’évaluation des circonstances, quelles étaient les attentes réciproques les plus importantes selon l’opinion commune des parties (consid. 4). L’exclusion imposée à un coureur cycliste pour une durée indéterminée et sans motif pertinent, est gravement contraire aux obligations contractuelles de l’employeur. En conséquence, le coureur cycliste avait le droit de résilier le contrat de travail avec effet immédiat (consid. 7).
Selon le TF, lorsqu’il entrave le travailleur dans la jouissance de son temps libre, le temps d’attente consacré au service de piquet doit être rémunéré (consid. 5.1). L’indemnité pour le service de piquet peut être inférieure au taux de salaire de base et le contrat individuel de travail peut prévoir que ladite indemnité est intégrée dans le taux de salaire pour l’activité principale (consid. 5.1, cf. ATF 124 III 249, consid. 3b et 3c). Enfin, pour évaluer le caractère contraignant du service de piquet, il faut tenir compte de la réalité, notamment de la fréquence à laquelle le travailleur est appelé à intervenir lorsqu’il est de piquet. Dans le cas d’espèce, le service de piquet paraissait astreignant, alors qu’en pratique, il était très rare que l’agent de sécurité soit appelé à intervenir. En conséquence, la clause indiquant que la rémunération contractuelle couvrait le service de piquet a été déclarée valable (consid. 5.2 et 5.3).
Art. 56 LCR, art. 6, art. 7 OTR 1, art. 321c al. 3 CO, art. 9, art. 13 LTr
Cet arrêt traite de l’indemnisation du travail supplémentaire des conducteurs professionnels de véhicules automobiles (art. 56 LCR ; art. 6 et art. 7 OTR 1 ; art. 321c al. 3 CO ainsi que les art. 9 et 13 LTr). Le temps de travail supplémentaire des conducteurs professionnels de véhicules automobiles doit être indemnisé impérativement avec la rémunération de base et le supplément de salaire prévu par la loi (salaire majoré d’un quart au moins) dans la mesure où il n’est pas compensé par du temps libre (consid. 2-2.6). A noter que l’article 7 al. 3 OTR 1 qui renvoyait au CO en matière de rémunération du temps de travail supplémentaire a été abrogé au 1er janvier 2011.
Selon le TF, lorsqu’il entrave le travailleur dans la jouissance de son temps libre, le temps d’attente consacré au service de piquet doit être rémunéré (consid. 5.1). L’indemnité pour le service de piquet peut être inférieure au taux de salaire de base et le contrat individuel de travail peut prévoir que ladite indemnité est intégrée dans le taux de salaire pour l’activité principale (consid. 5.1, cf. ATF 124 III 249, consid. 3b et 3c). Enfin, pour évaluer le caractère contraignant du service de piquet, il faut tenir compte de la réalité, notamment de la fréquence à laquelle le travailleur est appelé à intervenir lorsqu’il est de piquet. Dans le cas d’espèce, le service de piquet paraissait astreignant, alors qu’en pratique, il était très rare que l’agent de sécurité soit appelé à intervenir. En conséquence, la clause indiquant que la rémunération contractuelle couvrait le service de piquet a été déclarée valable (consid. 5.2 et 5.3).
Interprétation d’une CCT (art. 356 CO)
Le TF rappelle que les clauses relatives à la conclusion, au contenu et à l’extinction des contrats individuels de travail, ont pour la durée de la convention, un effet direct et impératif (art. 357 al. 1 CO). Il s’agit de clauses normatives qui doivent être interprétées de la même manière qu’une loi tout en tenant compte de la volonté des cocontractants et de ce que l’on peut comprendre selon le principe de la bonne foi (consid. 2.3.1). En cas de modification du contenu de la CCT, il est important que les dispositions ayant un effet direct sur les relations individuelles puissent être connues de tous avec certitude. Il est d’ailleurs regrettable que la publication à la Feuille fédérale soit à ce point laconique que l’on ne puisse saisir d’emblée quel est le contenu de la modification au point que les avocats des parties divergent sur le contenu de celle-ci (consid. 2.3.2). D’un point de vue téléologique, il est clair que le travail de nuit (ou un dimanche ou un jour férié) est plus pénible parce qu’il suppose une adaptation du mode de vie et une renonciation à passer son temps libre en même temps que les autres (consid. 2.3.3). Un travailleur payé à l’heure avec un horaire irrégulier et incertain peut être enclin à ne pas prendre de vacances. Cette situation ne supprime cependant pas son droit à des vacances payées, de sorte qu’une compensation adéquate doit lui être procurée (2.3.5).
Le TF a refusé la demande d’un syndicat visant à réintégrer une vendeuse licenciée après s’être exprimée dans la presse contre la prolongation des horaires de travail. Cette vendeuse était également déléguée syndicale. Le TF a confirmé l’irrecevabilité de la demande de réintégration et surtout jugé que le syndicat n’avait pas la qualité pour agir en justice en vue d’obtenir que la vendeuse retrouve son emploi (consid. 4.2). Selon le TF, le licenciement de l’employée ne porte pas atteinte aux droits de la personnalité des travailleurs de la profession concernée et la demande de réintégration d’une employée ne constitue pas un intérêt collectif au regard de la liberté syndicale (consid. 4.2).
Application de l’article 66 al. 4 LTF ; frais judiciaires à charge d’une collectivité. Selon le TF, la collectivité qui est touchée dans son intérêt patrimonial en tant qu’employeur n’est pas dispensée des frais judiciaires (consid. 8.1.4).
Art. 329a ss et 128 ch. 3 CO
Droit aux vacances ; prescription. Le droit aux vacances se prescrit par cinq ans (consid. 4.1).
Art. 12 al. 6 let. b LPers
Il appartient en premier lieu aux supérieurs hiérarchiques, ainsi qu’à l’autorité compétente de qualifier les prestations de l’employé, du moment qu’ils peuvent le mieux évaluer le travail quotidien et apprécier le comportement de l’intéressé (consid. 4.2.1). L’avertissement prévu à l’article 12 al. 6 let. b LPers ne constitue pas une décision sujette à recours. L’avertissement doit être reconnaissable en tant que tel et doit permettre à l’intéressé de savoir clairement quels sont les manquements reprochés et quelles sont les exigences auxquelles il aura à satisfaire à l’avenir (consid. 4.3.1).
Selon l’article 10 al. 2 LEg, le travailleur est protégé contre le congé durant toute la durée des démarches effectuées au sein de l’entreprise, durant la procédure de conciliation et durant toute la durée du procès, de même que pendant le semestre qui suit la clôture des démarches ou de la procédure. En l’occurrence, l’employée se sentant harcelée s’est pour la dernière fois plainte de harcèlement sexuel en juin 2003 et a été licenciée le 23 janvier 2004, soit plus d’un semestre plus tard. Le congé ne peut donc être annulé sur la base de l’article 10 LEg puisqu’il intervient après la période légale de protection prévue (consid. 3.2). L’article 5 al. 3 LEg ne peut s’appliquer dans le cas d’espèce puisqu’il ressort des aveux de l’employée que son employeur a pris les mesures nécessaires pour mettre fin à la discrimination en question puisque celle-ci ne s’est plus reproduite (consid. 4.2).
En matière de mobbing, il faut relever que la décision qui admet, ou écarte, l’existence d’un harcèlement psychologique présuppose une appréciation globale des circonstances d’espèce, en particulier des indices pouvant entrer dans la définition du mobbing ; il convient donc d’accorder au juge une certaine marge d’appréciation, ce d’autant plus lorsque les déclarations des nombreux témoins entendus sont largement contradictoires et que la Cour cantonale a dû se décider sur la base de l’ensemble des témoignages (consid. 3.3.4).
Art. 335b et 336b CO
Résiliation abusive (art. 336ss CO): Résiliation abusive pendant le temps d'essai ; délai pour faire opposition par écrit en cas de délai de congé réduit. L'opposition contre une résiliation abusive pendant le temps d'essai doit être formée en cas de délai de congé réduit également au plus tard jusqu'à la fin de ce délai, dans la mesure où cela est possible et raisonnablement exigible (consid. 2 et 3).
Résiliation en temps inopportun (art. 336c ss CO) :
Malgré la controverse doctrinale sur la question de savoir si un travailleur qui produit un certificat médical mais qui continue à exercer son activité peut bénéficier de la protection de l’art. 336c CO, le TF a jugé que cette disposition s’appliquait, sauf si l’atteinte à la santé s’avérait insignifiante au point de ne pas empêcher l’employé d’occuper, le cas échéant, un nouveau poste de travail. Un engagement par un nouvel employeur à la fin du délai de congé ordinaire ne doit pas paraître hautement invraisemblable en raison de l’incertitude quant à la durée et au degré de l’incapacité de travail (consid. 3.2). Dans le cas d’espèce, le TF a considéré qu’une angine, qualifiée d’infection passablement banale, n’était pas de nature à affecter sa faculté d’occuper un nouveau poste de travail à la fin de son délai de congé (consid. 3.2).
Résiliation immédiate (art. 337ss CO) :
Un convoyeur a été licencié avec effet immédiat pour avoir conduit sur le tarmac de l’aéroport de Genève avec 0.5 pour mille. Selon le TF, le convoyeur n’a pas commis d’infraction pénale, mais il a violé le règlement d’entreprise qui prescrit que le taux d’alcoolémie autorisé sur le tarmac est de 0.0 pour mille (consid. 2.3). Toutefois, dans le cas d’espèce, il n’a pas été retenu que le convoyeur avait, en raison de son état, mal accompli ses prestations de travail ou dérangé de quelconque manière ses collègues de travail (consid. 2.3). En conséquence, le TF a jugé que le licenciement immédiat était injustifié et qu’un avertissement aurait suffi.
Le fait qu’un directeur de succursale d’agence temporaire laisse se créer une situation dangereuse pour l’une de ses employées est un motif suffisant pour procéder au licenciement de celui-ci (consid. 6.2). En l’occurrence, le directeur avait également commis des irrégularités comptables.
Dans le cas d’espèce, le directeur d’une agence fiduciaire a dénigré l’agence auprès de deux clients au point que l’un des deux mette un terme au mandat conclu avec l’agence. En raison de son obligation de fidélité, le travailleur est tenu de sauvegarder les intérêts légitimes de son employeur et, par conséquent, de s’abstenir de tout ce qui peut lui nuire. Cette obligation accessoire générale vaut dans une mesure accrue pour les cadres (consid. 4.1). Le fait de ne pas sauvegarder fidèlement les intérêts légitimes de son employeur au sens de l’article 321a al. 1 CO peut constituer un juste motif de licenciement immédiat (consid. 4.2).
En principe, des prestations de travail de mauvaise qualité ne constituent pas un juste motif de résiliation immédiate. Dans ce domaine, il convient de tenir compte de toutes les circonstances du cas concret, en particulier de la nature de l’activité promise (consid. 6.1). La mauvaise exécution ou l’insuffisance du travail pourra justifier un licenciement immédiat si elle résulte d’un manquement grave et délibéré du travailleur (consid. 6.1). Le seul rendement insuffisant de l’employé ne peut constituer un motif de licenciement immédiat sans avertissement préalable (consid. 6.2).
Résumé : un employé qui refuse d’exécuter sa prestation de travail au prétexte que son employeur ne le paie plus garde son droit à la gratification qui a été convenue dans le contrat de travail. Le TF rappelle que l’employé a le droit de refuser de travailler s’il n’est pas payé. En outre, si ce refus est justifié, l’employeur devra continuer de verser le salaire pendant l’absence de l’employé. En conséquence, l’employeur doit également payer la gratification convenue qui correspondait, en l’occurrence, à un treizième salaire. Le TF a en plus précisé que rien n’indiquait que la gratification pouvait être réduite en raison de prestations insuffisantes de la part de l’employé.
Art. 326a et 329d CO.
Prétentions financières d’une travailleuse rémunérée aux pièces. Lorsque l’employeur verse durant plus de trois mois un salaire aux pièces correspondant à un taux déterminé par unité, il faut en conclure que les parties ont convenu tacitement de ce taux. En conséquence, l’employeur ne peut réduire ce taux de manière unilatérale. Mais si l’employée ne proteste pas et continue de travailler à un taux réduit, et ce pendant plusieurs mois, il faut en déduire que la réduction du taux a été acceptée par l’employée. (consid. 3). D’après la jurisprudence, les parties ne peuvent valablement convenir qu’à titre exceptionnel (occupation très irrégulière de travailleurs à temps partiel par exemple) que le salaire afférent aux vacances soit inclus dans le salaire des périodes de travail effectivement accomplies et que l’employeur ne devra rien pour les périodes de vacances. Le fait que le salaire soit variable est une circonstance courante en cas de travail payé à l’heure, aux pièces ou à la tâche et qui ne justifie pas en elle-même un accord dérogatoire (consid. 4).
Résumé : les travailleurs rémunérés à l’heure n’ont pas droit au paiement des jours fériés si leur contrat ne le prévoit pas. Le 1er août fait exception, à condition qu’il tombe sur un jour ouvrable. Développement : à teneur de l’article 110 al. 3 Cst. féd., le 1er août est le jour de la fête nationale, il est assimilé aux dimanches du point de vue du droit du travail - ce qui implique que tout travail est en principe interdit, sauf circonstances particulières - et il est rémunéré. Il est incontestable que cette disposition consacre une obligation de payer le salaire pour le jour férié fédéral, laquelle concerne également les travailleurs rémunérés à l’heure pour autant toutefois que le 1er août tombe sur un jour à l’occasion duquel l’employé aurait normalement travaillé (consid. 2.1). Le droit interne ne prévoit pas une obligation de payer les jours fériés pour les travailleurs payés à l’heure (consid. 2.2). L’article 7 let. d Pacte ONU-I dispose que les Etats parties audit Pacte reconnaissent le droit qu’a toute personne de jouir de conditions de travail justes et favorables, qui assurent notamment : le repos, la limitation raisonnable de la durée du travail et la rémunération des jours fériés. Cet article n’a pas été considéré comme directement applicable (« self-executing »), il s’adresse plutôt au législateur, respectivement au Constituant, lequel en a précisément tenu compte en édictant l’article 110 al. 3 Cst. féd. (consid. 2.3.1 et 2.3.3).
Dans le cas d’espèce, l’employeur devait prélever l’impôt à la source, mais il a continué à le faire alors qu’il n’y était plus tenu. Le travailleur n’a jamais consenti aux prélèvements litigieux. L’employeur ne peut réduire unilatéralement le salaire du travailleur sans que celui-ci ne donne son accord ou qu’une clause contractuelle le permette. Le travailleur peut cependant, sans respecter aucune forme particulière, renoncer à une partie de son salaire, mais cette renonciation doit être dûment établie (consid. 3.1). L’argument selon lequel le salaire net est resté le même n’est pas pertinent, puisque l’employeur doit payer le salaire brut sous réserve des déductions qu’il est autorisé à faire en vertu de la loi ou de l’accord des parties (consid. 3.3).
Distinction entre travail à temps partiel proprement dit et travail à temps partiel improprement dit. Dans le cadre du travail à temps partiel proprement dit, les prestations sont effectuées selon des horaires répétitifs et déterminés à l’avance même s’ils sont irréguliers. Alors que le travail à temps partiel improprement dit se base sur un accord des parties pour chaque prestation de travail (consid. 2.2). Dans cet arrêt, l’institutrice devait chaque année (à la fin du mois de mai), faire part de ses vœux pour l’année scolaire suivante. Si elle prétend pouvoir modifier ses horaires selon sa propre volonté, elle ne peut exiger de la direction de l’école de se conformer automatiquement à ses vœux. En conséquence, en renonçant aux services de l’institutrice au motif que sa disponibilité était fortement réduite, l’employeur n’est pas tombé en demeure (consid. 2.3).
Violation du devoir de diligence d’un employeur (art. 91 LEtr) ; le bailleur de services est un employeur (art. 12 LSE). Selon la jurisprudence rendue sous l’empire de la loi sur le séjour et l’établissement des étrangers, qui garde, pour l’essentiel, sa valeur sous l’empire de la loi sur les étrangers, la notion d’employeur est une notion autonome qui vise l’employeur de fait et ne se limite pas à celle du droit des obligations (consid. 4.2). Un bailleur de services au sens de l’article 12 LSE doit être considéré comme un employeur au sens de l’article 91 LEtr, et ce, sans égard au fait que les travailleurs loués se soient présentés de leur propre chef ou sur instruction d’un tiers en exécution d’un contrat de location de services (consid. 5.2, 2ème paragraphe). En outre, l’obligation de diligence qu’impose l’article 91 LEtr au bailleur de services au sens de l’article 12 LSE ne préjuge en rien de l’éventuelle obligation pour les autres parties aux contrats en chaîne de respecter un même devoir de diligence également fondé sur l’article 91 LEtr (consid. 5.2, 3ème paragraphe).
Entreprise locataire de services soumise à une convention collective de travail étendue ; obligation à charge du bailleur de services conformément à l'art. 20 al. 1 LSE. N'est pas une disposition concernant le salaire au sens de l'art. 20 al. 1 LSE la clause d'une convention collective de travail étendue, imposant à l'employeur d'offrir le libre passage d'une assurance collective couvrant la perte de gain en cas de maladie à une assurance individuelle (consid. 2).
Art. 342 al. 2 CO
Employée de maison étrangère au service d'une diplomate; effets de droit civil d'une déclaration de l'employeur envers la Confédération suisse (art. 342 al. 2 CO). L'octroi d'une carte de légitimation à la domestique étrangère suppose notamment une déclaration de garantie de l'employeur, qui s'engage en particulier à occuper l'employée à plein temps. La travailleuse peut se prévaloir de cette obligation de droit public devant le juge civil (consid. 3.2). Abus de droit de l'employée nié en l'espèce (consid. 3.3).
Statut des employés de CCF Cargo SA. Celle-ci est une filiale des CFF, constituée sous la forme d’une société anonyme de droit privé au sens des art. 620ss CO (consid. 3). L’interprétation textuelle (consid. 5.2.1), téléologique (consid. 5.2.2) et historique (consid. 5.2.3) de la LCFF et de la LPers permettent de considérer que les rapports juridiques créés entre CCF Cargo SA et ses employés sont soumis au droit privé.
Art. 357b CO
Exécution commune d’une convention collective de travail (art. 357b CO). Une convention collective de travail peut valablement prévoir que les parties contractantes fonderont des associations auxquelles l'exécution commune, y compris l'exercice d'actions judiciaires, sera déléguée (consid. 3-5).
Art. 1 al. 1 et 2, art. 19 al. 1 CO et art. 70 al. 2 CC
Dissolution consensuelle du lien unissant le sociétaire à l’association dont il est membre (art. 1 al. 1 et 2 et art. 19 al. 1 CO). Il est possible de quitter une association non seulement par une déclaration unilatérale de sortie (art. 70 al. 2 CC), mais également par l’établissement d’une convention entre association et membre (consid. 3.5.2). En l’espèce, l’employeur, une charpenterie, comme la plupart des entreprises de construction actives dans le domaine du bois, s’est retiré de la Société Suisse des Entrepreneurs (SSE) sur la base d’un accord contractuel prenant effet à la fin du mois de mars 2003. Il n’a par conséquent jamais été soumis à la convention collective de travail pour la retraite anticipée dans le secteur principal de la construction (CCT RA), entrée en vigueur le 1er juillet 2003, conclue entre la SSE et deux syndicats, raison pour laquelle il n’existe a priori pas de droit pour ses employés à une rente intermédiaire en cas de retraite anticipée selon la CCT RA (consid. 1-3).
Conflit de conventions collectives de travail. Une commission paritaire professionnelle ne peut recourir contre une décision, rendue par une Chambre cantonale des relations collectives de travail, qui ne constitue en réalité qu’un avis de droit donné sur une question théorique. Ladite décision est donc dépourvue de tout effet juridique, les parties n’étant liées entre elles par aucune convention collective de travail ou tout autre rapport juridique (consid. 1).
Champ d’application de la Convention collective nationale de travail (ci-après : CCNT) pour les hôtels, restaurants et cafés. Les traiteurs, dont l’activité consiste à préparer des repas ou des plats à emporter et à consommer chez soi, entrent dans le champ d’application de la CCNT pour les hôtels, restaurants et cafés (consid. 2.3.2).
Art. 21 III CCNT
Heures supplémentaires de travail dans la restauration. L’art. 21 III de la Convention collective nationale de travail (ci-après : CCNT) pour les hôtels, restaurants et cafés (édition 1998 dans le cas d’espèce) est une clause qui n’a pas été étendue au niveau fédéral. Mais cela n’a pas d’incidence puisque les parties ont décidé d’intégrer la CCNT dans le contrat individuel de travail (consid. 3). Lorsque l’employeur sait que le travailleur accomplit des heures supplémentaires, celui-ci n’est pas tenu de les quantifier dès le premier mois. Le travailleur ne commet pas d’abus de droit s’il revendique le paiement des heures supplémentaires après la fin des rapports de travail (consid. 4.1.3). L’art. 21 III CCNT autorise le juge à se référer au contrôle de la durée du temps de travail tenu par le travailleur lorsque l’employeur a omis de tenir un registre des heures de travail (consid. 4.2).
Art. 28 al. 3 Cst., art. 8 par. 1 let. d Pacte ONU I
Contrainte (art. 181 CP), droit de grève (art. 28 al. 3 Cst., art. 8 par. 1 let. d Pacte ONU I), liberté de réunion (art. 22 Cst., art. 17 al. 1 Cst./AG), liberté d'opinion (art. 16 Cst.). Barrage d'une autoroute par des grévistes. Délit de contrainte réalisé en l'espèce (consid. 4-6).
Art. 8 LRCF, art. 321e CO (application par analogie), art. 20 LPers
Action en dommages-intérêts de l’EPFL contre un ex-professeur du Département de chimie de l’EPFL. Cette dernière reproche à l’ex-professeur le déficit financier du laboratoire dont il avait la charge en se basant notamment sur un règlement de l’EPFL qui semble prévoir une responsabilité financière, mais qui n’est entré en vigueur qu’après les faits (consid. 4.3.1). En outre, il a fallu déterminer son cahier des charges. Il n’avait été engagé que pour enseigner et développer des projets interdisciplinaires, non pour « tenir la comptabilité » de son laboratoire (consid. 4.3.2). Enfin, il a été retenu que la condition de l’illicéité, qui doit être réalisée pour pouvoir engager la responsabilité du recourant, n’était pas remplie en l’occurrence (consid. 4.3.2).
Art. 3 al. 1, 6 al. 2, 20 al. 1 LRCF, art. 9 al. 2 let. b OPers-EPF, art. 4 al. 2 let. g LPers
Action en responsabilité pour cause de mobbing contre l’EPFL par un de ses employés. La responsabilité de l’EPFL est déterminée par la LRCF (consid. 4.2.1). La protection de la personnalité de l’employé est assurée par les art. 9 al. 2 let. b OPers-EPF et 4 al. 2 let. g LPers, dispositions qui dérivent de l’art. 328 CO et qui ont sensiblement la même teneur (consid. 5.2). Dans le cas d’espèce, il a été retenu que la négligence commise par l’EPFL avait été d’une intensité suffisante pour tomber sous le coup de l’art. 6 al. 2 LRCF. (consid. 7.2). En outre, il a été reconnu que l’atteinte à la personnalité de l’employé était grave au point de constituer un tort moral (consid. 8.2). Ainsi, l’EPFL devra payer CHF 20'000.- à titre de tort moral à l’employé mobbé (c. 11.3).
Art. 9 et 50 Cst., art. 89 al. 1 et al. 2 let. c LTF
Recours en matière de droit public et qualité pour recourir. Une association intercommunale atteinte par la décision attaquée en tant que détentrice de la puissance publique peut recourir sur la base de l'art. 89 al. 2 let. c LTF en invoquant la violation de garanties qui lui sont reconnues par la constitution cantonale ou la Constitution fédérale. La qualité pour agir des collectivités publiques est également donnée au regard de l'art. 89 al. 1 LTF, lorsqu'elles sont touchées de façon identique ou analogue à un employeur privé. Tel est en principe le cas dans les litiges de nature pécuniaire relevant du droit de la fonction publique (consid. 2).
Déclassement d’une fonction et droits acquis. La conclusion qui vise à ce qu’une fonction soit maintenue dans une classe de traitement déterminée a un but économique pouvant être apprécié en argent. Elle constitue donc une contestation de nature pécuniaire (consid. 1). Il y a « droits acquis » en faveur des agents de la fonction publique seulement si la loi fixe une fois pour toutes les situations particulières et les soustrait aux effets des modifications légales ou lorsque des assurances précises ont été données à l’occasion d’un engagement individuel (consid. 3.1). En matière de droit à l’égalité de traitement des fonctionnaires, le TF opère une certaine retenue. Les autorités cantonales disposent d’un large pouvoir d’appréciation, notamment concernant les questions relatives à l’organisation et à la rémunération. Elles peuvent, par exemple, prévoir une contribution supérieure aux porteurs d’un diplôme qui bénéficient d’une formation plus poussée, pour autant que cette formation soit utile à l’enseignement pratiqué et que la différence de rémunération reste dans les limites de l’acceptable (consid. 5).
Rappel des principes applicables en la matière, en particulier lorsque l'Etat étranger a conclu un contrat de travail (consid. 2). Une mission d'expert-juriste au sein d'une commission des Nations Unies n'est pas un emploi subalterne; l'immunité de juridiction de l'Etat employeur doit être reconnue en cas de litige (consid. 3).
Comme le mobbing est difficilement prouvable, il peut être admis sur la base d’un faisceau d’indices convergents (consid. 2.2.). Dans ce cadre-là, il n’est pas admissible d’écarter d’emblée les témoignages d’autres employés qui ont aussi été victimes de comportements hostiles et qui éprouvent du ressentiment à l’égard du mobbeur (consid. 2.2.2). Les témoignages indirects ne sont pas exclus pour établir des actes constitutifs de mobbing. Les déclarations de témoins indirects tels qu’un médecin de famille ou un expert peuvent même être suffisantes pour prouver l’existence d’un harcèlement sexuel (consid. 2.2.4). L’expert judiciaire (ici un médecin psychiatre) ne peut faire davantage que constater l’existence ou l’inexistence de symptômes compatibles avec ceux que présentent habituellement les victimes de tels actes. En conséquence, ignorer les conclusions d’experts qui ont répondu clairement et de façon circonstanciée aux questions posées reviendrait à remettre en cause la nécessité d’une expertise judiciaire (consid. 2.2.4).
Art. 23 al. 4 et art. 3 al. 3 LSEE
Fait d'occuper illégalement des étrangers (art. 23 al. 4 et art. 3 al. 3 LSEE). Les autorisations de séjour délivrées en application de l'Accord sur la libre circulation ont en principe un caractère déclaratif. Toutefois, tant que l'autorisation de travailler est soumise au contingentement, la prise d'un emploi sans autorisation de séjour demeure illégale (consid. 4).
Art. 336 CO, art. 28 CC, art. 41, 49 et 328 CO
Licenciement d’un travailleur se trouvant dans un conflit grave et persistant avec la direction. Un licenciement ayant pour seul motif que le travailleur se trouve dans un conflit grave et persistant avec le président élu par son employeur n’est pas abusif. L’employeur n’abuse donc pas de son droit de résiliation s’il licencie le travailleur au motif qu’il critique la stratégie ou l’organisation imposée par l’organe compétent (consid. 3). Le licenciement d’une personne n’appartient pas à sa sphère secrète, et communiquer au sujet des mutations intervenues en matière d’animation socioculturelle, sur le plan local, en particulier quant aux personnes responsables dans ce domaine, répondait en l’espèce à un intérêt légitime de l’employeur et du public. Légitimement aussi, cette partie pouvait faire connaître son point de vue après que le travailleur avait lui-même amorcé une polémique. Dans ces conditions, l’employeur ne doit aucune réparation pécuniaire et il ne doit pas non plus faire publier une rectification (consid. 4).
Art. 336 al. 1 let. e CO
Congé donné parce que l’autre partie a accompli une obligation légale lui incombant sans qu’elle ait demandé de l’assumer (art. 336 al. 1 let. e CO). L’atteinte aux intérêts de l’employeur ne constitue pas une condition d’application de l’art. 336 al. 1 let. e CO (consid. 2.2). Le congé donné au travailleur parce qu’il a participé à un interrogatoire et répondu à des questions précises de la police peut être qualifié d’abusif (consid. 2.3.3).
Art. 336 al. 1 let. a CO, art. 328 CO
L’employeur a le droit de licencier un travailleur âgé (à 22 mois de la retraite) et ayant œuvré longuement (après 25 années de service) lorsqu’il n’est plus en mesure d’exécuter de manière satisfaisante les tâches qui lui sont confiées. Dans le cas d’espèce, le travailleur exécutait mal son travail et n’accomplissait pas assez d’heures de travail par jour (moins de 6.5 heures par jour) au vu de son poste de cadre.
Art. 336c al. 1 let. c CO
Protection contre le licenciement accordée à la femme enceinte durant toute la grossesse et 16 semaines après l’accouchement selon l’art. 336c al. 1 let. c CO. Le droit de protection de l’art. 336c al. 1 let. c CO n’est pas soumis à l’annonce immédiate, ni à brefs délais, de l’état de grossesse (consid. 3). L’examen de l’abus de droit doit se faire au cas par cas, en tenant compte des circonstances propres à chaque litige. En conséquence, il est donc impossible de poser de manière générale que le défaut d’information immédiate de son état de grossesse par l’employée licenciée serait abusif (consid. 3).
Art. 336c CO
Selon l’art. 336c CO, après le temps d’essai, l’employeur ne peut pas résilier le contrat de travail dans différents cas, en particulier pendant une incapacité de travail totale ou partielle résultant d'une maladie ou d'un accident non imputable à la faute du travailleur, et ce pour un certain nombre de jours (al. 1 let. b). Le texte de la loi ne fait pas référence aux jours ouvrables et/ou fériés. Il n'indique pas que les périodes de protection ne couvrent que les jours ouvrables et que seuls de tels jours devraient donc être pris en considération. La ratio legisde cet art. est de permettre au travailleur, même en cas de maladie, de disposer d’un délai de congé complet pour lui permettre de trouver un nouvel emploi. Selon le TF, on ne saurait déduire de cette ratio legis que seule une incapacité survenue durant un jour ouvrable permettrait de suspendre le délai de congé (consid. 3).
Art. 337, 337b, 337c CO
Résiliation immédiate du contrat de travail par le travailleur. La jurisprudence a considéré qu’il y avait de justes motifs notamment en cas d’atteinte grave aux droits de la personnalité du travailleur (consid. 3.1.1). Le fait d’avoir retiré sans nécessité au travailleur un important portefeuille de clients constitue une atteinte grave aux droits de la personnalité de celui-ci, lui permettant ainsi de résilier immédiatement le contrat de travail pour justes motifs (consid. 3.1.2).
Art. 337, 328 CO
Cas d’un employé charmant, libertin et célibataire qui a une relation avec deux de ses conseillères qui finalement déposent plainte pénale contre lui pour contrainte sexuelle et pornographie. Ce qui a donné lieu au licenciement avec effet immédiat de l’employé en question. Il a été retenu que le licenciement avec effet immédiat était injustifié et surtout dépourvu d’un avertissement préalable (consid. 2.1).
Art. 329d al. 2, 337c, 337 et 18 CO
La créance en dommages-intérêts prévue en cas de licenciement immédiat injustifié comprend le salaire, mais aussi le droit aux vacances remplacé par des prestations en argent. Le droit au paiement des vacances en espèces ne constitue pas un droit absolu. Lorsque le travailleur est indemnisé pour une longue période au cours de laquelle il ne travaille pas et n’a guère de possibilité de trouver un emploi, on peut admettre que l’indemnité reçue inclut le droit aux vacances (consid. 3.2). La résiliation est un droit formateur qui s’exerce en principe de manière inconditionnelle et irrévocable (consid. 3.3). Interprétation d’une clause relative à l’indemnisation des désagréments liés aux longs déplacements (consid. 4).
Art. 337c CO
Licenciement immédiat injustifié, gain manqué. Tout licenciement immédiat injustifié comporte une atteinte aux droits de la personnalité du travailleur. Cette atteinte ouvre les droits précisément décrits à l’art. 337c CO, soit des dommages-intérêts (al. 1) et une indemnité sui generis(al. 3). Si le travailleur invoque un dommage supplémentaire tel qu’un gain manqué après l’échéance ordinaire du contrat, il devra démontrer soit une atteinte aux droits de la personnalité allant au-delà de celle inhérente au caractère injustifié du licenciement, soit la violation, par l’employeur, d’une obligation contractuelle autre que celle découlant de l’art. 328 CO (consid. 3.2).
Art. 5 al. 1 et 2 LAVS, art. 9 al. 2 let. f LAVS
Le paiement de dividendes est-il compris dans le salaire déterminant ? La "pratique nidwaldienne" (consid. 2.4), développée pour qualifier le versement de dividendes aux membres de conseils d'administration, ne tient pas compte de la conception fiscale, et les critères qui y sont retenus sont contraires à la loi en tant qu'ils déterminent la proportion du dividende en se référant au capital-actions (au lieu des fonds propres). Il en va de même chez l'actionnaire, la proportion du revenu de la fortune (non soumis à cotisations) ne doit pas être déterminée en fonction de la valeur nominale, mais de la valeur économique effective des actions (consid. 2.8).
Art. 3, 5, 6 LEg
Egalité salariale entre femmes et hommes. Le bilinguisme, dans un canton bilingue (ici Fribourg), doit être considéré comme un aspect de la prestation de travail méritant une reconnaissance au niveau salarial (consid. 3.2.1). Toutefois, sous l’angle du principe de la proportionnalité, il a été décidé que l’ancienneté et l’expérience professionnelle, mêmes associées au bilinguisme, ne justifient pas une différence de salaire de 16% en moyenne au détriment de la travailleuse (consid. 3.2.1). Compte tenu des facteurs en jeu dans le cas d’espèce, il a été ordonné le paiement d’un salaire sur la base d’une différence de salaire de 8,5% par rapport au collègue masculin (consid. 3.2.2).
Art. 322d, 322, 322a CO
Qualification de la notion « rémunération complémentaire », est-ce un élément de salaire ou une gratification ? Dans le cas d’espèce, l’élément de salaire a été retenu (consid. 4). Et quid de la modification du régime contractuel en cours d’emploi ? (consid. 5).
Art. 18, 27 LTr, art. 26 OLT 2
Interdiction du travail dominical, exception en faveur des magasins ("shops") des stations-service situés le long d'axes de circulation importants à forte fréquentation touristique. Cas du canton de Genève. Principe de l'interdiction de travailler le dimanche et aperçu des dérogations possibles (consid. 4.1); objet du litige (consid. 4.2). Notion "d'axes de circulation importants à forte fréquentation touristique": portée et but de l'art. 26 al. 4 OLT 2 (consid. 5).
Art. 321a, 328, 336 CO
Licenciement abusif d’un employé de banque qui communique à l’avocat de la banque les soupçons qu’il a au sujet du directeur de la succursale. Le TF rejette l’argument fondé sur la distinction entre « personne étrangère à la banque » et « personne extérieure » et précise que l’avocat de la banque est soumis au devoir de confidentialité (consid.5 et 6). Enfin, le TF a qualifié le licenciement de l’employé comme étant abusif car celui-ci a adopté un comportement adapté aux circonstances en se confiant à l’avocat de la banque, personne de confiance soumise au devoir de confidentialité (consid.7).
Licéité des moyens de combat dans les conflits collectifs du travail (art. 28 Cst.; art. 41 et 357a CO)
Critères pour qu'un moyen de combat relève du droit collectif du travail (c. 4.3). Comme l'art. 28 Cst.relatif à la liberté syndicale déploie un effet horizontal indirect sur les relations de travail dans le secteur privé, le juge, qui est appelé à examiner la licéité d'un moyen de combat en droit collectif du travail, doit prendre en compte cette garantie constitutionnelle. Pour qu'un moyen de combat soit licite, il doit se rapporter aux relations de travail, être conforme à l'obligation de paix relative du travail, être appuyé par une organisation de travailleurs et respecter le principe de la proportionnalité (c. 4.4). Sous l'angle de ce principe, s'il est disproportionné de mettre en œuvre des moyens de combat faisant usage de la violence ou portant atteinte aux biens de l'entreprise, il est licite d'organiser des piquets de grève pour autant qu'ils n'usent pas de la force (c. 4.5).
Champ d'application d'une convention collective de travail ayant fait l'objet d'une décision d'extension (art. 1 al. 1 LECCT). Conditions auxquelles une entreprise étrangère offrant principalement des services pour lesquels il n'existe pas de concurrence sur le marché indigène est soumise à une convention collective de travail étendue (c. 2).
Art. 5 LEg
Droits conférés à la personne victime d'une discrimination ; procédure applicable aux prétentions en dommages-intérêts fondées sur la LEg. La personne lésée par une discrimination peut faire valoir les droits spécifiques de l'art. 5 al. 1 à 4 LEg et, cumulativement, les prétentions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral réservées à l'art. 5 al. 5 LEg. Cette réserve ne tend pas à soumettre ces dernières prétentions à une procédure différente. Elles ont en effet le même fondement que les droits énoncés aux alinéas 1 à 4, si bien que le lésé doit pouvoir faire valoir toutes ses prétentions dans la procédure ouverte contre la décision discriminatoire. Cette solution est conforme à l'esprit de la loi et s'impose également du point de vue de l'économie de procédure (c. 5.3). Le fait de renvoyer le lésé à faire valoir ses prétentions en dommages-intérêts devant une autre autorité constitue en outre une application arbitraire des règles de procédure cantonale applicables en l'espèce (c. 5.2 et 5.4).
Art. 336 al. 2 let. c, art. 336a et 336b CO
Licenciement collectif sans consultation préalable de la représentation des travailleurs; indemnités revendiquées par les travailleurs alors que l'employeuse a retiré les congés et que les rapports de travail se poursuivent. L'indemnité prévue par l'art. 336a CO n'est pas due lorsque l'employeur, ayant licencié abusivement un travailleur, retire le congé après que ce travailleur a fait opposition. Cette règle vise aussi le licenciement abusif consistant en un licenciement collectif sans consultation préalable de la représentation des travailleurs (c. 5).
Art. 336 al. 2 let. b CO
Congé donné à un représentant élu par les travailleurs. Conditions auxquelles le congé donné pour des motifs économiques à un membre d'une représentation des travailleurs se révèle admissible (c. 6).
Art. 336c CO
Contrat de travail; résiliation en temps inopportun; durée de la période de protection pour une incapacité de travail à cheval sur les deux premières ou les cinquième et sixième années de service. Si une incapacité de travail, au sens de l'art. 336c CO, empiète sur une année de service prévoyant une période de protection plus longue que celle applicable durant l'année de service précédente, c'est la période de protection la plus longue qui s'applique. Manière de calculer la période de protection et d'en fixer le dies a quo (c. 3).
Art. 337b et 337c al. 3 CO
Contrat de travail ; résiliation immédiate ; indemnité. L'art. 337c al. 3 CO, qui permet au juge d'allouer au travailleur une indemnité en cas de licenciement immédiat injustifié par l'employeur, n'est pas applicable par analogie dans l'hypothèse visée par l'art. 337b CO, concernant la résiliation immédiate justifiée de la part du travailleur (c. 3).
Résiliation abusive pendant le temps d'essai (art. 335b et 336 CO). Conditions auxquelles un congé pendant le temps d'essai peut être abusif (c. 7).
Question juridique de principe; art. 74 al. 2 let. a LTF
Il y a une question juridique de principe lorsque le Tribunal fédéral n'a pas tranché de manière uniforme une question litigieuse et qu'il n'est pas clairement posé quelle est la jurisprudence déterminante en la matière (c. 1.3-1.5). Contrat de travail; prolongation des rapports de travail en cas de grossesse survenue après la résiliation; calcul du délai de congé au sens de l'art. 336c al. 2 CO. Confirmation de la jurisprudence, selon laquelle le délai de congé de l'art. 336c al. 2 CO doit être calculé rétroactivement à partir de l'échéance du contrat (c. 2 et 3).
Loi sur le Tribunal fédéral (LTF) ; recevabilité du recours en matière civile des art. 72 ss LTF.
Droit intertemporel (c. 1). Conditions de recevabilité du recours en matière civile (c. 2.1). Pouvoir d'examen du Tribunal fédéral en instance de recours en matière civile (c. 2.2 – 2.4). Subsidiarité du recours constitutionnel (c. 5). Interdiction dans les rapports de travail de toute discrimination à raison du sexe quant à la rémunération ; devoir d'examen de l'autorité cantonale (art. 3 et 12 al. 2 LEg). L'art. 12 al. 2 LEg, en renvoyant notamment à l'art. 343 al. 4 CO, impose à l'autorité cantonale un devoir d'examen étendu. Ainsi le juge qui refuse d'ordonner une expertise requise par une partie pour établir l'équivalence entre les différentes fonctions d'une même entreprise ne satisfait en principe pas à son devoir d'examen (c. 4).
Art. 5 al. 2, 1ère phrase LAVS ; art. 7 let. c RAVS
Assujettissement aux cotisations des options de collaborateurs. Par analogie avec la pratique en vigueur depuis le mois de mai 2003 en matière de taxation fiscale – du revenu – les options de collaborateurs incluant une clause de blocage sont soumises à cotisations à partir du moment où le droit qu'elles confèrent a été effectivement exercé. Ni le moment de leur attribution, ni le terme de la période de blocage ne sont décisifs. Dans la mesure où le ch. 2022.2 de la Directive sur le salaire déterminant (DSD) déroge aux principes qui précèdent, son contenu s'avère contraire à la loi (c. 4 et 5).
Créance de salaire selon la Convention nationale pour le secteur principal de la construction en Suisse (CN) ; accord individuel dérogatoire sur la question du salaire afférent aux vacances pour travailleurs payés à l'heure (art. 329d al. 1 et art. 357 al. 2 CO, art. 34 CN). Pour juger de l'admissibilité d'un accord individuel dérogeant à la CN sur la question du salaire afférent aux vacances, il ne faut pas comparer le salaire global, mais confronter les indemnités de vacances mensuelles selon la Convention nationale avec celles prévues dans le contrat individuel de travail (c. 3.2.4.3). Comparaison de l'indemnité de vacances d'après le contrat individuel de travail avec celle qui résulte de l'art. 329d al. 1 CO (c. 3.2.4.4).
Transfert des rapports de travail en cas de scission d'une société; plan social. Le transfert d'une partie d'entreprise, consécutif à la scission de la société-mère, tombe sous le coup de l'art. 333 al. 1 CO (c. 4.1). Le transfert des rapports de travail, prévu par cette disposition, ne peut pas être exclu par voie de convention dérogatoire (c. 4.2), ni par le biais d'un contrat de location de services (c. 5). Nature juridique d'un plan social (c. 6.1). La responsabilité solidaire instituée par l'art. 333 al. 3 CO vise aussi les créances découlant d'un plan social établi par l'ancien employeur en faveur du travailleur (c. 6.2). Précisions concernant le calcul des prestations auxquelles le demandeur peut prétendre sur la base du plan social en cause (c. 7).