Art. 23 LPP et 53e LPP
Alors qu’elle était affiliée pour la prévoyance professionnelle auprès de la Fondation B., C. tombe en incapacité totale de travail qui donne lieu à une décision de l’Office de l’assurance-invalidité du 13 janvier 2012, lui reconnaissant le droit à une rente entière d’invalidité assortie de rente pour enfant du 1er juin 2011 au 31 mars 2011, puis dès le 1er décembre 2011, des mesures d’ordre professionnel ayant été allouées du 28 mars au 25 décembre 2011. Le 1er janvier 2009, un groupe de salariés, dont C. faisait partie, a été repris par la société dont la Fondation A. était l’institution de prévoyance. Dans le cadre de cette reprise, ces deux fondations ont conclu une convention, signée en juin et juillet 2009, prévoyant le transfert de toutes les obligations en matière de pensions et de tous les actifs, ce transfert étant soumis à la condition d’un accord entre les fondations en ce qui concerne les pensions en cours. Les deux fondations contestant leur obligation de verser les prestations d’invalidité à C., la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice genevoise a condamné chacune des institutions de prévoyance à verser un pourcentage des rentes d’invalidité dues à C.
La qualité de bénéficiaire de C. n’est pas contestée.
Le TF a retenu que la juridiction cantonale n’était pas en droit de se fonder sur la convention de juin/juillet 2009 pour examiner laquelle des deux institutions de prévoyance en cause était tenue d’allouer une rente de prévoyance obligatoire et plus étendue à C. La délimitation des responsabilités entre institutions de prévoyance quant à l’octroi de prestations à l’ayant-droit n’est en effet pas à la libre disposition de celles-ci et ne dépend pas d’une convention qu’elles auraient conclue, mais découle de la loi et, en cas de prévoyance plus étendue, du règlement de prévoyance et des statuts applicables. Le TF rappelle sa jurisprudence constante selon laquelle l’art. 23 LPP sert à délimiter les responsabilités entre institutions de prévoyance lorsque le travailleur, déjà atteint dans sa santé et dans une mesure propre à influer sur sa capacité de travail, entre au service d’un nouvel employeur en changeant en même temps d’institution de prévoyance et bénéficie, ultérieurement, d’une rente de l’assurance-invalidité. Il découle de cette disposition que l’obligation de prester incombe à une seule institution de prévoyance (sous réserve des cas où un salarié est soumis à plusieurs rapports de travail en même temps) et ne peut pas être répartie entre plusieurs institutions de prévoyance auxquelles le salarié aurait été successivement affilié. Deux institutions de prévoyance ne peuvent pas être tenues simultanément de verser des prestations de la prévoyance obligatoire à un assuré pour le même cas d’assurance.
Cette cause relevant d’une liquidation partielle de la Fondation B., ce que les parties ne contestaient pas, le TF rappelle que la résiliation du contrat d’affiliation est alors régie par l’art. 53e LPP, qui s’applique également à la prévoyance plus étendue (art. 49 al. 2 ch. 12 LPP). Selon l’alinéa 6 de l’art. 53e LPP, si les rentiers restent affiliés à l’institution de prévoyance, le contrat d’affiliation concernant les rentiers est maintenu ; cette règle s’applique aussi aux cas d’invalidité déclarés après la résiliation du contrat d’affiliation lorsque l’incapacité de travail dont la cause est à l’origine de l’invalidité est survenue avant la résiliation du contrat d’affiliation. L’incapacité de travail déterminante au sens de cette disposition correspond à celle de l’art. 23 LPP. Le TF constate que le jugement entrepris ne contient aucune considération sur la notion d’invalidité prévue par le règlement de prévoyance applicable au cas d’espèce, ni de constatation de fait relative à l’incapacité de travail déterminante au sens de l’art. 23 LPP. Le jugement cantonal ne comprend pas non plus des considérations sur le sort des rentiers au moment de la résiliation du contrat d’affiliation concernant les employés qui ont changé d’employeur, au regard de l’application éventuelle de l’art. 53e LPP. La cause est donc renvoyée aux premiers juges pour compléter les faits et appliquer les règles légales et réglementaires pertinentes afin de déterminer laquelle des deux institutions de prévoyance est tenue de verser les prestations de rente à C., l’octroi simultané de celles-ci par les deux fondations recourantes n’étant pas possible.
Corinne Monnard Séchaud, avocate à Lausanne