(Mokgadi Caster Semenya c. International Association of Athletics Federation [IAAF] et Athletics South Africa [fédération sudafricaine d’athlétisme, membre de l’IAAF]) ; ordonnance sur mesures provisionnelles et demande d’effet suspensif dans le cadre du recours contre la sentence rendue le 30 avril 2019 par le TAS (procédure d’arbitrage ordinaire) ; simultanément au dépôt du recours contre la sentence du TAS, la recourante a demandé l’effet suspensif et requis des mesures superprovisionnelles urgentes. Statuant à titre superprovisionnel (ordonnance du 31 mai 2019), le Tribunal fédéral avait accepté la demande de la recourante et ordonné à l’IAAF de suspendre immédiatement l’application du règlement litigieux (à savoir le « Règlement régissant la qualification dans la catégorie féminine – pour les athlètes présentant des différences du développement sexuel », abrégé dans l’arrêt « Règlement DDS ») à son égard. Statuant présentement à titre provisionnel, le Tribunal fédéral rappelle qu’en principe le recours en matière civile n’est pas assorti d’effet suspensif (art. 103 al. 1 LTF). Le juge instructeur peut toutefois, d’office ou sur requête d’une partie, statuer différemment sur l’effet suspensif (art. 103 al. 3 LTF) ou ordonner d’autres mesures provisionnelles (art. 104 LTF). Ce faisant, le juge doit effectuer une pesée des intérêts et se demander, en particulier, si la décision attaquée est de nature à entraîner un préjudice irréparable pour la partie recourante, mais aussi prendre en considération, dans la mesure du possible à ce stade, les chances de succès du recours. Le Tribunal fédéral rappelle que, selon sa pratique « stricte », l’effet suspensif, de même que toute autre mesure provisionnelle, ne peut être accordé que si, prima facie, « le recours apparaît très vraisemblablement fondé » (consid. 1). L’athlète fait valoir, dans son mémoire de recours, que la sentence du TAS est contraire à l’ordre public matériel à un double titre. Premièrement, la recourante dénonce le fait que la sentence attaquée constitue une violation de l’interdiction de discrimination. Deuxièmement, elle se plaint de la violation injustifiée de ses droits de la personnalité et de sa dignité humaine (notamment en s’appuyant sur la CEDH). Sur le premier des deux arguments, le Tribunal fédéral relève qu’« il est douteux » que l’interdiction de discrimination entre dans le champ d’application de la notion d’ordre public (matériel) au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. Même à vouloir l’admettre, le grief n’apparait pas « très vraisemblablement fondé », compte tenu de l’examen approfondi effectué dans la sentence par la Formation arbitrale, qui avait jugé que le règlement litigieux crée certes une « différenciation fondée sur le sexe légal et les caractéristiques biologiques innées », mais que cette mesure était néanmoins justifiée, à savoir nécessaire, raisonnable et proportionnée (consid. 3.1). Quant au deuxième argument de la recourante, le Tribunal fédéral rappelle qu’il a déjà jugé que la CEDH ne s’applique pas directement à l’arbitrage (TF 4A_178/2014). De plus, l’argumentation de la recourante n’emporte pas la conviction du Tribunal fédéral quant au caractère « très vraisemblablement fondé » de la violation alléguée (consid. 3.2). De même, aux yeux du Tribunal fédéral, il n’apparaît pas de façon évidente que la situation de la recourante soit comparable à celle du footballeur brésilien Matuzalem (ATF 138 III 322) (consid. 3.2 in fine). Requête rejetée.
Antonio Rigozzi, Riccardo Coppa