(A.A. c. B.A.). Recours contre la décision rendue le 15 octobre 2020 par un Tribunal arbitral avec siège à Zurich. Convention conclue entre un père et ses fils, régissant le rachat et l’entretien d’une maison familiale. Clause d’arbitrage prévoyant que l’avocat G., qui avait conseillé les parties lors l’élaboration de la convention, agirait en tant qu’arbitre en cas de différend entre elles, et que, si G. devait être empêché d’assumer cette fonction, son « successeur de bureau » (Büronachfolger) le remplacerait. Un litige survint entre deux des fils (A.A. et B.A.), et B.A. fit appel à G. pour qu’il se prononce en tant qu’arbitre. G. déclara accepter son mandat d’arbitre et nomma Me H. secrétaire du Tribunal. A.A. déposa une demande de récusation à l’encontre de G. auprès de l’Obergericht du Canton Aargau, qui, par décision en date du 20 août 2020, lui donna raison. Récusé, l’arbitre G. informa les parties que son successeur au bureau était Me H. et qu’il lui avait transmis les actes de l’arbitrage. Sur ce, A.A. écrivit en septembre 2020 à H. qu’il n’était pas compétent pour assumer le mandat d’arbitre, qu’il devait retourner les actes de procédure à G., et en détruire toute copie en sa possession. Selon A.A., comme G. était toujours en activité et restait titulaire de son bureau d’avocat, il n’existait pas de « successeur de bureau » qui pouvait reprendre son mandat d’arbitre au sens de la clause d’arbitrage. Le 15 octobre 2020, H. rendit une décision dans laquelle il se constituait en tant qu’arbitre unique et rejetait l’exception d’incompétence soulevée par A.A. Dans son recours au TF, A.A. demande en premier lieu que H. soit déclaré incompétent. Selon lui, il était apparent que son écriture de septembre 2020 ne faisait que signaler qu’il pourrait ultérieurement soulever une exception d’incompétence, qui serait alors formulée en bonne et due forme, mais que, au moment où il avait rédigé cette écriture, A.A. pensait encore que H. n’allait pas assumer le mandat d’arbitre, ou à tout le moins qu’il commencerait par donner l’opportunité aux parties de se prononcer sur la question de sa compétence, avant d’entreprendre toute autre démarche dans la procédure. De plus, A.A. affirme que H. n’avait aucunement démontré être le successeur au bureau de G. au sens de la clause arbitrale, et qu’il était prévenu et ne pouvait pas être considéré indépendant des parties, ayant préalablement agi comme secrétaire du Tribunal aux côtés de l’arbitre G. récusé (consid. 3). Dans ses observations sur le recours, H. affirme qu’il n’avait pas considéré l’écriture de A.A. comme faisant état d’une exception d’incompétence, qu’il ne l’avait donc pas traitée comme telle, et que A.A., qui était assisté d’un avocat, aurait dû attirer son attention sur cette erreur immédiatement après sa décision du 15 octobre 2020. Le TF retient que la décision du 15 octobre 2020 est bel et bien une décision incidente tranchant une contestation au sujet de la compétence et de la régularité de la constitution du Tribunal au sens de l’art. 359 al. 1 CPC (consid. 5.3). En définitive, par cette décision l’arbitre avait déterminé que le fait que l’arbitre G. était encore actif à l’époque de sa récusation n’excluait pas que H. puisse être considéré comme son « successeur de bureau » au sens de la clause d’arbitrage, et que la récusation de l’arbitre G. constituait bien un empêchement propre à provoquer la mise en œuvre du mécanisme de remplacement de l’arbitre G. par son « successeur de bureau », selon les prévisions de cette même clause. Cela étant, devant le TF, A.A. conteste non seulement la compétence mais également l’indépendance de H. Selon l’art. 367 al. 1 CPC un arbitre peut être récusé, entre autres motifs, s’il n’a pas les qualifications convenues entre les parties ou en cas de doutes légitimes quant à son indépendance ou impartialité. L’art. 369 al. 2 CPC prévoit que si les parties n’ont pas convenu d’une procédure particulière à cet effet, et si l’arbitrage est toujours pendant, la demande de récusation, écrite et motivée, doit être adressée à l’arbitre concerné dans les 30 jours à compter de la découverte du motif de récusation. Dans les 30 jours suivant la notification à l’arbitre, la partie requérante peut demander à l’organe désigné par les parties ou, à défaut d’un tel organe, à l’autorité judiciaire compétente, de statuer sur la demande de récusation. La décision de l’organe désigné ou de l’autorité compétente ne peut ensuite être revue « qu’à la faveur d’un recours contre la première sentence attaquable » rendue par l’arbitre contesté. Ainsi, tant que l’arbitrage est pendant, une contestation de la régularité de la composition du Tribunal au motif d’un défaut d’indépendance ne peut pas être soulevée directement devant le TF dans un recours contre une décision arbitrale incidente. Le recours de A.A., qui n’a pas démontré avoir déposé une demande de récusation à l’encontre de H. devant l’autorité compétente (ni que les parties avaient convenu de suivre une procédure autre que celle prévue aux art. 367 CPC en cas de récusation), doit donc être déclaré irrecevable dans la mesure où il repose sur un défaut d’indépendance allégué de H. (consid. 6.2.2). Par ailleurs, la clause arbitrale litigieuse, interprétée à la lumière du principe de la bonne foi, ne se révèle pas être pathologique et la constitution du Tribunal arbitral au moment où la décision litigieuse a été rendue n’apparaît pas avoir été irrégulière, sous réserve du ou des motifs de récusation qui auraient dû être portés devant l’autorité compétente (consid. 8). Voir également le consid. 7 de cet arrêt résumé en relation avec l’art. 393 let. d CPC.