(A. AG [bailleur de bien-fonds] c. B. [société exploitant les bains thermaux sur ces biens-fonds]). Recours contre la sentence finale rendue par un arbitre unique le 7 avril 2020 sous l’égide de la Swiss Chambers’ Arbitration Institution. Accords et conventions bilatérales conclus d’une part entre A. (bailleur) et C. (filiale d’un groupe français et locataire), à laquelle B. (société détenue par C.) avait succédé par la suite, et d’autre part entre A. et G. (pour l’obtention d’un crédit de financement), en vue de la rénovation et exploitation d’un complexe thermal situé en Suisse. Les accords conclus entre A. et C. prévoyaient une clé de répartition des subsides qui seraient perçus des communes environnantes, en contrepartie de la mise à disposition de certains bassins pour dispenser des cours de natation à leurs écoliers. Dans une lettre annexée à l’un de leurs contrats, A. et C. avaient estimé que les subsides perçus annuellement à ce titre « se monter[aient] à un minimum de CHF 600’000 ». B. avait initié l’arbitrage pour réclamer à A. le paiement de sa part des subsides qui avaient été versés à celle-ci par la commune de U. entre mars 2017 et mars 2020. Dans sa sentence, l’arbitre unique avait entièrement fait droit aux conclusions de B. L’arbitre avait notamment considéré, sur la base d’une interprétation normative, que A. et B. entendaient se répartir par moitié les subsides reçus, quel que soit le montant de ces subsides. La recourante reproche à l’arbitre unique d’avoir versé dans l’arbitraire, en commettant des « erreurs de lecture » ou en omettant de tenir compte d’éléments au dossier qui selon elle dictaient une solution différente. Contrairement à ce que prétend la recourante, l’arbitre n’a pas ignoré les faits et pièces mis en exergue par elle, mais il a considéré, sur la base des preuves administrées dans l’arbitrage, que les parties n’avaient pas entendu modifier la clé de répartition des subsides dans l’hypothèse où ceux-ci n’atteindraient pas le montant escompté de CHF 600’000 par an. La conclusion à laquelle l’arbitre a abouti n’est pas manifestement réfutée par les pièces citées par la recourante. En réalité, celle-ci tente de remettre en question l’appréciation des preuves opérée par l’arbitre, ce qui n’est pas admissible dans le cadre d’un recours en annulation dirigé contre une sentence arbitrale (consid. 6.1). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(B. AG [société suisse de négoce, courtage et extraction de matières premières] c. A. AG [société suisse d’extraction et transformation de matières premières]). Recours contre la sentence rendue le 22 mai 2020 par un Tribunal arbitral siégeant à Zurich sous l’égide de la Chambre de commerce de Zurich. Litige né de contrats pour la vente et la livraison de cuivre. Dans ses arrêts du 19 novembre 2014 (4A_190/2014 ; résumé dans l’édition 2014-2015 de ce recueil) et 11 avril 2016 (4A_426/2015 ; résumé dans l’édition 2015-2016 de ce recueil), le TF avait annulé les deux sentences finales précédemment rendues dans cette affaire par le même Tribunal arbitral. Dans le premier cas, le TF avait considéré que le Tribunal avait violé l’interdiction de l’arbitraire en rendant une sentence dont la motivation était manifestement insuffisante et reposait sur un raisonnement contradictoire. Dans le deuxième cas, le TF avait constaté que le Tribunal arbitral avait rendu une décision pratiquement identique à la première, violant par-là son obligation de statuer dans le sens des considérants de l’arrêt par lequel le TF lui avait renvoyé la première sentence (art. 395 al. 2 CPC), ce qui entraînait une nouvelle annulation de la sentence pour violation de l’arbitraire. L’arrêt ici résumé se prononce sur le recours formé par B. contre la troisième sentence du Tribunal arbitral. La recourante reproche au Tribunal d’avoir encore une fois rendu une sentence arbitraire, en manquant à nouveau de se conformer aux considérants des arrêts de renvoi du TF. Dans cette troisième sentence, le Tribunal arbitral a développé son raisonnement juridique au sujet de la qualification et des conséquences de la résiliation des contrats litigieux par B., notamment en articulant plus en détail son analyse du contexte entourant cette résiliation, et en rattachant la conduite de B., dont il avait jugé qu’elle était abusive, à la catégorie plus précisément définie des cas comportant une disproportion grossière des intérêts en présence (consid. 3.3-3.4). Contrairement à ce que prétend la recourante, le raisonnement du Tribunal arbitral dans cette troisième sentence résiste à l’examen sous l’angle de l’arbitraire (consid. 4). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. ; B. ; C. ; les héritiers de feu D, à savoir : D1. à D5. ; les héritiers de feu E., à savoir : E1. à E3. [recourants] c. F. ; G. (intimés), et S. & Cie SA ; 2. à 11., 12a. à 12d., 16. à 26. [parties intéressées]). Recours contre la sentence arbitrale du 30 septembre 2019 rendue par un Tribunal arbitral ad hoc avec siège à Genève. Convention d’arbitrage contenue dans un Acte d’association conclu en 1982 (AA 1982) entre les associés-gérants d’une banque privée (Banque H.), stipulant les conditions convenues pour maintenir la présence dans le collège d’au moins un représentant de la branche genevoise de la famille du fondateur de la banque. Plusieurs autres actes d’association avaient été conclus après l’AA 1982, au fil des ans et au gré des entrées et sorties des associés gérants, soit en 1986, 1987 et 1988. Ces AA subséquents contenaient (pour les deux derniers, par renvoi) la même convention d’arbitrage que l’AA 1982 (consid. A). En décembre 2016, F. et G., membres de la branche genevoise et descendants d’un des signataires de l’AA 1982, qui n’avaient pas été admis comme membres du collège des associés, avaient déposé une demande d’arbitrage à l’encontre de 31 défendeurs (comprenant notamment le successeur légal et de nombreux associés présents et passés de la banque), sur la base de la clause compromissoire contenue dans un projet de l’AA 1982 qu’ils avaient découvert en 1999, après le décès de leur aïeul. Sur le fond, F. et G. réclamaient le paiement d’un montant en francs suisses à déterminer par les arbitres, à titre de dédommagement pour le traitement inéquitable et injuste que les défendeurs leur avaient réservé. Les défendeurs, qui avaient produit les AA de 1986, 1987 et 1988 seulement en cours de procédure, avaient contesté la compétence du Tribunal arbitral au motif que la clause d’arbitrage se trouvait dans un acte n’ayant été signé ni par les demandeurs ni par la plupart des défendeurs. Les recourants soutenaient également que les accords conclus entre les associés-gérants de 1982 n’avaient pas été repris dans le cadre des modifications subies ultérieurement par la banque, qui avait entretemps été fusionnée avec une autre banque et dissoute, puis fusionnée avec une troisième banque, avant d’être transformée, en 2014, en société anonyme (S. & Cie). Dans sa sentence du 30 septembre 2019, le Tribunal arbitral s’était déclaré compétent à l’égard des deux demandeurs et de cinq des 31 défendeurs. En bref, le Tribunal avait retenu que la convention d’arbitrage dans l’AA 1982 liait à la fois les demandeurs (non-signataires de l’AA 1982) et les cinq défendeurs qui avaient souscrit (ou consenti) à l’AA 1982 et dont les obligations avaient survécu à la dissolution de la Banque H. (consid. B.). En vertu du principe de la relativité des obligations contractuelles, la convention d’arbitrage incluse dans un contrat ne lie en principe que les cocontractants. Toutefois, la jurisprudence recense diverses hypothèses pouvant conduire à ce qu’une convention d’arbitrage oblige des personnes qui ne l’ont pas signée ou n’y sont pas mentionnées. Il est notamment admis que, sauf convention contraire, le bénéficiaire d’une stipulation pour autrui parfaite au sens de l’art. 112 al. 2 CO peut déposer une requête d’arbitrage puisqu’il acquiert, vis-à-vis du débiteur (ou promettant), une créance avec tous les droits de préférence et autres droits accessoires rattachés à celle-ci, y compris la clause compromissoire (consid. 3.1). L’article 5 de l’AA 1982 (repris dans les AA 1986, 1987 et 1988) disposait que « les associés autres que ceux de la branche genevoise… s’engage[aient] à maintenir celle-ci dans l’Association en acceptant comme associés, pour autant qu’ils les en jugent dignes et capables, les descendants de […] » et que « [c]ette règle sera[it] notamment observée pour […], F. et G. […], pour autant qu’il [l’eussent souhaité] ». Le Tribunal avait retenu que l’article 5 était une stipulation pour autrui parfaite et irrévocable, ce qui avait notamment pour conséquence que F. et G. avaient le droit d’invoquer la convention d’arbitrage contenue dans les différents AA, même si cette stipulation ne leur conférait pas nécessairement le droit de devenir associés – question de fond qu’il reviendrait au Tribunal de résoudre dans une phase ultérieure de l’arbitrage. Le TF souscrit à la conclusion du Tribunal selon laquelle sa compétence est fondée sur la stipulation pour autrui parfaite dont F. et G. étaient bénéficiaires en vertu des AA. En revanche, le TF considère que le Tribunal arbitral ne peut être suivi lorsqu’il considère que cette stipulation était irrévocable. A cet égard, les défendeurs recourants se plaignent à raison de la violation de la règle supplétive sur le complètement des lacunes des contrats prévu à l’art. 112 al. 3 CO. Selon cette règle, que le Tribunal n’a pas appliquée, une stipulation pour autrui parfaite peut être révoquée ou modifiée aussi longtemps que les bénéficiaires n’ont pas fait valoir leur droit. Etant donné que les parties n’avaient rien prévu dans les AA concernant la révocabilité/irrévocabilité de la stipulation de l’article 5, le Tribunal aurait dû appliquer l’art. 112 al. 3 CO au lieu de rechercher d’emblée la (pseudo) volonté hypothétique des parties sur ce point (consid. 6.3). Les recourants ont également raison lorsqu’ils reprochent au Tribunal d’avoir retenu, sans fondement juridique valable, que l’AA de 1982 avait subsisté à côté des AA subséquents et liait donc toujours ses signataires, en plus des adhérents aux AA subséquents. Il faut bien plutôt retenir que l’AA de 1982 avait été abrogé et remplacé, tour à tour, par les AA 1986, 1987 et 1988, avec la conséquence que la portée subjective de la convention d’arbitrage figurant dans ces AA a pu varier dans le temps. De ce fait, le Tribunal arbitral est compétent seulement vis-à-vis des parties liées par l’AA 1988, soit les deux demandeurs (en tant que bénéficiaires de l’article 5 de l’AA) et les défendeurs signataires de cet AA, soit B., E., A. et C. Le Tribunal n’était pas compétent à l’égard du défendeur D. qui avait quitté le collège des associés avant la conclusion de l’AA 1988, et n’en était pas signataire. Recours partiellement admis ; sentence partiellement annulée, le point (ii) de son dispositif étant réformé en ce qui concerne l’étendue de la compétence ratione personae du Tribunal arbitral.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A.A. c. B.A.). Recours contre la décision rendue le 15 octobre 2020 par un Tribunal arbitral avec siège à Zurich. Convention conclue entre un père et ses fils, régissant le rachat et l’entretien d’une maison familiale. Clause d’arbitrage prévoyant que l’avocat G., qui avait conseillé les parties lors l’élaboration de la convention, agirait en tant qu’arbitre en cas de différend entre elles, et que, si G. devait être empêché d’assumer cette fonction, son « successeur de bureau » (Büronachfolger) le remplacerait. Un litige survint entre deux des fils (A.A. et B.A.), et B.A. fit appel à G. pour qu’il se prononce en tant qu’arbitre. G. déclara accepter son mandat d’arbitre et nomma Me H. secrétaire du Tribunal. A.A. déposa une demande de récusation à l’encontre de G. auprès de l’Obergericht du Canton Aargau, qui, par décision en date du 20 août 2020, lui donna raison. Récusé, l’arbitre G. informa les parties que son successeur au bureau était Me H. et qu’il lui avait transmis les actes de l’arbitrage. Sur ce, A.A. écrivit en septembre 2020 à H. qu’il n’était pas compétent pour assumer le mandat d’arbitre, qu’il devait retourner les actes de procédure à G., et en détruire toute copie en sa possession. Selon A.A., comme G. était toujours en activité et restait titulaire de son bureau d’avocat, il n’existait pas de « successeur de bureau » qui pouvait reprendre son mandat d’arbitre au sens de la clause d’arbitrage. Le 15 octobre 2020, H. rendit une décision dans laquelle il se constituait en tant qu’arbitre unique et rejetait l’exception d’incompétence soulevée par A.A. Dans son recours au TF, A.A. demande en premier lieu que H. soit déclaré incompétent. Selon lui, il était apparent que son écriture de septembre 2020 ne faisait que signaler qu’il pourrait ultérieurement soulever une exception d’incompétence, qui serait alors formulée en bonne et due forme, mais que, au moment où il avait rédigé cette écriture, A.A. pensait encore que H. n’allait pas assumer le mandat d’arbitre, ou à tout le moins qu’il commencerait par donner l’opportunité aux parties de se prononcer sur la question de sa compétence, avant d’entreprendre toute autre démarche dans la procédure. De plus, A.A. affirme que H. n’avait aucunement démontré être le successeur au bureau de G. au sens de la clause arbitrale, et qu’il était prévenu et ne pouvait pas être considéré indépendant des parties, ayant préalablement agi comme secrétaire du Tribunal aux côtés de l’arbitre G. récusé (consid. 3). Dans ses observations sur le recours, H. affirme qu’il n’avait pas considéré l’écriture de A.A. comme faisant état d’une exception d’incompétence, qu’il ne l’avait donc pas traitée comme telle, et que A.A., qui était assisté d’un avocat, aurait dû attirer son attention sur cette erreur immédiatement après sa décision du 15 octobre 2020. Le TF retient que la décision du 15 octobre 2020 est bel et bien une décision incidente tranchant une contestation au sujet de la compétence et de la régularité de la constitution du Tribunal au sens de l’art. 359 al. 1 CPC (consid. 5.3). En définitive, par cette décision l’arbitre avait déterminé que le fait que l’arbitre G. était encore actif à l’époque de sa récusation n’excluait pas que H. puisse être considéré comme son « successeur de bureau » au sens de la clause d’arbitrage, et que la récusation de l’arbitre G. constituait bien un empêchement propre à provoquer la mise en œuvre du mécanisme de remplacement de l’arbitre G. par son « successeur de bureau », selon les prévisions de cette même clause. Cela étant, devant le TF, A.A. conteste non seulement la compétence mais également l’indépendance de H. Selon l’art. 367 al. 1 CPC un arbitre peut être récusé, entre autres motifs, s’il n’a pas les qualifications convenues entre les parties ou en cas de doutes légitimes quant à son indépendance ou impartialité. L’art. 369 al. 2 CPC prévoit que si les parties n’ont pas convenu d’une procédure particulière à cet effet, et si l’arbitrage est toujours pendant, la demande de récusation, écrite et motivée, doit être adressée à l’arbitre concerné dans les 30 jours à compter de la découverte du motif de récusation. Dans les 30 jours suivant la notification à l’arbitre, la partie requérante peut demander à l’organe désigné par les parties ou, à défaut d’un tel organe, à l’autorité judiciaire compétente, de statuer sur la demande de récusation. La décision de l’organe désigné ou de l’autorité compétente ne peut ensuite être revue « qu’à la faveur d’un recours contre la première sentence attaquable » rendue par l’arbitre contesté. Ainsi, tant que l’arbitrage est pendant, une contestation de la régularité de la composition du Tribunal au motif d’un défaut d’indépendance ne peut pas être soulevée directement devant le TF dans un recours contre une décision arbitrale incidente. Le recours de A.A., qui n’a pas démontré avoir déposé une demande de récusation à l’encontre de H. devant l’autorité compétente (ni que les parties avaient convenu de suivre une procédure autre que celle prévue aux art. 367 CPC en cas de récusation), doit donc être déclaré irrecevable dans la mesure où il repose sur un défaut d’indépendance allégué de H. (consid. 6.2.2). Par ailleurs, la clause arbitrale litigieuse, interprétée à la lumière du principe de la bonne foi, ne se révèle pas être pathologique et la constitution du Tribunal arbitral au moment où la décision litigieuse a été rendue n’apparaît pas avoir été irrégulière, sous réserve du ou des motifs de récusation qui auraient dû être portés devant l’autorité compétente (consid. 8). Voir également le consid. 7 de cet arrêt résumé en relation avec l’art. 393 let. d CPC.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A.A. c. B.A.). Recours contre la décision rendue le 15 octobre 2020 par un Tribunal arbitral avec siège à Zurich. Récapitulatif des faits présentés ci-dessus, avant le résumé des considérants en lien avec l’art. 393 let. b CPC. Force est de constater que l’arbitre admet, de fait, avoir violé le droit d’être entendu de A.A. puisque, après avoir rendu sa décision rejetant l’exception d’incompétence d’A.A. en octobre 2020, il affirme à présent devant le TF que A.A. aurait dû attirer son attention sur le fait que son écriture de septembre 2020 comportait une exception d’incompétence (consid. 7.1). Le droit d’être entendu est une garantie fondamentale de caractère formel, dont la violation entraîne en principe l’annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond. Cela étant, le droit d’être entendu n’est pas une fin en soi : lorsque la partie recourante ne parvient pas à démontrer que la violation de son droit d’être entendue a eu un quelconque effet concret sur la procédure, il n’y a pas lieu d’annuler la décision. Le recours de A.A. se révèle être en partie insuffisamment motivé sur ce grief, et en partie fondé sur des arguments qui n’avaient pas été soulevés devant l’arbitre (consid. 7). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. AG [locataire du bien-fonds sur la base d’un contrat de bail à construction] c. B. AG[propriétaire du terrain du contrat de bail à construction]). Recours contre la décision de clôture rendue le 17 février 2020 par un Tribunal arbitral statuant en application de la St. Galler Schiedsordnung (SGSO). Dans la procédure arbitrale, le Tribunal avait rendu plusieurs décisions, conduit une inspection oculaire du site en question, et tenu une audience au cours de laquelle il avait proposé une solution transactionnelle au litige, que les parties n’avaient pas adoptée. Peu après l’audience, les parties avaient transigé, retiré leurs demandes respectives, et demandé au Tribunal de clore la procédure et rendre une décision sur le montant et l’allocation des frais de l’arbitrage, dont les parties avaient convenu que chacune d’entre elles supporterait la part correspondant à ses demandes. Dans sa décision de clôture, le Tribunal avait fixé ses frais et honoraires et les frais administratifs de la procédure à CHF 58’000 et CHF 2’000 respectivement, et avait alloué ces montants de manière proportionnée à la valeur des demandes principales et reconventionnelle présentées par les parties. La recourante demande au TF d’annuler le point du dispositif fixant les montants des frais de l’arbitrage, montants qu’elle considère manifestement excessifs au sens de l’art. 393 let. f CPC, et de fixer les frais et honoraires des arbitres à CHF 25’000 et les frais administratifs à CHF 400.40, en application du règlement SGSO. Le TF observe que lorsque les parties se sont soumises à un règlement d’arbitrage prévoyant un barème pour les frais et honoraires des arbitres et frais de l’arbitrage, et que, comme en l’espèce, les parties n’ont pas conclu d’accord spécifique modifiant ce barème, l’examen du caractère excessif ou non des honoraires et frais fixés par les arbitres doit être effectué par référence aux prévisions du barème (consid. 3). Il n’est pas contesté que la valeur litigieuse de l’affaire était de CHF 50’000, ce qui la plaçait dans la fourchette « jusqu’à CHF 250’000 » dans le barème SGSO. Ce dernier prévoit que les frais et honoraires d’un tribunal de 3 membres peuvent aller, dans ce cas, d’un minimum de CHF 25’000 à un maximum de CHF 75’000. Le barème prévoit également des ajustements en cas de transaction en cours de procédure ou de décision rendue sans les motifs (réduction de 25% du montant honoraires et frais), ainsi que la prise en compte de facteurs de majoration, lorsque l’affaire exige des étapes procédurales particulières ou est spécialement complexe. Le Tribunal arbitral souligne que la valeur litigieuse n’est pas le seul élément pertinent pour la détermination des honoraires des arbitres. Ses frais et honoraires, fixés à CHF 60’000 se situent à l’intérieur de la fourchette prévue par le règlement et sont justifiés, eu égard aux actes procédure accomplis et compte tenu de la complexité de l’affaire (consid. 2.3). Le TF retient qu’il est possible que l’application cumulée de la réduction consécutive à une transaction et des facteurs justifiant une augmentation des frais et honoraires puisse résulter en un montant supérieur au maximum prévu par le barème pour la valeur litigieuse en question. Ici, le montant maximal selon le barème serait, compte tenu de la transaction, de CHF 56’250 (75% de CHF 75’000) ; le Tribunal a donc excédé ce maximum en fixant ses frais honoraires à CHF 58’000, et il faut examiner si ce dépassement est justifié en l’espèce. Selon le TF, les décisions et mesures procédurales dont le Tribunal a considéré qu’elles justifiaient une augmentation du montant maximum de ses honoraires pour cette affaire n’ont rien d’exceptionnel et ne peuvent donc pas fonder une telle augmentation (consid. 4.3). Dès lors, le montant des frais et honoraires fixé par le Tribunal est excessif et le dispositif correspondant dans sa décision doit être annulé (consid. 4.5). Lorsqu’il admet un recours pour le grief de l’art. 393 let. f CPC, le TF peut réformer la décision des arbitres et fixer lui-même le montant de leurs frais et honoraires, à condition de disposer des faits et informations nécessaires. Tel n’est pas le cas ici ; la cause doit donc être renvoyée au Tribunal arbitral pour qu’il reconsidère sa décision et prenne le soin de calculer ses frais et honoraires en conformité avec les critères prévus par la SGSO. Dans ce contexte, la valeur litigieuse, en tant qu’elle reflète l’importance et portée de l’affaire, doit être prise en compte, et les arbitres doivent s’assurer que le temps qu’ils consacrent à la conduite de la procédure n’est pas disproportionné par rapport à cette valeur (consid. 5.2). Recours admis ; émoluments et dépens mis à la charge des arbitres.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. a
(A. AG [société suisse] c. B. [société turque]). Recours contre la sentence rendue le 13 mai 2019 par un tribunal arbitral ad hoc avec siège à Wollerau. Découverte par la recourante qu’une conversation téléphonique de quelques minutes avait eu lieu entre l’arbitre nommé par une partie et le conseil de cette partie, après confirmation de l’arbitre mais avant la nomination par les coarbitres d’un président et la constitution du tribunal arbitral. Les contacts unilatéraux entre une partie ou son représentant légal et un arbitre ne sont pas exclus dans tous les cas. Par exemple, il est d’usage et généralement permis de contacter un arbitre potentiel pour déterminer son aptitude et sa disponibilité ou pour discuter de la nomination d’un président du tribunal. En relation avec le cas de figure litigieux en l’espèce, les IBA Guidelines on Party Representation in International Arbitration de 2013 prévoient expressément, en leur chiffre 8, que : « (b) A Party Representative may communicate with a prospective or appointed Party-Nominated Arbitrator for the purpose of the selection of the Presiding Arbitrator ». La doctrine confirme également qu’il est largement admis que – sauf convention contraire – les deux coarbitres peuvent être en contact avec les parties qui les ont désignés en vue de choisir un président ; en revanche, les contacts unilatéraux ne sont généralement pas autorisés après la désignation du président. Enfin, le Canon III/B.2 du AAA Code of Ethics for Arbitrators in Commercial Disputes de 2004 confirme lui aussi que « [i]n an arbitration in which the two party-appointed arbitrators are expected to appoint the third arbitrator, each party-appointed arbitrator may consult with the party who appointed the arbitrator concerning the choice of the third arbitrator ». Il apparaît évident que le contact téléphonique entre le coarbitre Lazopoulos et la représentante de la demanderesse – qui, selon les explications fournies, concernait le droit applicable au fond, avait été convenu au préalable avec l’autre coarbitre et dont le président avait été informé par la suite – ait servi à choisir un président approprié, étant donné que la décision de nomination des deux coarbitres par le tribunal d’arrondissement de Höfe ne contenait aucune indication concernant l’élection de droit, et que cette question était de nature à influencer le choix du président. Ainsi, compte tenu des circonstances, il n’y a pas d’élément objectif qui puisse justifier des doutes quant à l’impartialité du coarbitre Lazopoulos (consid. 3.4). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. b
(A. A.S. [société de construction de droit turc] et B. [société de construction de droit iranien] c. C [société de droit iranien contrôlée par le ministère iranien des routes et du développement urbain] et D. [Banque d’Etat iranienne]). Recours contre la sentence rendue le 2 juillet 2019 par un tribunal arbitral avec siège à Genève. Cas d’un Accord Trilatéral (AT) entre une entreprise de construction étrangère d’une part, et une société et une banque contrôlées par l’Etat iranien d’autre part, portant sur la construction de 20’000 logements sociaux en Iran et contenant une convention d’arbitrage s’avérant être une copie presque identique de la clause de résolution des différends contenue dans le Traité bilatéral d’investissement entre la Turquie et la République islamique d’Iran de 1996. Absence de cohérence entre la convention d’arbitrage et le reste de l’AT (consid. 3.1). Sentence majoritaire concluant à l’incompétence du tribunal pour résoudre le litige entre les parties. Confirmation de la jurisprudence selon laquelle le Tribunal fédéral ne peut revoir les constatations de fait contenues dans la sentence, même dans le cadre d’un recours visant une décision sur compétence (consid. 3.2.3). Il découle de cette jurisprudence que, s’agissant de l’interprétation de la convention d’arbitrage, le Tribunal fédéral ne peut revoir que l’établissement de la volonté présumée des parties (interprétation dite objective ; question de droit) et non pas la constatation de leur volonté réelle (interprétation dite subjective ; question de fait). Ayant établi que les parties envisageaient deux types différents (et incompatibles) d’arbitrage pour résoudre les différends pouvant surgir de l’AT, la majorité du tribunal a conclu, sur le fondement d’une interprétation subjective de la clause d’arbitrage, à l’absence de volonté mutuelle et concordante des parties de recourir à l’arbitrage international. Le tribunal a correctement déduit de cette conclusion qu’il n’y avait pas lieu de procéder à une interprétation objective de la convention d’arbitrage. En effet, la divergence des vues des parties quant au mode de résolution des différends à adopter étant clairement établie, il eût été impossible que l’une ou l’autre d’entre elles puisse croire, de bonne foi, qu’un accord avait été trouvé à ce sujet (consid. 3.2.5). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. b
(A. SA [Société de droit suisse sise à Genève, créateur d’un concept de bars d’aéroport] c. Z. Ltd [Société de droit anglais sise à Londres, exploitant d’échoppes de nourriture et boissons dans les lieux de transport]). Recours contre la sentence finale rendue le 23 novembre 2018 par un tribunal arbitral siégeant à Genève. En matière d’arbitrage, la qualité de partie à la convention d’arbitrage et la légitimation active ou passive, qualité qui relève du fondement matériel de l’action, peuvent se chevaucher, car, contrairement aux juges, les arbitres tirent leur compétence de la convention des parties, souvent incorporée, en tant que clause de résolution des différends, dans le contrat dont découle l’obligation litigieuse. Déterminer si l’on peut déduire d’un contrat l’existence d’une obligation stipulée pour autrui et s’il est possible de prendre des conclusions en faveur d’un tiers sur la base d’une telle stipulation est une question de fond. Les arbitres sont compétents pour en connaître, du moment que les parties à l’arbitrage sont les signataires du contrat en question et que celui-ci inclut une clause soumettant à l’arbitrage toute controverse concernant le contrat, respectivement toute réclamation relative au contrat ou à sa violation. De même, lorsqu’une clause d’arbitrage couvre les litiges relatifs aux dommages-intérêts consécutifs à une violation contractuelle, il importe peu que le créancier fasse valoir son propre dommage ou celui d’un tiers : dans l’un et l’autre cas, ses conclusions entrent dans le champ d’une telle clause compromissoire (consid. 3.2). Dans le cas d’espèce, telle que formulée, la clause d’arbitrage permettait bel et bien aux arbitres de connaître de la question du dommage subi par un tiers non partie au contrat de licence contenant cette clause (consid. 3.4.2). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. b
(A. S.L [société espagnole sise à B. c. République bolivarienne du Venezuela]). Recours contre la sentence rendue le 20 mai 2019 par un tribunal arbitral avec siège à Genève. Notion d’investissement selon l’art. I(2) du Traité bilatéral d’investissement (TBI) Espagne-Venezuela. Statuant sur sa compétence, le tribunal s’est penché sur les objections ratione personae et ratione materiae soulevées par l’intimée et est parvenu à la conclusion que la recourante n’avait pas effectué un investissement propre à fonder sa compétence en vertu du TBI. Conformément à sa jurisprudence, le TF interprète le sens des termes « investisseur » et « investissement » dans un TBI conformément aux règles de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 (consid. 3.4.1). Ayant déjà eu l’occasion de constater qu’il n’existe pas de définition abstraite, définitive et unanimement acceptée de la notion d’investissement dans les traités internationaux de protection des investissements, le TF interprète cette notion de bonne foi, à partir du texte du traité examiné, suivant le sens ordinaire des termes pertinents, considérés dans leur contexte et à la lumière de l’objet et du but du traité (consid. 3.4.2.2). Se fondant sur une interprétation littérale de l’article I(2) TBI, le tribunal arbitral en a déduit la nécessité d’un acte d’investissement actif de la part de l’investisseur. Quand bien même les actions de la société D. S.A. constituaient un investissement, et même si la recourante remplissait les critères pour être considérée un investisseur au sens du TBI, le tribunal a tenu pour décisif le fait que les actions avaient été transférées à la recourante par des sociétés sises dans des pays tiers, dans le cadre d’une restructuration dont le but était précisément de bénéficier de la protection du TBI. Sur cette base, il a nié à la recourante la protection du TBI, en se déclarant incompétent pour statuer sur le litige qui lui a été soumis. Il est admis que les Etats parties aux TBIs disposent – et font régulièrement usage – de possibilités diverses d’exclure une telle pratique, connue sous l’appellation de « treaty shopping ». De nombreux TBI comportent, par exemple, des clauses dites de « denial of benefits » ou « origin of capital » qui servent précisément à cette fin. Or, le TBI en question ne contient aucune clause de ce genre, alors qu’elles étaient déjà courantes à l’époque de sa conclusion et que les deux pays signataires en ont fait usage dans d’autres traités. Force est donc de constater que les Etats contractants avaient renoncé en connaissance de cause à inclure une telle disposition limitative dans le TBI. Ainsi, c’est à tort que le tribunal arbitral a retenu l’existence d’un investissement actif comme condition d’application de ce traité. En réalité, rien ne permet de dégager du texte du TBI la volonté des Etats contractants d’exclure l’investissement en question de son champ d’application. Demeure réservée l’hypothèse de l’abus de droit, que le tribunal arbitral devra encore examiner dans le cadre des objections de l’intimée qu’il avait pu se dispenser de déterminer en déclinant sa compétence sur la base de cette interprétation erronée (consid. 3.4.2.4-3.4.2.8). Recours partiellement admis, sentence annulée. Renvoi de la cause au tribunal arbitral pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. b
(A. [Société de droit sud-coréen spécialisée dans la production d’écrans pour automobiles] c. B. [société de droit allemand spécialisée dans les technologies automobiles.]). Recours contre la sentence partielle sur compétence et responsabilité rendue le 3 juin 2019 par un tribunal arbitral CCI avec siège à Zurich. Litige ayant surgi de l’attribution d’une commande d’écrans à transistors pour automobiles dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres. Alors que la demanderesse avait déjà commencé à livrer les écrans, les parties ne réussissaient pas à trouver un accord sur la teneur finale de certaines dispositions du « Contrat cadre » et des « Conditions d’achat » censés régir la commande. En revanche, les parties parvenaient à s’accorder sur et à signer le Quality Assurance Agreement (QAA) qui devait accompagner ces deux autres contrats. Chacun des documents contractuels discutés entre les parties envisageait la soumission d’éventuels litiges à un tribunal arbitral CCI avec siège à Zurich. Arbitrage initié par l’intimée sur le fondement de la clause d’arbitrage contenue dans le QAA, à la suite de la déclaration de la recourante qu’elle n’entendait pas livrer toutes les unités convenues. C’est à raison que le tribunal arbitral s’est considéré compétent pour décider du litige, malgré le fait que celui-ci ne portait pas sur les obligations spécifiques couvertes dans le QAA, car le langage de ce contrat et de la clause litigieuse, tout comme l’ensemble de la relation contractuelle entre les parties indiquent clairement qu’elles entendaient soumettre à l’arbitrage envisagé dans le QAA (tout comme, en des termes très similaires, dans les projets des autres accords que les parties n’avaient pas signés) l’ensemble des litiges (« contract disputes ») pouvant surgir en relation avec la commande d’écrans adjugée à la recourante (consid. 3.4). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. b
(A. [Joint-Venture de droit turc], B. SA, C. SA [actionnaires] c. D. [organisation indépendante régissant la construction d’un grand fleuve artificiel], Etat de Libye). Recours contre la sentence intitulée Partial Award rendue le 22 octobre 2018 par un tribunal CCI. Confirmation de la jurisprudence Westland (arrêt P 1675/1987 du 19 juillet 1988), selon laquelle le droit suisse reconnaît l’indépendance des entités détenues par l’Etat par rapport à ce dernier (consid. 4.5.1). Une convention d’arbitrage signée par une organisation étatique ne lie pas automatiquement l’Etat (non-signataire de la convention) ayant créé cette organisation. En l’espèce, les faits établis dans la sentence attaquée montrent que l’entité D. était indépendante de l’Etat libyen, n’exerçait pas la puissance publique, et avait conclu le contrat litigieux de manière autonome (consid. 4.3). La théorie du droit libyen selon laquelle la responsabilité contractuelle encourue par une entité étatique doit être endossée par l’Etat, à la supposer applicable, est sans pertinence en matière de compétence juridictionnelle (consid. 4.4.2). Les faits constatés par les arbitres ne permettent pas non plus de conclure à une extension de la convention d’arbitrage sur la base du droit suisse (consid. 4.5). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. b
(La République X. c. A. N.V [société de droit néerlandais, filiale de B. Ltd], B. Ltd. [société de droit chypriote], C. Ltd [société de droit chypriote], D. Sàrl [société de droit luxembourgeois]). Recours contre la sentence arbitrale partielle rendue le 20 décembre 2017 par un tribunal arbitral ad hoc constitué conformément au Traité sur la Charte de l’énergie (TCE) et au Règlement CNUDCI. Question de savoir si la « taxe solaire » litigieuse était une « mesure fiscale » au sens de l’art. 21 TCE, auquel cas les intimées ne pouvaient déduire aucun droit de ce traité ni se prévaloir de la clause d’arbitrage figurant en son art. 26. Interprétation du TCE conformément aux art. 31 ss de la Convention de Vienne sur le droit des traités (RS 0.111), qui codifient en substance le droit coutumier international. A la lumière de son analyse de la jurisprudence de la plus haute instance ordinaire du pays hôte de l’investissement, ayant dûment examiné les implications de la désignation formelle de la mesure en question, tout comme son essence, le contexte de son introduction et son but, le tribunal a constaté que la « taxe solaire » n’avait matériellement pas la nature d’un impôt, et n’était donc pas une mesure fiscale au sens de l’art. 21 TCE. Cette interprétation est conforme aux principes applicables en la matière et ne peut donc pas être remise en question (consid. 3). Question du changement stratégique de nationalité, accompli dans le but d’obtenir la protection d’un traité d’investissement qui, sans cette opération, ne trouverait pas application (« Treaty shopping »). Sur le vu des faits constatés dans la sentence, interprétés à la lumière des dispositions pertinentes du TCE et des traités bilatéraux de protection des investissements applicables, les intimées ont bel et bien effectué des investissements protégés par ces traités (consid. 4.1-4.7). Le correctif de l’abus de droit, qui trouve à s’appliquer en tant que principe général du droit international ou même en tant que règle de droit international coutumier, suppose des circonstances exceptionnelles. La situation factuelle présentée dans la sentence, notamment la chronologie des événements et la conduite des parties dans ce contexte, qui montrent que le litige n’était pas nécessairement prévisible, portent à conclure que de telles circonstances ne sont pas réunies en l’espèce (consid. 4.8). Recours rejeté (voir également les consid. 2.4.1-2.4.3 de cet arrêt, résumé ci-dessus, dans la section intitulée Recevabilité, en relation avec l’art. 99 al. 1 LTF).
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. c
(A. Ltd [société israélienne] c. B. A.S [société de droit turc] et C. A.S. [société de droit turc]). Recours contre la sentence rendue le 6 mai 2019 par un tribunal arbitral CCI avec siège à Zurich. Une sentence arbitrale statue ultra ou extra petita si elle alloue davantage ou autre chose que ce qui a été demandé. En l’espèce, le tribunal arbitral a statué extra petita en allouant des dommages-intérêts alors que la demanderesse n’avait demandé qu’une décision déclaratoire constatant que les défenderesses avaient manqué à leurs obligations en vertu de l’accord litigieux, mais non une fixation du dédommagement dû en conséquence de ces violations (consid. 4.2). De même, les défenderesses soutiennent à juste titre que la demanderesse n’avait pas demandé la compensation de sa créance avec les demandes reconventionnelles éventuellement admises par le tribunal, alors que la sentence procède bel et bien à une telle compensation (consid. 6.2.2). Recours partiellement admis. Annulation de certains dispositifs de la sentence et renvoi au tribunal pour qu’il rende une nouvelle décision sur les chefs de demande correspondants (voir également le consid. 5 de cet arrêt, résumé ci-dessous en relation avec l’art. 190 al. 2 let. e LDIP).
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. e
(Fédération de Russie c. B. [société ukrainienne]). Recours contre la sentence rendue le 12 avril 2019 par un tribunal arbitral siégeant à Genève. Note : ce recours contre la sentence finale faisait suite au recours contre la sentence sur compétence du 26 juin 2017, rejeté par le TF dans son arrêt ATF 144 III 559 du 16 octobre 2018. Dans cet arrêt précédent, le Tribunal fédéral avait entériné la décision du tribunal arbitral, qui, fondant sa juridiction sur le Traité d’investissement de 1998 entre l’Ukraine et la Russie (ISA 1998), l’avait déclaré applicable à un investissement effectué en Ukraine (sur la péninsule de Crimée), mais se trouvant désormais (à la suite de l’annexion de la Crimée en 2014) sur un territoire placé sous le contrôle et la juridiction de facto de la Fédération de Russie. Les allégations de la recourante selon lesquelles l’investissement aurait été entaché de fraude et corruption sont irrecevables car elles se fondent sur des documents nouveaux et des faits non constatés dans la sentence (consid. 3.5). La recourante reproche au tribunal de s’être prononcé sur la question – qui selon elle est non arbitrable et non sujette à la libre disposition des parties au litige – du statut et de la portée de l’ISA 1998 entre l’Ukraine et la Russie en ce qui concerne le territoire de la Crimée. De ce fait, selon la recourante, la sentence doit être déclarée nulle ou alors doit être annulée pour violation de l’ordre public au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. En réalité, le tribunal s’est uniquement prononcé sur la demande de l’intimée, qui visait à obtenir un dédommagement pour l’expropriation de ses investissements effectuée par la recourante en violation de l’ISA 1998. Une telle demande constitue une cause de nature patrimoniale au sens de l’art. 177 LDIP et était donc tout à fait arbitrable. A y regarder de plus près, dans la mesure où il critique la constatation du tribunal que le litige relevait du champ d’application matériel, temporel et territorial de l’ISA 1998, le recours vise à nouveau la décision arbitrale sur compétence, qui a déjà été confirmée par le TF et ne peut donc être remise en question (consid. 4.1). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. e
(Fédération de Russie c. A., B., C., D., E., F., G., H., I., J., K.. [sociétés ukrainiennes]). Recours contre la sentence rendue le 12 avril 2019 par un tribunal arbitral siégeant à Genève. Voir le résumé de l’arrêt du TF 4A_244/2019 ci-dessus, dont le texte est identique (à l’exception des détails concernant les parties intimées) à celui du présent arrêt.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 190 LDIP al. 2 let. e
(A. Ltd [société israélienne] c. B. A.S [société de droit turc] et C. A.S. [société de droit turc]). Recours contre la sentence rendue le 6 mai 2019 par un tribunal arbitral CCI avec siège à Zurich. Selon une jurisprudence bien établie, le fait que l’art. 163 CO relève de l’ordre public suisse ne signifie pas encore que sa violation contreviendrait à l’ordre public de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. L’argument de la demanderesse selon lequel le tribunal arbitral aurait violé l’art. 163 al. 2 CO du fait qu’il a alloué des pénalités conventionnelles pour la non-exécution d’une obligation devenue impossible se heurte au fait que cette disposition prévoit précisément la possibilité pour les parties de conclure une « convention contraire » par rapport à la règle voulant que les pénalités sont en principe inexigibles dans une telle circonstance (consid. 5 ; voir également les consid. 4.2 et 6.2.2 de cet arrêt, résumés ci-dessus en relation avec l’art. 190 al. 2 let. c LDIP).
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
Art. 393 CPC let. e
(A. Schweiz AG [société de publicité suisse] c. B. Europe AG [société de commercialisation et distribution de machines-outils ayant son siège social à V.]). Recours contre la sentence rendue le 27 mars 2019 par un tribunal arbitral siégeant à Zurich. Une partie de la doctrine s’interroge sur la question de savoir si la « violation manifeste du droit » visée à l’art. 393 let. e CPC in fine concerne aussi le droit étranger ou seulement le droit (matériel et international privé) suisse (consid. 2.1). Question laissée ouverte (consid. 2.5). Recours rejeté.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
[Avocat à Sion] c. A, B, C [avocats et notaires à Sion et E. [arbitre unique]). Recours contre les prononcés de la Chambre des affaires arbitrales du Tribunal cantonal du canton du Valais du 14 décembre 2018 et du 5 juillet 2019. L’arbitrage à l’origine du recours était pendant lorsque le Code de procédure civile unifié (CPC) est entré en vigueur en 2011. Dès lors, les dispositions du Concordat sur l’arbitrage de 1969 (CA) s’appliquent à cette procédure, à l’exception des voies de recours ouvertes contre la sentence finale, rendue en 2014, qui sont celles prévues par le CPC (consid. 1). Le CA ne prévoyait pas la possibilité de demander la révision d’une sentence en cas de découverte d’un motif de récusation après la clôture de l’arbitrage. Il en va de même du CPC. Quant à elle, la LTF prévoit en son art. 38 al. 4 que si un motif de récusation à l’encontre d’un juge ou greffier du TF est découvert après la clôture de la procédure, les dispositions sur la révision s’appliquent. L’art. 121 let. a LTF régit la révision dans les cas où les dispositions concernant la composition du tribunal ou la récusation n’ont pas été observées. Dans l’ATF 142 III 521, consid. 2, le TF a envisagé que le régime des art. 38 al. 4 et 121 let. a LTF, prévu pour ses propres juges et greffiers, soit applicable par analogie aux membres d’un tribunal arbitral, nonobstant l’absence de dispositions correspondantes dans le CPC. Il avait déterminé que la question pouvait rester indécise au motif que la législation topique était en cours de révision et allait être complétée, et que dans le cas d’espèce, de toute manière, il n’y avait pas lieu à révision de la sentence attaquée. Question laissée derechef indécise dans le présent arrêt, par identité de motifs (même si l’art. 121 let. a LTF devait s’appliquer par analogie, l’arbitre unique n’était pas récusable au regard des dispositions pertinentes du CA ; consid. 3-5). Recours rejetés.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
(A. [avocat] c. B. [avocat]). Demande de révision de l’arrêt rendu par le TF le 27 mars 2019 dans la cause TF 4A_539/2018 (résumé dans le chapitre « Arbitrage » de l’édition 2018-2019 de cet ouvrage). Le requérant se réfère à un passage dans le considérant 7 de l’arrêt précité (retenant que « [d]ans ce litige… emprunt d’un puissant esprit d’animosité et de polémique, le tribunal arbitral pouvait voir dans l’exception [de compensation soulevée par le recourant] une simple récrimination supplémentaire plutôt qu’un moyen de défense sérieux… »), et à un courrier reçu du greffier du Tribunal fédéral, pour reprocher à la Haute Cour d’avoir violé la garantie d’un tribunal indépendant et impartial. Contrairement à ce qu’il soutient, ni le passage incriminé, ni le courrier (envoyé par le greffier sur ordre de la Présidente de la Ire Cour de droit civil) ne démontrent une apparence de partialité (consid. 4.3). Demande rejetée.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler
La mainlevée – provisoire ou définitive – de l’opposition ne peut être prononcée par un tribunal arbitral (consid. 2.1).
L’arbitrabilité des causes patrimoniales au sens de l’art. 177 LDIP peut se trouver limitée par des règles de compétence qui réservent impérativement à une autorité étatique la connaissance de certains différends. De même, sous réserve d’une clause expresse (à laquelle s’appliqueraient par analogie les critères de validité dégagés dans la jurisprudence du TF au sujet de l’art. 192 LDIP), la convention d’arbitrage ne prive pas le poursuivant du droit de requérir du juge étatique la mainlevée provisoire (consid. 2.2).
Absence de litispendance entre la procédure de mainlevée provisoire et l’action en paiement devant un tribunal arbitral (consid. 2.3).
[(A. [footballeur professionnel] c. Trabzonspor Kulübü Dernegi [club de football turc] et Turkish Football Federation (TFF))]. En tant que tribunal arbitral, le TAS ne pourra se considérer compétent pour statuer sur un litige qu’en présence d’une convention d’arbitrage valable entre les parties ou lorsque les lois, statuts ou règlements applicables prévoient spécifiquement une telle compétence. Le fait qu’en absence de clause d’arbitrage une partie serait par hypothèse privée d’accès à la justice est sans pertinence.
[(A.X. c. B.X [père de A.X], C.X [frère de A.X], D.X [frère de B.X] et V.X. [société de droit néerlandais] BV)]. Portée subjective de la convention d’arbitrage. Par exception au principe de la relativité contractuelle, la jurisprudence admet qu’une convention d’arbitrage peut lier des tiers non-signataires dans certains cas de figure comme la cession de créance, la reprise de dette, le transfert de contrat ou encore, à condition qu’on puisse en déduire la volonté du tiers d’être partie à la clause arbitrale, son immixtion dans l’exécution du contrat. La question de savoir si le bénéficiaire d’une stipulation pour autrui est lié par la clause arbitrale contenue dans le contrat générateur d’obligations entre le stipulant et le promettant demeure débattue. Cela étant, sauf convention spécifique en sens contraire, il convient également d’admettre que le bénéficiaire d’une stipulation pour autrui parfaite au sens de l’art. 112 al. 2 CO acquiert contre le débiteur ou promettant une créance, avec tous les droits accessoires à celle-ci, y compris, cas échéant, la clause compromissoire, de telle sorte qu’il sera habilité à faire valoir ses prétentions afférentes au contrat par la voie arbitrale (consid. 2.4.1).
(X.__ GmbH c. Y.__ Sàrl). Le TF analyse le grief tiré de la violation d’un mécanisme contractuel constituant un préalable obligatoire à l’arbitrage sous l’angle de l’art. 190 al. 2 let b LDIP (consid. 3.3).
La question de la sanction qui doit s’attacher à la violation d’un tel mécanisme demeure controversée. Cela étant, l’on ne saurait exclure a priori qu’une sanction de nature matérielle comme les dommages-intérêts puisse être combinée avec la sanction procédurale consistant en une déclaration d’irrecevabilité (voire le rejet en l’état) de la demande. Par ailleurs, un courant doctrinal semble s’affirmer en Suisse, selon lequel la sanction la plus appropriée pour une telle violation serait la suspension de la procédure arbitrale et la fixation d’un délai aux parties pour qu’elles puissent réparer l’omission (consid. 3.4).
Caractère obligatoire ou non des mécanismes contractuels prévoyant la mise en œuvre d’un expert et d’une tentative de conciliation préalables à l’arbitrage. Pour ce qui est de l’exigence d’une tentative de conciliation, sur le vu des critères dégagés dans la jurisprudence (décision 4A_18/2007), pour être obligatoire, une stipulation à cet effet doit contenir des éléments concrets permettant d’établir que la tentative de conciliation est conçue comme une mesure préalable nécessaire à la recevabilité de la procédure arbitrale et décrire de façon suffisamment claire, spécifique et détaillée la procédure de conciliation envisagée, en indiquant par exemple si l’intervention d’un médiateur est requise et/ou si la procédure doit être initiée dans un délai particulier. De plus, le principe de la bonne foi et l’interdiction de l’abus de droit exigent que la partie qui affirme le caractère obligatoire du mécanisme préalable essaie de le mettre en œuvre en temps voulu (consid. 3.5.2).
[(X. [opérateur téléphonique] SA c. A.Y.__ SA, B.Y.__ SA, C.Y.__B.V. (anciennement Z.__BV) et D.Y.__SA)]. Un tribunal arbitral est habilité à trancher des questions préjudicielles n’entrant pas dans le champ d’application matériel de la clause arbitrale, voire à élucider, toujours à titre préjudiciel, des points qui ne sont pas en eux-mêmes susceptibles d’arbitrage, dans la mesure où l’issue du litige qui lui est soumis dépend de ses déterminations quant à ces questions ou points. Ce faisant, le tribunal n’excède pas ses pouvoirs. Le même raisonnement tend du reste à se généraliser en matière de compensation, par la consécration du principe selon lequel l’arbitre est compétent pour connaître d’une exception de compensation même si la relation sur laquelle se fonde la créance invoquée à cette fin n’entre pas dans les prévisions de la clause compromissoire, ou fait l’objet d’une autre convention d’arbitrage, voire d’une clause d’élection de for (voir par ex. l’art. 21(5) Swiss Rules et, pour l’arbitrage interne, l’art. 377 al. 1 CPC). à Voir également l’arrêt 4A_ 428/2010 (d) du 9 novembre 2011 (consid. 2.1-2.3).
[(X. [société de production et de distribution de DVD, en particulier dans le domaine sportif] SA c. Comité International Olympique)]. Une partie peut sans doute renoncer à une convention d’arbitrage de manière tacite, par exemple en procédant sur le fond devant le juge étatique sans soulever d’exception d’arbitrage. Toutefois, il serait artificiel d’admettre sans autre qu’il existe une telle renonciation ou qu’il y aurait eu « acceptation » d’une offre de renonciation à la convention d’arbitrage dans un cas où une partie a adressé à l’autre une mise en demeure assortie d’une menace de saisine des tribunaux étatiques visant à obtenir l’exécution d’un contrat contenant une clause arbitrale, et l’autre partie a répondu à la lettre de mise en demeure sans se prévaloir de la convention d’arbitrage, alors que par la suite la partie dont émanait la mise en demeure a agi devant le tribunal arbitral mentionné dans la clause arbitrale sans soulever une quelconque exception.
(A.__ c. WADA, FIFA et Cyprus Football Association). Clause arbitrale par référence. Le TF examine avec « bienveillance » le caractère consensuel du recours à l’arbitrage en matière sportive dans le but de favoriser la liquidation rapide des litiges par des tribunaux spécialisés présentant des garanties suffisantes d’indépendance et d’impartialité, à l’instar du TAS. Cette logique sous-tend également la souplesse dont fait preuve la jurisprudence de la Haute Cour dans son traitement de la problématique des clauses arbitrales par référence dans le domaine sportif (consid. 3.2.2). Elle se justifie d’autant plus dans les affaires de dopage, au vu du rôle prééminent progressivement assumé par le TAS, en tant que juridiction garante des standards internationaux, dans le cadre de la lutte mondiale contre ce fléau (consid. 3.3.1). En l’espèce, c’est à bon droit que le TAS s’est déclaré compétent pour connaître de l’appel formé par l’AMA et la FIFA contre la décision du Judicial Committee de la Fédération Chypriote de Football (CFA), en vertu du renvoi global contenu dans les statuts de cette dernière aux règlements de la FIFA prévoyant la compétence du TAS à statuer sur appel dans les affaires de dopage.
L’indépendance et l’impartialité requises des membres d’un tribunal arbitral s’imposent aussi bien aux arbitres désignés par les parties qu’au président du tribunal arbitral. Le système dit de l’arbitre-partie dans lequel l’arbitre désigné par chacune des parties ne serait pas astreint à la même indépendance et à la même impartialité que l’arbitre appelé à présider le tribunal arbitral doit être exclu (consid. 3.3.1).
Les spécificités de l’arbitrage sportif institué par le TAS, telle la liste fermée d’arbitres, dont on ne saurait faire abstraction, ne justifient pas en soi un traitement différencié de l’arbitrage sportif et commercial (consid. 3.3.3).
Par exception au caractère cassatoire du recours en nullité contre les sentences arbitrales internationales et pour des raisons relevant à la fois de la sécurité juridique et de l’économie de la procédure, le TF est compétent pour prononcer directement la récusation d’un arbitre qu’il jugerait dépendant ou partial (consid. 3.3.3.1).
[(Alejandro Valverde Belmonte c. Agence Mondiale Antidopage (AMA), Union Cycliste Internationale (UCI) et Real Federacion Espanola de Ciclismo (RFEC))]. Problématique dite du « tribunal arbitral tronqué ». Conséquences de la démission sans justes motifs d’un membre du tribunal. « Question délicate » laissée ouverte en l’espèce puisqu’il appert que la démission de l’arbitre en question n’a pas été établie, de sorte qu’il faut considérer que ledit arbitre faisait toujours partie du tribunal au moment où la sentence litigieuse a été rendue (consid. 4.3).
Art. 190 al. 2 lit. b
(Dame Y. [bénéficiaire et protectrice d'un trust] c. Z. [bénéficiaire et protecteur d'un trust] & TA ad hoc à Berne).
Caractère tardif du grief d'incompétence; le champ d'application d'une clause arbitrale visant les litiges "in connection with" l'accord en question est plus large que celui d'une clause visant, par exemple, les litiges pouvant résulter ("arising out") dudit accord; art. 190 al. 2 lit. c : TA ayant statué ultra ou extra petita (non) : les arbitres ne statuent pas au-delà des demandes s'ils n'allouent pas plus que le montant réclamé par la demanderesse, tout en appréciant les faits sur la base de règles ou principes juridiques autres que ceux invoqués par les parties (jura novit curia); art. 190 al. 2 lit. d : latitude accordée aux arbitres dans l'appréciation anticipée des preuves; construction surprenante et imprévisible (non); art. 190 al. 2 lit. e : violation du principe pacta sunt servanda (non).
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
(A. C. SE, A. D. Ltd., A. E. Ltd. Et J. Ltd. C. K. SAS)
Compétence du TA – champ d'application personnel d'une clause compromissoire ; application à une filiale sortie du groupe, suite à un "management buy-out", après la conclusion du contrat contenant la convention d'arbitrage ; art. 190 al. 2 lit. d LDIP : le droit d'être entendu n’est pas violé du fait que le TA a refusé de sanctionner la production, par l'intimée, d'actes de procédure un jour après l'échéance du délai procédural, dès lors que l'acte de mission ne contient pas de règle spécifique à ce sujet. L’égalité des parties serait violée seulement dans le cas où l’autre partie aurait été sanctionnée pour un même retard, mais pas simplement du fait qu’elle a pour sa part déposé à temps.
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
(X. [club de football] c. A., B., C. et D. [entraîneurs et physiothérapeute)
Deux contrats ont été signés, seul le premier prévoyant une compétence du TAS. Les parties ont également prévu qu’en cas de contradiction, les termes du premier contrat prévalent. Le TAS est donc compétent ; art. 190 al. 2 lit. e : la violation du principe pacta sunt servanda n’est constitutive d’une violation de l’ordre public que si le TA refuse d’appliquer une clause contractuelle tout en admettant qu’elle lie les parties ou si le TA impose le respect d’une clause dont il considère qu’elle ne lie pas les parties ; art. 190 al. 2 lit. d : violation du droit d’être entendu uniquement si le TA se fonde sur un motif juridique qui ne pouvait pas raisonnablement être prévu par les parties et qui les a donc surprises.
(X. GmbH [société allemande] c. Y. Corporation [société russe])
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
Recours contre une sentence sur compétence par laquelle le TA s'est déclaré incompétent (sentence finale). Groupe de contrats : clauses compromissoires différentes dans des contrats conclus entre les mêmes parties. Non application de la clause en question à d'autres contrats (les termes « Ansprüche aus oder im Zusammenhang mit diesem Vertrag » ne sont pas suffisants pour étendre la clause compromissoire à d’autres contrats) ; art. 190 al. 2 lit. d : violation du droit d'être entendu (non).
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
(A. C. SE, A. D. Ltd., A. E. Ltd. Et J. Ltd. C. K. SAS)
Irrecevabilité du grief tiré de l’incompétence du TA dans un recours contre une sentence finale lorsque ce grief avait déjà été rejeté dans un recours contre une sentence partielle dans la même affaire.
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
(B. Fund c. A. Group)
Le TA est compétent pour examiner à titre préjudiciel si une infraction pénale a été commise. Le TA doit suspendre l’instance si un motif impérieux le commande (exemples de motifs impérieux : une partie perd la personnalité juridique ou la capacité d’agir en justice, des circonstances de fait ou de droit déterminantes pour l’issue du litige, mais étrangères à la compétence du TA, doivent être préalablement élucidées) ; le TA peut suspendre l’instance si cette mesure lui semble opportune au regard des intérêts des parties. En l’absence de motif impérieux, la suspension ou le refus de suspendre ne mettent pas en cause l’égalité des parties, ni leur droit d’être entendues en procédure contradictoire. Pas de motif impérieux en l’espèce.
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
(X. c. Y.) recours contre une sentence du TA se déclarant incompétent faute de clause compromissoire liant les parties.
La recourante, en sa qualité de cessionnaire d’une créance, entend fonder son action sur la clause compromissoire insérée dans le contrat. Le TF retient que l’existence d’une cession n’a pas été démontrée ; art. 190 al. 2 lit. c ; la recourante reproche au TA d’avoir statué ultra petita pour s’être déterminé sur l’existence ou non d’une cession. Application de la théorie des faits de double pertinence car l’existence d’une cession détermine à la fois la légitimation active du cessionnaire et sa capacité à être partie à la procédure arbitrale mise en œuvre sur la base de la clause compromissoire liée à la créance cédée. Le TA devait, pour déterminer sa propre compétence, examiner à titre préjudiciel la question de l’existence de la cession de créance litigieuse.
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
(X. c. Fédération Internationale de Hockey (FIH))
La recourante se plaint du fait que le TAS s’est déclaré – à tort selon la recourante – compétent, alors qu’en réalité ses critiques portent sur la question de savoir si elle disposait de la légitimation active pour recourir au TAS. A noter que – curieusement – la recourante se plaint du fait que le TAS se serait à tort déclaré compétent, alors même que c’est la recourante qui a initié la procédure devant le TAS.
Art. 190 al. 2 lit. b
(X. AG [société allemande] et Y. SA c. A)
Distinction entre un arbitre et un expert-arbitre sur la base des critères suivants : termes utilisés dans l’accord des parties, étendue des attributions conférées au tiers à désigner selon cet accord, aptitude de la décision prise par ce tiers à constituer un titre d’exécution forcée.
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
(A. c. Fédération Internationale de Football Association (FIFA) & World Anti-Doping Agency (WADA))
Les statuts de l’association brésilienne de football (CFB) renvoient aux règles de la FIFA qui, elles-mêmes, contiennent une clause compromissoire en faveur du TAS. En sa qualité de membre de la CFB, le recourant est lié par cette clause compromissoire.
Art. 190 al. 2 lit. b LDIP
(X. AG c. Federation Y.)
Relation contractuelle contenant une clause compromissoire est « prolongée » par un nouveau contrat contenant une clause d’élection de for
Les parties ont clairement convenu de la conclusion d’un nouveau contrat qui n’est donc pas soumis à la clause compromissoire prévue dans le premier contrat. Il s’en suit également que le TA n’était pas habilité à accorder des dommages-intérêts pour violation du second contrat.
Art. 190 al. 2 lit. a LDIP
(X. [organisateur suisse de match de football] c. Y [Fédération turque de football])
Composition irrégulière du TA (non) ; appartenance commune de deux des trois arbitres et du représentant d’une des parties à la même association ; devoir des parties de vérifier que les arbitres offrent des garanties suffisantes d'indépendance et d'impartialité ; degré de diligence requis des parties dans les circonstances (parties sur un pied d'égalité, montant litigieux important) ; référence aux IBA Guidelines on Conflicts of Interest de 2004.
Art. 190 al. 2 lit. a LDIP
(X. SA c. Y Limited)
Recours contre un « Procedural Order » du TA dans le cadre duquel le TA statue sur une demande de suspension, il s’agit donc d’une décision incidente susceptible de recours, car en statuant de la sorte le TA a implicitement admis sa compétence et la régularité de sa propre composition (motifs de recours prévus à l’art. 190 al. 2 lit. a et b cum 190 al. 3).
Le TA saisi pour trancher de questions relatives à l’interprétation d’un accord peut également se déterminer sur la validité de cet accord ; art. 190 al. 2 lit. a : allégation d’une partialité du TA (non).
(X. GmbH [société allemande] c. Y. Corporation [société russe])
Art. 190 al. 2 let. b LDIP : recours contre une sentence sur compétence par laquelle le TA s'est déclaré incompétent (sentence finale). Groupe de contrats : clauses compromissoires différentes dans des contrats conclus entre les mêmes parties. Non-application de la clause en question à d'autres contrats.
Art. 190 al. 2 let. d LDIP : violation du droit d'être entendu (non).
Art. 190 al. 2 let. b LDIP
(A. C. SE, A. D. Ltd., A. E. Ltd. Et J. Ltd. C. K. SAS)
Compétence du TA : champ d'application personnel d'une clause compromissoire; application à une succursale sortie du groupe, suite à un "management buy-out", après la conclusion du contrat contenant la convention d'arbitrage ; art. 190 al. 2 let. d LDIP : le droit d'être entendu n’est pas violé du fait que le TA a refusé de sanctionner la production par l'intimée d'actes de procédure un jour après l'échéance du délai procédural, dès lors que l'acte de mission ne contient pas de règle spécifique à ce sujet. L’égalité des parties serait violée seulement dans le cas où l’autre partie aurait été sanctionnée pour un même retard, mais pas simplement du fait qu’elle a pour sa part déposé à temps.
Art. 190 al. 2 let. b LDIP
(A. C. SE, A. D. Ltd., A. E. Ltd. Et J. Ltd. C. K. SAS)
Irrecevabilité du grief tiré de l’incompétence du tribunal arbitral dans un recours contre une sentence finale lorsque ce grief avait déjà été rejeté dans un recours contre une sentence partielle dans la même affaire.
(X. [organisateur suisse de match de football] c. Y. [Fédération turque de football])
Art. LDIP 190 al. 2 let. a : composition irrégulière du TA (non) ; appartenance commune de deux des trois arbitres et du représentant d’une des parties à la même association ; devoir des parties de vérifier que les arbitres offrent des garanties suffisantes d'indépendance et d'impartialité ; degré de diligence requis des parties dans les circonstances (parties sur un pied d'égalité, montant litigieux important) ; référence aux IBA Guidelines on Conflicts of Interest de 2004.