(A. AG [locataire du bien-fonds sur la base d’un contrat de bail à construction] c. B. AG[propriétaire du terrain du contrat de bail à construction]). Recours contre la décision de clôture rendue le 17 février 2020 par un Tribunal arbitral statuant en application de la St. Galler Schiedsordnung (SGSO). Dans la procédure arbitrale, le Tribunal avait rendu plusieurs décisions, conduit une inspection oculaire du site en question, et tenu une audience au cours de laquelle il avait proposé une solution transactionnelle au litige, que les parties n’avaient pas adoptée. Peu après l’audience, les parties avaient transigé, retiré leurs demandes respectives, et demandé au Tribunal de clore la procédure et rendre une décision sur le montant et l’allocation des frais de l’arbitrage, dont les parties avaient convenu que chacune d’entre elles supporterait la part correspondant à ses demandes. Dans sa décision de clôture, le Tribunal avait fixé ses frais et honoraires et les frais administratifs de la procédure à CHF 58’000 et CHF 2’000 respectivement, et avait alloué ces montants de manière proportionnée à la valeur des demandes principales et reconventionnelle présentées par les parties. La recourante demande au TF d’annuler le point du dispositif fixant les montants des frais de l’arbitrage, montants qu’elle considère manifestement excessifs au sens de l’art. 393 let. f CPC, et de fixer les frais et honoraires des arbitres à CHF 25’000 et les frais administratifs à CHF 400.40, en application du règlement SGSO. Le TF observe que lorsque les parties se sont soumises à un règlement d’arbitrage prévoyant un barème pour les frais et honoraires des arbitres et frais de l’arbitrage, et que, comme en l’espèce, les parties n’ont pas conclu d’accord spécifique modifiant ce barème, l’examen du caractère excessif ou non des honoraires et frais fixés par les arbitres doit être effectué par référence aux prévisions du barème (consid. 3). Il n’est pas contesté que la valeur litigieuse de l’affaire était de CHF 50’000, ce qui la plaçait dans la fourchette « jusqu’à CHF 250’000 » dans le barème SGSO. Ce dernier prévoit que les frais et honoraires d’un tribunal de 3 membres peuvent aller, dans ce cas, d’un minimum de CHF 25’000 à un maximum de CHF 75’000. Le barème prévoit également des ajustements en cas de transaction en cours de procédure ou de décision rendue sans les motifs (réduction de 25% du montant honoraires et frais), ainsi que la prise en compte de facteurs de majoration, lorsque l’affaire exige des étapes procédurales particulières ou est spécialement complexe. Le Tribunal arbitral souligne que la valeur litigieuse n’est pas le seul élément pertinent pour la détermination des honoraires des arbitres. Ses frais et honoraires, fixés à CHF 60’000 se situent à l’intérieur de la fourchette prévue par le règlement et sont justifiés, eu égard aux actes procédure accomplis et compte tenu de la complexité de l’affaire (consid. 2.3). Le TF retient qu’il est possible que l’application cumulée de la réduction consécutive à une transaction et des facteurs justifiant une augmentation des frais et honoraires puisse résulter en un montant supérieur au maximum prévu par le barème pour la valeur litigieuse en question. Ici, le montant maximal selon le barème serait, compte tenu de la transaction, de CHF 56’250 (75% de CHF 75’000) ; le Tribunal a donc excédé ce maximum en fixant ses frais honoraires à CHF 58’000, et il faut examiner si ce dépassement est justifié en l’espèce. Selon le TF, les décisions et mesures procédurales dont le Tribunal a considéré qu’elles justifiaient une augmentation du montant maximum de ses honoraires pour cette affaire n’ont rien d’exceptionnel et ne peuvent donc pas fonder une telle augmentation (consid. 4.3). Dès lors, le montant des frais et honoraires fixé par le Tribunal est excessif et le dispositif correspondant dans sa décision doit être annulé (consid. 4.5). Lorsqu’il admet un recours pour le grief de l’art. 393 let. f CPC, le TF peut réformer la décision des arbitres et fixer lui-même le montant de leurs frais et honoraires, à condition de disposer des faits et informations nécessaires. Tel n’est pas le cas ici ; la cause doit donc être renvoyée au Tribunal arbitral pour qu’il reconsidère sa décision et prenne le soin de calculer ses frais et honoraires en conformité avec les critères prévus par la SGSO. Dans ce contexte, la valeur litigieuse, en tant qu’elle reflète l’importance et portée de l’affaire, doit être prise en compte, et les arbitres doivent s’assurer que le temps qu’ils consacrent à la conduite de la procédure n’est pas disproportionné par rapport à cette valeur (consid. 5.2). Recours admis ; émoluments et dépens mis à la charge des arbitres.
Antonio Rigozzi, Erika Hasler