Droit social

ATF 145 V 215 (d)

2019-2020

Art. 6 LPGA, Art. 7 LPGA, Art. 8 LPGA, Art. 21 LPGA al. 4, Art. 4 LAI al. 1, Art. 7 LAI al. 2 let. d, Art. 28 LAI al. 1

Le caractère invalidant d’un syndrome de dépendance, en l’espèce aux benzodiazépines et aux opiacés, doit désormais être évalué dans le cadre de la procédure probatoire structurée mise en place à l’ATF 141 V 281. La distinction entre dépendance primaire et dépendance secondaire n’est plus pertinente dans ce contexte. En revanche, l’obligation de diminuer son dommage, en particulier de se soumettre aux mesures médicales raisonnablement exigibles, conserve toute sa pertinence.

ATF 145 V 231 (d)

2019-2020

Art. 13 LPGA, Art. 6 LAI al. 2

2, 8 et annexe II ALCP ; 2 § 1 et 10 § 1 R (CEE) n° 1408/71 ; 2 par. 1, 4 et 7 R (CE) n° 883/2004 ; l’épouse, de nationalité indienne et domiciliée en Allemagne, d’un ressortissant suisse qui exerce son droit à la libre circulation en exerçant une activité indépendante dans plusieurs Etats, peut se prévaloir de l’application du Règlement (CE) n° 883/2004 en tant que « membre de la famille » au sens de son art. 2 al. 1. A ce titre, elle peut invoquer le principe de l’interdiction de discrimination consacré par l’art. 4 R (CE) n° 883/2004, de même que la levée des clauses de résidence prévue par son art. 7. Dans ce contexte, le fait qu’il s’agisse de statuer sur des droits propres aux prestations sociales ou sur des droits dérivés est indifférent. Le TF confirme à ce sujet une jurisprudence constante, rappelée dans l’arrêt résumé. En conséquence, s’agissant de l’octroi d’une rente AI, la condition de domicile imposée aux personnes de nationalité étrangère par l’art. 6 al. 2 LAI ne peut lui être opposée, de sorte que son droit doit être reconnu.

ATF 145 V 266 (d)

2019-2020

Art. 2 ALCP

Art. 1b, 8a, 9 al. 1bis et let. a al. 1-3 disp. fin. modification du 18 mars 2011 LAI (disp. fin. LAI) ; 2 ALCP ; 4 R (CE) n° 883/2004 ; à la suite de la suppression de la rente AI du défendeur, le TF analyse s’il subsiste un droit à des mesures de nouvelle réadaptation (art. 8a LAI) ainsi qu’à une rente accessoire en application de la let. a al. 1 et 2 disp. fin. LAI. S’agissant des mesures de nouvelle réadaption, l’assuré n’y a droit selon la let. a al. 2 disp. fin. LAI que si elles sont censées (« sinnvoll ») et utiles (« nutzbringend »). De plus, le droit à de telles mesures est subordonné à la condition d’assurance au sens de l’art. 1b LAI en relation avec l’art. 1a LAVS (art. 9 al. 1bis LAI). Le fait que la lettre de la loi parle de « bénéficiaire de rente » et non d’« assuré » n’y change rien. En l’espèce, le défendeur étant domicilié au Portugal et n’exerçant plus d’activité lucrative en Suisse, son droit à des mesures de nouvelle réadaptation de même que son droit à une rente accessoire (let. a al. 3 disp. fin. LAI) tombent. Selon le TF, cette disposition ne viole pas l’interdiction de discrimination de l’art. 2 ALCP et de l’art. 4 R (CE) n° 883/2004, car elle est justifiée par des raisons objectives indépendantes de la nationalité du travailleur et est proportionnée. En dehors de l’art. 9 al. 1 LAI, qui permet d’appliquer des mesures de réadaptation à l’étranger dans des cas exceptionnels au sens des art. 23bis

et 23ter LAI, il n’est en effet ni sensé ni utile de réinsérer sur le marché de l’emploi suisse une personne vivant à l’étranger et percevant depuis longtemps une rente AI. La mise en place de telles mesures est plus pertinente dans l’Etat de domicile de cette personne. Conformément à l’art. 11 al. 3 let. e R (CE) n° 883/2004, le droit de cet Etat doit donc être appliqué.

ATF 145 V 278 (d)

2019-2020

Art. 42ter LAI al. 3, Art. 42quater LAI al. 3, Art. 39a RAI let. c

Selon la lettre de l’art. 42quater al. 3 LAI, le Conseil fédéral dispose d’une grande marge d’appréciation pour déterminer les conditions d’octroi de la contribution d’assistance pour les assurés mineurs. Il n’est en particulier pas limité par un degré d’autonomie minimale ou par la capacité de discernement de l’assuré mineur, contrairement à l’assuré majeur (cf. art. 42quater al. 1 et 2 LAI). L’interprétation historique et systématique de la disposition aboutit à la même conclusion. Partant, le Conseil fédéral n’a pas outrepassé ses compétences en conditionnant à l’art. 39a let. c LAI l’octroi de la contribution d’assistance des assurés mineurs à un certain degré de dépendance.

ATF 145 V 333 (d)

2019-2020

Art. 13s LAI, Art. 27 LAI al. 1, Art. 27 LAI al. 3, Art. 27bis LAI al. 1, Art. 27bis LAI al. 2, Art. 24 RAI al. 2, Art. 47 LOGA al. 6

De la même manière que dans l’assurance-maladie, la législation en matière d’assurance-invalidité prévoit que la structure tarifaire pour déterminer la rémunération des séjours hospitaliers effectués dans le cadre des art. 13 et 14 LAI (traitement d’une infirmité congénitale) doit en premier lieu être définie par accord des partenaires tarifaires. En l’absence d’accord, c’est au gouvernement d’agir par voie d’ordonnance. La compétence du tribunal arbitral est limitée aux litiges qui surviennent ensuite dans l’application de ce tarif (consid. 6). S’agissant de la rémunération des séjours hospitaliers financés par l’assurance-invalidité, ni la loi, ni l’ordonnance ne prévoit les principes généraux et abstraits sur lesquels pourrait se fonder une décision individuelle. Si les parties ne peuvent les déterminer conventionnellement, il n’appartient pas au tribunal arbitral de faire œuvre de législateur. C’est à l’autorité d’exécution qu’il appartient d’établir ces principes, dans la loi ou dans l’ordonnance (consid. 7, qui résume TAF C-529/2012). Cela vaut également lorsque les parties s’accordent, comme en l’espèce, pour utiliser la structure tarifaire SwissDRG, mais ne parviennent pas à s’entendre sur le montant du baserate. C’est donc à juste titre que le tribunal arbitral du canton de Zurich a refusé d’entrer en matière sur la demande en paiement dirigée par le Kinderspital zurichois contre les 27 offices AI.

ATF 145 V 361 (d)

2019-2020

Art. 7 LPGA al. 2, Art. 43 LPGA, Art. 44 LPGA, Art. 4 LAI al. 1, Art. 28 LAI al. 1

Dans cette affaire concernant l’évaluation de l’incapacité de gain d’une personne atteinte de troubles psychiques au moyen de la procédure probatoire structurée (ATF 141 V 281), le TF tente de tracer une distinction entre ce qui relève du fait et ce qui relève du droit ou, en d’autres termes, des compétences des médecins, respectivement des experts, et des compétences des juges. Insistant sur le fait qu’une évaluation parallèle par les magistrats (« Paralellüberprüfung », consid. 3.2.2), détachée de l’appréciation médicale, n’est pas autorisée, le TF indique en substance que la tâche du juge est de contrôler si et dans quelle mesure les médecins ont respecté le cadre normatif du catalogue d’indicateurs correspondant aux questions qui leur sont posées (consid. 3). Ce contrôle est nécessaire parce que l’évaluation médicale, en particulier la démarche adoptée en psychiatrie, permet une certaine marge d’appréciation, qui doit être respectée du moment que le médecin a travaillé conformément aux règles de son art. Se référant à des exemples tirés de sa propre jurisprudence, le TF dit que si l’expertise livre toutes les indications nécessaires et permet de se prononcer sur tous les indicateurs, il n’y a pas lieu de s’écarter de ses conclusions. En revanche, dans le cas contraire, le juge peut corriger l’appréciation du médecin, en se fondant sur les éléments à disposition. Si ces éléments sont insuffisants, il convient de poursuivre l’instruction (consid. 4.2 et 4.3). En l’espèce, les conclusions de l’expert – en faveur de la personne assurée – n’étaient pas plausibles parce que les limitations cognitives annoncées par la personne assurée n’avaient pas été vérifiées dans le cadre de l’examen psychiatrique ou à l’aide de tests neuropsychologiques (consid. 4.4).

ATF 145 V 370 (d)

2019-2020

Art. 16 LPGA, Art. 28a LAI al. 3, Art. 27bis RAI al. 3

Dans un cas d’application de la nouvelle méthode mixte, en vigueur depuis le 1er janvier 2018, le TF considère qu’il n’y a pas lieu de fixer le revenu d’invalide sur la base du salaire de valide au taux d’occupation effectif (en l’espèce, 75% de 99’047, moins 50% d’incapacité de travail = CHF 37’143.-, ce qui donnait un taux d’invalidité totale de 51,83 % et ouvrait donc le droit à une demi-rente). Il convient plutôt de prendre un taux d’occupation hypothétique de 100% pour déterminer les revenus de valide et d’invalide. Cette solution correspond à la volonté du législateur, qui souhaitait, à travers cette révision, égaliser le poids des travaux habituels et de l’activité lucrative dans le calcul du taux d’invalidité, et ce afin de refléter une meilleure conciliation entre vie familiale et la vie professionnelle. Auparavant, le taux d’occupation de l’activité lucrative était en effet doublement comptabilisé. De plus, cette nouvelle manière de calculer correspond au procédé utilisé en matière d’assurance-accidents, ce qui permet d’éviter des disparités entre les différentes assurances sociales.

ATF 146 V 16 (d)

2019-2020

Art. 8 LPGA al. 1, Art. 16 LPGA, Art. 28 LAI

L’arrêt traite des facteurs d’abattement sur les salaires déterminés par l’enquête sur la structure des salaires (ESS), dans le cadre de l’évaluation du revenu d’invalide. Constituent notamment des facteurs pertinents l’âge, la nationalité de la personne assurée ou sa catégorie d’autorisation de séjour. Le taux d’abattement, qui ne peut dépasser 25%, est décidé par l’office AI selon son propre pouvoir d’appréciation. Il ne peut donc être revu par le TF que sous l’angle de la violation du pouvoir d’appréciation. En revanche, la question de savoir si l’office AI est autorisé ou non à procéder à un abattement du salaire statistique est une question de droit que le TF peut librement examiner. En l’espèce, le statut de frontalier de l’intimé constitue un premier facteur pouvant justifier un abattement du salaire statistique. Il intervient potentiellement également au niveau du parallélisme des revenus lors du calcul du revenu de valide. Ne pouvant toutefois être pris en considération à deux reprises, il convient donc de procéder à deux examens séparés. En l’espèce, la différence de revenus étant marginale (0,37%), il n’y a pas à procéder à un parallélisme des revenus. Sous l’angle d’un abattement sur le salaire statistique, la différence de salaire est de 3%. La pratique applicable au parallélisme des revenus, qui exclut les différences de moins de 5%, ne peut être reprise dans le cadre de l’abattement, qui nécessite un examen concret de la situation de l’intimé. En l’espèce, il n’est pas défavorisé par rapport à des salariés suisses, si bien que son statut de frontalier ne joue aucun rôle dans la détermination de son revenu d’invalide. Il n’y a donc pas lieu à abattement. L’âge proche de la retraite de l’intimé (58 ans en l’espèce) peut deuxièmement justifier un abattement sur le salaire statistique, s’il influence concrètement ses chances de trouver un emploi. L’âge ne joue notamment aucun rôle pour les professions très recherchées sur le marché du travail. En l’espèce, au regard de la situation de l’assuré (longue expérience professionnelle, bonnes qualifications professionnelles), l’âge n’est pas un facteur d’abattement admissible.