Droit fiscal

ATF 140 II 88

2013-2014

Art. 58 al. 2 lit. b LIFD

Distribution dissimulée de bénéfice ; prêt accordé à l’actionnaire ; taux d’intérêt insuffisant.

Une société finance un prêt accordé à une société actionnaire au moyen de fonds étrangers. Le taux d’intérêt de ce prêt est cependant trop bas selon l’administration fiscale qui, considérant qu’une distribution dissimulée de bénéfice a eu lieu en faveur de l’actionnaire, procède à une reprise sur le bénéfice déclaré de la filiale. La prestation appréciable en argent se mesure par la différence entre le taux d’intérêt conforme au principe de pleine concurrence et le taux effectivement appliqué.

Pour calculer le taux d’intérêt conforme au marché, l’administration se réfère à l’une de ses lettres circulaires. Selon cette circulaire, pour respecter le principe de libre concurrence, une telle opération doit conduire à la réalisation d’un bénéfice chez la société prêteuse. Aux yeux du TF, cette manière de calculer est appropriée.

A noter que ces taux d’intérêts ne créent qu’une présomption réfragable d’existence de prestation appréciable en argent ; il s’agit pour la société contribuable de démontrer que la prestation octroyée est tout de même conforme au principe de libre concurrence. En l’espèce, la société prêteuse n’y parvient pas ; la reprise est donc légitime.

TF 2C_842/2013

2013-2014

Art. 25 al. 2 LHID

Report des pertes après la perte du statut holding ; réserves latentes.

Une société holding genevoise met un terme à son statut de holding et passe à une imposition ordinaire. Elle décide alors de reporter les pertes encourues par le passé, alors qu’elle bénéficiait encore du régime holding, ce qui lui est refusé par l’administration fiscale genevoise.

En l’espèce, le TF valide la pratique genevoise : les sociétés holding ont en effet la possibilité de porter les réserves latentes à leur bilan fiscal pour la période précédant le passage à l’imposition ordinaire ou de procéder à une réévaluation comptable sans incident sur le résultat. Cela permet de traiter parallèlement de manière cohérente les gains et les pertes.

La société n’ayant pas utilisé cette possibilité lorsqu’elle en avait l’occasion, il lui est désormais impossible de reporter les pertes. Le TF considère que la société contribuable aurait dû connaître la pratique genevoise, l’autorité fiscale n’ayant pas l’obligation de conseiller et de renseigner spontanément sur les conséquences de la fin du régime holding.

TF 2C_985/2012

2013-2014

Art. 57 et 58 LIFD
Prestation appréciable en argent ; réintégration de charges dans le bénéfice imposable.

Une société mère achète à une société fille 20’000 tonnes d’huile de tournesol. Elle effectue le paiement de 14 millions de dollars de manière anticipée, sans y être obligée et sans déduire d’escompte. De plus, c’est elle qui supporte les frais bancaires importants. Quelques mois plus tard, la vente est annulée d’un commun accord.

Pour le TF, le paiement anticipé volontaire, quoique rare en pratique, s’explique par le fait que les parties se connaissent, et ne pose donc pas de problèmes. Mais il est d’usage qu’un paiement anticipé ait lieu en échange d’un escompte commercial. L’absence d’un tel escompte constitue donc une avance sans intérêt et remplit les conditions pour être qualifiée de prestation appréciable en argent.

C’est donc tout naturellement qu’il faut réintégrer la somme correspondant à l’escompte – qui aurait dû être accordé – dans le bénéfice imposable de la société mère.

TF 2C_589/2013

2013-2014

Art. 24 LHID

Qualification de l’achat par une société d’une voiture de collection.

Une société spécialisée dans l’entretien de glissières de sécurité acquiert une Ferrari Enzo et la revend quelques années plus tard à son actionnaire unique, qui possède une collection de Ferrari. En raison de son statut particulier d’objet de collection, la voiture n’est pas utilisée mais simplement entreposée et entretenue. Se posent alors des problèmes de qualification juridique d’un tel achat.

Selon le TF, l’acquisition de la Ferrari ne peut pas être assimilée à un actif fictif, comme l’avait retenu le Tribunal cantonal.

En revanche, les opérations liées à l’achat et la revente de la voiture constituent des prestations appréciables en argent. Il faut donc effectuer une reprise. On ne peut pas calculer cette reprise sur la valeur de location de la voiture puisque cette dernière a été acquise dans un but de collection et non d’utilisation.

Le TF constate que les opérations d’achat et de revente du cas d’espèce correspondent à un contrat de vente à crédit. C’est sur cette base qu’il faudra calculer l’avantage appréciable en argent fait à l’actionnaire.

TF 2C_686/2013

2013-2014

Art. 57 et 67 al. 1 LIFD

Réactivation d’une société manteau ; report des pertes ; évasion fiscale.

Une société réalise d’importantes pertes en 2001 et 2002. Ses actifs sont ensuite rendus liquides et elle reste inactive pendant 3 ans. Après un assainissement, la société fait valoir le report des pertes subies à l’époque. Cela lui est refusé au motif qu’il s’agit d’une évasion fiscale. Selon le TF, il ne s’agit en l’espèce pas d’un transfert de manteau d’action mais de la réactivation d’une société ; le critère de la continuation économique n’est donc pas déterminant en l’espèce et seule l’évasion fiscale doit être examinée. In casu, le TF rejette l’évasion fiscale et admet le report des pertes.