Droit pénal spécial

ATF 146 IV 88 (d)

2019-2020

Art. 91a LCR al. 1, Art. 55 LCR al. 1, Art. 55 LCR al. 2, Art. 10 OCCR al. 2

Refus de mesures de constatation de l’incapacité de conduire ; tests préliminaires de stupéfiants ; motifs de suspicion suffisants pour la mise en œuvre ; valeur probante. Pour ordonner des tests préliminaires (art. 10 al. 2 OCCR), il suffit que le conducteur présente de faibles signes indiquant une altération de sa capacité de conduire en raison de stupéfiants ou médicaments. Il n’est pas nécessaire de démontrer l’existence de soupçons suffisants au sens de l’art. 197 al. 1 let. b CPP pour ce faire. L’entrave aux mesures de constatation de l’incapacité de conduire (art. 91a LCR) n’est réalisée que si l’établissement fiable de l’incapacité de conduire n’est définitivement plus possible, que ce soit par une opposition active ou passive. Le refus de se soumettre aux tests préliminaires est donc insuffisant puisque ceux-ci ont une valeur indicative et ne sont pas propres à déterminer exactement l’état médical et l’incapacité de conduire de la personne concernée.

Art. 15a LCR al. 4

Caducité du permis de conduire à l’essai. Lorsque le conducteur commet une seconde infraction à la loi sur la circulation routière alors que la première infraction n’a pas encore fait l’objet d’un jugement entré en force, l’autorité administrative cantonale doit déclarer le permis de conduire à l’essai caduc si ces deux infractions sont sanctionnées d’un retrait du permis de conduire (art. 15a al. 4 LCR). Le prononcé de la caducité du permis de conduire selon l’art. 15a al. 4 LCR n’exige donc pas que la première infraction ait déjà fait l’objet d’une décision de retrait. Le TF nie ainsi l’application de l’art. 49 CP, qui aurait pour effet de privilégier le conducteur qui a commis plusieurs infractions en peu de temps et engendrerait une inégalité de traitement inadmissible avec un conducteur qui a commis les mêmes infractions mais sur une période plus longue.

Art. 4 LPD al. 4, Art. 12 LPD, Art. 13 LPD, Art. 140 CPP, Art. 141 CPP

Exploitation de moyens de preuve obtenus illégalement. Le recourant a été condamné pour de multiples infractions – graves pour certaines – à la loi sur la circulation routière sur la base d’enregistrements vidéo (dashcam) fournis par un tiers privé. Les enregistrements vidéo à partir d’un véhicule appartenant à un tiers ne sont pas facilement reconnaissables par les autres conducteurs. Ils sont donc secrets au sens de l’art. 4 al. 4 LPD et, partant, illicites sous réserve d’une justification ou d’un intérêt public ou privé prépondérant (art. 12 et 13 al. 1 LPD). L’exploitation de tels moyens de preuve dans le cadre d’une procédure pénale est soumise aux conditions des art. 140 s. CPP. D’après l’art. 141 al. 2 CPP, les preuves obtenues en violation de règles de validité ne peuvent être exploitées que pour élucider des infractions graves. Cette même règle s’applique aux preuves obtenues illicitement par des particuliers. Les infractions des art. 90 al. 1 et 2 LCR n’étant pas des infractions graves au sens de l’art. 141 al. 2 CPP selon la jurisprudence, le TF confirme l’inexploitabilité des enregistrements vidéo fournis par le particulier et admet le recours.

Art. 90 LCR al. 3, Art. 90 LCR al. 4, Art. 100 LCR al. 4

Excès de vitesse qualifié ; course officielle urgente. Le policier qui, lors d’une course officielle urgente, commet un excès de vitesse qualifié au sens de l’art. 90 al. 4 let. b LCR, ne peut prétendre à l’impunité sur la base de l’art. 100 ch. 4 LCR, cela même s’il pensait devoir prêter main forte à des collègues au cours d’une interpellation. La peine peut cependant être atténuée si le policier, bien que n’ayant pas fait preuve de la prudence imposée par les circonstances, n’a pas adopté un comportement totalement inconsidéré. En l’espèce, la situation ne présentait aucune circonstance externe ou exceptionnelle qui aurait permis de retenir que le recourant n’avait pas eu la volonté d’adopter la vitesse enregistrée et d’accepter les risques y relatifs. Il a sciemment augmenté sa vitesse alors qu’il se trouvait dans une zone d’habitation, acceptant ainsi de ne pouvoir, en cas d’obstacle ou de présence inopinée d’un autre usager sur la chaussée, réagir à temps afin d’éviter un accident ou de conserver la maîtrise de son véhicule. Les éléments constitutifs de l’infraction réprimée par l’art. 90 al. 3 et 4 LCR sont réalisés. Le recourant peut toutefois bénéficier d’une atténuation de la peine car la course a été interrompue dès qu’il a réalisé que l’interpellation n’était pas imminente et parce que l’excès de vitesse a été limité dans le temps et l’espace.