Droit du développement territorial

Admissibilité de l’expropriation. Une expropriation fondée sur l’art. 58 al. 1 LPE peut être envisagée pour toutes les décharges conformes à l’OLED en cas de besoin avéré, et est compatible avec la garantie de la propriété et la liberté économique invoquées par le recourant (consid. 3.2.5). Le besoin pour l’expropriation contestée est suffisamment démontré, au vu du constat d’un manque de décharges de type A dans l’ensemble du canton. L’expropriation peut donc être fondée sur l’art. 58 al. 1 LPE. Cela signifie également que l’intérêt public pour l’expropriation est donné (consid. 3.3). La commune de St-Gall peut être mise au bénéfice du droit d’expropriation pour l’exploitation de la décharge sur le territoire d’une autre commune du canton ; l’intérêt public à la réalisation de l’extension de la décharge suffit pour revendiquer le droit d’expropriation (consid. 4.4).

ATF 147 II 465 (d)

2021-2022

Transformation d’une étable-grange située en zone agricole en maison de vacances. Le TF confirme sa jurisprudence selon laquelle le renvoi de l’art. 9 al. 2 LRS se réfère seulement aux règles sur les constructions protégées (art. 24d al. 2 et 3 LAT) et sur les constructions en tant qu’éléments caractéristiques du paysage (art. 39 al. 2 à 5 OAT), dans les deux cas en relation avec l’art. 43a OAT (consid. 3.1). L’art. 24d al. 2 LAT sert à garantir la protection des droits acquis découlant de la garantie de la propriété. Il suppose donc que les constructions dont l’affectation doit être modifiée soient encore utilisables conformément à leur destination au moment de la modification. Les constructions qui ne le sont pas ne tombent pas dans le champ d’application de cette disposition (consid. 4.2.1 et 4.2.2). Il apparaît en l’espèce douteux que la construction soit utilisable conformément à sa destination au vu de son état de conservation, mais ce point peut être laissé ouvert (consid. 4.2.3 et 4.2.4). L’art. 24d al. 2 LAT exige, outre sa mise sous protection au sens formel, que le bâtiment soit, comme objet individuel, matériellement digne d’être protégé. Le caractère digne de protection peut résulter de facteurs liés à la protection des monuments. Dans certaines circonstances, des aspects de la protection du paysage peuvent également faire apparaître une construction comme digne de protection (consid. 4.3.1). L’étable-grange n’atteint en l’occurrence pas la valeur de protection requise par l’art. 24d al. 2 LAT (consid. 4.3.3 et 4.3.4).

ATF 147 II 484 (d)

2021-2022

Changement d’affectation de terrains non équipés en zone à bâtir ; protection contre le bruit. Les exigences en matière de protection contre le bruit pour l’équipement d’une zone à bâtir doivent également être prises en compte lorsqu’un terrain non équipé doit être affecté en zone à bâtir. Un changement d’affectation en zone à bâtir d’une parcelle qui ne peut pas être équipée n’est pas admissible (consid. 3). L’art. 30 OPB concrétise et précise l’art. 24 al. 2 LPE (consid. 4.2). Lors d’une planification en plusieurs étapes, il convient de s’assurer dès la première étape que dans le cadre de la planification ultérieure une solution appropriée puisse être trouvée afin de respecter les valeurs de planification dans la majorité de la zone (consid. 4.3). En l’espèce, il n’est pas établi que la parcelle litigieuse puisse être équipée conformément aux prescriptions légales après son changement d’affectation. Le plan partiel d’affectation de Stoglen ne satisfait ainsi pas aux exigences du droit fédéral en matière de protection contre le bruit (consid. 4.3.4).

ATF 148 II 139 (d)

2021-2022

Admissibilité d’un plan d’aménagement détaillé cantonal pour le parc d’innovation de Zurich (IPZ) sur le site actuel de l’aérodrome militaire de Dübendorf. La qualité pour recourir prévue par l’art. 89 al. 1 LTF est conçue en premier lieu pour les personnes privées, mais peut également concerner, de manière restrictive, les collectivités publiques (consid. 3.1). Le canton de Zurich est en l’occurrence concerné par la décision attaquée en tant que titulaire d’un droit de superficie, ce qui lui confère une position comparable à celle d’une personne privée. Il poursuit également un objectif public propre, fondé sur des intérêts publics importants, avec la réalisation prévue du parc d’innovation de Zurich, lequel revêt un intérêt national supérieur (consid. 3.2). Bien que la fondation « Innovationspark Zürich » (IPZ) et les deux sociétés chargées de la réalisation du parc d’innovation n’aient pas participé à la procédure de première instance, leur intérêt à agir n’est né qu’avec l’arrêt contesté ; la qualité pour recourir leur est donc reconnue (consid. 3.3.4). Il n’y a pas de comportement abusif de l’intimé 2, voisin du projet de construction litigieux, dans la mesure où rien n’indique qu’il n’aurait pas agi dans son propre intérêt ou qu’il aurait poursuivi d’autres intérêts. Le seul fait qu’il aurait pu être motivé par l’intimé 1 à recourir ne rend pas son recours manifestement abusif, et pour lequel aucune preuve déterminante ne peut être apportée (consid. 5.5). Le caractère d’intérêt national prépondérant du parc d’innovation doit être pris en compte dans l’interprétation et l’application des dispositions cantonales pertinentes (consid. 7). Se fondant sur l’intérêt national prépondérant de l’IPZ, ainsi que sur sa planification dans le plan directeur cantonal, le TF confirme le besoin d’utiliser un plan détaillé cantonal, bien que le droit cantonal ne le prévoie pas dans une telle hypothèse (consid. 8), et confère à un tel plan la faculté de déroger à l’affectation de la zone agricole (consid. 9).

ATF 148 II 198 (d)

2021-2022

Autorisation de construire, rénovation du camping, espace réservé aux eaux de la Muota. L’article 41a al. 1 OEaux, qui fixe l’espace réservé aux cours d’eau dans des sites dont les buts de protection sont liés aux eaux, est applicable en zone d’habitation (consid. 4.4). La détermination de la largeur du fond de lit selon l’art. 41a OEaux correspond en général à la largeur naturelle du lit mineur dans le cas de cours d’eau proches de l’état naturel ; pour les cours d’eau rectifiés et aménagés, la largeur naturelle du lit mineur doit en revanche être déduite (consid. 5.3). Les facteurs de correction doivent prendre en compte la formation de l’embouchure et du delta de la Muota (consid. 6.4). La protection découlant de l’inventaire ISOS doit être prise en compte à la fois dans la fixation d’un espace réservé aux eaux, dans la revitalisation du cours d’eau ainsi que la procédure d’autorisation de construire concernant la rénovation du camping ; pour assurer cette protection, il s’agit d’augmenter la largeur de l’espace réservé au cours d’eau (consid. 7.6). Le TF examine enfin les conditions auxquelles la rénovation du camping doit satisfaire (consid. 8).

ATF 148 II 36 (d)

2021-2022

Parc éolien de la Montagne de Granges ; obligation de prévoir le site dans un plan directeur ; mesures pour la protection des oiseaux et des chauves-souris ; intérêt à la production d’énergie renouvelable ; pesée globale des intérêts. Au vu des effets importants du projet du parc éolien sur le territoire et l’environnement, celui-ci doit avoir été prévu dans le plan directeur, conformément à l’article 8 al. 2 LAT. Un examen approfondi du plan directeur doit permettre d’écarter les sites d’emblée non réalisables, et de choisir parmi les sites les plus appropriés. Dans ce cadre, il faut tenir compte de l’intérêt à la protection des espèces menacées, qui présente un potentiel conflit d’intérêt avec les éoliennes (consid. 2.1 et 2.5). En l’espèce, cet examen a été complété dans le cadre de l’adoption du plan d’affectation ; le projet ne doit ainsi pas être annulé du seul fait d’un examen incomplet dans le cadre du plan directeur. Le plan d’affectation doit toutefois satisfaire aux exigences du droit fédéral en matière de protection des biotopes, des espèces et du paysage (consid. 2.6). L’importance primordiale du développement des énergies renouvelables dans le contexte du changement climatique est mise en balance avec la protection de la biodiversité (consid. 13.1 et 13.2). L’exploitation de l’énergie éolienne doit s’efforcer de réduire le risque de collisions et de perturbation des habitats à un niveau compatible avec la protection des biotopes et des espèces, et à compenser les atteintes par des mesures de remplacement, sans pour autant rendre impossible l’utilisation de l’énergie éolienne (consid. 13.5). En l’occurrence, la pesée globale des intérêts conduit à renoncer aux deux sites d’implantation les plus proches du site de nidification de faucons pèlerins (consid. 13.6), et à imposer des mesures de protection supplémentaires (consid. 14).

Droit d’être entendu ; publication des décisions en matière de résidences secondaires. Le droit de consulter le dossier n’est pas nécessairement lié au droit d’opposition. Ce droit est accordé aux parties à une procédure judiciaire ou administrative, mais également aux tiers qui n’ont pas la qualité de partie et qui rendent vraisemblable un intérêt digne de protection qui l’emporte sur des intérêts (privés ou publics) contraires. Un examen et une pesée des intérêts complète est ainsi nécessaire ; il ne suffit ainsi pas de se référer à l’expiration du délai d’opposition. En l’occurrence, la recourante possède la qualité pour recourir et peut en tout cas consulter tous les documents susceptibles de constituer la base de la décision ; son droit d’être entendu a ainsi été violé par l’instance inférieure (consid. 2). Le TF se penche pour la première fois sur le rapport entre l’art. 20 al. 1 LRS et l’art. 12b LPN. Il conclut que l’art. 20 al. 1 LRS constitue une lex specialis par rapport à l’art. 12LPN, avec pour conséquence que les demandes de permis de construire relevant du champ d’application de la LRS ne doivent pas obligatoirement être publiées dans la feuille officielle cantonale, mais que le droit cantonal peut également prévoir d’autres organes de publication, sous réserve que cela n’empêche pas l’exercice du droit de recours ou ne le rende pas excessivement difficile (consid. 4). L’art. 20 al. 1 LRS doit toutefois être interprété de manière restrictive lorsqu’une autre tâche fédérale est liée au projet de construction ; dans cette hypothèse, la notification est régie par l’art. 12b LPN, à l’exclusion de l’art. 20 LRS. Dans la mesure où le dossier en l’état ne permet pas de déterminer si une autre tâche fédérale est en cause, ce qui déclencherait l’obligation de publication dans la feuille officielle cantonale, l’affaire est renvoyée à l’instance inférieure (consid. 5).

ATF 148 II 155 (d)

2021-2022

Inscription d’un bien-fonds au cadastre des sites pollués ; délimitation entre stockage et valorisation. Le TF se penche sur la délimitation entre le stockage des déchets et leur valorisation en tant que matériaux de construction. A la lumière de la modification récente de l’art. 19 al. 2 OLED, il faut reconsidérer la distinction actuelle entre valorisation et stockage dans le contexte de l’art. 2 al. 1 let. a OSites lorsque les polluants parviennent dans le sous-sol. En cas de comblement avec des matériaux contaminés dans le sous-sol, il n’est généralement pas possible de déterminer après coup si le but premier est la valorisation ou le dépôt ; les deux objectifs sont souvent poursuivis simultanément. On ne voit pas pourquoi il y aurait une différence entre le fait que des polluants aient été introduits dans le sous-sol par une valorisation (qui n’est plus autorisée aujourd’hui) ou par un stockage. Inversement, il semble contradictoire d’inscrire au cadastre des sites contenant des remblais avec des matériaux d’excavation faiblement pollués en tant que sites de stockage, alors même que ces matériaux peuvent désormais être traités et revalorisés sur place conformément à l’art. 19 al. 2 let. d OLED, sans qu’une inscription au cadastre ne soit nécessaire (consid. 4.2). Selon le droit en vigueur, l’inscription au cadastre est uniquement liée à la charge en déchets. Les sites pollués sont ainsi inscrits dans le cadastre des sites pollués et restent dans le cadastre, même si les analyses montrent qu’il n’y a pas d’obligation de surveillance ou d’assainissement, c’est-à-dire que les polluants déposés ne présentent actuellement aucun danger concret pour les biens environnementaux, mais qu’ils devraient être éliminés dans les règles de l’art en cas de travaux de génie civil. Si l’obligation d’inscription n’était plus considérée comme judicieuse, une révision des art. 32c LPE et 2 à 6 OSites serait nécessaire (consid. 5.5).

Approbation du plan « N04 Neue Axenstrasse » ; reclassement d’une route nationale ; Convention alpine ; Loi sur le CO2. Recours des associations de défense de l’environnement contre la décision d’approbation du plan « N04 Neue Axenstrasse » qui prévoit la construction de deux tunnels routiers entre Ingenbohl et Gumpisch, ainsi que l’aménagement d’une galerie de protection. Le Conseil fédéral n’a pas outrepassé ses compétences en classant la N04 Neue Axenstrasse en tant que route nationale de deuxième classe (consid. 3). Au regard de l’art. 4a LRN, il ne ressort pas des méthodes d’interprétation usuelles que le Conseil fédéral ne serait pas habilité à reclasser des tronçons de route nationale autrement que dans des cas mineurs ; seul un reclassement qui entraînerait une modification importante de l’ensemble du système devrait être décidée par l’Assemblée fédérale (consid. 3.5.7). L’art. 2 par. 2 let. j de la Convention alpine est une disposition programmatique et non directement applicable ; elle n’est par conséquent pas justiciable (consid. 4.4.3). La Suisse n’ayant pas ratifié le Protocole Transports de la Convention alpine, celui-ci ne déploie pas d’effet contraignant à l’égard de la Confédération (consid. 4.4.4). L’exécution des mesures de politique climatique et la mise en œuvre des obligations découlant de l’Accord de Paris s’appuient sur les lois nationales existantes, à savoir la Loi sur le CO2 actuellement en vigueur, sa révision totale ayant été rejetée en votation populaire en juin 2021 (consid. 5.4.2). Dans la mesure où aucune mesure de réduction des émissions de CO2 pour les routes nationales n’est prévue dans la Loi sur le CO2 ou la LEne, il n’est pas nécessaire d’examiner leur prise en compte lors de l’étude d’impact sur l’environnement (consid. 5.4.3). Il n’y a pas non plus de violation des principes de développement durable (art. 2 al. 2 et 73 Cst.) et de précaution (art. 74 al. 2 1re phrase Cst. et 1 al. 2 LPE) (consid. 5.4.4.1 et 5.4.4.2).