Densification ; inventaire communal des sites protégés ; pondération des intérêts. Le projet consiste en la démolition et la reconstruction d’un quartier par une coopérative dans le but de rendre le quartier plus dense avec en particulier de nombreuses unités résidentielles supplémentaires. Afin de rendre possible la réalisation du projet, la Ville de Zurich prend la décision de retirer le site de l’inventaire des biens protégés d’importance communale. La Ville de Zurich et la coopérative interjettent recours au TF contre l’arrêt du tribunal cantonal annulant la modification de l’inventaire. En substance, le TF retient que c’est à juste titre que le tribunal cantonal a reconnu au quartier un intérêt à être protégé comme monument historique et qu’il existe un intérêt public important à sa conservation. Le TF souligne que ce n’est pas parce que le site est digne de protection que des mesures de conservation doivent être ordonnées, mais que dans tous les cas l’autorité doit procéder à une pesée des intérêts. En l’espèce, le TF considère comme majeur l’intérêt public à la conservation du quartier en raison non seulement de son apport sur le plan historique, mais également en raison de ses qualités architecturales. S’agissant de l’intérêt public à la densification du milieu bâti, celui-ci est considéré comme mineur dans ce cas. En effet, la préservation des bâtiments historiques nécessite justement que la zone ne soit pas exploitée de manière intensive et quand bien même un objectif de densification devait être poursuivi dans cette zone, d’autres alternatives existent pour celle présentée dans ce cas au TF.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Compensation de la plus-value. Sur recours de la commune de Liestal, le TF est appelé à se prononcer sur la conformité de la réglementation cantonale relative à la plus-value à la lumière du droit fédéral. Selon l’art. 5 al. 1 LAT, le droit cantonal établit un régime de compensation permettant de tenir compte équitablement des avantages et des inconvénients majeurs qui résultent de mesures d’aménagement. Les changements d’affectation et les augmentations des possibilités de construire entrent dans le champ d’application de cette disposition. La réglementation cantonale prévoit une compensation de la plus-value lors de nouvelles mises en zone à bâtir tout en interdisant aux communes d’adopter leurs propres normes s’agissant des changements d’affectation et de l’augmentation des possibilités de bâtir. Le TF retient qu’une telle restriction n’est pas conforme à l’art. 5 LAT puisqu’elle interdit aux communes d’adopter des normes en vue de compenser la plus-value en cas de changement d’affectation ou d’augmentation des possibilités de bâtir.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Qualification des actes ; voies de droit. Saisi d’un recours direct, le TF est appelé à se prononcer sur la qualification de l’ordonnance thurgovienne sur les petites localités (Kleinsiedlungsverordnung). Après un rappel des distinctions entre normes générales et abstraites et décisions individuelles et concrètes, le TF s’attarde sur les caractéristiques des plans d’affectation en tant qu’acte hybride. Eu égard aux normes fédérales en matière d’instance de recours vis-à-vis de ce type d’acte juridique (art. 33 LAT), le TF doit trancher la question de savoir si l’ordonnance dont il est question en l’espèce entre dans la catégorie de plan d’affectation. Sur ce point, le TF souligne que la simple absence de plan annexé à l’ordonnance ne permet pas à elle seule d’exclure la qualification de plan d’affectation. La qualification de l’acte nécessite en effet un examen minutieux de son contenu. En cela, l’ordonnance dont il est question en l’espèce permet, par le biais de coordonnées géographiques, d’identifier précisément les parcelles touchées par la réglementation. En outre, elle contient des renvois au règlement d’affectation des zones agricoles et de protection ce qui correspond en pratique à une zone réservée au sens de l’art. 27 LAT ou éventuellement à une planification provisoire et permet de garantir une période transitoire jusqu’à la révision de la planification. A la lumière de ces considérations, le TF retient que l’ordonnance litigieuse constitue un plan d’affectation au sens matériel et par conséquent qu’elle doit pouvoir faire l’objet d’un recours au niveau cantonal. Pour cette raison, le recours est irrecevable devant le TF.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Egalité de traitement. Le principe de l’égalité de traitement ne peut pas être invoqué avec succès par des voisins qui se plaignent de ne pas avoir été autorisés en leur temps à construire un mur en panier de pierres et une clôture à distance et hauteur plus élevées que ne le permet le règlement cantonal, alors que l’autorité de police des constructions a renoncé à ordonner la remise en état d’une construction analogue réalisée ultérieurement dans le quartier, également à distance et hauteur plus élevées que les valeurs réglementaires. La situation n’est pas similaire dans la mesure où, dans le premier cas, la commune avait refusé de tolérer le dépassement de la hauteur en cours de travaux, alors que dans le second cas les travaux étaient déjà achevés.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Zone de verdure ; ISOS. Dans cet arrêt, le TF est appelé à examiner la possibilité pour un agriculteur de construire un pressoir en zone de verdure, zone qui, selon le règlement communal, se trouve être en zone à bâtir. La commune est inventoriée depuis 1992 dans l’ISOS et il appert qu’à l’époque la création de zones de verdure par la commune avait pour objectif de préserver les vignobles de nouvelles constructions. En s’appuyant sur sa jurisprudence, le TF confirme que le but principal de la zone prime le règlement communal. Aussi, l’objectif de préservation du site construit tend à exclure le caractère de zone bâtir de la zone de verdure.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Constructions et installations existantes sises hors de la zone à bâtir et non conformes à l’affectation de la zone. Dans cet arrêt de première importance, le TF précise sa jurisprudence s’agissant des ordres de démolition portant sur des constructions illégales. En effet, en zone à bâtir, une construction non conforme peut être maintenue – et sa non-conformité guérie – après l’écoulement d’une période de trente ans ; en cela elle bénéficie d’un délai de prescription qui lui est favorable. En revanche, comme le retient le TF dans cet arrêt, et ce pour la première fois, lorsque la construction illégale se trouve hors zone à bâtir, le principe cardinal de l’aménagement du territoire à savoir la séparation stricte des zones à bâtir et des autres zones prévaut et ni la sécurité juridique ni l’égalité de traitement ne peuvent y faire obstacle. En conséquence, hors zone à bâtir, aucune construction non conforme ne peut tirer profit de l’écoulement du temps.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Dans cette affaire, le TF examine la décision de modification du plan directeur s’agissant de la planification de décharges la lumière de l’autonomie dont jouissent les communes zurichoises en matière de gestion de déchets, subsidiairement en matière d’aménagement du territoire. Le TF débute son analyse en soulignant les compétences des communes en matière de gestion des déchets. Dans le canton de Zurich, les communes remplissent des tâches en la matière de manière indépendante conformément à la législation cantonale sur la gestion des déchets et disposent à ce titre d’une certaine autonomie au sens de l’art. 50 Cst. La révision du plan directeur cantonal, contestée en l’espèce, représente un changement d’orientation pour le canton en matière de planification des décharges en prévoyant un seul site par type de décharges. L’enjeu de cette affaire se concentre sur la participation des communes et association de communes dans ce changement d’orientation. Le TF rappelle que les communes doivent pouvoir participer à la préparation des plans directeurs dans les domaines qui touchent leurs intérêts. En outre, en raison de l’impact qu’exercent les décharges sur le territoire, domaine protégé par l’autonomie communale, le processus doit donner la voix aux communes pour que ces dernières puissent faire valoir leurs arguments. L’absence de participation des communes sur la révision du plan directeur cantonal constitue une lacune sur le plan de la coordination au sens de l’art. 2 al. 1 LAT. Au-delà de l’aspect formel, une participation effective des communes permet de sélectionner les sites les plus appropriés pour l’installation de décharges et participe dès lors à une planification de qualité.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Stand de tir, protection contre le bruit. Selon l’art. 11 al. 1 et 2 LPE, les nuisances à l’instar du bruit sont limitées par des mesures prises à la source dans la mesure que permettent l’état de la technique et les conditions d’exploitation et pour autant que celles-ci soient économiquement supportables. En matière de bruit, respectivement de vibrations, l’art. 15 LPE dispose que les valeurs limites d’immissions sont fixées de telle manière à ce qu’en-deçà, la population ne s’en trouve pas gênée dans son bien-être. Le TF débute son analyse en soulignant que l’intérêt à la défense nationale ne permet pas de faire fi des prescriptions en matière environnementale mais que celles-ci ne doivent pas rendre les exercices de tir en dehors des heures de service impossibles ou presque impossibles, raison pour laquelle des allégements peuvent être accordés ; cela n’est en principe pas le cas des tirs civils qui ne présentent pas d’intérêt public. En l’espèce, il n’est pas contesté que les valeurs limites d’immissions fixées pour les stands de tir sont dépassées. Le TF retient que les exercices de tir contestés ne sont pas de nature privée et revêtent également un intérêt pour la défense nationale. La distinction entre les tirs volontaires et les tirs obligatoires s’opère au moment de la pesée des intérêts au sens de l’art. 14 al. 1 OPB. Ainsi, l’importance des tirs volontaires se révèle moindre par rapport au tir obligatoire ; pour cette raison, tandis qu’il n’est pas envisageable de limiter le temps consacré au tir obligatoire, une limitation du nombre de demi-journées consacrées au tir volontaire est admissible, tout en précisant que dans l’intérêt de la défense nationale il demeure nécessaire de conserver un certain nombre de demi-journées pour les exercices de tir volontaires. Sur fond de recherches de solution intercantonale s’agissant des stands de tir, le TF retient une réduction à 11.5 demi-jours par an au lieu de 13.5 tout en soulignant que la limitation sera plus importante dès qu’une solution intercantonale aura été trouvée.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Districts francs ; distinction entre « chasse » et « tir ». Sur recours d’une organisation de protection de la nature, le TF est appelé à se prononcer sur la légalité d’un avenant du Conseil d’Etat valaisan prévoyant notamment l’ouverture partielle de la chasse de cerfs du district franc fédéral de la forêt d’Aletsch afin de réduire la population de cervidés à l’origine de dommages. Selon l’art. 11 al. 5 LChP, la chasse est interdite dans les districts francs ; les organes cantonaux d’exécution peuvent cependant y autoriser le tir d’animaux non protégés lorsque l’exigent la sauvegarde des biotopes, la conservation de la diversité des espèces, des raisons cynégétiques ou la prévention de dommages excessifs causés par le gibier. Le TF débute son analyse en distinguant les notions de « chasse » et de « tir » en précisant en particulier que le tir doit être ordonné sur une base individuelle et spécifique détaillant les personnes habilitées à tirer et spécifiant en particulier l’espèce, le sexe, l’âge du gibier ainsi que la période, les moyens et la zone du tir à effectuer. En outre, une pesée des intérêts doit être opérée afin de déterminer si la mesure et proportionnée notamment à la lumière des intérêts de l’agriculture et des objectifs de la protection de la nature et du paysage et à la conservation des forêts (art. 9 al. 1 ODF). En l’espèce, en habilitant un groupe de personnes, à savoir toutes les personnes ayant le permis de chasse, l’avenant réglemente un cas précis. Cela dit, il ne comporte pas un ordre individuel et spécifique ce qui tend à exclure la qualification de « tir » au sens de la loi. Dans la mesure où le principe est l’interdiction de la chasse dans un district franc fédéral et que l’avenant ne remplit pas les critères de l’art. 11 al. 5 LChP, l’ouverture partielle de la chasse de cerfs dans le district franc fédéral de la forêt d’Aletsch n’est pas conforme du droit fédéral.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Barrage hydroélectrique ; pesée des intérêts ; rôle du plan directeur. Sur recours de deux organisations de protection de la nature, le TF est appelé à se prononcer sur le rehaussement de deux murs du barrage du Grimsel. En substance, le TF se montre critique eu égard à l’évaluation incomplète des intérêts en présence. Le TF souligne le manque de coordination entre le projet de rehaussement et la centrale électrique de Trift, qui ensemble déploient des effets considérables sur le territoire et l’environnement dans la région. En outre, la prise en compte des intérêts de la protection de la nature et du paysage est considérée comme lacunaire par le TF. Pour ces raisons, il revient au Conseil d’Etat bernois de compléter le plan directeur cantonal dans le sens de ces considérants. A noter que l’arrêt apporte quelques éclaircissements sur la notion d’intérêt national à la production d’énergie renouvelable au sens de l’art. 12 LEne.
Valérie Défago, Séverine Beuret
Projet de construction d’un parc éolien ; efficacité des mesures de compensation. Dans cet arrêt, il revient au TF d’examiner la conformité au droit de l’environnement du projet de parc éolien de Sainte-Croix. Selon l’art. 18 al. 1 LPN, la disparition d’espèces animales et végétales indigènes doit être prévenue par le maintien d’un espace vital suffisamment étendu (biotope), ainsi que par d’autres mesures appropriées. L’al. 1ter dispose que lorsque tous les intérêts sont pris en compte et qu’il est impossible d’éviter des atteintes, l’auteur doit veiller à prendre des mesures particulières pour en assurer la meilleure protection possible, la reconstitution ou, à défaut, le remplacement adéquat. En l’espèce, le projet de parc éolien porte atteinte à différentes espèces d’oiseaux nicheurs en danger et il y a en ce sens une atteinte à des biotopes dignes de protection au sens de l’art. 18 al. 1ter LPN. Selon la loi, toute atteinte n’est d’emblée pas exclue ; en effet, elle peut être autorisée à certaines conditions. L’atteinte doit être inévitable et l’installation doit poursuivre un intérêt prépondérant. Partant, une pesée des intérêts doit être réalisée en prenant en compte l’importance des atteintes prévisibles, respectivement l’intérêt public à la réalisation du projet et l’efficacité des mesures de compensation. Dans cet arrêt, après un examen minutieux opéré par le TF des rapports sur l’impact du projet sur l’avifaune, respectivement les différentes mesures de compensation au sens de l’art. 15 OPN, en particulier celles en matière de restriction du trafic motorisé, le TF retient que la limitation du trafic motorisé lié aux activités de loisirs durant la période qui s’étend jusqu’à fin mai est une mesure de compensation judicieuse et efficace et proportionnée par rapport à l’intérêt touristique.
Valérie Défago, Séverine Beuret