Droit du développement territorial

Art. 15 et 38a al. 2 LAT ; 52a al. 1 OAT

Application des dispositions transitoires de la LAT révisée au recours pendant devant la dernière instance cantonale. En principe, une instance de recours applique le droit en vigueur au moment où l’autorité de première instance a statué. Toutefois, elle applique le nouveau droit lorsque la nouvelle règle répond à un intérêt public majeur et dont la mise en œuvre ne souffre aucun délai, étant tenu compte également du pouvoir d’examen complet dont elle doit disposer à cet effet. Dans un contexte de surdimensionnement notoire des zones à bâtir, la révision de la LAT est fondée sur la prémisse que les plans directeurs cantonaux jusqu’alors en vigueur ne sont pas conformes aux exigences légales définissant les besoins en zones à bâtir. L’art. 38a al. 2 LAT, qui limite l’extension de zones à bâtir dans l’attente des planifications directrices conformes au nouveau droit, relève d’un intérêt public majeur et est d’application immédiate.

Art. 38a LAT ; 52a al. 2 OAT

Application du moratoire sur l’extension de la zone à bâtir.

Selon les dispositions transitoires, à compter de l’entrée en vigueur de la révision de la LAT et pour une durée de cinq ans, seuls les classements compensés par des déclassements de même surface sont autorisés. Cela suppose une simultanéité entre les deux opérations. Exceptionnellement, le déclassement peut être différé si le projet présente un caractère urgent. Toutefois, quelle que soit l’urgence, cela ne lève pas l’obligation de déclasser une surface équivalente, le cas échéant de manière différée. Peuvent être reconnus comme projet urgent la construction d’un bâtiment public de grande importance ou d’autres zones d’importance cantonale. En revanche, toute nouvelle zone située dans un pôle de développement ne peut être qualifiée automatiquement de zone d’importance cantonale sans un examen concret du projet ni la réalisation de la condition de l’urgence, celle-ci devant en outre être appréciée à l’échelle d’un moratoire de 5 ans.

Art. 6, 22 LapEl ; 6 PA

Lorsque l’ElCom vérifie d’office les tarifs de l’électricité, elle agit en tant qu’autorité de surveillance. Les parties à la procédure sont l’ElCom en tant qu’auteur de la mesure de surveillance et les destinataires de celle-ci, à savoir les entreprises électriques et les exploitants de réseaux. En revanche, les consommateurs sont des tiers à cette procédure, qui ne sont touchés que de manière indirecte. La situation est différente lorsqu’un consommateur se trouve en litige avec un fournisseur d’électricité et que l’intervention de l’ElCom est demandée conformément à l’art. 22 al. 2 let. b LApEl. Dans ce cas, la qualité de partie lui est acquise. Selon l’art. 6 al. 1 LApEl, le gestionnaire de réseaux fournit aux consommateurs captifs et aux consommateurs finaux de l’électricité à tarif raisonnable. En cas de bénéfice tiré par l’entreprise d’approvisionnement de son accès au réseau, celui-ci doit profiter tant aux consommateurs captifs qu’aux consommateurs finaux. La méthode de calcul utilisée par l’ElCom pour vérifier les prix est conforme au droit.

ATF 142 II 128 (d)

2015-2016

Aéroport de Zurich ; principes régissant l’octroi d’indemnités pour survols lors d’approches par le sud.

L’indemnisation en cas de survol direct suppose une atteinte directe au droit de propriété. Une telle atteinte présuppose une atteinte spécifique d’ordre physique ou psychique, provoquée par l’intrusion des avions dans l’espace aérien du bien-fonds ; le seul bruit des avions ne suffit pas, même dépassant les valeurs limites d’immission. Les survols à 350 mètres de hauteur ne constituent pas une atteinte au droit de propriété. Concernant l’expropriation formelle des droits de voisinage, la date retenue par le TF est celle du 1er janvier 1961. Il s’agit d’une règle générale, applicable à toutes les procédures et qui doit être appliquée de manière stricte, même si l’agencement des vols se modifie par la suite.

Principes régissant les indemnisations en cas de survols directs.

En cas de survol direct d’un bien-fonds, l’indemnisation liée au bruit est due indépendamment de savoir si l’évolution du bruit était prévisible au moment de l’acquisition de la parcelle. La moins-value est ainsi indemnisée pour toute la parcelle et pas uniquement pour la partie réellement survolée. Toutefois, cette pratique peut conduire à des résultats choquants, lorsque des parcelles particulièrement grandes ou sur lesquelles sont construits plusieurs bâtiments ne sont que partiellement survolées. Ainsi, il se justifie de limiter l’indemnisation à la partie du terrain qui est effectivement survolée. En outre, en vertu des principes de sécurité du droit et d’égalité de traitement, il convient d’appliquer le modèle de la Commission fédérale d’évaluation (CFE) pour le calcul des moins-values liées au bruit des immeubles locatifs. Finalement, le propriétaire a également droit à une indemnisation pour les conséquences liées aux survols directs, mais qui ne sont pas dues au bruit. Le montant du supplément doit être estimé au cas par cas.

Art. 26 et 27 Cst. ; 1 et 3 LGL/GE

Droit de préemption communal ; logements d’utilité publique ; intérêt public ; proportionnalité ; garantie de la propriété ; liberté économique.

Le besoin de logements d’utilité publique d’une collectivité poursuit un intérêt public. La décision d’une commune de faire usage de son droit de préemption légal peut porter sur une parcelle déjà bâtie pour autant que le potentiel constructible ne soit pas épuisé. L’autorité qui exerce son droit de préemption ne doit pas nécessairement être à même de réaliser immédiatement des logements d’utilité publique sur la parcelle qu’elle entend acquérir. Elle doit cependant rendre plausible l’existence d’un besoin précis et tenir compte des possibilités réelles de le satisfaire à l’emplacement envisagé, dans un avenir pas trop éloigné. La construction de 2 à 5 logements d’utilité publique dans le cadre d’une surélévation d’immeubles justifie, sous l’angle de la proportionnalité, l’acquisition dudit immeuble comprenant 32 logements à loyer libre.

ATF 141 II 476 (f)

2015-2016

Art. 11 al. 2 et 12 al. 1 let. a LPE ; 7 al. 1 let. a OPB

Valeurs de planification et principe de limitation préventive des émissions, construction sans droit d’une pompe à chaleur.

En matière de protection contre le bruit, la construction d’une installation implique une application cumulative des valeurs de planification et du principe de la limitation préventive des émissions. Le seul respect des valeurs de planification, qui ne sont pas des valeurs limites d’émission, ne garantit pas que toutes les mesures de limitation imposées par le principe de prévention aient été prises et que le projet respecte la législation en matière de protection de l’environnement. Il s’agit partant de déterminer dans chaque cas d’espèce, en lien avec les critères définis par les art. 11 al. 2 LPE et 7 al. 1 let. a OPB, dans quelle mesure une limitation supplémentaire des émissions peut être exigée en vertu du principe de prévention. L’appréciation des émissions induites par une nouvelle installation et la protection des tiers contre les atteintes nuisibles et incommodantes sont déterminantes pour le choix de son emplacement. Même si la construction respecte les valeurs de planification, elle viole le principe de prévention lorsque, érigée sans droit, un autre emplacement limitant les nuisances sonores était disponible et économiquement supportable.

ATF 141 II 483 (d)

2015-2016

Art. 18 LPE ; 8 al. 2 OPB

Modification notable d’une installation routière existante.

Les mesures de protection contre le bruit applicables à une installation, en l’espèce une section de route nationale, diffèrent en fonction de la qualification de l’installation elle-même, qu’elle soit nouvelle, existante et sujette à assainissement ou modifiée et sujette à assainissement. On qualifie de notable une modification d’une installation existante lorsqu’elle risque d’entraîner la perception d’immissions de bruit plus élevées. Il est toutefois nécessaire de procéder à une appréciation globale de la portée des travaux de construction, des coûts et des effets sur la durée de vie de l’ensemble de l’installation. Une modification notable impose notamment l’installation de fenêtres insonorisées sur les bâtiments concernés par le dépassement des valeurs limites d’immission, à charge en l’occurrence de la Confédération.

žATF 142 I 26 (i)

2015-2016

Art. 23 LST/TI, 117 RLST/TI

Emplacement des antennes de téléphonie mobile ; autonomie communale ; contrôle abstrait.

Les communes tessinoises bénéficient d’une grande autonomie en matière de planification et de construction, et particulièrement pour l’adoption et les modalités d’exécution du plan directeur de sorte qu’une réglementation cantonale exigeant que l’emplacement des antennes de téléphonie mobile soit défini pour une période transitoire de dix ans viole l’autonomie communale. Un modèle en cascade, applicable indifféremment à l’ensemble du territoire cantonal, ne permet pas d’évaluer si une couverture de téléphonie mobile adéquate est garantie et n’est pas proportionné à la protection éventuelle de certaines zones d’habitation communales déterminées.

Art. 22 LPE ; 31 et 39 OPB

Protection contre le bruit en cas de nouvelles constructions ; pratique de la « fenêtre d’aération » (Lüftungsfensterpraxis).

Alors même qu’un plan d’affectation spécial qui tient compte des valeurs de planification a été adopté, il faut, dans le cadre de la procédure d’autorisation de construire, apporter la preuve du respect des valeurs limites d’immission. La loi sur la protection de l’environnement et l’ordonnance sur la protection contre le bruit exigent qu’en cas de nouvelles constructions, les valeurs limites d’immission soient respectées au niveau de toutes les fenêtres d’une pièce sensible au bruit. Partant, la pratique de la « fenêtre d’aération », selon laquelle le respect des valeurs limites au niveau d’une seule fenêtre est suffisant, contrevient au but de protection de la santé. Le fait de renoncer à densifier des parcelles particulièrement exposées au bruit allant à l’encontre des principes d’utilisation mesurée du sol et de densification du milieu bâti vers l’intérieur, il y a lieu d’envisager une autorisation dérogatoire. Celle-ci n’entre cependant en considération que lorsque toutes les mesures raisonnables de protection contre le bruit ont été prises et que le projet sert à un développement urbain ainsi qu’à une densification vers l’intérieur de qualité.

ATF 142 II 20 (d)

2015-2016

Art. 8 et 10a LPE ; 2 al. 4 OPair

Pluralité d’installations soumises à une EIE globale.

Il découle du principe de l’évaluation conjointe des immissions tel que codifié à l’art. 8 LPE qu’une étude d’impact sur l’environnement globale doit être réalisée lorsque des ouvrages distincts doivent être considérés comme des éléments d’une installation unique parce qu’il existe entre eux, pris individuellement, un lien spatial, temporel et fonctionnel. Tel est le cas lorsque les différentes installations sont administrées en commun, appartiennent au même propriétaire ou exploitant, disposent d’une organisation ou planification commune ou créent une unité pour le regard extérieur. Il en va ainsi d’un commerce spécialisé constituant une partie d’un centre commercial faisant lui-même partie d’un ensemble de centres commerciaux.

Art. 32d al. 2 LPE

Prise en charge des frais d’assainissement.

L’art. 32d al. 2, 3e phrase, LPE exonère de l’obligation de prise en charge des frais d’assainissement le détenteur du site – perturbateur par situation – qui n’avait pas pu avoir connaissance de la pollution. Tel est le cas d’une personne héritant d’une parcelle dont l’utilisation comme décharge avait été abandonnée de longue date avant la dévolution. S’agissant de l’obligation de prise en charge des frais incombant au perturbateur par comportement, elle peut être mise à la charge des héritiers de celui-ci si au moment de la succession il existait une base légale fondant l’obligation de payer et si les héritiers ont eu la possibilité de la répudier ou de demander la prise d’un inventaire dans la mesure où la prise en charge des frais était prévisible. L’art. 14 de l’ancienne loi fédérale sur les eaux du 8 octobre 1971 constituait une base légale à cet effet. En revanche, la condition de la prévisibilité n’est pas réalisée dans l’hypothèse où la décharge avait dûment été autorisée.

Art. 75b Cst. ; 6 et 14 LRS ; 3 al. 1 ORSec

Limitation des résidences secondaires.

Une fraude à la loi n’est admise que si l’abus de droit est manifeste. Il s’agit alors de vérifier si l’intéressé, en prétendant vouloir construire une résidence principale, n’a pas pour objectif d’éluder la limitation, en réalisant à terme une résidence secondaire ou en envisageant d’emblée de faire usage la faculté prévue par la loi de suspendre l’affectation de résidence principale lorsqu’il n’existe pas de demande pour un tel logement à un prix raisonnable. Il convient alors de rechercher s’il existe des indices concrets mettant en doute la volonté du constructeur, notamment en lien avec la situation de l’immeuble, sa conception, son prix, la personne qui entend y vivre, l’insuffisance de la demande de résidences principales dans la commune en question pour le type d’objets concernés, mais également les autres permis de construire qui ont été octroyés durant la même période dans le même secteur et qui font simultanément l’objet d’un recours.