Droit du développement territorial

Art. 27 et 94 Cst.

Compatibilité d’une zone touristique avec la liberté économique.

Une mesure qui sert un but d’aménagement du territoire mais qui entrave la liberté économique de certains individus n’est pas contraire au principe constitutionnel de la liberté économique, à moins qu’il ne s’agisse d’une mesure de politique économique cachée ou qu’elle prive la liberté économique de tout son sens. Ainsi, l’attribution d’une parcelle comportant un hôtel à la zone de tourisme ne contrevient pas au principe de la liberté économique dès lors que les conditions de l’art. 36 Cst. sont respectées.

Art. 50 al. 1, 75 Cst. ; 5 al. 1 LAT

Prélèvement d’une taxe sur les plus-values par une commune, autonomie communale pour les tâches d’importance locale.

Aussi longtemps que le législateur cantonal n’a pas fait usage de sa compétence dans la mise en œuvre du mandat fédéral le chargeant de prélever une taxe sur la plus-value générée par la mise en zone à bâtir ou l’augmentation des possibilités de construire, les communes sont habilitées à prélever cette contribution. La perception de la taxe sur la plus-value est étroitement liée à l’aménagement local du territoire qui incombe aux communes.

Art. 78 al. 2 Cst. ; 15 et 38a LAT ; 2 et 12 LPN

Classement de nouvelles surfaces en zone à bâtir ; qualité pour recourir des organisations de protection de la nature et du paysage.

Un classement en zone constructible au sens de l’art. 15 LAT révisée poursuit l’exécution d’une tâche fédérale au sens de l’art. 78 al. 2 Cst. Il en découle que les organisations de protection de la nature et du paysage selon l’art. 12 LPN disposent d’un droit de recours en la matière et peuvent invoquer une violation des dispositions transitoires de la LAT révisée, particulièrement l’art. 38a al. 2 LAT.

ATF 143 II 276 (f)

2016-2017

žArt. 6 ss, 14 et 33 LAT

Contestation de la qualification de plan directeur.

Le plan directeur cantonal (art. 6 ss LAT) est défini comme un plan de gestion continue du territoire ayant un caractère programmatoire. Il a force obligatoire pour les autorités mais ne produit aucun effet direct pour les particuliers, ces derniers ne pouvant dès lors pas recourir contre lui. Le droit cantonal peut prévoir des plans directeurs de rang inférieur, régionaux ou communaux. La qualification comme plan directeur du plan directeur de quartier en cause ne peut être contestée et considérée comme un plan d’affectation dans la mesure où la protection juridique des recourants est garantie par l’adoption subséquente d’une planification d’affectation imposée par le droit cantonal. De ce fait, la participation des recourants est assurée conformément à l’art. 33 al. 2 LAT.

žArt. 15a LAT ; 46 al. 2 LATeC-FR

Mise en œuvre insuffisante de l’art. 15a al. 2 LAT par le droit cantonal fribourgeois.

Dans la mise en œuvre de l’art. 15a LAT, les cantons disposent d’une marge d’appréciation suffisante pour déterminer les sanctions à l’abstention de construction en terrains constructibles, ainsi que pour la désignation de l’autorité compétente. En revanche, le droit fédéral impose de permettre à l’autorité compétente de pouvoir exiger de manière préalable et par voie décisionnelle qu’une construction soit réalisée dans un délai déterminé. De même, s’agissant de son champ d’application dans l’espace, le droit cantonal ne peut pas limiter ses sanctions à certaines parties du territoire constructible – comme en l’espèce aux zones d’activités d’importance cantonale telles que reconnues par le plan directeur cantonal –, mais doit les prévoir pour l’ensemble de la zone à bâtir. Le Tribunal fédéral renonce toutefois à annuler la disposition (décision incitative).

Art. 4 al. 1 et 2, 33 LAT ; 19, 71 LCAT-JU ; 54 DPC-JU

Modification de la loi jurassienne sur les constructions et l’aménagement du territoire et du décret concernant le permis de construire, frais de la procédure de conciliation.

L’art. 33 LAT, qui garantit une protection juridique globale en permettant à tout administré de prendre connaissance du plan, sert de point de départ de la procédure d’opposition dans les cantons qui connaissent l’institution – tel le canton du Jura – et permet l’exercice du droit d’être entendu. La collectivité publique, initiatrice d’une procédure de planification ou le propriétaire, initiateur de la procédure d’autorisation de construire, doit, selon le principe de causalité, supporter les frais de mise à l’enquête et de traitement des oppositions. Selon le principe du perturbateur, ce n’est pas aux opposants de s’acquitter des frais de l’opposition, accessoire de la requête principale. La jurisprudence s’en tient également au principe de causalité et protège particulièrement le droit d’être entendu, sans quoi la mise à charge de frais pour l’opposant entraînerait un effet dissuasif. On ne saurait toutefois accorder une gratuité inconditionnelle à la procédure d’opposition, en application de la règle générale de l’art. 41 CO, en cas de dol ou de négligence grave. Le droit cantonal peut ainsi mettre les frais à la charge d’un opposant dont l’intervention apparaît abusive au point d’engager sa responsabilité au sens de l’art. 41 CO, l’abus de droit devant être manifeste. Le seul fait que l’opposition soit déclarée irrecevable ou mal fondée ne suffit pas à mettre les frais à la charge de son auteur, tout comme l’échec de la conciliation lorsque les frais ont été occasionnés sans nécessité. La notion d’absence de nécessité est en effet sans lien avec celle d’acte illicite, un tel critère, particulièrement flou étant au demeurant inconnu dans le droit fédéral ou cantonal de l’aménagement du territoire et du droit des constructions.

ATF 142 II 517 (d)

2016-2017

Art. 29 ss LEaux ; 7 ss LFSP ; 8 et 10a ss LPE

Projet de conduite forcée et concession pour des captages supplémentaires des eaux pour des centrales hydroélectriques existantes ; coordination des procédures.

L’appréciation de l’impact environnemental d’un projet de conduite ne peut se faire de manière isolée et doit tenir compte des installations existantes, en particulier celles qui ont des tronçons à débits résiduels communs. Si le droit de l’environnement justifie un assainissement des installations existantes, ce dernier doit faire l’objet d’une coordination avec la délivrance de la concession et de l’autorisation de construire. Une nouvelle concession globale incluant les installations existantes au projet de conduite forcée n’est toutefois pas requise, les concessions existantes ne faisant pas l’objet d’une modification notable.

Art. 15 ss LCO; 46 al. 1 et annexe 9 ch. 4 OCO2

Réduction des émissions de gaz à effet de serre, système d’échange de quotas d’émission, attribution de droits d’émission à titre gratuit.

La concrétisation de l’efficacité des installations en termes d’émissions de gaz à effet de serre dans l’ordonnance sur le CO2 est conforme à la loi. Elle prend en compte les émissions indirectes qui proviennent de la consommation d’électricité et permet le respect de la concurrence entre les installations employant des combustibles ou de l’électricité. Pour ce qui concerne les émissions indirectes, il n’existe aucune obligation pour les entreprises soumises de remettre à la Confédération des droits d’émission ou des certificats de réduction des émissions. Par conséquent, elles ne peuvent exiger l’attribution de droits d’émission à titre gratuit en relation avec ces émissions indirectes (voir ég. JdT 2017 I, p. 84 ss).

Art. 29a Cst. ; 31b al. 3 LPE ; 12 de la loi communale de Cazis sur les déchets (GR)

Fermeture d’une déchetterie pour les ordures ménagères, qualification de l’acte de fermeture comme une décision, garantie d’accès au juge.

La fermeture d’une déchetterie par la commune constitue selon le Tribunal fédéral une décision contestable, et non un acte matériel. Même si la loi ne leur impose pas d’utiliser une déchetterie en particulier et bien qu’ils ne disposent d’aucun droit à ce que ces installations se situent à une certaine distance de leur domicile, les détenteurs d’ordures ménagères sont toutefois tenus de s’en débarrasser dans les déchetteries mises à leur disposition par les communes (art. 31b al. 3 LPE, en lien avec l’art. 12 de la loi communale de Cazis sur les déchets). Les cantons et les communes bénéficient d’un large pouvoir d’appréciation quant à l’organisation de cette élimination. En revanche, la jurisprudence leur impose la mise en place d’installations en nombre et fréquence suffisants. Les recourants ont établi que la fermeture de l’installation de Portein les obligerait à devoir se rendre vers l’installation voisine la plus proche située à une distance de 1,6 km et qu’ils ne pourraient dès lors plus s’y rendre à pied. De ce fait, cette mesure porte atteinte à la situation juridique des recourants, en particulier à leur devoir légal d’élimination des déchets de même qu’à leur droit à la mise à disposition par la commune de déchetteries à des conditions raisonnables, et constitue bien une décision (voir ég. Spiess Marie-Hélène, La garantie de l’accès au juge en lien avec la fermeture d’une déchetterie, in : www.lawinside.ch/428/).

Art. 78 Cst. ; 23b LPN

Projet d’extension d’une centrale hydroélectrique portant atteinte à un site marécageux.

Les marais et sites marécageux d’une beauté particulière – définis et délimités selon l’art. 23b LPN – qui présentent un intérêt national sont protégés par l’art. 78 Cst. Le degré de protection des sites étant élevé, le Conseil fédéral peut toutefois prendre en compte les installations existantes et les projets concrets de modification ou d’extension de celles-ci au moment de la délimitation définitive de leur périmètre. Il existe un intérêt public et privé à l’extension des aménagements existants liée à l’exploitation de la force hydraulique. Le Tribunal fédéral a validé le projet d’extension de la centrale du Grimsel portant atteinte à un site marécageux, dans lequel il a fait prévaloir l’augmentation du potentiel de retenue du barrage correspondant à 20% du potentiel total d’extension des centrales hydroélectriques en Suisse sur une mise à contribution minimale du territoire.

Art. 36a LEaux ; 41c al. 1 let. a OEaux

Autorisation exceptionnelle pour la construction dans l’espace réservé aux eaux ; notion de zones densément bâties.

La construction litigieuse est située dans l’espace réservé aux eaux à une distance de 15 m de la rive, dépassant ainsi de 5 m la distance admise par le droit transitoire qui exige la réserve d’une bande de terrain de 20 m, aussi longtemps que l’espace réservé aux eaux n’aura pas été délimité pour le lac de Zurich. Une autorisation dérogatoire ne peut être accordée qu’à la condition que la parcelle se situe en zone densément bâtie, niée en l’espèce, puisqu’elle se situe en périphérie de l’agglomération principale de la commune et est clairement séparée par une ligne ferroviaire et une zone verte. Dès lors et tant que l’espace réservé aux eaux n’aura pas été délimité, aucune dérogation ne peut être accordée (voir ég. DEP 2017, p. 276 ss).

ATF 143 I 109 (f)

2016-2017

Art. 49, 81a, 87, 92 al. 1 Cst.

Primauté du droit fédéral ; compétence du législateur cantonal de fixer les tarifs des Transports publics genevois (TPG).

Le Tribunal fédéral s’interroge sur les compétences de la Confédération dans le domaine des transports. Il ne répond toutefois pas à la question de savoir quels types de compétences fédérales découlent des art. 87 et 92 Cst. et s’il est possible ou non de différencier plusieurs types de compétences selon le domaine de transports concerné, alors que ceux-ci sont réglementés dans le même article constitutionnel. Dans tous les cas, les TPG constituent un établissement de droit public cantonal qui a été doté d’une certaine autonomie organisationnelle par le constituant et le législateur genevois et auquel la Confédération a octroyé une concession et des compétences tarifaires par le biais de l’art. 15 LTV. Afin de déterminer si le législateur cantonal genevois a outrepassé ses compétences en fixant les tarifs des TPG dans la loi cantonale, le Tribunal fédéral procède à une interprétation approfondie de la LTV. Il en arrive à la conclusion que l’introduction par le canton de Genève de normes permettant à ses autorités de fixer les tarifs des TPG ne contrevient ni à la lettre ni à l’esprit de la législation fédérale en matière de transports publics et, donc, ne déroge pas au principe de la primauté du droit fédéral.