Propriété intellectuelle

Art. 26 al. 1 lit. a, 26 al. 4, 41 LTFB ; 10 des Directives procédurales du TFB du 28.11.2011 ; 8 CC ; 26 al. 1 lit. a, 26 al. 1 lit. d, 26 al. 1 lit. c, 51 al. 1, 58 al. 2, 66 lit. a, 66 lit. b, 72, 125 al. 1 LBI ; 3 lit. b LCD

Les actions en cessation de trouble doivent viser l’interdiction d’un comportement précisément décrit. La partie condamnée doit apprendre ce qu’elle n’est plus en droit de faire, et les autorités d’exécution ou les autorités pénales doivent savoir quel comportement elles doivent empêcher ou peuvent assortir d’une peine. Si l’on fait valoir auprès de ces autorités que le défendeur a répété un acte prohibé malgré l’interdiction du juge civil, celles-ci doivent seulement avoir à vérifier si les conditions factuelles invoquées sont remplies. En revanche, elles ne doivent pas être amenées à qualifier sur le plan juridique le comportement en cause. Mentionner l’essence des revendications d’un brevet dans les conclusions visant l’interdiction de sa violation peut s’avérer insuffisant. Le mode de violation du brevet ou le mode d’exécution allégué doit ainsi être décrit de façon à ce qu’un examen purement factuel permette sans autre de constater si on est en présence d’une forme d’exécution prohibée. Il faut donc décrire la forme de violation comme un acte technique réel, à travers certaines caractéristiques qui ne nécessitent aucune interprétation juridique ou interprétation de termes techniques ambigus. Ceci en particulier parce que le dispositif du jugement, éventuellement interprété sur la base des considérants, doit exposer concrètement quelles caractéristiques du mode d’exécution sont attaquées en tant que mise en œuvre de l’enseignement technique. Il ne suffit ainsi pas de répéter les caractéristiques mentionnées dans le brevet. Une description du mode de violation est nécessaire ; et ce n’est que lorsque les caractéristiques du mode d’exécution utilisant le brevet litigieux sont concrètement désignées qu’une éventuelle interdiction peut être exécutée. Ce n’est en fait que lorsque l’énoncé de la revendication est spécifique au point qu’un examen purement factuel permet sans autre de constater si on est en présence d’une forme d’exécution prohibée et que cet énoncé ne nécessite aucune interprétation juridique ou interprétation de termes techniques ambigus, que la désignation concrète des caractéristiques techniques concrètes du mode d’exécution peut se confondre avec l’énoncé de la revendication qui fonde l’interdiction. Ce qui a été admis en l’espèce (consid. 17).

Art. 107 al. 1 lit. e, 261 al. 1 CPC

Selon l’art. 261 al. 1 CPC l’intérêt juridiquement protégé à une demande en interdiction n’existe que si un dommage menace, c’est-à-dire que le comportement de la défenderesse laisse présager sérieusement une violation future du droit. Un indice d’une telle violation future peut résulter du fait que de telles violations ont déjà eu lieu par le passé et qu’une répétition est à craindre. On peut généralement admettre un tel risque de répétition lorsque le contrevenant conteste l’illégalité et de son comportement. Tel peut être le cas lorsque le contrevenant, au vu d’un procès à venir, a mis fin au comportement contesté, mais cherche à le justifier dans la procédure. Il s’agit là d’une présomption réfragable. Le risque de répétition n’est cependant pas donné lorsque le défendeur a signé une déclaration d’abstention inconditionnelle et non équivoque et que cette dernière n’apparaît pas comme une simple manœuvre procédurale. Tel est le cas en l’espèce (consid. 4.2 et 4.3). Les acheteurs des médicaments concernés ne peuvent pas être astreints à restituer les produits achetés. Une injonction visant à rappeler les médicaments ne permet pas d’atteindre le but et doit être considérée comme disproportionnée (consid. 4.4).

Art. 26 al. 1 lit. a, 26 al. 4, 41 LTFB ; 10 des Directives procédurales du TFB du 28.11.2011 ; 8 CC ; 26 al. 1 lit. a, 26 al. 1 lit. d, 26 al. 1 lit. c, 51 al. 1, 58 al. 2, 66 lit. a, 66 lit. b, 72, 125 al. 1 LBI ; 3 lit. b LCD 

l’art. 72 al. 1 LBI prévoit que celui qui est atteint ou menacé dans ses droits par l’un des actes mentionnés à l’art. 66 LBI, notamment par la contrefaçon ou par l’imitation d’une invention brevetée (art. 66 lit. a LBI) peut demander la cessation de cet acte. Comme en l’espèce la demanderesse a prouvé que la défenderesse viole le brevet litigieux, comme l’atteinte a déjà commencé et, comme selon la correspondance entre les parties respectives, leurs conseils et les contestations dans la présente procédure, elle n’a pas pris fin, il convient d’ordonner à la défenderesse – sous la menace de l’art. 292 CP, soit l’amende – de cesser tout usage du mécanisme breveté en relation avec des montres (consid. 40). Quand il est, comme en l’espèce, impossible pour le demandeur de chiffrer ses prétentions lorsque l’ignorance résulte de faits qui sont entre les mains du défendeur ou d’un tiers, il peut intenter une action dite échelonnée, dans laquelle une conclusion en réédition de comptes est liée à une conclusion indéterminée en paiement de la somme due. La seconde est principale, la première est complémentaire. L’action en renseignement découle de l’art. 66 lit. b LBI (consid. 41).

Art. 26 al. 1 lit. a, 26 al. 4, 41 LTFB ; 10 des Directives procédurales du TFB du 28.11.2011 ; 8 CC ; 26 al. 1 lit. a, 26 al. 1 lit. d, 26 al. 1 lit. c, 51 al. 1, 58 al. 2, 66 lit. a, 66 lit. b, 72, 125 al. 1 LBI ; 3 lit. b LCD ; l’art. 41 LTFB

Implique un transfert automatique au TFB de tous les procès qui n’ont pas encore été plaidés sur le fond au 1er janvier 2012, quel que soit l’avancement de l’instruction. Selon l’art. 10 des Directives procédurales du TFB, le TFB reprend le traitement des procédures qui, au moment de l’entrée en vigueur de la LTFB, sont pendantes devant les tribunaux cantonaux, dans la mesure où la juridiction cantonale concernée justifie que les débats principaux n’ont pas encore eu lieu. L’interprétation du droit cantonal revient aux juridictions cantonales auxquelles il appartient de déterminer à quel moment il convient d’admettre, selon leur propre procédure cantonale, que les débats principaux sont réputés avoir eu lieu (consid. 14).

 

Art. 26 al. 1 lit. a, 26 al. 4, 41 LTFB ; 10 des Directives procédurales du TFB du 28.11.2011 ; 8 CC ; 26 al. 1 lit. a, 26 al. 1 lit. d, 26 al. 1 lit. c, 51 al. 1, 58 al. 2, 66 lit. a, 66 lit. b, 72, 125 al. 1 LBI ; 3 lit. b LCD

Est réputée constituer une extension allant au-delà du contenu des pièces initialement déposées, une modification qui n’est pas divulguée à la date pertinente (de dépôt ou d’un éventuel report au sens de l’art. 58 aLBI), soit un enrichissement technique du contenu de la demande et donc un apport d’informations de nature technique qui ne se déduit pas – directement et sans ambiguïté – de l’intégralité du contenu technique – explicite ou implicite – soumis à la date pertinente. Pour toutes les prétentions relevant du droit privé fédéral, l’art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve auquel correspond, en principe, le fardeau de l’allégation et, partant, les conséquences de l’absence de preuve ou d’allégation. La partie qui entend se prévaloir d’un motif de nullité d’un brevet supporte le fardeau de la preuve, à moins que la loi n’en dispose autrement, conformément à l’art. 8 CC. Un état de fait qui n’a pas été allégué par la partie qui en supporte le fardeau ne peut pas être admis par le juge et, si en raison d’un défaut d’allégation, un état de fait ne peut pas être pris en considération ou demeure incertain, le juge doit se prononcer en vertu de l’art. 8 CC en défaveur de la partie qui supporte le fardeau de la preuve. Dès lors que la partie qui souhaite se prévaloir du motif de nullité découlant d’une extension illicite de l’art. 26 al. 1 lit. c LBI supporte le fardeau de la preuve de cette extension illicite et doit alléguer de façon détaillée d’une part la modification en cause et d’autre part la détermination de l’homme du métier et l’étendue de ses connaissances à la date pertinente (date de dépôt ou de report). Le même principe d’allégation détaillée relative à l’homme du métier et à ses connaissances s’applique à la question de l’activité inventive et à la suffisance de description au sens des art. 26 al. 1 lit. a (en relation avec l’art. 1 al. 2) et 26 al. 1 lit. b LBI. Il ne suffit dès lors pas de simplement alléguer qu’une modification particulière ne serait pas explicitée dans le contenu des pièces initialement déposées (à la date de dépôt ou de report). Encore faut-il identifier l’homme du métier (typiquement par sa profession et/ou sa formation) et ses connaissances générales (typiquement les sujets techniques qu’il doit maîtriser en sa qualité d’homme du métier déterminé) à la date pertinente et expliquer pour quels motifs une telle modification ne se déduirait pas du contenu explicite des pièces initialement déposées à l’aide des connaissances de l’homme du métier (consid. 19). Tel n’a pas été le cas en l’espèce. La Cour a retenu en outre qu’il résultait de l’examen des pièces modifiées en cours de procédure d’enregistrement qu’aucune extension illicite n’était intervenue (consid. 20 et consid. 21-23). Concernant la nouveauté, la Cour rappelle qu’une combinaison avec d’autres documents n’est pas admissible et considère qu’il convient dès lors d’admettre la nouveauté de l’invention revendiquée par rapport aux deux antériorités invoquées (consid. 26). Une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si pour l’homme du métier elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique. L’homme du métier joue ainsi un rôle décisif dans l’appréciation de l’activité inventive. À l’instar de la question de l’examen de l’extension illicite, l’appréciation de l’activité inventive présuppose une allégation détaillée quant à la détermination de l’homme du métier et ses connaissances à la date pertinente par la partie qui souhaite se prévaloir du motif de nullité correspondant au sens de l’art. 26 al. 1 lit. a (en relation avec l’art. 1 al. 2 lit. b. ) Cette information est nécessaire afin de déterminer si ses connaissances générales auraient incité et permis à l’homme du métier de combler une lacune entre une ou plusieurs antériorités déterminées (par exemple une ou plusieurs publications et/ou usages publics antérieurs) et l’invention revendiquée. Une telle allégation détaillée est également nécessaire afin de déterminer si ses connaissances générales auraient permis à l’homme du métier de combiner les enseignements contenus dans des antériorités différentes afin de les réduire en un mode d’exécution combinée (réelle) couvert par l’invention revendiquée. Le défaut d’une allégation détaillée en ce sens contraint en principe le juge a rejeté le motif de nullité invoqué, ainsi que cela a été fait en l’espèce, la demanderesse ayant présenté l’homme du métier uniquement comme un « praticien du domaine technologique normalement qualifié qui possède des connaissances générales dans le domaine concerné et qui est censé avoir eu accès à tous les éléments de l’état de la technique » (consid. 32). Selon l’art. 125 al. 1 LBI, dans la mesure où, pour la même invention, un brevet suisse et un brevet européen ayant effet en Suisse ont été délivrés au même inventeur ou à son ayant cause avec la même date de dépôt ou de priorité, le brevet suisse ne porte plus effet dès la date à laquelle le délai pour former opposition au brevet européen est échu, ou la procédure d’opposition a définitivement abouti au maintien en vigueur du brevet européen. Dans le contexte de la LBI, une invention se comprend comme une règle de comportement technique portant sur l’utilisation des éléments naturels ou des forces de la nature et aboutissant à un résultat déterminé. L’invention est définie dans une ou plusieurs revendications du brevet (art. 51 al. 1 LBI). En l’espèce, la revendication 1 du brevet suisse concerné ne définit pas la même invention que celle de la revendication 1 du brevet européen. Le brevet suisse définit ainsi une règle différente de celle du brevet européen. Par conséquent, les deux brevets ne protègent pas « la même invention » et les conditions d’application de l’art. 125 LBI ne sont pas réalisées (consid. 37).

Art. 123 al. 2 CBE 2000 ; 1 al. 1, 7 al. 1, 7 al. 2, 8 al. 1, 8 al. 2, 26 al. 1 lit. a, 26 al. 1 lit. c, 51, 58 al. 2, 66 lit. a, 72, 73 al. 1 LBI ; 55 al. 1, 56, 57, 125 lit. a, 133 lit. e, 237 CPC

L’homme du métier n’est pas un individu réel, mais une fiction juridique. Il a reçu une formation classique dans le domaine technique en cause et il est doté de compétences et de connaissances moyennes dans ce même domaine. Il n’est pas exempt des idées habituellement préconçues dans ledit domaine. L’homme du métier est typiquement le professionnel appelé à réaliser l’objet décrit dans le brevet ou chargé de résoudre le problème correspondant.

Aux termes de l’art. 56 CPC, le tribunal interpelle les parties lorsque leurs actes ou déclarations sont peu clairs, contradictoires, imprécis ou manifestement incomplets. Il leur donne l’occasion de les clarifier et de les compléter. Il incombe au tribunal d’élucider la situation juridique sur la base des faits régulièrement établis dans le procès. Le tribunal doit statuer selon les règles de répartition du fardeau de la preuve lorsque des faits importants n’ont pas été régulièrement allégués puis prouvés. Il n’est pas autorisé à se prononcer sur la conséquence juridique de faits autres que ceux dûment établis et il doit s’abstenir de spéculer sur l’issue de la cause dans l’hypothèse où les parties auraient procédé différemment. Il ne peut rendre aucun jugement grevé de réserves ou fondé sur des conjectures.

En se référant dans le cas d’espèce au rapport de deux experts, dont les connaissances et les aptitudes personnelles permettent de présumer qu’ils se sont référés aux connaissances et aptitudes typiques d’un professionnel appelé à réaliser l’objet décrit dans le brevet ou chargé de résoudre le problème correspondant, le TFB a, implicitement au moins, recouru à la notion d’homme du métier telle qu’elle est décrite ci-dessus. Comme le procès civil est soumis à la maxime des débats selon l’art. 55 al. 1 CPC, et qu’aucune dérogation n’est prévue en matière de brevet d’invention, il appartenait aux parties d’alléguer et de prouver, le cas échéant, que des connaissances particulières et inhabituelles, différentes de celles des deux experts, auraient été nécessaires pour apprécier la validité et la portée du brevet concerné (consid. 5).

Art. 123 al. 2 CBE 2000 ; 1 al. 1, 7, 8, 26, 51, 58 al. 2, 66 lit. a, 72, 73 al. 1 LBI

La nouveauté d’une invention n’est détruite que lorsque toutes ses caractéristiques ont été rendues accessibles au public avant le dépôt de la demande de brevet. L’examen de la nouveauté consiste dans une comparaison individuelle entre chaque solution déjà divulguée et l’invention en cause. La nouveauté de cette invention n’est détruite que lorsqu’une antériorité en présente identiquement toutes les caractéristiques. Il est suffisant, mais nécessaire que l’enseignement technique revendiqué soit déjà apporté à l’homme du métier par une solution connue.

Il appartient à la partie qui invoque l’absence de nouveauté de la prouver. Tel n’est pas le cas lorsque trois caractéristiques du brevet dont la validité est contestée ne se retrouvent pas dans le brevet antérieur qui lui est opposé au titre d’antériorité détruisant la nouveauté (consid. 6). Pour qu’une invention soit brevetable, l’objet du brevet doit être le résultat d’une activité inventive, car la protection légale n’est pas accordée à ce que l’homme du métier peut logiquement développer sur la base de la connaissance de l’état de la technique et par la simple mise en œuvre de compétences moyennes ; l’invention brevetable est le résultat d’une sagacité plus considérable. L’activité inventive doit être appréciée d’après ce qui était objectivement réalisable à la date déterminante.

À la différence du critère relatif à la nouveauté de l’invention, l’appréciation de l’activité inventive nécessite d’appréhender l’état de la technique dans sa globalité. Tous les enseignements et toutes les antériorités accessibles au public constituent dans leur ensemble le patrimoine technique dont un homme du métier, doté de capacités de combinaison normales, dispose librement pour aborder le problème à résoudre. Il faut examiner si l’état de la technique a suggéré une combinaison évidente d’éléments distincts, compte tenu de leur fonction au sein de l’ensemble ; il importe toutefois de ne pas considérer de manière erronée et artificielle, dans une approche rétrospective issue de la connaissance de la solution en cause, une combinaison comme résultant à l’évidence de l’état de la technique (consid. 7).

Art. 2 lit. a, 2 lit. b, 5 al. 1 LCBr

Pour pouvoir porter le titre de « conseil en brevets », une personne doit notamment être titulaire d’un titre reconnu du degré tertiaire en sciences naturelles ou en ingénierie et avoir réussi l’examen fédéral de conseil en brevets ou un examen étranger de conseil en brevets reconnu (art. 2 LCBr, lit. a et b). Un titre en sciences naturelles ou en ingénierie délivré par une haute école étrangère est reconnu si son équivalence avec un titre reconnu délivré par une haute école suisse est prévue dans un traité sur la reconnaissance réciproque des titres avec l’Etat concerné ou avec une organisation supranationale.

Art. 321a, 332 al. 1 CO

Le droit à la délivrance du brevet et l’appartenance du brevet à l’entreprise ayant employé l’inventeur ne sont en l’espèce pas litigieux. Seule le demeure la signature du document de cession nécessaire au regard du droit américain des brevets en vigueur au moment du dépôt de la demande de brevet en 2011. Il ressort des pièces au dossier qu’en dépit de ses dénégations, le défendeur maîtrise suffisamment la langue anglaise pour percevoir la portée du document formel de transfert qu’il lui est demandé de signer (consid. 4.2).

Il n’est pas contesté que l’invention concernée est une invention de service qui appartient à l’employeur, soit à la demanderesse, en vertu de l’art. 332 al. 1 CO. Le droit à une invention englobe toutes les attributions liées à l’exploitation de l’invention qui reviennent à l’inventeur sur le plan mondial du fait de son invention. Le droit de déposer une demande de brevet partout dans le monde en fait partie. Le devoir général de diligence et de fidélité du travailleur vis-à-vis de son employeur découlant de l’art. 321a CO implique qu’il lui apporte, dans la mesure de ce qui est raisonnable, son appui dans les demandes en vue de l’obtention de la protection. Cela vaut aussi en lien avec l’obtention de droits de protection à l’étranger. Le travailleur est ainsi tenu de signer les documents nécessaires à l’obtention de la protection par son employeur tant en Suisse qu’à l’étranger. Cette obligation perdure après la fin du contrat de travail. Le travailleur n’a pas droit à une indemnité particulière en présence d’une invention de service. Le déploiement d’une activité inventive fait partie de l’accomplissement des obligations contractuelles pour lesquelles il est rémunéré (consid. 4.3).

Art. 106 al. 1 LTF ; 15 al. 1, 21 al. 4, 110 al. 1, 117 al. 1, 122 al. 1 LDIP

Le TF applique le droit d’office (art. 106 al. 1 LTF). Il n’est ainsi lié ni par les arguments invoqués dans le recours ni par les considérants de l’autorité inférieure. Il peut admettre un recours pour d’autres motifs que ceux invoqués dans le cadre du recours et il peut rejeter un recours en se basant sur une argumentation différente de celle de l’autorité inférieure (consid. 1.2). Les art. 116 ss LDIP règlent les questions de droit applicable aux contrats de façon générale. L’art. 122 LDIP constitue une disposition particulière pour les contrats en matière de propriété intellectuelle. Il en découle que les contrats portant sur la propriété intellectuelle sont soumis au droit de l’État dans lequel celui qui transfère ou concède le droit de propriété intellectuelle a sa résidence habituelle (art. 122 al. 1 LDIP). Pour les personnes morales, c’est le lieu d’établissement qui est déterminant, lequel se trouve sur le territoire de l’État dans lequel le siège de la personne morale est situé (art. 21 al. 4 LDIP).

L’art. 122 al. 1 LDIP concerne aussi les contrats qui portent sur des demandes de brevet. Alors que l’art. 110 al. 1 LDIP règle le statut des droits de la propriété intellectuelle, l’art. 122 al. 1 LDIP a lui trait aux contrats et en particulier à tout ce qui concerne leur conclusion, leur contenu et leur validité. Il est possible de déroger au rattachement ordinaire de l’art. 122 al. 1 LDIP, selon l’art. 15 al. 1 LDIP, si la cause se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. Une modification du critère de rattachement doit, pour certains, aussi intervenir selon l’art. 117 al. 1 LDIP, lorsqu’il existe un lien clair avec le droit d’un État autre que celui résultant de l’art. 122 al. 1 LDIP (consid. 2.3). Lorsqu’un contrat est destiné à transférer des demandes de brevet à l’une des parties, il porte sur des droits de propriété intellectuelle au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP.

S’il existe un différend entre les parties quant au fait même qu’un contrat soit intervenu entre elles et quant à son objet, c’est du statut du contrat qu’il est débattu au sens de l’art. 122 al. 1 LDIP et pas de celui des droits de propriété intellectuelle selon l’art. 110 al. 1 LDIP. Le droit applicable est ainsi celui de l’État dans lequel la partie qui aurait éventuellement transféré les droits de propriété intellectuelle concernés a son siège. Il s’agit en l’espèce de la défenderesse au recours qui, tant au moment de la conclusion éventuelle du contrat que par la suite, a toujours eu son siège à Hong Kong. Le fait que les demandes de brevet concernées désignent plus souvent la Suisse que Hong Kong ou la Chine comme pays pour lesquels la protection est requise ne suffit pas à créer un lien clair avec le droit de notre pays qui justifierait une dérogation au critère de rattachement de l’art. 122 al. 1 LDIP en vertu soit de l’art. 15 al. 1 LDIP, soit de l’art. 117 al. 1 LDIP. Le droit applicable est donc celui de Hong Kong dont le contenu doit, selon l’art. 16 al. 1 LDIP, être établi d’office par l’autorité inférieure à laquelle la cause est renvoyée, mais dont la preuve peut, en matière patrimoniale comme en l’espèce, être mise à la charge des parties (consid. 2.4).

Art. 123 al. 2 CBE 2000 ; 8 al. 1, 8 al. 2, 26 al. 1 lit. a, 26 al. 1 lit. c, 51, 58 al. 2, 66 lit. a, 72, 73 al. 1 LBI

Tant selon l’art. 26 al. 1 lit. c LBI, que l’art. 123 al. 3 CBE 2000, le juge peut être requis de constater la nullité du brevet lorsque son objet va au-delà du contenu de la demande de brevet dans la version qui a déterminé sa date de dépôt. L’art. 26 al. 1 lit. c LBI se rattache à l’art. 58 al. 2 LBI qui interdit de modifier les pièces techniques, pendant la procédure d’examen de la demande de brevet, de manière à ce que l’objet de la demande modifiée aille au-delà de leur contenu.

Avant le 1er juillet 2008, selon l’art. 58 al. 2 lit. a LBI, la date de dépôt de la demande de brevet était reportée à celle du dépôt des pièces modifiées qui, le cas échéant, en étendaient l’objet. Ce report devait toutefois s’accomplir formellement au cours de la procédure d’examen. À défaut, le brevet délivré était nul selon l’art. 26 al. 1 ch. 3bis aLBI. L’extension ainsi interdite peut consister aussi bien dans l’adjonction que dans la suppression d’informations. La modification est en revanche admise si elle a pour seul effet de préciser l’invention ou d’éliminer une contradiction. La substitution ou la suppression d’une caractéristique, dans une revendication, est admissible s’il apparaît directement et sans ambiguïté à l’homme du métier que cette caractéristique n’est pas présentée comme essentielle dans la divulgation de l’invention, qu’elle n’est pas indispensable en tant que telle à la réalisation de l’invention, eu égard aux problèmes techniques que celle-ci propose de résoudre et que sa suppression ou sa substitution n’impose pas de vraiment modifier en conséquence d’autres caractéristiques. Si une caractéristique est remplacée par une autre, il est indispensable que celle-ci soit couverte par les pièces techniques initiales.

Le TF confirme le jugement du TFB, qui a considéré que, quoi qu’elles aient été importantes, la présence de 8 différences entre le libellé de la revendication No 1 du brevet dans la demande initialement déposée et dans le brevet finalement obtenu, n’a pas étendu l’objet du brevet par rapport à celui figurant dans la demande, en se fondant sur l’analyse de deux experts qui ont retenu que, pour l’homme du métier, les caractéristiques présentes dans le libellé final de la revendication étaient aisément reconnaissables dans les pièces techniques initiales. Le TF relève que la présence d’une expertise dissidente, qui ne motive pas ses conclusions de manière intelligible, ne suffit pas à démontrer que les modifications apportées sont incompatibles avec l’art. 26 al. 1 lit. c LBI dont le sens ne peut être qu’un avis d’expert, même déraisonnable ou non pertinent, suffirait à établir une extension inadmissible de l’objet du brevet, au sens de l’art. 26 al. 1 lit. c LBI (consid. 8). Le brevet confère à son titulaire le droit d’exiger la cessation d’une utilisation illicite de l’invention, en particulier de l’utilisation à titre professionnel par un tiers, au sens de l’art. 8 al. 1 et 2 LBI et de réclamer la réparation du dommage causé par cette utilisation illicite (art. 66 lit. a, 72 et 73 al. 1 LBI).

L’invention est définie par les revendications du brevet, au besoin interprétées d’après la description et les dessins (art. 51 LBI). Les revendications doivent être interprétées comme l’homme du métier les comprend. Les pièces techniques et, en particulier le libellé des revendications s’adressent à l’homme du métier ; l’enseignement technique doit être mis en œuvre par lui et il faut par conséquent apprécier de son point de vue ce qui est rendu accessible par le brevet. La sécurité juridique exige que l’homme du métier puisse savoir à quoi s’en tenir à la seule lecture du brevet. Lorsqu’un doute subsiste parce que la revendication et la description sont équivoques, c’est le titulaire qui doit en pâtir et non les tiers. Le fascicule du brevet peut conférer un sens spécial à un terme technique, divergent du sens courant. Ce qui amène le TF à admettre qu’en l’espèce la notion de « denture » périphérique est un entraînement constitué de dents en nombre indéterminé, y compris, s’il y a lieu, une dent unique ; et que rien ne justifie d’interpréter ce mot, dans le libellé de la revendication, en ce sens que la couverture du brevet serait restreinte aux entraînements périphériques comprenant deux dents au minimum.

TFB S2013_003 (d)

2013-2014

Art. 107 al. 1 lit. e, 261 al. 1 CPC

La procédure étant devenue sans objet, les frais sont à répartir selon la libre appréciation du tribunal (art. 107 al. 1 lit. e CPC). Il sera tenu compte de quelle partie a donné lieu à la plainte, de quelle était l’issue probable du procès, de quelle est la partie responsable du fait que la procédure est devenue sans objet et de quelle partie a causé des frais sans raison. Dans un cas comme celui de l’espèce, où la défenderesse a émis une déclaration d’abstention uniquement après que l’instance avait été saisie, c’est elle qui a rendu la procédure sans objet (consid. 5.2.) Est également déterminante la question de savoir si la défenderesse a causé l’introduction de la procédure. Tel est le cas lorsque la validité et la violation d’un brevet sont retenues par le juge. L’examen de l’activité inventive se fera selon l’approche « problème-solution », selon laquelle sera d’abord déterminé l’état de la technique le plus proche, puis le problème technique objectif à résoudre puis, enfin si l’invention revendiquée, en partant de l’état de la technique le plus proche et du problème technique objectif, non seulement aurait pu être obtenue par l’homme de métier, mais aurait pu l’être sans autre (consid. 5.3).

TFB O2013_004 (d)

2013-2014

Art. 25, 32, 33 LTFB ; 3 al. 1 lit. a, 3 al. 1 lit. b, 5, 8, 9 al. 2 FP-TFB ; 3 al. 3 RInfo-TFB ; 52, 85, 91 al. 1, 91 al. 2 CPC 

Lorsqu’il ressort des moyens de preuves, notamment d’une procédure arbitrale parallèle, que la valeur litigieuse minimale provisoire de l’action est manifestement erronée et que les parties ne s’entendent pas sur un nouveau montant, le tribunal fixe une nouvelle valeur litigieuse (consid. 3.1). En l’espèce, à l’ouverture de la procédure, il n’était pas impossible ou inexigible d’emblée de chiffrer la valeur litigieuse exacte de l’action en cession du brevet. C’est en violation des règles de la protection de la bonne foi que la recourante a, pour des raisons de tactique procédurale, sous-évalué la valeur litigieuse dans son introduction d’instance. Il n’est pas acceptable, sous l’angle des règles de la bonne foi, qu’une fois connue l’issue favorable de la procédure pour la recourante, celle-ci fournisse une nouvelle valeur litigieuse beaucoup plus élevée, dans le but d’obtenir des indemnités de procédures plus importantes. Par conséquent, il convient de s’en tenir à la valeur litigieuse énoncée à l’ouverture de la procédure, même si celle-ci est manifestement erronée (consid. 4.4). Les parties ont un intérêt important au maintien de la confidentialité. Le présent arrêt ne concerne que des questions des frais de procédure et d’indemnité des parties. Dès lors, l’arrêt peut être anonymisé, conformément à la demande de la défenderesse (consid. 5).

Art. 42 al. 2, 91 lit. a, 93 al. 1, 37 al. 1, 37 al. 2, 37 al. 3 LTFB ; 55 al. 1, 56, 57, 125 lit. a, 133 lit. e, 237 CPC

Les prétentions en dommages et intérêts et en publication du jugement sont indépendantes de celles en fourniture d’informations et en interdiction. Le jugement accueillant une demande auxiliaire en réédition de comptes, ayant pour objet les renseignements nécessaires à l’évaluation du dommage, est une décision incidente. Le recours au TF, contre une telle décision, n’est pas assujetti aux conditions restrictives de l’art. 93 al. 1 LTF (consid. 1). Le juge instructeur a la faculté de limiter la procédure à des questions ou à des conclusions déterminées, dans la perspective de régler séparément certaines des prétentions en cause, par une décision partielle, ou de régler séparément certaines questions de fait ou de droit par une décision incidente, selon l’art. 237 CPC. Il n’en a toutefois, sous réserve d’un abus de son pouvoir d’appréciation, pas l’obligation, même si les parties l’en requièrent. L’art. 125 CPC n’exclut pas que le tribunal rende une décision partielle, relative à certaines prétentions, ou incidente, relative à certaines questions de fait ou de droit, alors même que la procédure n’a pas été préalablement ni formellement limitée. L’art. 133 lit. e CPC n’impose pas non plus d’annoncer l’éventualité d’une décision partielle ou incidente dans la citation aux débats (consid. 2).

Art. 26 al. 2 LTFB ; 321a, 332 al. 1 CO ; 257 CPC

Selon l’art. 26 al. 2 LTFB, le TFB est entre autres compétent pour juger les affaires civiles qui ont un lien de connexité avec des brevets. Toutes les actions qui se fondent sur des conventions en rapport avec des brevets sont en principe de sa compétence. Les demandes basées sur ce type de contrat n’ont pas besoin d’avoir des brevets immédiatement pour objets. Il suffit que le contrat à l’origine de la demande ait un lien avec un brevet, une invention ou une demande de brevet future ou pendante. Les termes « affaires civiles qui ont un lien de connexité avec des brevets » doivent être compris de manière très large et couvrent en particulier les demandes qui, comme en l’espèce, découlent d’un contrat de travail entre les parties en ce qu’il concerne un brevet, respectivement une demande de brevet (consid. 2.1).

Art. 26 LTFB ; 29 LBI ; 105 al. 1 lit. d OBI ; 236 al. 3, 261 al. 1, 262 lit. a, 262 lit. c, 265 al. 1, 343 al. 1 lit. b CPC ; 1, 10, 109 al. 1, 110 al. 1 LDIP

Les deux parties ayant leur siège aux Etats-Unis, les tribunaux suisses compétents pour prononcer des mesures provisoires sont les tribunaux ou les autorités suisses compétents au fond ou ceux du lieu d’exécution de la mesure au sens de l’art. 10 LDIP (consid. 2.1).

L’action au fond est une demande en cession selon l’art. 29 LBI de deux demandes de brevet suisses. Elle a été introduite devant le TFB le 25 septembre 2014. Les mesures provisoires requises visent à faire interdire tout acte de disposition éventuel des demandes de brevet en question et à faire porter la mention de la restriction du droit de disposer au registre des brevets. L’action en cession de l’art. 29 LBI est, aux côtés des actions portant sur la validité et l’inscription de droits de propriété intellectuelle, une action d’état au sens de l’art. 109 al. 1 LDIP qui se rapporte à l’existence du droit de propriété intellectuelle ou à son titulaire. En outre, la mesure doit être exécutée en Suisse puisque les autorités suisses qui tiennent le registre, soit l’IPI, sont requises d’y porter l’annotation d’une restriction du droit de disposer des demandes de brevet. La compétence du TFB à raison du lieu et à raison de la matière découle ainsi à la fois des art. 1, 10 et 109 al. 1 LDIP, ainsi que de l’art. 26 LTFB (consid. 2.2). Le droit suisse est applicable selon l’art. 110 al. 1 LDIP (consid. 2.3).

Le TFB suit l’argumentaire de la demanderesse qu’un dommage difficilement réparable résulterait du fait que la défenderesse, en transférant les deux demandes de brevet à un tiers, rendrait plus difficile, si ce n’est absolument impossible, la mise en œuvre de l’action en cession. En cédant les demandes de brevet à un tiers, la défenderesse perdrait sa légitimité passive et l’introduction d’une nouvelle action en cession contre l’acquéreur des demandes de brevet s’imposerait, ce qui retarderait de manière importante la procédure et entraînerait une augmentation des coûts. Le TFB retient que l’octroi des mesures requises – qu’il soit fait interdiction à la défenderesse de céder le droit à la délivrance des deux demandes de brevet litigieuses ou de leur apporter des modifications, est de nature à supprimer le risque d’entrave à l’exécution, en particulier en lien avec l’ordre supplémentaire donné à l’autorité qui tient le registre d’y porter cette restriction du droit de disposer. Le risque d’entrave à l’exécution ne peut être supprimé que par l’octroi de mesures provisionnelles immédiates sans audition préalable de la défenderesse, au sens de l’art. 265 al. 1 CPC.

Pour le TFB, les mesures superprovisionnelles requises sont proportionnées et ne sont pas de nature à porter préjudice à la défenderesse si cette dernière ne peut pas momentanément transférer ou modifier les demandes de brevet déposées. La requête de mesures superprovisionnelles est ainsi admise et il est donné l’ordre à l’IPI, en vertu des art. 262 lit. c CPC et 105 al. 1 lit. d OBI de porter au registre les restrictions correspondantes au droit de disposer des demandes de brevet concernées (consid. 4.2). Le TFB assortit, au titre de mesure d’exécution, l’interdiction de disposer des demandes de brevet, respectivement de les modifier, de la menace d’une amende d’ordre de CHF 5’000.- au sens de l’art. 236 al. 3 CPC en lien avec l’art. 343 al. 1 lit. b CPC.

Art. 9, 29 al. 2 Cst.

Le recourant qui se prévaut d’une violation de l’art. 9 Cst. ne peut pas se contenter de simplement invoquer l’arbitraire. Une correction ou un complément de l’état de fait n’est possible que si l’instance inférieure a violé des droits constitutionnels. Dans un tel cas, le recourant doit non seulement démontrer l’importance des faits en question pour l’issue de la procédure, mais également de quelle manière la constatation des faits telle qu’elle a été effectuée par l’instance inférieure est contraire aux principes constitutionnels (consid. 1.2). Dans les cas mentionnés à l’art. 107 CPC, le tribunal peut s’écarter des règles générales relatives à la répartition des frais de procédure et les répartir selon sa libre appréciation (consid. 2.3.1 et 2.3.2.). Le droit d’être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) vise d’une part à établir les faits, de l’autre à assurer que les parties puissent participer à la prise de la décision (consid. 3.1). Le tribunal qui omet de prendre en considération la note de frais du conseil en brevet empêche la partie victime de cet oubli de faire valoir son point de vue relativement à la répartition des frais. Une telle omission constitue une violation de l’art. 29 al. 2 Cst., laquelle doit être corrigée.

Art. 90, 93, 98, 106 al. 2 LTF

Les décisions sur mesures provisionnelles ne sont considérées comme des décisions finales au sens de l’art. 90 LTF que lorsqu’elles relèvent d’une procédure autonome. Les mesures provisionnelles notifiées séparément pendant ou en dehors d’une procédure principale et qui ne sont accordées que pour la durée du procès ou à condition qu’une procédure au fond soit introduite constituent des décisions incidentes au sens de l’art. 93 LTF. Dans le cas d’espèce, la décision qui déclare la requête de mesures provisionnelles comme étant partiellement sans objet et devant partiellement être rejetée doit être considérée comme finale (consid. 1.1). Dans les recours formés contre des décisions portant sur des mesures provisionnelles, seule peut être invoquée la violation des droits constitutionnels (art. 98 LTF) ; elle doit l’être avec précision (art. 106 al. 2 LTF).

Art. 6 ch. 1 CEDH ; 30 al. 1 Cst. ; 42 al. 1, 42 al. 2, 75 al. 1, 92 al. 1, 97 al. 1, 99 al. 1, 105 al. 1, 105 al. 2, 106 al. 2 LTF ; 27, 28 LTFB ; 47 al. 1 lit. f, 48 CPC ; l’art. 28 LTFB

Règle la question de la récusation des juges suppléants au TFB. Pour le surplus, les principes généraux du CPC, et en particulier ceux qui traitent de la récusation selon les art. 47 ss CPC valent en vertu de l’art. 27 LTFB aussi pour la procédure devant le TFB. C’est ainsi qu’est concrétisé le droit constitutionnel à bénéficier d’un juge indépendant et impartial consacré par l’art. 30 al. 1 Cst. (consid. 2.1.1). Cette garantie est déjà violée en présence de circonstances qui, examinées de manière objective, donnent à penser qu’elles pourraient fonder une apparence de prévention ou le danger d’un parti pris. Tel est le cas si l’ensemble des circonstances, tant de fait que du point de vue procédural, fait apparaître des éléments de nature à éveiller la méfiance quant à l’impartialité du juge. La défiance quant à l’indépendance doit apparaître comme fondée d’un point de vue objectif, et il n’est pas exigé pour la récusation que le juge soit effectivement prévenu (consid. 2.1.2). La garantie du juge constitutionnel vaut de la même manière pour les juges ordinaires que pour les juges suppléants (consid. 2.1.3). Un avocat intervenant comme juge suppléant est, selon la jurisprudence constante, considéré comme prévenu lorsqu’il est encore lié par un mandat à l’une des parties ou lorsqu’il est intervenu comme mandataire d’une des parties à de nombreuses reprises ou peu avant la procédure. Cela sans égard au fait que le mandat soit en lien ou non avec l’objet de la procédure. Dans sa jurisprudence la plus récente, le TF a considéré qu’un avocat intervenant comme juge était prévenu non seulement lorsqu’il représentait ou avait représenté peu de temps auparavant une des parties à la procédure, mais aussi lorsque, dans le cadre d’une autre procédure, il était ou avait été mandaté par une partie adverse à celles intervenant dans la procédure dans le cadre de laquelle il était appelé à officier comme juge (consid. 2.1.4). Une apparence de prévention peut aussi découler de ce qu’un des associés du juge suppléant, et pas ce dernier à titre personnel, est mandaté par une des parties à la procédure ou l’a été peu de temps auparavant. Cela quelle que soit la nature du rapport juridique qui unit les associés au sein d’une étude (consid. 2.1.5). D’autres types de relations qu’un mandat direct entre une des parties et le juge suppléant peuvent susciter l’existence de liens particuliers entre eux fondant l’apparence d’une prévention. Les considérations pratiques liées à la difficulté d’établir l’existence de telles relations ne doivent pas être un obstacle à leur prise en compte, vu l’obligation de déclarer l’existence d’un possible motif de récusation faite par l’art. 48 CPC aux magistrats ou fonctionnaires judiciaires (consid. 2.1.6). Selon l’art. 28 LTFB, les juges suppléants se récusent dans les procédures où une partie est représentée par une personne qui travaille dans la même étude d’avocats, dans le même cabinet de conseils en brevets ou pour le même employeur. Cette disposition vise seulement les cas dans lesquels un associé ou un collègue de travail du juge représente une partie dans le cadre de la procédure pendante devant le TFB. Elle ne règle pas la situation dans laquelle un associé du juge appartenant à la même étude que lui est lié par un mandat à une des parties à la procédure, sans pour autant la représenter dans la procédure pendante devant le TFB. L’art. 28 LTFB n’est ainsi pas applicable aux cas dans lesquels un mandat est ouvert entre l’étude d’avocats à laquelle le juge appartient et une partie à la procédure (ou une partie étroitement liée à celle-ci parce qu’appartenant au même groupe de sociétés), mais où cette dernière est représentée dans la procédure devant le TFB par un mandataire qui n’est pas un des associés du juge suppléant. Ce sont alors les motifs généraux de récusation selon l’art. 47 CPC – dans le cas particulier la clause générale de l’al. 1 lit. f – qui doivent être pris en compte dans le respect des principes établis par l’art. 30 al. 1 Cst. (consid. 2.2). Dans le cas particulier, le mandat donné à un des associés du juge suppléant ne l’était pas par une des parties à la procédure (Denner SA), mais par sa société sœur : Migros France. Le risque de prévention du juge suppléant a néanmoins été retenu par le TF vu la manière dont les marques sont gérées au sein du groupe Migros (qui agit aussi pour celles de Denner) (consid. 2.3.1), et de la communauté d’intérêts entre ce groupe et Denner à l’issue du procès devant le TFB (consid. 2.3.4). Le recours est admis.

Art. 105 al. 2 LTF ; 1 al. 2, 18 al. 1, 332 al. 1 CO ; 2, 109 al. 1, 110 al. 3, 122 LDIP

Lorsqu’une action tend seulement à faire contraindre le défendeur à accomplir des démarches juridiques destinées au transfert du brevet, le jugement le condamnant n’exerce qu’une influence médiate sur la titularité de ce bien immatériel, et la contrainte ne résulte que de la menace d’une sanction pénale à infliger par les autorités suisses. Cette action n’est pas clairement exclue par l’art. 109 al. 1 LDIP. Elle n’est visée par aucune disposition spécifique de la loi, de sorte que les tribunaux suisses du lieu du domicile du défendeur sont compétents par l’effet de l’art. 2 LDIP (consid. 2). Lorsque les deux parties ont leur siège ou domicile en Suisse et que le défendeur a fourni ses services dans ce pays, le droit suisse est applicable à leurs relations contractuelles conformément aux art. 110 al. 3 et 122 LDIP (consid. 3).

L’inventeur peut valablement transférer à une autre personne le droit d’introduire une demande de brevet, puis de devenir titulaire du brevet, avant même le dépôt d’une telle demande. Ce transfert n’est soumis à aucune condition de forme. Déjà avant l’achèvement de l’invention et la naissance du droit au brevet correspondant, l’inventeur peut convenir avec une autre personne que ce droit lui appartient d’emblée ; c’est le régime ordinairement prévu par l’art. 332 al. 1 CO dans les relations entre travailleurs et employeurs. L’inventeur peut d’ailleurs aussi s’obliger valablement et par avance à exécuter, le moment venu, les actes éventuellement nécessaires à un transfert du droit au brevet (consid. 4). En cas de litige sur la portée d’un accord intervenu entre l’inventeur et une autre personne revendiquant le droit au brevet, le juge doit, au premier chef, s’efforcer de déterminer conformément à l’art. 18 al. 1 CO leur réelle et commune intention, ce qui relève de la constatation des faits. Au stade des déductions à opérer sur la base d’indices, lesquelles relèvent, elles aussi, de la constatation des faits, le comportement que les cocontractants ont adopté dans l’exécution de leur accord peut éventuellement dénoter de quelle manière ils l’ont eux-mêmes compris et révéler ainsi leur réelle et commune intention (consid. 4).

Le comportement du défendeur, qui a personnellement concouru à ce que les droits de propriété intellectuelle afférents à la création au développement de laquelle il a collaboré soient acquis par la demanderesse – en souscrivant un acte de cession de ces droits, en répondant aux demandes d’instructions du mandataire de la demanderesse et en consentant ainsi de manière implicite au moins au fait que cette dernière dépose la demande de brevet correspondant à l’invention concernée – dénote avec certitude qu’il admettait, selon sa propre conception de la collaboration rémunérée par la demanderesse, que les droits de propriété intellectuelle se rapportant à la création à laquelle il avait collaboré, revenaient à cette dernière.

Pour le TF, le défendeur a ainsi implicitement admis que le droit à la délivrance du brevet appartenait d’emblée à la demanderesse ou que, à défaut, en particulier pour les brevets américains, il devait lui être transféré avec son concours. Le TF procède d’office en application de l’art. 105 al. 2 LTF à cette constatation de fait qui pour lui s’impose (consid. 5). L’acquisition de droits de propriété intellectuelle en contrepartie d’une rémunération peut faire l’objet d’un contrat tacitement, mais valablement conclu entre les parties, conformément à l’art. 1 al. 2 CO. Il importe peu que le lien entre la rémunération versée et l’invention considérée ne ressorte peut-être pas clairement du libellé des factures établies par le défendeur. Ce contrat englobe tous les brevets d’invention afférents au mécanisme concerné, y compris celui faisant l’objet du litige. Il autorise la demanderesse à exiger le transfert de ce brevet aussi, quelle que soit la qualification des relations contractuelles nouées entre les parties (consid. 5).