Participation sans droit à l’assemblée générale ; contestation de décisions de l’assemblée générale. Si des personnes qui n’ont pas le droit de participer à l’assemblée générale prennent part à une décision, tout actionnaire peut contester cette décision, à moins que la société défenderesse ne prouve que cette participation n’a exercé aucune influence sur la prise de décision. En l’espèce, la recourante conteste l’existence d’une base légale interdisant à une fondation de prévoyance du personnel d’exercer le droit de vote des actions qu’elle détient. Appliquant l’art. 659a al. 1 CO par analogie, le TF considère que lorsqu’une fondation patronale de prévoyance du personnel détient des actions de la société qui la contrôle, le droit de vote découlant de ces actions est suspendu, à moins que des mesures structurelles appropriées ne garantissent que le conseil de fondation agisse de manière effectivement et durablement indépendante. Dans le cas d’espèce, la participation non autorisée a eu un effet causal sur la prise de décision au sens de l’art. 691 al. 3 CO in fine. Chaque actionnaire peut dès lors contester les décisions de l’assemblée générale concernées.
Olivier Hari, Hervé N’Zita, Mickaël Vuilleumier
Convocation d’une assemblée générale ordinaire ; nullité des décisions de l’assemblée générale pour vices de formes graves. Selon la jurisprudence constante du TF, les inscriptions au registre du commerce sont des faits notoires qui n’ont besoin ni d’être allégués ni prouvés. En l’espèce, l’objet du litige reposant sur les versions successives des statuts, respectivement les modes de convocation de l’assemblée générale, la recourante n’ayant pas pu se prononcer sur lesdits statuts en première instance se voit privée de son droit d’être entendu. Une violation éventuelle de l’art. 696 al. 2 CO ne constitue pas un motif de nullité au sens de l’art. 706b CO. Quand bien même la nullité se constate d’office, celle-ci doit être invoquée dans le cadre d’une requête au sens de l’art. 58 CPC. En l’absence d’une telle requête, le TF ne saurait entrer en matière sur une requête en constatation de la nullité des décisions de l’assemblée générale.
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Convocation d’une assemblée générale ordinaire. Conformément à l’art. 699 al. 4 CO, le juge doit, sur requête, ordonner la convocation de l’assemblée générale si le conseil d’administration ne donne pas suite à cette requête dans un délai raisonnable. La convocation par le juge sur la base de l’art. 699 al. 4 CO est une mesure purement formelle qui ne lie sur le fond ni l’assemblée générale ni le juge qui statue sur la contestation des décisions prises lors de l’assemblée convoquée sur ordre du juge. Le juge chargé de la convocation n’a donc pas non plus à juger si les décisions qui seront prises lors de l’assemblée générale seront valables ; ces questions ne doivent être examinées que dans le cadre d’une éventuelle action en annulation ou en nullité. Néanmoins, le juge saisi d’une requête de convocation ne doit pas donner suite à une demande de convocation et d’inscription à l’ordre du jour si celle-ci s’avère manifestement abusive ou chicanière ; il en va de même des demandes d’inscription à l’ordre du jour manifestement nulles et non avenues.
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Carence organisationnelle. Sort du mandat d’administrateur lorsqu’ aucune assemblée générale n’a eu lieu ou que l’élection du conseil d’administration n’a pas été inscrite à l’ordre du jour dans les six mois qui suivent la clôture de l’exercice. En l’espèce, le TF exclut la continuation ou la reconduction tacite dudit mandat. De même, une disposition statutaire prévoyant une réélection automatique des administrateurs pour éviter une éventuelle situation de blocage au sein de l’actionnariat serait contraire au droit inaliénable de l’assemblée générale d’élire les membres du conseil d’administration en vertu de l’art. 698 al. 2 ch. 2 CO. Aussi, le mandat du conseil d’administration prend fin à l’expiration du sixième mois suivant la clôture de l’exercice concerné, si aucune assemblée générale n’a été organisée conformément à l’art. 699 al. 2 CO ou si l’élection du conseil d’administration n’a pas été inscrite à l’ordre du jour.
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Carence dans l’organisation d’une société anonyme faisant partie de l’actif d’une succession ; action de l’exécuteur testamentaire et intervention accessoire d’un héritier à titre individuel. Lorsque les héritiers membres de la communauté héréditaire sont en commun actionnaire (unique) d’une société, l’exécuteur testamentaire a, en tant qu’administrateur de la succession, la faculté d’introduire l’action pour carences dans l’organisation de cette société en vertu de l’art. 731b CO. Les héritiers sont titulaires des droits successoraux ; par conséquent chaque héritier a un intérêt juridique individuel à intervenir dans la procédure ; il peut donc intervenir seul au procès en qualité d’intervenant accessoire indépendant. A ce titre, il est libre de procéder indépendamment de l’exécuteur testamentaire et peut même adopter une position en contradiction avec celle de celui-ci.
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Responsabilité du conseil d’administration ; légitimation active ; concurrence entre l’action de la société et celle d’un créancier/actionnaire (ayant tous deux subi un dommage) et de la priorité à donner à l’une par rapport à l’autre (consid. 3.2.3.1). Revenant sur les arrêts 131 III 306 et 141 III 112, le TF mentionne qu’il ne s’était alors par explicitement prononcé sur la question de savoir si la priorité de l’action de la société s’appliquait indépendamment du fait que la société soit en faillite ou non. Il précise ici que dans le cas d’une société en activité, il n’y a pas de concurrence entre les deux actions qui peuvent être introduites librement par les ayants droit. Finalement, le TF dresse une liste des dispositions du droit de la société anonyme qu’un créancier peut invoquer pour fonder un dommage. Il se réfère aussi à la notion de normes à double effet protecteur : en font partie les dispositions relatives au bilan ainsi que celles sur le surendettement. L’art. 717 CO (diligence) en revanche ne crée que des obligations envers la société et ne peut pas être invoqué par un créancier. En l’espèce, l’actionnaire ou le créancier voit sa qualité pour agir limitée aux prétentions tendant à la réparation de son dommage direct. Il est rappelé que les prétentions en responsabilité fondées sur l’art. 754 CO peuvent également être formulées par une personne qui n’est plus actionnaire ou créancière de la société au moment où l’action est introduite, pour autant qu’elle ait été directement lésée en cette qualité. Conformément à la maxime des débats, il est indispensable d’établir l’illicéité du comportement adopté par l’organe, afin que le dommage allégué qui en résulte puisse être admis.
Olivier Hari, Hervé N’Zita, Mickaël Vuilleumier
Responsabilité des organes de la société anonyme. La responsabilité fondée sur l’art. 754 CO est subordonnée à la réunion des quatre conditions générales suivantes, à savoir la violation d’un devoir, une faute (intentionnelle ou par négligence), un dommage et l’existence d’un rapport de causalité (naturelle et adéquate) entre la violation du devoir et la survenance du dommage. Elle vise tant les administrateurs que toute personne qui s’occupe de la gestion, y compris les organes de faits. Lorsque le manquement reproché est, comme en l’espèce une omission, le rapport de causalité doit exister entre l’acte omis et le dommage. C’est notamment le cas lorsque les créances colloquées dans la faillite sont nées après la date à laquelle l’administrateur intimé aurait dû aviser le juge du surendettement comme dans le cas d’espèce. L’art. 759 al. 1 CO institue une solidarité différenciée. Si plusieurs personnes répondent d’un même dommage, chacune d’elles est solidairement responsable dans la mesure où le dommage peut leur être imputé personnellement en raison de leur faute et au vu des circonstances. Dans l’affaire en cause, le TF retient qu’il semble discutable d’admettre une faute de l’administrateur qui se renseignait régulièrement sur l’état de la société auprès du directeur recourant, relançait ce dernier en cas de retard dans l’établissement des comptes, a requis l’établissement des comptes avant son départ de la société, a prêté plusieurs millions à la société et a postposé ses créances au vu des pertes subies par la celle-ci.
Olivier Hari, Hervé N’Zita, Mickaël Vuilleumier
Contrôle spécial. Conformément à l’art. 697b al. 2 CO, le droit au contrôle spécial est soumis à l’interdiction générale de l’abus de droit. Il ne doit pas être utilisé à des fins étrangères à son essence. Ainsi, le requérant qui démontre que le manque d’informations relatives aux sujets visés par les questions litigieuses empêchait les actionnaires de voter en toute connaissance de cause et que le comportement des organes de la recourante contrevenait à plusieurs dispositions légales, notamment dans un contexte susceptible de remplir les conditions de l’art. 725 CO, renforce dès lors d’autant plus la légitimité de sa requête.
Olivier Hari, Hervé N’Zita, Mickaël Vuilleumier