Droit pénal général

Contrats de bail ; faux dans les titres. Il est question de déterminer si les formules officielles et les contrats de bail à loyer sont des titres au sens de l’art. 110 al. 4 CP et permettent l’application de l’art. 251 CP. Le faux peut être matériel (l’auteur du document ne correspond pas à l’auteur réel) ou intellectuel (le contenu du document n’est pas conforme à la réalité). Le document doit être d’« une crédibilité accrue et son destinataire pouvoir s’y fier raisonnablement » pour être considéré comme un faux matériel. Dans le cas d’espèce, la formule officielle (art. 269CO) a été utilisée dans le contrat de bail et des montants de loyers, ainsi que des noms fictifs ont été inscrits pour éviter des procédures de contestation du loyer initial et, de ce fait, augmenter les bénéfices du bien immobilier. L’art. 251 CP est donc applicable dans les cantons ou la formule officielle est prescrite selon l’art. 269d CO, car celle-ci a un caractère obligatoire et son contenu est défini strictement dans la loi. Cependant, l’obligation légale ne porte que sur le montant du loyer et pas sur les noms des précédents locataires. Dans le cas d’espèce, l’art. 251 CP ne s’applique donc qu’aux montants fictifs, mais pas aux noms fictifs. Le recours est partiellement admis.

ATF 148 IV 96 (d)

2021-2022

Calcul de l’amende TVA en cas de pluralité d’infractions ; principe de l’aggravation et cumul des peines. Sous réserve de dispositions particulières dans les lois administratives pertinentes, l’exclusion du principe de l’aggravation pour les amendes et les peines prononcées en conversion d’amendes (art. 9 DPA), s’applique également en cas de concours entre des infractions à différentes lois administratives ou à la même loi administrative. En matière de taxe sur la valeur ajoutée, l’art. 9 DPA s’applique aux cas régis par l’art. 101 al. 4 et 5 LTVA, malgré son exclusion générale prévue à l’art. 101 al. 1 LTVA. Dans le domaine de compétence de l’OFDF, l’art. 101 al. 4 LTVA ne couvre que le concours idéal, tandis que l’art. 101 al. 5 LTVA règle également le concours réel pour les infractions qui ressortissent à l’AFC. Le cumul des peines s’applique donc aux infractions commises en concours réel dans le domaine de compétence de l’OFDF.

Applicabilité des bases légales. La recourante, âgée de 15 ans au moment des faits, s’est rendue en Syrie sur les territoires de l’EI avec son frère en 2014. La recourante a vécu plusieurs mois dans la communauté de l’organisation avant de s’enfuir et revenir en Suisse fin 2015. En 2019, elle a été condamnée à dix mois de privation de liberté avec sursis selon les art. 2 al. 1 et 2d de la Loi fédérale interdisant les groupes « Al-Qaïda » et « Etat islamique » et les organisations apparentées (loi interdisant Al-Qaïda/EI). La recourante allègue que les mauvaises bases légales ont été appliquées et que l’art. 2 al. 1 de la loi interdisant Al-Quaïda/EI ne répondait pas à l’exigence de précision de la loi pénale. Il est ici question de l’applicabilité de la loi interdisant Al-Qaïda/EI (en vigueur jusqu’à fin 2022) en rapport avec l’article analogue (art. 74) de la Loi fédérale sur le renseignement (LRens). Le Conseil Fédéral, dans le message relatif à l’art. 74 LRens, indique que la LRens ne prime pas sur la loi interdisant Al-Qaïda/EI, notamment car les dispositions pénales dans les deux textes sont identiques. Pour ce qui est de l’exigence de précision de l’art. 2 al. 1 de la loi interdisant Al-Qaïda/EI, cette loi vise à réprimer toutes les activités et les actes visant à soutenir ces organisations. L’exigence de précision n’est donc pas violée, car les comportements sanctionnés pénalement sont limités à un niveau de proximité avec les organisations précitées. Dans le cas d’espèce, en vivant dans la communauté avec le soutien financier de l’EI et en endossant le rôle attribué par les règles de l’EI (habillement, travail domestique, enseignements aux enfants), la recourante a participé activement à la vie de l’EI. De plus, elle a effectué le voyage en connaissance de cause. La condition de proximité entre son comportement et les activités criminelles de l’EI prescrit par la jurisprudence est donc réalisée.

Principe de la légalité ; dispositions pénales de la LAsi et la LEI ; renvoi exécutoire. La loi sur les étrangers et l’intégration (LEI) s’applique aux personnes étrangères dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral (art. 2 al. 1 LEI), dont la loi sur l’asile (LAsi) tout particulièrement. En cas de décision de renvoi exécutoire d’une personne requérante d’asile, l’obligation de collaboration à l’obtention de documents de voyage de l’art. 8 al. 4 LAsi prime celle prévue aux art. 120 al. 1 let. e cum 90 let. c LEI. La méconnaissance de l’obligation de collaborer n’étant pas sanctionnée par la LAsi – à l’inverse de la LEI qui prévoit une peine pour une telle violation –, il est contraire au principe de la légalité de prononcer une peine sur la base des art. 120 al. 1 let. e cum 90 let. c LEI dans ce contexte où ces dispositions sont inapplicables.