Arbitrage

TF 4A_486/2014

2014-2015

(A. [société anonyme de droit xxx] c. X.B. [société de droit yyy]

Recours contre la sentence rendue le 30 juin 2014 par un tribunal arbitral CCI. Argument selon lequel, en omettant d’appliquer les principes d’interprétation établis par le droit suisse (régissant le contrat litigieux) à l’art. 18 al. 1 CO, pourtant dûment invoqués par la recourante, le tribunal aurait commis un déni de justice formel (consid. 4.2-4.3.1). S’il est vrai que la sentence ne cite pas expressément cette disposition, l’examen de son contenu montre que le tribunal a bel et bien procédé à l’interprétation du contrat conformément aux principes déduits de l’art. 18 al. 1 CO. Plus spécifiquement, le tribunal a retenu, à la majorité de ses membres, que son analyse du contrat lui avait permis de déterminer la réelle et commune intention des parties (interprétation dite ‘subjective’) quant au sens à donner aux clauses pertinentes pour la résolution du litige (consid. 4.3.2). Recours rejeté.

TF 4A_554/2014

2014-2015

(A. [société de droit français] c. B. [société soumise au droit de l’Etat du Delaware]) 

Recours contre la sentence rendue le 30 juillet 2014 par un Arbitre unique CCI siégeant à Genève. En Suisse, le droit des parties d’être interpellées sur des questions juridiques n’est reconnu que de manière restreinte. En vertu de l’adage jura novit curia, les tribunaux étatiques et arbitraux peuvent statuer sur la base de règles de droit autres que celles invoquées devant eux. Pour autant que la convention d’arbitrage ne restreigne pas la mission du tribunal aux seuls moyens juridiques soulevés par les parties, celles-ci n’ont pas à être entendues sur la portée à reconnaître aux règles de droit, à moins que le tribunal n’envisage de fonder sa décision sur une norme ou considération juridique qui n’a pas été invoquée dans l’arbitrage et dont les parties ne pouvaient pas supputer la pertinence pour la résolution du litige (consid. 2.1).

Par ailleurs, si les parties étaient convenues de déroger à la règle jura novit curia en limitant la mission de l’arbitre aux seuls moyens juridiques qu’elles invoqueraient (par exemple en incluant une clause à cet effet dans l’acte de mission), le non-respect de cette limitation ouvrirait un recours au TF au titre de l’incompétence de l’arbitre (art. 190 al. 2 let. b LDIP) ou de la violation de la règle ne eat judex ultra petita partium (art. 190 al. 2 let. c LDIP), et non du chef de la violation du droit d’être entendu sanctionnée par l’art. 190 al. 2 let d LDIP (consid. 2.2).

Cela étant, la recourante plaide en vain l’effet de surprise : s’il est vrai que l’expression « reconduction tacite » n’avait pas été utilisée dans les écritures des parties, l’application par l’arbitre de cette figure juridique connue du droit français, régissant le contrat litigieux, était loin d’être imprévisible. Au vu de la question à résoudre, l’hypothèse de la reconduction tacite ne pouvait en tout cas pas être écartée d’emblée par un plaideur prudent et a fortiori par la recourante, une entreprise française rompue à la négociation de contrats internationaux, dotée d’un service juridique interne et assistée dans l’arbitrage par deux conseils inscrits au barreau de Paris (consid. 2.3.2). Recours rejeté.

TF 4A_636/2014

2014-2015

(A. Corporation [Société russe] c. B. SA [Société luxembourgeoise, partie du groupe C.]) 

Recours contre la sentence rendue le 15 septembre 2014 par un tribunal CCI siégeant à Genève. En fondant sa décision quant au dommage subi par la demanderesse sur une déclaration de témoin soumise par cette même partie, le tribunal n’a pas violé le droit d’être entendue de l’autre partie, laquelle s’était limitée à affirmer que ce témoignage n’était pas apte à prouver le montant du dommage, sans produire de contre-témoignage ou d’expertise, et sans contre-interroger le témoin de la demanderesse sur ce point (consid. 3.3). En droit suisse de l’arbitrage international, la violation ou l’application arbitraire d’une règle de procédure par le tribunal n’est pas en tant que telle un motif d’annulation de la sentence. En particulier, l’admission d’une écriture déposée par une partie après le délai fixé à cette fin n’autorise pas l’autre partie à se plaindre d’une violation du principe de l’égalité de traitement. Une telle violation ne survient, dans ce cas de figure, que si les deux parties ont soumis leurs écritures tardivement et que seule l’une d’entre elles est sanctionnée pour ce retard (consid. 4.2).

TF 4A_709/2014

2014-2015

(A. SA [société de droit suisse] c. B. Sàrl [société de droit luxembourgeois]).

L’art. 182 al. 3 LDIP, tel qu’interprété par la jurisprudence, ne confère pas aux parties le droit de faire entendre oralement ceux de leurs témoins qui ont déposé des déclarations écrites. Par ailleurs, il n’y a pas de violation du principe de l’égalité de traitement lorsque l’arbitre, conformément à la procédure usuelle en arbitrage international, accorde à une partie le droit d’interroger ses propres témoins (re-direct examination) suite à leur audition en cross examination à la demande de son adverse partie, tout en refusant à cette dernière le droit d’appeler ses témoins pour un interrogatoire direct alors que l’autre partie n’en a pas requis l’audition en cross examination (consid. 5.2.4). Recours rejeté. (En rapport avec ce thème : au sujet de l’admissibilité des règles de procédure limitant le droit des parties de faire entendre leurs propres témoins aux cas où le contre-interrogatoire a été requis par la partie adverse, voir le consid. 6.2.3 de l’arrêt 4A_199/2014 du 8 octobre 2014).