Arbitrage

TF 4A_682/2012

2012-2013

(Egyptian Football Association c. Al-Masry Sporting Club)

Recours contre la sentence rendue le 2 octobre 2012 par le TAS. L’art R47 al. 1 du Code TAS, qui impose l’obligation d’épuiser les instances préalables, « ne vise que l’instance interne dont la fédération sportive concernée prescrit la mise en œuvre avant toute saisine du TAS, à l’exclusion de celle à qui la partie recourante a le choix de déférer ou non la décision qui ne la satisfait pas » (consid. 4.4.3.2). En conséquence de quoi, cette obligation ne s’étend pas à la révision/reconsidération en tant que moyen de droit extraordinaire prévu par la réglementation sportive. Recours rejeté.

ATF 139 III 135

2012-2013

(A. c. B. et C.)

Art. IV CNY

Recours contre l’arrêt de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois du 12 avril 2012, considérant qu’un séquestre pouvait être ordonné sur présentation d’une sentence arbitrale étrangère en l’absence d’une décision d’exequatur préalable. Saisi d’un recours contre un arrêt sur opposition à séquestre, le TF ne revoit l’application du droit fédéral que sous l’angle restreint de l’arbitraire, s’agissant d’une procédure sur mesures provisionnelles au sens de l’art. 98 LTF. A la lumière du texte de la LP, tout comme de la volonté du législateur telle qu’elle ressort notamment des travaux préparatoires relatifs à la modification de cette loi suite à l’entrée en vigueur de la CL révisée de 2007, il n’est pas arbitraire d’admettre que la notion de titre de mainlevée définitive au sens de l’art. 271 al. 1 ch. 6 LP comprend tous les jugements suisses et étrangers, même « non Lugano », y compris les sentences arbitrales étrangères (consid. 4.5.1). Il doit également être admis que de telles décisions sont susceptibles de fonder un séquestre sur la base de l’art. 271 al. 1 ch. 6 LP sans avoir fait l’objet d’une procédure d’exequatur préalable. Ainsi, le juge du séquestre doit statuer à titre incident, à la suite d’un examen sommaire du droit et des faits rendus simplement vraisemblables, sur le caractère exécutoire d’une décision étrangère « non Lugano » (consid. 4.5.2). Recours rejeté.

(X. SA c. Y. [société anonyme de droit mauricien] et Z.)

Art. V CNY

Recours contre les décisions du Tribunal cantonal du canton du Valais du 5 décembre 2012. Sentence arbitrale CCI du 5 décembre 2011 invoquée comme titre de créance dans le cadre de deux requêtes de mainlevée définitive par les poursuivants, Y. et Z., à l’encontre de X. Jugement en première instance déclarant la sentence exécutoire et ordonnant la mainlevée définitive des oppositions aux commandements de payer interjetées par X. Recours contre ce jugement rejeté par le Tribunal cantonal. Caractère subsidiaire de la réserve de l’ordre public au sens de l’art. V ch. 2 let. b CNY en ce qui concerne la régularité de la procédure arbitrale, qui doit être examinée en premier lieu sous l’angle de l’art. V ch. 1 let. b CNY (consid. 4.2.1). Décision incidente, dans la procédure arbitrale, refusant la récusation d’un arbitre, rendue sans les motifs conformément au règlement applicable. L’exequatur de la sentence rendue au terme de cette procédure peut-il être refusé, sur requête de la partie contre laquelle la sentence est invoquée, au motif que son droit d’être entendue aurait été violé, faute pour elle d’avoir obtenu une décision motivée sur le rejet de sa requête de récusation? L’absence de motivation dans la sentence rend plus difficile la tâche du juge de l’exequatur, appelé à la contrôler, mais un tel risque doit être supporté par la partie qui a librement accepté de se soumettre à une juridiction arbitrale, dont les règles de procédure ne sont pas sujettes au mêmes contraintes formelles que celles d’une juridiction étatique (consid. 4.2.2). Recours rejeté.

TF 4A_660/2012

2012-2013

(Y. GmbH [société allemande] c. X. SpA [société italienne])

Recours contre la décision de l’Obergericht ZH, Cour administrative, du 24 octobre 2012, refusant la délivrance d’un certificat de force exécutoire (art. 193 al. 2 LDIP) pour la sentence rendue le 20 juillet 2012 par un arbitre unique statuant sous l’égide de la Chambre de commerce de Zurich. Décision annulée au motif que la cour inférieure avait omis de transmettre à Y., avant de se déterminer sur sa requête, les observations déposées par la partie adverse, violant ainsi le droit d’être entendue de la recourante et son droit à la réplique (consid. 2.2). Recours admis.

ATF 138 III 714

2012-2013

(X. Lda [société de droit portugais] c. Y. Ltd [société de droit chinois])

Recours contre la sentence sur compétence rendue le 23 novembre 2011 par un Tribunal arbitral CCI. L’arbitrabilité subjective (ou ratione personae), qui comprend la capacité de compromettre et celle d’être partie à l’arbitrage, doit être examinée, en tant que condition de validité de la convention d’arbitrage, sous l’angle de l’art. 190 al. 2 let. b LDIP (consid. 3.2). A l’exception de l’art. 177 al. 2 pour les entreprises d’Etat, le chapitre 12 LDIP ne contient pas de disposition spéciale régissant cette question. Selon la jurisprudence du TF, celle-ci relève du principe général de procédure qui veut que la capacité d’être partie (Parteifähigkeit) dépend de la question préalable de la capacité de jouissance, soit la capacité d’être titulaire de droits et obligations, ou capacité juridique (Rechtsfähigkeit) (consid. 3.3.1 et 3.3.4). Dans un arbitrage international ayant son siège en Suisse, la capacité juridique relèvera du droit désigné par les art. 33 ss LDIP pour les personnes physiques ou 154 et 155 let. c LDIP pour les personnes morales (consid. 3.3.2). Une entité étrangère jouissant de la capacité juridique selon son droit d’incorporation sera réputée avoir cette même capacité, et par là, la capacité d’ester en justice ou d’être partie à une procédure d’arbitrage en Suisse. La recourante est une société à responsabilité limitée de droit portugais. Selon ce droit, une telle société maintient sa capacité juridique même si elle est mise en faillite. Il s’ensuit qu’elle a la capacité d’être partie à un arbitrage international en Suisse. Toute restriction imposée en relation avec l’arbitrage par le droit étranger régissant une personne morale est sans effet du point de vue de la lex arbitri suisse, tant qu’elle n’affecte pas la capacité juridique de cette personne (consid. 3.3.4). Effet d’une loi d’application immédiate étrangère (Eingriffsnorm) sur la validité d’une convention d’arbitrage sous l’angle de la LDIP : question laissée ouverte (consid. 4). Recours rejeté.

TF 4A_244/2012

2012-2013

(FC X. [club de football] c. Y. [entraîneur professionnel de football])

Recours contre la sentence rendue par le TAS le 19 mars 2012. Employment Agreement conclu en 2009 entre le club et l’entraîneur, suivi d’un Second Agreement concernant le même rapport de travail, et, en 2010, d’un Settlement Agreement mettant un terme à la relation et prévoyant le paiement d’une indemnité à l’entraîneur. Contrats contenant à la fois une clause d’arbitrage prévoyant la compétence « exclusive » du TAS et des clauses d’élection de for « non exclusives » en faveur des tribunaux suisses (Faits, A.b-A.d). Arbitrage TAS initié par l’entraîneur faute de paiement de l’indemnité par le club. Sentence accueillant partiellement la demande de l’entraîneur, rendue au terme d’une procédure menée par défaut suite à l’objection d’incompétence soulevée par le club. Lorsqu’une clause compromissoire ne permet pas d’établir la volonté concordante des parties de se soumettre à l’arbitrage, elle doit être interprétée conformément au principe de la confiance (interprétation objective). En l’espèce, une interprétation objective des clauses contenues dans les différents contrats ne permet pas de conclure à l’existence d’une volonté concordante des parties de renoncer à la juridiction étatique. Le TAS a, en particulier, méconnu la jurisprudence du TF selon laquelle une clause d’élection de for contenue dans un accord transactionnel subséquent prime sur la clause d’arbitrage contenue dans le contrat originaire (consid. 4.4 – 4.6). Conditions de validité d’un accord prévoyant des compétences juridictionnelles alternatives, selon le choix du demandeur : question laissée ouverte (consid. 4.4) (voir également TF 4A_515/2012, consid. 5.2, dans le cadre d’un arbitrage interne). Recours admis.

TF 4A_388/2012

2012-2013

(A. [citoyen bulgare ; entraîneur de l’équipe nationale bulgare de football] c. Bulgarische Fussballunion)

Recours contre une sentence rendue par le TAS le 24 mai 2012, déniant sa compétence. Saisi du grief de l’art. 190 al. 2 let. b LDIP, le TF en examine librement tous les aspects juridiques (jura novit curia), ce qui peut le conduire à rejeter le grief sur la base d’un autre motif que celui qui est indiqué dans la sentence entreprise (consid. 3.1). Selon la règle matérielle de l’art. 177 al. 1 LDIP, un litige surgissant d’un contrat de travail est arbitrable dans la mesure où il porte sur une prétention de nature patrimoniale, sous réserve de dispositions de droit étranger exigeant impérativement la juridiction des tribunaux étatiques et relevant de l’ordre public, ce qui n’est pas le cas de la disposition du Code de procédure civile bulgare invoquée en l’espèce. Ainsi, c’est à tort que le TAS a conclu à l’inarbitrabilité du litige. De même, il n’y avait pas lieu pour le TAS de prendre en considération le risque éventuel que la sentence ne soit pas exécutée en Bulgarie, un tel risque étant sans pertinence aux fins de sa décision sur compétence (consid. 3.2-3.3). Cela étant, la clause compromissoire en question n’est pas valable au sens de l’art. 178 al. 2 LDIP : la sentence du TAS était donc correcte dans son résultat (consid. 3.4). Recours rejeté.

TF 4A_414/2012

2012-2013

(X. c. Z.)

Recours contre la sentence rendue le 6 juin 2012 par un Tribunal arbitral CCI. Cas dans lequel le TA a rendu une première « sentence partielle », en juin 2011, se déclarant compétent pour connaître du litige. Savoir si l’intimée disposait de la capacité d’être partie au moment où cette première sentence a été rendue est une question qui relève de l’arbitrabilité subjective, en d’autres termes de la compétence ratione personae. Cette question doit donc être examinée sous l’angle de l’art. 190 al. 2 let. b LDIP (consid. 1.2) (voir aussi ATF 138 III 714, consid. 3.2 et 3.3). La recourante ne conteste pas l’interprétation du droit étranger faite par le TA dans la sentence entreprise, rendue après la première sentence sur compétence, et concluant à l’effet rétroactif de la réinscription de Z., en août 2011, au registre des sociétés dont elle relevait. Dès lors, on doit tenir pour acquis que l’intimée n’a pas cessé d’exister (et avait ainsi la capacité d’être partie) durant la période de quelques mois où elle ne figurait plus dans ce registre, quand la première sentence a été rendue. Par ailleurs, selon la jurisprudence du TF, la capacité d’être partie doit être réalisée, comme les autres conditions de recevabilité, au moment où le jugement au fond est rendu. En l’espèce, les deux sentences rendues par le TA n’ont qu’un caractère incident (consid. 2.3.1.1). Recours rejeté (voir également le consid. 3.2 du même arrêt, résumé en relation avec l’art. 190 al. 2 let. d LDIP).

TF 4A_538/2012

2012-2013

(X. [société française] c. Y. [société irakienne] Ltd.)

Recours contre la sentence rendue le 9 juillet 2012 par un Tribunal arbitral CCI. Le grief selon lequel le TA se serait déclaré à tort compétent pour connaître d’une demande d’arbitrage introduite par un représentant sans pouvoir relève de la compétence ratione personae au sens large, donc de l’art. 190 al. 2 let b LDIP, et non pas de la régularité de la constitution du tribunal au sens de l’art. 190 al. 2 let. a LDIP. Cette dernière disposition a trait uniquement aux griefs tirés de la manière dont les arbitres ont été nommés ou remplacés (art. 179 LDIP) ou aux questions relatives à leur indépendance et impartialité (art. 180 LDIP) (consid. 4.3). Recours rejeté (voir également le consid. 5.1 du même arrêt, résumé en relation avec l’art. 190 al. 2 let. d LDIP).

TF 4A_596/2012

2012-2013

(X. (International) AG c. A. [résidant en Allemagne])

Recours contre le Procedural Order Nr. 7 du 11 septembre 2012 (PO 7) et le Procedural Order Nr. 8 du 3 octobre 2012 (PO 8), rendus par un Tribunal arbitral (arbitre unique) CCI avec siège à Saint-Gall. Sentence « partielle » rendue par l’arbitre en février 2012, statuant sur sa compétence et ordonnant à la recourante de produire les documents requis dans la demande d’arbitrage, à laquelle la recourante n’a pas donné suite. PO 7 et PO 8 ordonnant à la recourante de produire de nouveaux documents. Recours au TF au motif qu’en prononçant de telles ordonnances l’arbitre aurait statué implicitement sur sa compétence à ordonner la production de documents non couverts par sa sentence partielle. Selon la doctrine, les ordonnances sur production de documents sont des décisions de nature procédurale (consid. 3.3). En l’espèce, l’arbitre a expressément indiqué dans ses POs 7 et 8 que « the list ordered for production is not based on a substantive claim of Claimant against Respondent, but rather on procedural rules » et que, par ailleurs, l’ordre de produire ne devait pas être confondu avec une ordonnance d’exécution de la sentence partielle (consid. 3.4). Ainsi, les ordonnances en question sont de simples décisions portant sur la conduite de la procédure, pouvant être révoquées à un stade ultérieur de l’arbitrage. De jurisprudence constante, de telles décisions ne sont pas susceptibles de recours (consid. 3.7). Recours irrecevable.

TF 4A_110/2012

2012-2013

(X. [Roel Paulissen] c. UCI et Fédération Z. [RLVB])

Recours contre la sentence rendue par le TAS le 23 décembre 2011. La règle jurisprudentielle selon laquelle la partie qui entend récuser un arbitre doit invoquer le motif de récusation dès qu’elle en a connaissance vise aussi bien les motifs de récusation connus de cette partie que ceux qu’elle aurait pu connaître en faisant preuve de l’attention voulue (consid. 2.1.2). Argument du recourant selon lequel, d’une part, l’arbitre nommé par l’UCI aurait manqué à son devoir de révéler une circonstance figurant dans la liste orange des IBA Guidelines on Conflicts of Interest in International Arbitration (art. 3.1.3), à savoir le fait d’avoir été nommé à plus que deux reprises par cette même partie au cours des trois dernières années (en l’espèce, en tout cas cinq fois, dont quatre avant sa nomination dans l’affaire concernant le recourant, le tout en moins d’une année), et, d’autre part, du fait même de ce manquement et parce que toutes les affaires concernées portaient sur la même question juridique, cet arbitre ne présentait pas des garanties suffisantes d’indépendance et d’impartialité (consid. 2.2.1). Les connaissances du conseil ayant représenté le recourant devant le TAS (un « spécialiste de l’arbitrage sportif et, singulièrement, de la jurisprudence du TAS ainsi que des arcanes de cette institution ») sont attribuables au recourant. Il n’est pas contesté qu’à la date de l’audience ce dernier connaissait au moins trois des sentences rendues dans les cinq affaires susmentionnées. Une ancienne publication du conseil du recourant montre, par ailleurs, qu’il avait une plus ample connaissance de la propension de l’intimée à désigner régulièrement l’arbitre en question. Partant, pour remplir son devoir de curiosité, le recourant aurait dû, au plus tard à l’audience, demander formellement à cet arbitre combien de fois il avait été nommé par l’UCI pour siéger dans une formation du TAS, et de révéler les parties concernées et les questions soumises aux formations dans ces affaires. En l’occurrence, le fait d’avoir demandé à l’arbitre « s’il y a[vait] quelque chose de nouveau » suite aux sentences dont le recourant avait déjà connaissance à cette époque n’était pas suffisant. Le devoir de révélation de l’arbitre n’existe qu’à l’égard de faits dont l’arbitre a des raisons de penser qu’ils ne sont pas connus de la partie qui pourrait s’en prévaloir. Or, pour les raisons déjà évoquées, tenant à la personne du conseil du recourant, l’arbitre questionné « pouvait admettre de bonne foi que cette exception trouvait à s’appliquer en l’espèce ». Recourant forclos à remettre en cause la régularité de la composition de la formation par le biais d’un recours contre la sentence (consid. 2.2.2). Question de l’applicabilité de la note explicative n° 6 relative à l’art. 3.1.3 des IBA Guidelines à l’arbitrage du TAS laissée ouverte (cf. consid. 2.2.1 in fine résumant la position – favorable – du TAS à cet égard) (voir également le résumé dans le chapitre Droit du sport au sujet de cet arrêt). Recours rejeté.

TF 4A_146/2012

2012-2013

(Etat X. [Israël] c. Société Z. [NIOC])

Recours contre la sentence rendue le 10 février 2012 par un Tribunal arbitral ad hoc. Cas particulier dans lequel l’arbitre du recourant a été désigné par une décision d’un tribunal français, avant que le siège de l’arbitrage ait été fixé en Suisse (à Genève) par le tribunal arbitral, une fois constitué. S’il est vrai qu’en Suisse, selon la jurisprudence du TF, la décision du juge d’appui de désigner un arbitre ne jouit pas de la force de la chose jugée, tel ne peut être le cas en l’espèce, eu égard à la configuration juridique très particulière de cette affaire, de la décision finale rendue par la plus haute juridiction civile de France (la Cour de cassation), confirmant la désignation en pleine connaissance de tous les éléments pertinents et après un ample débat contradictoire au sujet de la compétence internationale des tribunaux français pour désigner un arbitre à la partie récalcitrante (consid. 3.3.2). Recours rejeté.

TF 4A_635/2012

2012-2013

(A. SpA [Club de football] c. B. [Club de football])

Recours (rejeté) contre la sentence rendue par le TAS le 21 août 2012. Le grief selon lequel le tribunal aurait statué infra petita est exclu d’emblée quand le dispositif de la sentence déclare expressément que toute autre conclusion des parties est rejetée (« all other claims are dismissed »), sachant que, selon la jurisprudence en matière d’arbitrage international, les arbitres ne sont pas tenus de motiver leur sentence (consid. 4.2).

TF 4A_274/2012

2012-2013

(Fédération X. c. European Chess Union)

Recours contre la sentence rendue par le TAS le 22 mars 2012. Le pouvoir discrétionnaire reconnu aux arbitres en ce qui concerne la nomination d’un expert du tribunal n’est pas sans limite, quand bien même il serait exprimé en termes absolus dans le règlement d’arbitrage : si le tribunal pouvait écarter « ad libitum » toute requête, présentée en bonne et due forme, tendant à l’administration d’une expertise propre à prouver un fait pertinent et contesté, le droit d’être entendu de la partie requérante s’en trouverait violé (consid. 3.2.1). Par ailleurs, l’assimilation effectuée par le TAS entre une expertise judiciaire ordonnée par la formation arbitrale en application de l’art. R44.3 et une expertise privée au sens de l’art. R44.2 du Code TAS, est contestable. Les règles régissant ces deux types d’expertise sont très différentes et leurs forces probantes respectives pas comparables (ibid.). Recours rejeté faute pour la recourante d’avoir invoqué la violation alléguée de son droit d’être entendue en temps voulu.

TF 4A_407/2012

2012-2013

(X. SE [société européenne ayant son siège à Vienne] et Y. GmbH [société de droit autrichien] c. Z. BV [société de droit néerlandais])

Recours contre la sentence rendue le 29 mai 2012 par un Tribunal arbitral CCI. La partie qui s’estime victime d’une inégalité de traitement ou d’une violation de son droit d’être entendue doit s’en plaindre immédiatement et déployer tous les efforts que l’on peut raisonnablement exiger d’elle pour faire en sorte que le tribunal puisse remédier, tant que l’arbitrage est en cours, au vice de procédure allégué (consid. 3.1). En particulier, le fait que les recourantes se soient plaintes auprès du tribunal, pendant l’audience, que leur adverse partie avait bénéficié de plus de temps pour interroger les témoins, même avec l’indication expresse qu’elles souhaitaient soulever une objection à cet égard car leur « right to be heard and to be treated equally is really at stake here », ne constitue pas une protestation suffisamment claire. Ayant par la suite omis de requérir du tribunal qu’il ordonne la répétition ou une plus ample audition des témoins avant la clôture de la procédure arbitrale, le droit des recourantes de se plaindre d’une prétendue inégalité de traitement au stade du recours contre la sentence est forclos (consid. 3.4). Recours rejeté.

TF 4A_414/2012

2012-2013

(X. c. Z.)

Recours contre la sentence rendue le 6 juin 2012 par un Tribunal arbitral CCI. Grief selon lequel le TA aurait violé le droit d’être entendue de la recourante en ignorant ses allégués et preuves tendant à démontrer que l’intimée aurait commis un abus de droit qui l’empêcherait de se prévaloir de l’effet guérisseur de sa réinscription au registre des sociétés, tel qu’avalisé par le TA dans sa sentence. Selon l’art. 190 al. 3 LDIP, une sentence incidente ne peut être attaquée que pour les motifs énoncés à l’art. 190 al. 2 let. a et b LDIP. Le grief formulé par la recourante, basé sur l’art. 190 al. 2 let. d LDIP, est donc en principe irrecevable. Il est vrai que selon une partie de la doctrine les griefs tirés de l’art. 190 al. 2 let. c à e LDIP peuvent être invoqués à l’encontre des décisions incidentes dans le cadre d’un recours fondé sur l’art. 190 al. 2 let. a ou b LDIP, à condition que ce recours ne soit pas manifestement irrecevable ou infondé. En l’espèce, la question peut être laissée ouverte, d’une part parce que, dans le cadre d’un tel recours, le TF aurait la possibilité de compléter l’état de fait à la base de la sentence attaquée, et d’autre part parce que, en l’espèce, la motivation du recours est à l’évidence insuffisante sur ce point (consid. 3.2). Recours rejeté (voir également les consid. 1.2 et 2.3.1.1 du même arrêt, résumés en relation avec l’art. 190 al. 2 let. b LDIP).

TF 4A_538/2012

2012-2013

(X. [société française] c. Y. [société irakienne] Ltd.)

Recours contre la sentence rendue le 9 juillet 2012 par un Tribunal arbitral CCI. Utilisation « contre toute attente » par le tribunal arbitral, afin d’étayer une conclusion juridique, d’un moyen de preuve administré en relation avec une problématique entièrement différente. La jurisprudence selon laquelle les arbitres peuvent avoir exceptionnellement l’obligation d’interpeller les parties lorsqu’ils envisagent de se fonder sur une norme ou une considération juridique qui n’a pas été évoquée au cours de la procédure, et dont les parties ne pouvaient pas anticiper la pertinence, s’applique de manière restrictive et ne concerne pas l’établissement des faits. En particulier, le droit d’être entendu n’exige pas des arbitres qu’ils sollicitent une prise de position des parties sur la portée de toute pièce produite. Si chaque partie pouvait déterminer par avance les conséquences probatoires que le tribunal sera autorisé à tirer des pièces au dossier, le principe essentiel de la libre appréciation des preuves, qui est un pilier de l’arbitrage international, serait vidé de sa substance (consid. 5.1). Recours rejeté (voir également le consid. 4.3 du même arrêt, résumé en relation avec l’art. 190 al. 2 let. b LDIP).

TF 4A_669/2012

2012-2013

(X. Limited [Société de droit anglais] c. Y. Limited [Société de droit suisse])

Recours contre la sentence rendue le 6 octobre 2012 par un arbitre unique statuant sous les auspices de la Chambre de commerce de Zurich. Mention expresse, dans la sentence, du rapport soumis par l’expert de la recourante, exposant les déductions à effectuer pour tenir compte de frais d’acquisition de produits destinés à la vente dans le calcul des dommages-intérêts pour gains manqués alloués à l’intimée. Calcul desdits dommages par l’arbitre faisant totalement abstraction de ces mêmes déductions, sans que soit fournie une explication au sujet de cette omission. Violation du droit d’être entendu de X. (consid. 3.2.1) : recours admis partiellement. Puisque le litige portait uniquement sur la prétention relative aux gains manqués de Y., la sentence doit être annulée dans son entier. Cela étant, dans la nouvelle sentence à rendre, seule devra être réexaminée la question à l’égard de laquelle la recourante a obtenu gain de cause devant le TF (consid. 3.3). Même si la sentence rectificative rendue par l’arbitre au sujet des frais et dépens des parties devient ipso facto caduque en raison de l’annulation de la sentence originaire, il se justifie de l’annuler également pour éviter d’éventuels problèmes, notamment au stade de l’exécution (consid. 4). Frais et dépens en instance fédérale calculés en fonction de ce que la recourante pourra obtenir, dans le meilleur des cas, après renvoi (consid. 5).

TF 4A_730/2012

2012-2013

(X. [athlète] c. The International Association of Athletics Federations et Z.)

Recours contre la sentence rendue par le TAS le 18 octobre 2012. Argumentation subsidiaire du recourant passée complètement sous silence dans la sentence. La « formule stéréotypée » par laquelle la formation a indiqué qu’elle avait pris en compte tous les faits, arguments juridiques et moyens de preuve soumis par les parties dans le cadre de la procédure arbitrale, mais qu’elle ne ferait référence, dans la sentence, qu’aux éléments nécessaires pour expliquer son raisonnement est une simple clause de style que l’on retrouve dans la plupart des sentences du TAS. Le seul fait d’en user ne suffit pas à exclure la violation du droit d’être entendu qu’un tribunal arbitral commet s’il ne prend pas en considération des allégués, arguments, ou preuves présentés par une partie et importants pour la sentence à rendre. En l’espèce, l’intimée a démontré dans sa réponse au recours que l’argumentation subsidiaire du recourant n’était pas pertinente pour résoudre le litige (consid. 3.3.2). Recours rejeté.

TF 4A_95/2013

2012-2013

(X. Incorporation c. Y. AG)

Recours contre la sentence rendue le 15 janvier par un Tribunal arbitral CCI (arbitre unique). Sentence ne faisant pas état, entre autres, de la déclaration écrite et du témoignage rendu en audience par un témoin important de la recourante, et d’un e-mail dont il n’est pas contesté qu’il était pertinent pour l’issue du litige. Compte tenu du fait que le témoin a été entendu en audience, où il a pu confirmer sa déclaration au sujet de la question litigieuse, et que l’arbitre a expressément indiqué dans la sentence que sa conclusion sur ce point était basée sur son appréciation de l’ensemble des preuves offertes par les parties, « in particular the witness statements », le droit d’être entendue de la recourante n’a pas été violé (consid. 3.2). S’agissant de l’e-mail, la transcription de l’audience montre qu’il avait été discuté par la recourante dans le cadre du contre-interrogatoire d’un témoin. L’arbitre avait ainsi été rendu attentif à son existence et à son contenu. Le droit d’être entendu au sens de l’art. 190 al. 2 let. d LDIP ne comprenant pas le droit d’exiger une sentence motivée, l’on ne peut conclure que l’arbitre ait tout simplement ignoré cet e-mail dans son appréciation des preuves, même s’il ne l’a pas mentionné dans la sentence (consid. 3.3). Recours rejeté.

TF 4A_730/2012

2012-2013

(X. [athlète] c. The International Association of Athletics Federations et Z.)

Recours contre la sentence rendue par le TAS le 18 octobre 2012. Modification intervenue dans le dispositif de la sentence entre la première version, telle que communiquée aux parties ‑ sans les motifs ‑ le jour après l’audience d’instruction, et celle se trouvant à la dernière page de la version motivée qui leur a été notifiée quelques mois plus tard. La rectification opérée par la formation étant en faveur du recourant, celui-ci n’a pas d’intérêt digne de protection à la remettre en question par le biais d’un recours (art. 76 al. 1 let. b LTF) (consid. 4). Recours rejeté par ailleurs (voir également consid. 3.3.2 du même arrêt résumé en relation avec l’art. 190 al. 2 let. d LDIP).

TF 4A_314/2012

2012-2013

(Fédération X. c. Club A., Club B. et Confédération C.)

Recours (rejeté) contre la sentence rendue par le TAS le 27 avril 2012. Une sentence sur les frais de l’arbitrage, soit un « Award on costs » par lequel la formation TAS a clos la procédure en raison du retrait du recours, fixé les frais de l’arbitrage et statué sur les dépens, constitue une sentence finale susceptible d’un recours en matière civile au sens de l’art. 77 al. 1 let. a LTF, pour tous les motifs énoncés à l’art. 190 al. 2 LDIP (consid. 2).

TF 4A_198/2012

2012-2013

(A. [joueuse de basketball professionnelle] c. X. [agent])

Recours contre la sentence rendue le 12 mars 2012 par le Tribunal arbitral du basketball (Basketball Arbitral Tribunal, BAT). Question « délicate » de la recevabilité d’un recours contre une sentence non motivée, examinée d’office par le TF. Contrairement à la solution généralement applicable selon le Code de procédure civile suisse (art. 239 al. 2 CPC), en matière d’arbitrage (interne et international) la renonciation aux motifs n’implique nullement une renonciation au droit de recourir contre la sentence, même si elle réduit sensiblement les chances de succès de la partie qui entend attaquer la sentence non motivée (consid. 2.2).

TF 4A_666/2012

2012-2013

(X. [société de droit français] c. Y. SNC [société de droit français])

Demande de révision de la sentence finale rendue par un Tribunal arbitral CCI le 25 avril 2012, modifiée par un « addendum » (corrigeant le calcul du montant alloué à la demanderesse) du 28 juin 2012. Requérante invoquant la découverte de faits pertinents et moyens de preuve concluants (art. 123 al. 2 let. a LTF) que l’intimée lui aurait délibérément cachés pendant l’arbitrage, ce qui constituerait également une escroquerie au procès au sens de l’art. 123 al. 1 LTF. Il appartient à la requérante d’établir les circonstances déterminantes pour la vérification du respect du délai de révision fixé à l’art. 124 al. 1 let. d LTF (consid. 5.1). De son propre aveu, la requérante était en possession d’un moyen de preuve concluant (une expertise judiciaire), concernant le fait nouveau invoqué par elle, le 28 juin 2012. Dès lors, la demande de révision, déposée le 8 novembre 2012, est irrecevable (consid. 5.2.1). Il est vrai que dans ce cas le TA a rectifié sa sentence finale par un « addendum ».

A supposer que l’on puisse fixer le point de départ du délai de révision au moment de la notification de cet addendum – ce qui en l’occurrence devrait être exclu, en appliquant par analogie la jurisprudence voulant que la procédure de rectification n’interfère pas avec le recours contre la sentence originaire, l’objet de la rectification n’ayant ici rien à voir avec les motifs de révision invoqués à l’encontre de la sentence – la requérante n’établit pas à quel moment cette notification aurait eu lieu (consid. 5.2.2). S’agissant du motif de révision fondé sur la prétendue escroquerie au procès, la demande est prématurée, car la procédure pénale y relative est encore pendante. La requérante pourra renouveler sa demande le moment venu, pour autant qu’elle ait encore un intérêt à obtenir la révision de la sentence. Par souci de simplification, il convient de déclarer les deux pans de la demande de révision irrecevables (ibid.).

TF 4A_649/2012

2012-2013

(A.x. c. A.)

Recours contre la sentence rendue le 2 juillet 2012 par un tribunal arbitral avec siège à Balsthal. Litige portant sur les prétentions des héritiers de feu A.a., dont A.x. (représentant de la communauté successorale), en relation avec la quote-part du de cujus dans les biens de la société en nom collectif A. Sentence violant manifestement le droit dans la mesure où les arbitres ont méconnu les conditions de forme régissant la conclusion d’une convention de partage au sens de l’art. 634 al. 1 CC (en l’occurrence, un partage manuel partiel, exigeant une cession écrite des créances signée de tous les héritiers selon l’art. 165 al. 1 CO) (consid. 3.3). Recours admis.

TF 4A_515/2012

2012-2013

(Fondation pour l’animation socioculturelle lausannoise (FASL) c. X.)

Recours contre la « sentence partielle » rendue le 17 août 2012 par le président de la Commission paritaire professionnelle (CPP) de la FASL, affirmant sa compétence pour statuer sur le licenciement d’un employé de cette institution en vertu d’une disposition contenue dans la convention collective de travail (CCT) conclue avec le Syndicat suisse des services publics. Arbitrabilité du litige selon le critère de la libre disposition au sens de l’art. 354 CPC : la nature des signataires de la CCT et le contenu de cette convention en font un accord hybride aux frontières entre le droit privé et le droit public, engendrant une situation juridique complexe. L’incertitude résultant de cette situation n’est pas imputable à l’intimé. Dans ces circonstances, il se justifie de faire abstraction des règles relatives au caractère impératif de l’art. 336a CO et de considérer la prétention en cause comme une faculté sui generis que la CCT octroie au collaborateur sous le coup d’un licenciement disciplinaire (consid. 4.3). Clause compromissoire valable en la forme (consid. 5.1) et réunissant tous les éléments constitutifs requis (consid. 5.2).

Au regard du principe de la liberté contractuelle, rien ne s’oppose à ce que la convention d’arbitrage prévoie que le recours à l’arbitrage est facultatif, en ce sens que les deux parties ou l’une d’elles se voient accorder le choix entre l’arbitrage et la juridiction ordinaire (ibid.). Champ d’application de la clause : la compétence du président de la CPP pour statuer en tant qu’arbitre n’est donnée que si le licenciement incriminé constitue une mesure disciplinaire. Cette compétence étant contestée, le président de la CPP aurait dû avant tout parvenir à une conclusion définitive, au terme d’une instruction complète en fait et en droit, quant à la nature du licenciement en cause. Or, il a conclu au caractère disciplinaire de cette mesure en raisonnant seulement sous l’angle de la vraisemblance, au vu des éléments à sa disposition « en l’état de l’instruction » et sans exclure qu’une instruction complémentaire puisse infirmer cette conclusion (consid. 5.3.2.2). Partant, la sentence doit être annulée, sans que la conclusion de la recourante visant à faire constater le défaut de compétence du président de la CPP pour trancher le litige ne puisse être accueillie, car le sort de cette demande dépendra de l’issue définitive de l’instruction à parfaire (consid. 5.4). Recours admis.

(Y. SA c. X. SA)

Rrecours (rejeté) contre la sentence rendue le 20 juin 2012 par un tribunal arbitral ad hoc. Rappel : le motif de recours de l’art. 393 let. d CPC ayant été repris des règles régissant l’arbitrage international, la jurisprudence relative à l’art. 190 al. 2 let. d LDIP est en principe applicable également dans le domaine de l’arbitrage interne (consid. 5.1).

TF 4A_214/2012

2012-2013

(Ufficio federale delle strade (USTRA) c. A. et B.)

Recours contre la décision rendue le 2 mars 2012 par un juge unique du Tribunale d’appello TI, statuant en qualité de juge d’appui sur la base de l’art. 375 al. 2 CPC, et ordonnant à l’USTRA de produire des documents relatifs à une procédure d’appel d’offres dans le cadre d’un arbitrage entre B. et A. Une telle décision ne peut faire l’objet d’un recours, le juge d’appui statuant « en instance unique » (art. 356 al. 2 CPC), c’est-à-dire de manière définitive. Par ailleurs, l’USTRA, en tant qu’office de l’administration fédérale, n’est pas recevable à l’attaquer (art. 76 al. 2 LTF et art. 72 al. 2 let b LTF). Recours irrecevable.

(Y. SA c. X. SA)

Recours contre la sentence rendue le 20 juin 2012 par un tribunal arbitral ad hoc. Le simple fait que la clause compromissoire contenue dans un contrat conclu en 2005 déclare applicable le Concordat ne saurait être regardé comme une déclaration de la volonté commune des parties de choisir le tribunal cantonal compétent comme autorité de recours en lieu et place du TF au sens de l’art. 390 al. 1 CPC. D’une part, à l’époque où elles ont conclu la convention d’arbitrage, les parties ne pouvaient pas prévoir qu’elles disposeraient de la faculté d’opérer ce choix, maintenant prévu dans le CPC, et d’autre part, le renvoi au Concordat n’impliquait nullement une exclusion de la juridiction du TF, les décisions cantonales sur recours contre les sentences arbitrales étant elles-mêmes susceptibles de recours au TF (art. 36 CA) (consid. 2). Recours rejetés (voir également consid. 5.1 du même arrêt, résumé en relation avec l’art. 393 let. d CPC).