Art. 544 al. 1 CO ; 83 CPC ; société simple ; consorité matérielle nécessaire.
Cinq associés ayant constitué une société simple ouvrent une action en responsabilité civile contre un tiers. Toutefois, vingt mois avant l’ouverture de la procédure, l’un des associés avait cédé ses droits à une société anonyme (tierce), qui lui a succédé au sein de la société simple. Se pose alors la question de savoir si le nouvel associé peut se substituer à l’associé originel, dans le cadre de la procédure. Le TF rappelle tout d’abord que la société simple est un cas de consorité matérielle nécessaire. Pour que la qualité pour agir soit reconnue aux associés en tant qu’associés d’une société simple, il faut que tous les associés de la société simple agissent ensemble. Le fait que l’un des associés soit manquant ne constitue donc pas une simple inexactitude purement formelle. La substitution d’une partie est soumise aux conditions strictes de l’art. 83 CPC, qui ne sont en l’occurrence pas remplies. Il n’existe en effet aucune aliénation de l’objet du litige ni cession de la créance litigieuse durant le procès et la partie adverse s’est expressément opposée à la substitution. Le TF confirme donc que la qualité pour agir des demandeurs fait défaut.
Olivier Hari, Floriane Piguet, Ulysse DuPasquier, Quentin Herold
Art. 548 al. 1 et 2, 549 al. 1 CO ; dissolution d’une société simple ; calcul du bénéfice.
En principe, l’art. 548 al. 1 et 2 CO ne s’applique pas lorsque l’un des associés a mis à disposition de la société simple un immeuble pour un projet de construction et qu’il en a conservé seul la propriété. Si le projet n’est pas réalisé et que la société est dissoute et liquidée, l’associé reste propriétaire de son immeuble. Néanmoins, lorsque l’activité de la société simple a contribué à l’augmentation de la valeur de l’immeuble, cette plus-value est un bénéficie qui profite à tous les coassociés et le propriétaire en doit donc restitution.
Olivier Hari, Floriane Piguet, Ulysse DuPasquier, Quentin Herold
Art. 530 al. 1 et 541 CO ; société simple et relation de crédit ; but commun ; droit d’être renseigné.
Une société conclut un contrat-cadre de crédit hypothécaire avec une banque, portant sur un montant de CHF 111 millions, visant l’acquisition d’un important parc immobilier. Ce parc doit ensuite être transféré à une SICAV, spécialement fondée dans ce but. Il est convenu que la banque fonctionnera comme directeur de fonds et dépositaire. Diverses sûretés sont convenues, en faveur de la banque, comme notamment le transfert et nantissement de certaines valeurs patrimoniales par un investisseur allemand. Cependant, les sûretés ne sont pas constituées conformément au contrat-cadre. La banque résilie alors valablement ledit contrat-cadre. La société emprunteuse demande à la banque de lui remettre certains documents, dont notamment l’acte de nantissement, considérant que la banque a l’obligation de les renseigner, en vertu de l’art. 541 CO relatif aux droits et aux renseignements des associés d’une société simple. Se pose alors la question de savoir si la relation de crédit constitue en l’espèce une société simple. Après avoir rappelé le concept de société simple et souligné qu’il n’y a pas d’exigences de forme particulière en ce qui concerne le contrat de société simple, le TF constate qu’il ne s’agit pas d’un cas de société simple dans le cas présent. En effet, il faut que les associés s’obligent réciproquement à favoriser le but commun et décident de partager la substance même de l’entreprise, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence, dans la mesure où la banque assumait essentiellement les risques d’une bailleuse de fonds et en retirait les profits usuels.
Olivier Hari, Floriane Piguet, Ulysse DuPasquier, Quentin Herold
Art. 164 al. 1 CP ; 204 LP ; cession de créances (futures) en mains d’associés dans une société simple ; faillite d’un des associés.
Le créancier ne peut plus valablement céder les créances dont il est titulaire dès le prononcé de la faillite. Dans une société simple, les créances appartiennent en commun aux associés. La cession des créances par ces derniers ne déploie aucun effet si elle intervient après la mise en faillite d’un associé (et sans le consentement de l’administration de la faillite). En l’espèce, les associés ont cédé leurs créances valablement avant l’ouverture de la faillite de l’un d’entre eux. Mais après l’ouverture de celle-ci, les cessionnaires ont cessé de devenir (co-)titulaires des créances échues, l’associé en faillite ne pouvant plus en disposer et l’administration n’ayant pas donné son accord.
Olivier Hari, Floriane Piguet, Ulysse DuPasquier, Quentin Herold
Art. 545 CO ; dissolution pour justes motifs ; impossibilité subséquente.
Deux médecins généralistes ont constitué une société simple en 1994, prévoyant entre autres un délai de préavis d’un an pour la résiliation. Les relations se sont passablement détériorées, si bien qu’en 2006, l’associée, souffrant de burn-out, résilie le contrat de société simple avec effet immédiat (545 al. 2 CO). Elle demande en outre CHF 221’979.- pour la perte de gain et le tort moral causés. L’associé refuse cette résiliation immédiate et exige le paiement des charges d’exploitation dues. Le TF confirme le jugement de l’instance précédente, ayant refusé de considérer qu’il existait effectivement des justes motifs en l’espèce. Seule une incapacité de travail permanente aurait constitué un juste motif. La poursuite du but commun restait possible pendant le délai de dénonciation d’une année. Le TF déboute ainsi l’associée ; cette dernière devra donc s’acquitter des charges d’exploitation impayées.
Olivier Hari, Floriane Piguet, Ulysse DuPasquier, Quentin Herold
Art. 530 CO ; 393 let. b CPC ; convention d’arbitrage entre les associés d’un consortium de construction.
Trois parties (A. AG, C. AG, D. AG) sont liées par un consortium de construction conclu sous la forme d’un contrat de société simple ayant pour but la construction d’immeubles afin de les revendre pour en tirer un profit. Le contrat de société simple contenait une clause d’arbitrage et mentionnait que la conduite des affaires serait effectuée par B. AG. A. AG initia une procédure d’arbitrage contre C. AG et B. AG afin de requérir notamment tous les documents propres à fournir des informations sur l’activité du consortium de construction et tous les contrats et avenants conclus entre la société de construction et le maître d’ouvrage, ainsi qu’entre la société de construction et l’architecte. Le Tribunal arbitral s’est déclaré incompétent quant à la demande d’arbitrage intentée à l’encontre de B. AG au motif qu’une clause d’arbitrage ne lie que les parties contractantes et B. AG n’était pas un associé du consortium de construction. A. AG a donc recouru au TF. Selon ce dernier, dans le cas où l’exécution du contrat est déléguée à une tierce partie et que le contrat contient une clause d’arbitrage, il faut présumer que la tierce partie a approuvé de manière tacite ladite clause. En l’espèce, un tel consentement présumé à la clause d’arbitrage n’a pas été démontré. Il n’a également pas été démontré que B. AG, dans le cadre de l’exécution du contrat d’entreprise, avait une influence sur la création et la liquidation d’un rapport de société. Le TF a donc rejeté le recours.
Olivier Hari, Floriane Piguet, Ulysse DuPasquier, Quentin Herold