Droit des sociétés

Action révocatoire, prêt d’assainissement. La prolongation de la durée d’un prêt peut être considérée comme un prêt d’assainissement, non soumis à la révocation, si la volonté d’assainir est manifestée et que le comportement du créancier se distingue de celui d’un créancier ordinaire. On peut parler d’assainissement lorsque les mesures prévues visent à satisfaire intégralement les créanciers et à éviter la faillite ou une procédure concordataire.

Révocation de l’ajournement de faillite. Le tribunal met fin à l’ajournement de faillite de manière anticipée s’il constate que l’assainissement est devenu impossible ou que ses chances de succès sont réellement compromises. Tel sera le cas si le curateur n’accomplit pas la mission qui lui a été confiée. Si la société entend obtenir un sursis concordataire au moment de la révocation de l’ajournement, elle doit déposer une requête en ce sens ; à défaut, le tribunal prononce la faillite.

Retrait de l’agrément pour une durée déterminée. Le retrait de l’agrément pour une durée déterminée est proportionné lorsque le réviseur a omis de procéder à la révision de l’une des sociétés qui l’a nommé à cet effet, violant ainsi ses obligations de vérification, de faire rapport et de diligence.

Annulation d’une décision violant les droits privilégiés des participants. Les actionnaires privilégiés et les participants ne peuvent pas ouvrir action directement contre la société pour faire valoir leurs prétentions statutaires en paiement d’un dividende privilégié, mais ils doivent attaquer la décision ne respectant pas leurs droits privilégiés. Même après que la contestation a abouti, un dividende privilégié ne peut pas leur être directement alloué, selon le droit en vigueur ; l’assemblée générale doit prendre une nouvelle décision conforme aux statuts. Ce n’est que dans le cas où elle ne le fait pas, de manière contraire aux règles de la bonne foi, que les participants peuvent disposer d’une action directe.

Action en annulation et en constat de nullité des décisions de l’assemblée générale. Un vice de procédure formel, tel qu’une décision prise sur un objet non inscrit à l’ordre du jour, ne peut entraîner la nullité d’une décision que si un déroulement correct de la procédure aurait abouti à une décision différente.

Mesures provisionnelles en vue d’une action en annulation des décisions de l’assemblée générale. L’assemblée générale d’une société décide d’une réduction du capital-actions à zéro suivie d’une augmentation (« accordéon ») afin de supprimer un surendettement constaté au bilan. Les actionnaires minoritaires, qui s’opposent à cette mesure et demandent le blocage du registre du commerce à titre provisionnel, ne parviennent pas à démontrer que le surendettement serait fictif.

Convocation d’une assemblée générale par le tribunal. Au moment de décider s’il ordonne la convocation d’une assemblée générale, le tribunal examine uniquement des questions formelles ; il n’a pas à vérifier si les décisions qui seront prises sont conformes à la loi et aux statuts. S’il est allégué que la société n’a pas de registre des actionnaires, la partie requérante doit rendre vraisemblable sa position d’actionnaire d’une autre manière. Si les actions ont déjà été vendues, mais que l’acquisition doit encore être autorisée en vertu de la LDFR, les vendeurs commettent un abus de droit en se prévalant de leur position d’actionnaire pour élire un organe dont la tâche serait de conclure des affaires préjudiciables aux acquéreurs.

Considérants non publiés in ATF 147 III 238 (d) – Art. 699 al. 4 CO ; preuve de la qualité d’actionnaire. La partie qui requiert la convocation d’une assemblée générale par le tribunal doit encore être actionnaire au moment où le jugement est rendu ; autrement, la demande doit être rejetée faute de légitimation active.

Clause statutaire d’agrément. Le transfert d’actions nominatives non émises sous la forme d’un papier-valeur obéit aux règles de la cession de créances. La décision d’agrément prise par le conseil d’administration est valable même si l’acquéreur ne produit pas de pièce établissant l’acquisition du titre en propriété ou la constitution d’un usufruit.

Contrôle spécial. Le contrôle spécial peut porter sur la rémunération individuelle d’un organe de gestion. Le refus obstiné de fournir tout renseignement utile, conjugué à un accroissement inexpliqué des charges de personnel, suffisent à rendre vraisemblable le versement des prestations indues au sens de l’art. 678 CO, ce d’autant plus lorsqu’un conflit au sein de l’actionnariat pourrait inciter le groupe d’actionnaires dominant à procéder à des distributions occultes.

Transmission d’actions nominatives. Une action nominative peut être transférée par cession du titre endossé à l’acquéreur ou, pour autant que les statuts de la société ne l’excluent pas, conformément aux règles relatives à la cession de créance. Un courrier signé par le cédant et adressé à la société, confirmant la cession des actions et priant les organes de procéder à toutes les modifications nécessaires sur le plan de la société est assimilable à une cession au sens de l’art. 165 CO.

Qualité d’actionnaire. Lorsque les actions sont émises sous la forme d’actions au porteur, la remise du titre est nécessaire pour transférer les droits d’actionnaire. Dans le cas concret, la vendeuse avait conservé les actions au porteur ; l’acheteur n’a pas prouvé que les parties s’étaient entendues sur un transfert de propriété tout en laissant la possession à la vendeuse pour le compte de l’acheteur (constitut possessoire). Il ne pouvait donc pas être reconnu comme actionnaire.

Droit aux renseignements et à la consultation. Le droit d’être renseigné sur les honoraires perçus par chaque administrateur ne saurait être justifié par la possibilité abstraite d’une action en responsabilité ou en remboursement des prestations indues. Les informations demandées doivent être nécessaires pour une situation concrète, dans laquelle l’introduction d’une action est envisagée. Si rien n’indique que la rémunération globale est excessive et ne correspond pas aux conditions du marché, un actionnaire moyen n’a pas de raison de vouloir demander des détails sur les honoraires individuels des membres du conseil d’administration.

Contrôle spécial. Un conflit familial intense entre l’actionnaire requérant et les membres du conseil d’administration, le non-versement de dividendes sur deux années consécutives nonobstant des résultats positifs et des transactions entre la société visée et d’autres sociétés contrôlées par les administrateurs font suspecter avec une vraisemblance suffisante des échanges de prestations dans un rapport disproportionné. Il est admissible de demander à l’expert chargé de réaliser le contrôle spécial d’examiner si des prestations appréciables en argent ont été fournies à des actionnaires, à des administrateurs ou à des personnes qui leur sont proches, à quelles conditions et sur quel fondement ; il s’agit là de pures questions de fait. Sont également admissibles des questions portant sur des prestations effectuées par les filiales de la société visée, pour autant qu’elles apparaissent dans les comptes consolidés et qu’elles soient nécessaires à l’exercice des droits de l’actionnaire de la société-mère.

Un éventuel surplus d’actifs après désintéressement complet des créanciers dans la faillite entre à nouveau dans le pouvoir de disposition du débiteur. L’actif d’une société anonyme dissoute est, sauf disposition contraire des statuts, réparti entre les actionnaires au prorata de leurs versements et compte tenu des privilèges attachés à certaines catégories d’action. Les créances de la société faillie qui n’ont pas été réalisées dans le cadre de la faillite font partie du reliquat d’actifs qui revient aux actionnaires. L’actionnaire unique à qui revient une créance faisant l’objet d’un procès pendant se substitue de par la loi à la société dans le procès.

Le TF et certains tribunaux cantonaux ont tendance à estimer la valeur litigieuse de la requête fondée sur des carences dans l’organisation de la société en se référant à la valeur nominale du capital social. Dans d’autres arrêts, le TF s’est basé sur les conséquences économiques des mesures envisageables selon l’art. 731b CO. Le TF laisse indécise la question de la méthode de calcul à privilégier.

Carence dans l’organisation de la société ; conflit d’intérêts. En cas de carence dans l’organisation, le tribunal peut ordonner toute mesure appropriée à lever la carence dans le cas concret ; la liste de l’art. 731b al. 1bis CO n’est pas exhaustive. En présence de circonstances extraordinaires, un conflit d’intérêts peut causer une carence dans l’organisation s’il en résulte que les intérêts de la société ne peuvent plus être représentés de manière indépendante dans un cas concret. Tel serait le cas si l’administrateur était prévenu de gestion déloyale au préjudice de la société et représentait en même temps celle-ci dans la procédure pénale en qualité de victime et de partie civile.

Carences dans l’organisation. Le tribunal intervient pour lever une carence que la société n’est pas en mesure de lever d’elle-même, et non pour ordonner des mesures que les actionnaires sont aptes à prendre eux-mêmes. Dans le cas concret, les actionnaires auraient pu se réunir en assemblée générale universelle et de nommer les organes qui faisaient défaut. La dissolution ordonnée après que la société n’a pas rétabli une situation conforme au droit dans le délai péremptoire qui lui avait été fixé est justifiée.

Réinscription d’une entité juridique radiée. Pour obtenir la réinscription, il suffit de rendre vraisemblable que l’on est titulaire d’une créance envers la société et que celle-ci a été radiée à tort. Il ne faut pas se montrer trop sévère dans l’examen de la vraisemblance, car il ne faut pas anticiper l’examen matériel de la créance. La réinscription sera refusée en cas d’abus de droit ou d’absence d’intérêt à la réinscription. La réinscription est admissible pour faire valoir des créances et se faire céder des prétentions qui existaient déjà au moment de la suspension de la faillite faute d’actifs. La procédure de réinscription relève de la juridiction gracieuse ; la société concernée ne peut pas faire recours contre le jugement ordonnant la réinscription.

Responsabilité des fondateurs et des organes de gestion. La cession par la masse en faillite des prétentions en responsabilité contre les « fondateurs » inclut les prétentions contre les personnes qui n’étaient pas organes de la société visée. La société qui délègue un administrateur fiduciaire dans une autre société ne devient pas automatiquement organe de fait de celle-ci. La responsabilité des organes de la société anonyme n’est pas de nature contractuelle ou semi-contractuelle ; la réparation doit par conséquent être réclamée dans la monnaie du pays dans lequel l’atteinte patrimoniale s’est produite. Dans le cas concret, la responsabilité de l’administrateur est admise pour l’octroi d’un prêt non garanti qui a été détourné de sa finalité ; la violation des devoirs est admise s’agissant de l’achat d’un immeuble sans que l’organe se soit assuré de la valeur de celui-ci ni renseigné sur le rendement qu’il pouvait en tirer.

Action en responsabilité de la société contre deux de ses administrateurs. Deux administrateurs d’une société sont victimes d’une « arnaque au président », un escroc se faisant passer pour leur président leur demande d’effectuer un virement dans le but apparent d’échapper à un contrôle fiscal imminent. Le manquement aux devoirs est admis car les administrateurs auraient pu déceler la supercherie. Les administrateurs sont soumis à une convention fiduciaire les exonérant de toute responsabilité ; la question de l’opposabilité d’une telle clause à la société est laissée indécise, car leur faute grave les empêche de toute manière de s’en prévaloir. La causalité est niée pour l’un des administrateurs ; l’ordre de paiement qu’il a validé contenait une erreur et n’a pas été exécuté.

Action en responsabilité de l’actionnaire au titre du dommage de la société (action dérivée ou oblique). La responsabilité est admise pour l’administrateur qui n’a pas convoqué d’assemblée générale ordinaire dans le délai de six mois à compter de la fin de l’exercice, prévu à l’art. 699 al. 2 CO et qui s’est opposé, au nom de la société, à une action judiciaire en convocation d’une assemblée générale intentée par un actionnaire. Le dommage correspond aux frais judiciaires mis à la charge de la société et à ses frais d’avocat.

Action en responsabilité de l’actionnaire au titre du dommage de la société (action dérivée ou oblique). La responsabilité est admise pour l’administrateur qui n’a pas convoqué d’assemblée générale ordinaire dans le délai de six mois à compter de la fin de l’exercice, prévu à l’art. 699 al. 2 CO et qui s’est opposé, au nom de la société, à une action judiciaire en convocation d’une assemblée générale intentée par un actionnaire. Le dommage correspond aux frais judiciaires mis à la charge de la société et à ses frais d’avocat.

Responsabilité de l’organe de révision. Lorsqu’il est reproché à l’organe de révision d’avoir tardé à aviser le tribunal d’un surendettement manifeste, le dommage correspond à l’aggravation du surendettement entre le moment où la faillite aurait dû être prononcée et celui où elle l’a effectivement été. Le point de départ pour le calcul est le moment où l’organe de révision aurait dû constater le surendettement manifeste – et c’est l’état du bilan à cette date qui est déterminant pour le calcul du dommage – et non le moment où ce surendettement est intervenu. Si la partie demanderesse a omis d’alléguer cette date, il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise judiciaire en vue d’établir le montant du dommage ; la demande doit être rejetée faute d’allégation des faits pertinents.

Responsabilité de l’auteur de prospectus. Il incombe à la partie demanderesse d’alléguer et de prouver qu’elle s’est basée sur les informations erronées pour acquérir les titres promus par le prospectus d’émission et que, si elle avait été informée correctement, elle ne les aurait pas acquis ou les aurait acquis à un prix inférieur. Le degré de preuve applicable est celui de la vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas d’alléguer en termes généraux que l’on n’aurait pas acquis les titres considérés si l’information avait été correcte ; il faut au contraire alléguer précisément les motifs pour lesquels l’investissement n’aurait pas été réalisé.

Responsabilité des organes de gestion. La radiation de la société au registre du commerce n’a pas d’influence sur la qualité pour agir des créanciers qui se sont fait céder les prétentions en responsabilité contre les organes de la société en faillite. Des directeurs violent leurs devoirs à l’égard de la société en faisant exécuter des travaux par celle-ci, mais en se faisant personnellement rémunérer par le biais d’un contrat simulé avec une société qu’ils contrôlent. La responsabilité est également admise en raison d’une rémunération indue.

Contrat de vente d’actions. Un contrat de vente d’actions prévoit une clause de réduction du prix si le revenu de la société n’atteignait pas un certain seuil ainsi qu’en vertu de certaines clauses de garantie. Des délais sont fixés à l’acheteuse pour transmettre aux vendeurs les comptes audités de la société. L’interprétation du contrat conduit à la conclusion qu’il s’agit là de délais d’ordre, dont le non-respect ne prive pas l’acheteuse du droit de réclamer une réduction du prix de vente, les conditions de celui-ci étant réalisées.

Transfert de patrimoine et substitution de parties. L’effet de publicité lié à l’inscription au registre du commerce ne s’étend qu’à l’existence du transfert de patrimoine et non aux objets du patrimoine désignés dans l’inventaire contenu dans le contrat de transfert. On peut exiger de la société reprenant le patrimoine transféré qu’elle informe le débiteur de l’existence du transfert ; tant qu’il n’a pas été informé du transfert, le débiteur de bonne foi peut ouvrir action (en libération de dette) contre son créancier transférant. Sur le plan procédural, le créancier transférant ne peut exciper de son défaut de qualité pour défendre ; le tribunal doit procéder, sur requête d’une partie, à la substitution de partie.

Droit de sortie d’un associé de la Sàrl. Trois possibilités sont envisageables s’agissant du sort des parts sociales d’un associé qui entend exercer son droit de sortie pour de justes motifs : (i) la société reprend les parts, (ii) la société les cède à un autre associé ou à un tiers, (iii) la société réduit son capital social. Cependant, la société ne peut pas détenir plus de 35% de ses propres parts sociales et son capital social ne peut être inférieur à CHF 20’000.-. Ces règles priment le droit de sortie de l’associé, qui ne peut donc pas être exercé si elles s’en trouvaient violées. À moins qu’une conclusion subsidiaire ne soit prise en ce sens, le tribunal ne peut pas ordonner une autre mesure, comme la dissolution de la société.

Distinction entre prêt partiaire et société simple. Lorsque le bailleur de fonds se réserve le droit d’être consulté sur l’activité de l’entreprise ou même d’y collaborer, allant ainsi au-delà du droit de contrôle inhérent au prêt, il y a un fort indice de société simple, le cas échéant sous la forme d’une société tacite. La participation aux risques et aux pertes est aussi un indice de société simple, mais ce seul élément n’est pas décisif. En l’absence de participation aux pertes et de pouvoir d’administrer du prêteur, il n’est pas contraire au droit fédéral de retenir l’existence d’un prêt partiaire.

Société simple. Une société anonyme engage un directeur pour assurer la direction de l’hôtel dont elle est propriétaire. La société est vendue ; le gérant réclame une part de liquidation à l’ancien actionnaire et administrateur unique. En présence d’une société simple convenue par actes concluants, il faut établir tous les actes indices et autres circonstances pertinentes permettant de déduire que les parties, par actes concluants, auraient exprimé la volonté de poursuivre un but commun et de constituer une société simple. L’existence d’une telle société est niée faute de volonté de poursuivre un but commun et d’apport : le gérant se trouvant dans un rapport de subordination avec l’administrateur ; il avait certes renoncé à une augmentation de salaire, mais il n’avait pas prouvé que ce sacrifice avait été fait en vue d’un but commun.

Société simple, sortie d’un associé. Lorsqu’un associé sort de la société simple, sa part vient accroître celle des associés sortants. Sauf accord contraire, la valeur de son indemnité de sortie est calculée aux valeurs d’exploitation. Les affaires en suspens, qui ont déjà été conclues mais n’ont pas encore été exécutées au moment de la sortie, sont évaluées selon la méthode prévue dans le contrat ou, à défaut, selon un point de vue objectif. Si la réalisation d’un gain est suffisamment sûre, celui-ci doit être inscrit à l’actif. L’associé sortant peut intenter une action échelonnée et exercer, dans un premier temps, son droit à la reddition de compte.

Société simple. Des « partenaires » exploitent ensemble une société constituée sous la forme d’une SA. Une convention prévoit que les commissions touchées par l’une des partenaires dans le cadre de transactions immobilières sont réparties à hauteur de 60% pour elle et 40% pour les autres associés. L’existence d’une société simple est niée ; néanmoins, les parties sont libres de prévoir que les autres associés participent au bénéfice réalisé par la partenaire, même si elles n’ont pas contribué à sa réalisation.