Propriété intellectuelle

Art. 2 lit. a LPM

Le mot « You » ne peut pas être enregistré comme marque car il doit rester libre. Il fait partie des signes qui appartiennent au domaine public selon l’art. 2 lit. a LPM. Le pronom « You » fait partie du vocabulaire de base de la langue anglaise. Il n’est pas substituable et doit pouvoir être utilisé librement dans le langage publicitaire suisse comme moyen pour s’adresser aux consommateurs. En outre, il doit pouvoir être utilisé sans restriction dans des marques composées de plusieurs mots dont « You » fait partie. La monopolisation du mot « You » par une marque restreindrait son usage dans la publicité (consid. 4). Le fait d’accepter le mot « You » seul comme marque poserait problème lorsque d’autres déposants souhaiteraient obtenir des marques composées de plusieurs mots et contenant « You ». Il serait difficile de déterminer si la marque est trop similaire ou suffisamment distincte pour être enregistrée. Le fait de laisser « You » dans le domaine public n’empêche pas d’enregistrer des marques composées contenant le mot « You » (consid. 5.1). Le mot «You » doit rester libre car celui-ci permet de s’adresser à une personne, à un consommateur de manière générale et il n’y a pas d’alternative à ce mot (consid. 5.2). Le mot « You » est également trop banal pour avoir une quelconque force distinctive (consid. 5.3). Le juge civil est libre de décider si un mot peut être enregistré comme marque. L’inscription de ce dernier au registre du droit des marques ne représente qu’un indice et non une preuve qu’il s’agit d’une marque (consid. 5.4).

Art. 2 lit. a LPM

Le terme « Bürgenstock » est compris par le cercle des consommateurs visés comme une montagne panoramique et presqu’île du lac des Quatre-Cantons. En lien avec les services revendiqués en classes 35, 41, 43 et 44, le signe « BÜRGENSTOCK » n’est donc pas distinctif (consid. 4.3 et 4.5). La recourante n’a pas rendu vraisemblable l’imposition comme marque dans le commerce du signe « BÜRGENSTOCK ». Un droit à la marque basé sur la protection de la bonne foi (ausserregisterliches Anrecht) doit également être nié (consid. 5.2-5.4).

Art. 2 lit. a LPM

Le slogan « TOGETHER WE’LL GO FAR » est compris par le cercle des destinataires (« ensemble nous irons loin »). En lien avec des services financiers et d’assurances (classe 36), il a, du moins pour les consommateurs francophones, une connotation laudative dès lors que ceux-ci le comprennent, sans recours à l’imagination, dans le sens « ensemble nous réussirons ». Le slogan « TOGETHER WE’LL GO FAR » relève de ce fait du domaine public (consid. 7.6 et 8.1).

Art. 2 lit. a LPM

Le signe « NOBLEWOOD », qui est constitué des mots « NOBLE » et « WOOD », peut revêtir plusieurs significations – fractionné ou considéré dans son ensemble. En lien avec les produits revendiqués en classes 2, 19 et 27, le consommateur moyen visé le comprendra sans autre comme signifiant « bois noble, somptueux » (« nobles, edles, prächtiges Holz ») (consid. 6.4 et 6.4.3). Le signe « NOBLEWOOD » énonce ainsi l’emploi prévu pour les produits revendiqués et les propriétés de leurs matériaux. Outre son caractère descriptif, le signe a également une connotation laudative. Il ne possède par conséquent pas de force distinctive et appartient au domaine public (consid. 7.2, 7.3 et 8).

Art. 2 lit. a LPM, art. 47 al. 4 LPM, art. 49 al. 1 LPM

Le terme « Savoy » n’est plus perçu comme une indication de provenance (« Savoie »), mais comme un synonyme de luxe et de prestige, de sorte qu’il n’existe aucune attente quant à la provenance en relation avec la désignation « Savoy » (consid. 5.2). La marque « B Royal Savoy Lausanne The Bürgenstock Selection (fig.) » est toutefois comprise comme une indication de provenance du fait qu’elle contient le nom géographique « Lausanne » (consid. 5.3). Le terme « Bürgenstock » constitue également une indication géographique, puisque le Bürgenstock est une montagne panoramique suisse connue dans le monde entier. Ce terme n’est cependant pas isolé : il est utilisé en lien avec le mot « Selection ». Or, la désignation « The Bürgenstock Selection » ne revêt aucun sens géographique et ne crée, par conséquent, aucune attente quant à la provenance (consid. 5.4). Même si les deux indications géographiques « Lausanne » et « Bürgenstock » faisaient penser à une indication de provenance, les conditions de l’art. 49 al. 1 en lien avec l’art. 47 al. 4 LPM seraient satisfaites attendu qu’elles se réfèrent toutes deux à la Suisse (consid. 5.6).

Art. 2 lit. a LPM

Le terme italien « FIDUCIA » signifie sans équivoque, en relation avec les services revendiqués en classes 35, 36, 37, 38, 39, 41, 42 et 45, « confiance » ou « fiabilité » (consid. 5.3.1). Par conséquent, la marque « FIDUCIA » a, en tout cas pour les consommateurs italophones, un caractère laudatif et n’est donc pas distinctive (consid. 5.5).

Art. 2 lit. a LPM

L’adjectif « rhätisch » n’est pas une désignation de fantaisie, mais une indication de provenance (« bündnerisch » ou « aus Graubünden stammend ») (consid. 5.1.3-5.1.4). La recourante ne peut rien tirer du fait qu’elle bénéficie d’une certaine exclusivité, car sa concession est limitée dans le temps et d’autres concessions peuvent être accordées (consid. 5.1.4). Les noms « Bernina » et « Albula » sont également des indications de provenance (consid. 5.2.3, 5.3.3 et 5.5). Pour des produits des classes 9, 16 et 28, à l’exception des « Produits en papier et carton, non compris dans d’autres classes » (classe 16), les signes en cause sont descriptifs (du contenu thématique des produits) et appartiennent donc au domaine public. Pour des véhicules, notamment ferroviaires (classe 12), ils sont également descriptifs. Par ailleurs, ce n’est que dans la mesure où les services des classes 37, 39, 42 et 43 sont plus ou moins typiquement associés au train que les signes en cause appartiennent au domaine public (consid. 6.1-6.5). L’imposition comme marques des signes « BERNINABAHN » et « ALBULABAHN » n’est pas rendue vraisemblable par la recourante pour les services des classes 37, 39, 42 et 43, étant donné que ces signes sont utilisés avant tout dans un contexte historique ou pour désigner un tracé de ligne de train et qu’aucun moyen de preuve ne concerne la Suisse romande et la Suisse italienne (consid. 7.4-7.6). C’est à juste titre que l’IPI a admis que le signe « RHÄTISCHE BAHN » ne s’était imposé comme marque (dans toute la Suisse [consid. 8.2]) que pour les services qui forment le cœur d’une entreprise ferroviaire (classe 39) et non pas pour les autres services des classes 37, 39, 42 et 43 (consid. 8.1-8.6).

Art. 2 lit. a LPM

Le signe « MYPHOTOBOOK », constitué de trois termes appartenant au vocabulaire de base anglais, est compris par le consommateur moyen visé comme signifiant en allemand « mein Fotobuch » (consid. 4, 5.1 et 5.2). Ce signe est directement descriptif des services revendiqués (« Buchbindarbeiten » [classe 40]), attendu que la reliure de livres vise justement la fabrication d’un livre. De ce fait, le consommateur ne peut reconnaître dans ce signe, en l’absence d’un élément distinctif, une indication de la provenance commerciale. Partant, il appartient au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM (consid. 6.2 et 6.3).

Art. 2 lit. a LPM

Les mots sous-jacents (au terme « Frankonia ») « Franken » ou « Frank » ont de nombreuses significations géographiques et non géographiques (consid. 6.1). En allemand, « FRANKONIA » n’est plus compris comme une indication géographique, dès lors que cette région s’appelle désormais « Franken » (consid. 6.6). En italien et en français, les termes « Franconia » et « Franconie » ne revêtent plus aucune signification actuelle et ne sont guère plus utilisés dans la presse (consid. 6.7-6.9). Le signe « FRANKONIA (fig.) » n’est de ce fait pas compris comme une indication de provenance par le cercle des consommateurs visés et possède donc une force distinctive (consid. 6.13).

Art. 2 lit. a LPM

Le signe « QATAR AIRWAYS » (« Airline aus Katar ») est descriptif du contenu thématique des produits « Papier und Karton, Druckereierzeugnisse, Lehr- und Unterrichtsmittel » (classe 16) et appartient donc au domaine public (consid. 4.1.1-4.2 et 5.1-5.3). La simple allégation selon laquelle la recourante est la compagnie aérienne nationale du Qatar ne suffit pas pour considérer que le signe « QATAR AIRWAYS » n’appartient pas au domaine public en lien avec les services « Transportwesen ; Verpackung und Lagerung von Waren ; Veranstaltung von Reisen » (classe 39) (consid. 5.4). Le signe « QATAR AIRWAYS » n’est pas frappé d’un besoin de libre disposition absolu, car il existe suffisamment d’alternatives pour désigner une compagnie aérienne du Qatar (consid. 6.1-6.3). La vraisemblance de l’imposition du signe « QATAR AIRWAYS » comme marque doit également toucher la Suisse italienne, ne peut pas résulter de l’utilisation du signe « QATAR AIRWAYS » à titre de raison de commerce, ne saurait concerner les produits de la classe 16 s’ils ne sont utilisés que comme produits accessoires, ne peut résulter de documents datant d’après le dépôt du signe et n’est pas établie par l’usage du seul élément « QATAR » ou d’un signe figuratif duquel le signe « QATAR AIRWAYS » ressort de manière modifiée, ce d’autant que les moyens de preuve couvrent une période de trois ans seulement. L’imposition du signe « QATAR AIRWAYS » comme marque n’est dès lors pas rendue vraisemblable par la recourante (consid. 7.2).

Art. 1 al. 1 LPM, art. 2 lit. a LPM

Un slogan est susceptible d’être enregistré comme marque au sens de l’art. 1 al. 1 LPM (consid. 4-4.2). La jurisprudence de la CJUE en la matière ne lie pas les autorités suisses (consid. 4.1). Un slogan peut être frappé d’un besoin de libre disposition (consid. 4.3). Le slogan en anglais « WE CARE ABOUT EYECARE » est compris (notamment « Wir sorgen/kümmern uns um Augenpflege/Augenfürsorge » ou « Wir nehmen Augenpflege wichtig ») par ses destinataires (consid. 6 et 7.2). En lien avec des « Appareils et instruments optiques » (classe 9) et des « Services médicaux, soins d’hygiène pour êtres humains ou animaux » (classe 44), il a un caractère descriptif et publicitaire, l’élément graphique du signe « WE CARE ABOUT EYECARE (fig.) » étant par ailleurs trop banal pour lui conférer une quelconque force distinctive. En revanche, en lien avec le service « Traitement de matériaux » (classe 40), le signe n’est ni descriptif ni frappé d’un besoin de libre disposition (consid. 7.3).

Art. 2 al. 1 lit. a LPM

Sont exclus de la protection du droit des marques, en raison de leur appartenance au domaine public au sens de l’art. 2 al. 1 lit. a LPM, les signes qui décrivent les caractéristiques, les formes, les propriétés, la quantité, la qualité, les références ou d’autres caractéristiques des produits pour lesquels la protection de la marque est revendiquée et qui ne contribuent ainsi en rien à leur identification ou à leur différenciation. Le caractère descriptif de telles indications doit être immédiatement reconnaissable par le public concerné sans effort de réflexion ou d’imagination particulier. Un slogan est ainsi exclu de la protection en tant que marque lorsqu’il correspond à une indication sur la qualité du produit pour lequel la protection est revendiquée, et que le caractère descriptif du slogan n’a pas besoin d’une fantaisie particulière pour être compris. Le TF examine librement la façon de délimiter le cercle déterminant des destinataires des produits ou services pour lesquels la protection de la marque est revendiquée. Il s’agit là d’une question de droit, comme l’est celle de savoir, dans le cas de biens de consommation courante, de quelle façon les destinataires appréhendent le signe sur la base du degré d’attention attendu (consid. 2.1). Le slogan EIN STÜCK SCHWEIZ, en relation avec les produits de classe 29 pour lesquels la protection est revendiquée (fromage de l’Emmental) ne peut pas être considéré comme ayant plusieurs significations; en relation avec les produits revendiqués, l’évocation de la tradition suisse – et les attentes en termes de qualité qui en découlent – dominent par rapport à d’autres significations possibles et ce, sans effort d’imagination particulier pour le destinataire moyen (consid. 2.3.1). Il n’est pas déterminant de savoir si le signe provoque immédiatement une association d’idées avec le produit en question. En l’espèce, le slogan EIN STÜCK SCHWEIZ fait directement référence au fait que le produit pour lequel la protection de la marque est revendiquée est un produit traditionnel, typiquement suisse. Le fait qu’il vante directement les qualités du produit est immédiatement et facilement reconnaissable, sans qu’un effort ou une imagination particulière, ou plusieurs étapes de raisonnement ne soient nécessaires (consid. 2.3.2). La « suissitude » du produit ne joue aucun rôle à cet effet (consid. 2.3.3). L’expression EIN STÜCK suivie d’un nom de pays est apparentée à la tournure de phrase EIN STÜCK HEIMAT (un morceau de patrie) et fait ainsi partie du langage général. Il s’ensuit que l’utilisation du slogan EIN STÜCK SCHWEIZ est immédiatement comprise comme étant descriptive par le cercle déterminant des destinataires. N’étant pas particulièrement originale, elle n’est pas non plus apte à rester dans la mémoire du public déterminant comme étant particulièrement propre à individualiser un produit. Enfin, en tant que tournure de langage usuelle, la suite de mots EIN STÜCK SCHWEIZ doit être laissée à la libre disposition du public (consid. 2.3.4).