Art. 2 lit. a LPM
Le mot « You » ne peut pas être enregistré comme marque car il doit rester libre. Il fait partie des signes qui appartiennent au domaine public selon l’art. 2 lit. a LPM. Le pronom « You » fait partie du vocabulaire de base de la langue anglaise. Il n’est pas substituable et doit pouvoir être utilisé librement dans le langage publicitaire suisse comme moyen pour s’adresser aux consommateurs. En outre, il doit pouvoir être utilisé sans restriction dans des marques composées de plusieurs mots dont « You » fait partie. La monopolisation du mot « You » par une marque restreindrait son usage dans la publicité (consid. 4). Le fait d’accepter le mot « You » seul comme marque poserait problème lorsque d’autres déposants souhaiteraient obtenir des marques composées de plusieurs mots et contenant « You ». Il serait difficile de déterminer si la marque est trop similaire ou suffisamment distincte pour être enregistrée. Le fait de laisser « You » dans le domaine public n’empêche pas d’enregistrer des marques composées contenant le mot « You » (consid. 5.1). Le mot «You » doit rester libre car celui-ci permet de s’adresser à une personne, à un consommateur de manière générale et il n’y a pas d’alternative à ce mot (consid. 5.2). Le mot « You » est également trop banal pour avoir une quelconque force distinctive (consid. 5.3). Le juge civil est libre de décider si un mot peut être enregistré comme marque. L’inscription de ce dernier au registre du droit des marques ne représente qu’un indice et non une preuve qu’il s’agit d’une marque (consid. 5.4).
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Art. 2 al. 1 lit. b LPM, art. 3 al. 1 lit. c LPM, art. 13 LPM
L’examen du caractère éventuellement techniquement nécessaire des capsules de café Nespresso doit intervenir en se limitant à la forme des seules autres capsules qui sont compatibles avec les machines Nespresso (consid. 1). Le TF a rappelé dans sa jurisprudence Lego (cf. TF 4A_20/2012 du 3 juillet 2012, consid. 3.2) qu’au vu du caractère potentiellement illimité dans le temps de l’enregistrement d’une marque de forme, il convenait de ne l’admettre que dans la mesure où les concurrents ne s’en trouvaient pas prétérités en raison de la présence d’une forme alternative de même valeur, et que si le coût d’une telle forme alternative était plus élevé, même faiblement, le choix d’une autre forme ne pouvait leur être imposé (consid. 4). Il résulte de l’expertise sommaire diligentée par le tribunal que la forme conique des capsules est techniquement évidente mais pas absolument obligatoire pour une optimisation du système (consid. 5.aa) ; que leur forme varie chaque fois en fonction du matériau dans lequel ces capsules sont réalisées et qu’enfin une forme conique n’est pas techniquement nécessaire pour réaliser un « café normal » avec une machine Nespresso mais qu’elle s’impose par contre plus ou moins naturellement suivant le type de matériau dans lequel est réalisée cette capsule (consid. 5.aa). L’expert a retenu enfin que pour ressortir la capsule de la machine aussi, la forme conique n’est pas non plus absolument nécessaire, une forme cylindrique par exemple convenant également. Les formes qui constituent la nature même du produit, tant d’un point de vue fonctionnel qu’esthétique, sont exclues de l’enregistrement comme marques. C’est le cas lorsque la fonction du produit suppose pour le public qu’une telle forme lui soit donnée (consid. 10.a). Dans le cas particulier, le public attend un produit qui lui permette de préparer un café avec une machine Nespresso, soit nécessairement une capsule. Il s’agit donc de vérifier si la marque enregistrée constitue la nature même d’une capsule de café pouvant fonctionner avec une machine Nespresso, ce que le tribunal n’admet pas en l’espèce, en particulier parce que les capsules Nespresso présentent des caractéristiques particulières qui les distinguent des autres formes possibles de capsules de café (consid. 10.b). Il résulte de ce qui précède qu’il n’a pas été rendu vraisemblable que la présence d’un motif absolu au sens de l’art. 2 lit. b LPM exclurait la forme des capsules de café Nespresso d’un enregistrement comme marque (consid. 11).
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Art. 29 al. 2 Cst., art. 8 CC, art. 9 CC, art. 2 lit. b LPM
Le Tribunal de commerce du canton de Zurich a confirmé la nullité des marques de forme de Lego sur la base d’un examen du caractère techniquement nécessaire d’une forme tridimensionnelle, au sens de l’art. 2 lit. b LPM, effectué dans le cadre d’une expertise ordonnée par ce tribunal sur demande du Tribunal fédéral qui lui avait renvoyé la cause pour qu’il soit vérifié s’il existait des formes alternatives (tant compatibles qu’incompatibles avec les formes Lego), aussi pratiques, aussi solides et dont les coûts de production ne seraient pas plus élevés que ceux des formes contestées comme marques. Le Tribunal de commerce de Zurich a fondé son jugement sur la constatation des experts que chaque variante s’éloignant des formes géométriques de Lego conduisait à des coûts d’outillage supplémentaires, plus faibles pour les formes compatibles (11 à 30 %) et plus élevés pour celles qui ne l’étaient pas (29 à 54 %). L’expertise avait permis de poser que vu la durée de vie moyenne des outillages, les surcoûts de fabrication les plus bas oscillaient entre 1,326 et 4,927 % pour les formes compatibles et se montaient jusqu’à 50 % pour celles qui ne l’étaient pas. Lorsque dans son appréciation des preuves, le tribunal retient comme établi, sur la base d’une expertise obtenue à grands frais, que toutes les formes alternatives s’accompagnent de coûts de fabrication supérieurs à ceux des briques Lego et que, par conséquent, celles-ci doivent être considérées comme techniquement nécessaires au sens de l’art. 2 lit. b LPM, le principe de la répartition du fardeau de la preuve devient sans objet. Le grief de sa prétendue violation ne saurait donc être retenu (consid. 2). Une forme doit être considérée comme techniquement nécessaire au sens de l’art. 2 lit. b LPM si les autres possibilités existantes ne peuvent pas être imposées aux concurrents du déposant parce qu’elles sont moins pratiques, moins solides, ou parce qu’elles s’accompagnent de coûts de production plus élevés (consid. 3.1). Comme le monopole lié à l’obtention d’une marque de forme peut être illimité dans le temps, il faut que les formes alternatives à disposition des concurrents du déposant ne s’accompagnent d’aucun désavantage pour eux. Même un coût de production légèrement plus élevé constitue déjà un désavantage qui ne peut leur être imposé, en particulier en vertu du principe de l’égalité dans la concurrence. Ainsi, des coûts de production supplémentaires de 1,326 à 4,927 % suffisent pour que le recours à des formes alternatives ne puisse être rendu obligatoire aux concurrents des briques Lego (consid. 3.2). Lorsqu’elle a été invitée à le faire par le tribunal qui mène la procédure, la partie qui invoque ses secrets d’affaires pour refuser de transmettre des informations techniques à l’expert chargé de la réalisation d’une expertise dans le cadre de l’administration des preuves, ne peut se prévaloir d’une violation de son droit d’être entendu si les indications qu’elle donne ensuite sur ces questions dans sa détermination sur les résultats de l’administration de preuves sont considérées comme contradictoires et inacceptables par le tribunal au regard du principe de la bonne foi, et si ce dernier renonce à ordonner une nouvelle expertise demandée à ce stade seulement de la procédure sur ces mêmes questions (consid. 4.3.2).
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Art. 9 Cst., art. 93 al. 1 lit. a LTF, art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. b LPM, art. 3 LPM, art. 55 al. 1 lit. a LPM, art. 55 al. 1 lit. b LPM, art. 55 al. 4 LPM, art. 59 lit. d LPM, art. 2 LCD, art. 3 LCD
Dans leur opposition aux mesures provisionnelles, les sociétés ECC ont fait valoir le caractère techniquement nécessaire de la forme des capsules Nespresso. Le fait que l’Institut Fédéral de la Propriété Intellectuelle ait procédé à l’enregistrement de ces capsules comme marque de forme avec la mention qu’il s’agirait d’une marque imposée ne dispense pas le juge d’examiner la validité de la marque ainsi obtenue. L’imposition par l’usage ne permet de valider une marque que si le signe considéré appartenait au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM, mais pas s’il constituait une forme techniquement nécessaire ou la nature même du produit, selon l’art. 2 lit. b LPM (consid. 2.3). Si une forme est techniquement nécessaire, sa protection est absolument exclue par l’art. 2 lit. b LPM sans qu’une imposition par l’usage n’entre en ligne de compte. À la différence des autres signes appartenant au domaine public, une utilisation même prolongée et exclusive d’une forme constituant la nature même du produit ou techniquement nécessaire ne permet donc pas d’en obtenir la protection (consid. 2.3). Une invention tombée dans le domaine public à l’échéance de la durée de protection du droit des brevets (le brevet européen déposé par Nestlé sur les capsules Nespresso a expiré le 4 mai 2012) ne saurait être monopolisée une seconde fois par son enregistrement comme marque de forme renouvelable indéfiniment. En l’absence de formes alternatives permettant la même utilisation, ou si une autre forme présente des inconvénients empêchant une concurrence efficace, la protection doit être refusée. Il ne s’agit pas uniquement de savoir s’il est possible de produire une capsule différente qui soit utilisable de la même manière (donc dans les mêmes machines) et avec la même efficacité. Pour qu’elle constitue une forme alternative, il faut encore qu’elle n’entre pas dans le champ de protection de la capsule Nespresso. Il faut donc déterminer si la ou les forme(s) de ces capsules compatibles se distingue(nt) suffisamment dans l’esprit du public acheteur de celle(s) de la capsule Nespresso pour éviter d’entrer dans sa sphère de protection au sens de l’art. 3 LPM (consid. 2.3). Si la forme d’une capsule est techniquement nécessaire, les art. 2 et 3 LCD ne permettent pas d’interdire à un concurrent son utilisation, puisque toute concurrence deviendrait alors impossible et puisque la LCD ne saurait avoir pour effet d’accorder au produit litigieux une protection que la LPM lui refuse (consid. 2.3). S’agissant d’une question technique controversée et décisive, le juge cantonal aurait dû demander une expertise sommaire à un technicien indépendant qui permette d’élucider, au moins sous l’angle de la vraisemblance, la question de savoir si la forme des capsules Nespresso est ou non techniquement nécessaire. La décision du juge, qui a préféré trancher sans procéder à l’administration de cette preuve et sans disposer d’aucun élément de preuve sérieux, est entachée d’arbitraire (art. 9 Cst.) et doit être annulée (consid. 2.4).
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Art. 2 lit. a LPM
Le terme « Bürgenstock » est compris par le cercle des consommateurs visés comme une montagne panoramique et presqu’île du lac des Quatre-Cantons. En lien avec les services revendiqués en classes 35, 41, 43 et 44, le signe « BÜRGENSTOCK » n’est donc pas distinctif (consid. 4.3 et 4.5). La recourante n’a pas rendu vraisemblable l’imposition comme marque dans le commerce du signe « BÜRGENSTOCK ». Un droit à la marque basé sur la protection de la bonne foi (ausserregisterliches Anrecht) doit également être nié (consid. 5.2-5.4).
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Art. 2 lit. a LPM
Le slogan « TOGETHER WE’LL GO FAR » est compris par le cercle des destinataires (« ensemble nous irons loin »). En lien avec des services financiers et d’assurances (classe 36), il a, du moins pour les consommateurs francophones, une connotation laudative dès lors que ceux-ci le comprennent, sans recours à l’imagination, dans le sens « ensemble nous réussirons ». Le slogan « TOGETHER WE’LL GO FAR » relève de ce fait du domaine public (consid. 7.6 et 8.1).
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Art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM, art. 47 LPM
Les produits revendiqués – vêtements, chaussures et chapellerie (classe 25) s’adressent surtout aux consommateurs finaux. Les indications géographiques sont exclues de la protection en tant que marques parce qu’elles sont considérées comme appartenant au domaine public. Cependant, ne constituent pas des indications géographiques les désignations que les milieux intéressés ne considèrent pas comme une référence à la provenance des produits ou services (consid. 3.1). Un sondage d’opinion de 504 personnes interrogées est dépourvu d’une force probante suffisante, un panel d’au moins 1000 personnes étant requis pour les produits et services destinés à des consommateurs moyens (consid. 5.2.4). Il ne suffit pas de publier un certain nombre choisi de réponses mais il est aussi nécessaire de publier les questions préalables si celles-ci ont influencé les réponses aux questions choisies (consid. 5.2.5 et 5.2.6). Il n’est pas contesté que Savannah est une ville de Géorgie, État du Sud-Est des États-Unis. Cependant, « Savannah » a d’autres significations. Il peut, notamment, s’agir d’un terme anglais qui se traduit par « savane » en français et se réfère à une forme de végétation, mais Savannah peut également désigner une race de chat (consid. 6.1). Lorsqu’un signe présente des significations diverses, il faut tenir compte de la signification qui, au regard des produits et services revendiqués, retient d’avantage l’attention des consommateurs (consid. 6.2). En l’occurrence, les consommateurs ont associé le signe « Savannah » à une forme de végétation plutôt qu’à la ville de Savannah située dans l’État de Géorgie. Il est clair que la savane comme forme de végétation ne donne pas une indication de provenance des produits et services revendiqués. Il en va de même de la savane comme une référence indirecte à la région de la savane africaine. L’argument, selon lequel la marque contestée est susceptible de tromper les consommateurs quant à la provenance du produit, ne peut être soutenu. (consid. 6.3).
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Art. 2 lit. a LPM
Le signe « NOBLEWOOD », qui est constitué des mots « NOBLE » et « WOOD », peut revêtir plusieurs significations – fractionné ou considéré dans son ensemble. En lien avec les produits revendiqués en classes 2, 19 et 27, le consommateur moyen visé le comprendra sans autre comme signifiant « bois noble, somptueux » (« nobles, edles, prächtiges Holz ») (consid. 6.4 et 6.4.3). Le signe « NOBLEWOOD » énonce ainsi l’emploi prévu pour les produits revendiqués et les propriétés de leurs matériaux. Outre son caractère descriptif, le signe a également une connotation laudative. Il ne possède par conséquent pas de force distinctive et appartient au domaine public (consid. 7.2, 7.3 et 8).
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Art. 2 lit. a LPM, art. 47 al. 4 LPM, art. 49 al. 1 LPM
Le terme « Savoy » n’est plus perçu comme une indication de provenance (« Savoie »), mais comme un synonyme de luxe et de prestige, de sorte qu’il n’existe aucune attente quant à la provenance en relation avec la désignation « Savoy » (consid. 5.2). La marque « B Royal Savoy Lausanne The Bürgenstock Selection (fig.) » est toutefois comprise comme une indication de provenance du fait qu’elle contient le nom géographique « Lausanne » (consid. 5.3). Le terme « Bürgenstock » constitue également une indication géographique, puisque le Bürgenstock est une montagne panoramique suisse connue dans le monde entier. Ce terme n’est cependant pas isolé : il est utilisé en lien avec le mot « Selection ». Or, la désignation « The Bürgenstock Selection » ne revêt aucun sens géographique et ne crée, par conséquent, aucune attente quant à la provenance (consid. 5.4). Même si les deux indications géographiques « Lausanne » et « Bürgenstock » faisaient penser à une indication de provenance, les conditions de l’art. 49 al. 1 en lien avec l’art. 47 al. 4 LPM seraient satisfaites attendu qu’elles se réfèrent toutes deux à la Suisse (consid. 5.6).
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Art. 2 lit. a LPM
Le terme italien « FIDUCIA » signifie sans équivoque, en relation avec les services revendiqués en classes 35, 36, 37, 38, 39, 41, 42 et 45, « confiance » ou « fiabilité » (consid. 5.3.1). Par conséquent, la marque « FIDUCIA » a, en tout cas pour les consommateurs italophones, un caractère laudatif et n’est donc pas distinctive (consid. 5.5).
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Art. 2 lit. a LPM
L’adjectif « rhätisch » n’est pas une désignation de fantaisie, mais une indication de provenance (« bündnerisch » ou « aus Graubünden stammend ») (consid. 5.1.3-5.1.4). La recourante ne peut rien tirer du fait qu’elle bénéficie d’une certaine exclusivité, car sa concession est limitée dans le temps et d’autres concessions peuvent être accordées (consid. 5.1.4). Les noms « Bernina » et « Albula » sont également des indications de provenance (consid. 5.2.3, 5.3.3 et 5.5). Pour des produits des classes 9, 16 et 28, à l’exception des « Produits en papier et carton, non compris dans d’autres classes » (classe 16), les signes en cause sont descriptifs (du contenu thématique des produits) et appartiennent donc au domaine public. Pour des véhicules, notamment ferroviaires (classe 12), ils sont également descriptifs. Par ailleurs, ce n’est que dans la mesure où les services des classes 37, 39, 42 et 43 sont plus ou moins typiquement associés au train que les signes en cause appartiennent au domaine public (consid. 6.1-6.5). L’imposition comme marques des signes « BERNINABAHN » et « ALBULABAHN » n’est pas rendue vraisemblable par la recourante pour les services des classes 37, 39, 42 et 43, étant donné que ces signes sont utilisés avant tout dans un contexte historique ou pour désigner un tracé de ligne de train et qu’aucun moyen de preuve ne concerne la Suisse romande et la Suisse italienne (consid. 7.4-7.6). C’est à juste titre que l’IPI a admis que le signe « RHÄTISCHE BAHN » ne s’était imposé comme marque (dans toute la Suisse [consid. 8.2]) que pour les services qui forment le cœur d’une entreprise ferroviaire (classe 39) et non pas pour les autres services des classes 37, 39, 42 et 43 (consid. 8.1-8.6).
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Art. 2 lit. a LPM
Le signe « MYPHOTOBOOK », constitué de trois termes appartenant au vocabulaire de base anglais, est compris par le consommateur moyen visé comme signifiant en allemand « mein Fotobuch » (consid. 4, 5.1 et 5.2). Ce signe est directement descriptif des services revendiqués (« Buchbindarbeiten » [classe 40]), attendu que la reliure de livres vise justement la fabrication d’un livre. De ce fait, le consommateur ne peut reconnaître dans ce signe, en l’absence d’un élément distinctif, une indication de la provenance commerciale. Partant, il appartient au domaine public au sens de l’art. 2 lit. a LPM (consid. 6.2 et 6.3).
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Art. 2 lit. a et c LPM, art. 47 LPM
Les produits de mode et de cosmétique s’adressent principalement au public au sens large, lequel ne doit pas être nécessairement intéressé par la mode (consid. 5.6). Les villes de Burlington (Vermont/USA et Ontario/Canada) ne sont pas des destinations de masse pour le cercle des destinataires suisses déterminants et n’ont par ailleurs aucune signification économique ou politique prééminente pour celui-ci (consid. 6.4). Ces deux villes ne sont donc pas connues des destinataires visés, de sorte qu’ils n’associent pas le signe « BURLINGTON » à un lieu. « BURLINGTON » ne constitue de ce fait pas une indication de la provenance géographique (art. 47 LPM). Pour les produits revendiqués en classes 3, 14, 18 et 25, le signe n’appartient de ce fait pas au domaine public (art. 2 lit. a LPM) et n’est pas non plus trompeur (art. 2 lit. c LPM) (consid. 6.5). En raison des efforts publicitaires du déposant, et de son usage depuis des années en Suisse pour des vêtements (classe 25), la marque verbale « BURLINGTON » est perçue par le cercle des destinataires pertinents en Suisse comme une indication de la provenance commerciale ou comme un nom de famille. Le signe bénéficie donc d’une force distinctive (consid. 6.6-6.7).
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Art. 2 lit. a LPM
Les mots sous-jacents (au terme « Frankonia ») « Franken » ou « Frank » ont de nombreuses significations géographiques et non géographiques (consid. 6.1). En allemand, « FRANKONIA » n’est plus compris comme une indication géographique, dès lors que cette région s’appelle désormais « Franken » (consid. 6.6). En italien et en français, les termes « Franconia » et « Franconie » ne revêtent plus aucune signification actuelle et ne sont guère plus utilisés dans la presse (consid. 6.7-6.9). Le signe « FRANKONIA (fig.) » n’est de ce fait pas compris comme une indication de provenance par le cercle des consommateurs visés et possède donc une force distinctive (consid. 6.13).
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Art. 2 lit. a LPM
Le signe « QATAR AIRWAYS » (« Airline aus Katar ») est descriptif du contenu thématique des produits « Papier und Karton, Druckereierzeugnisse, Lehr- und Unterrichtsmittel » (classe 16) et appartient donc au domaine public (consid. 4.1.1-4.2 et 5.1-5.3). La simple allégation selon laquelle la recourante est la compagnie aérienne nationale du Qatar ne suffit pas pour considérer que le signe « QATAR AIRWAYS » n’appartient pas au domaine public en lien avec les services « Transportwesen ; Verpackung und Lagerung von Waren ; Veranstaltung von Reisen » (classe 39) (consid. 5.4). Le signe « QATAR AIRWAYS » n’est pas frappé d’un besoin de libre disposition absolu, car il existe suffisamment d’alternatives pour désigner une compagnie aérienne du Qatar (consid. 6.1-6.3). La vraisemblance de l’imposition du signe « QATAR AIRWAYS » comme marque doit également toucher la Suisse italienne, ne peut pas résulter de l’utilisation du signe « QATAR AIRWAYS » à titre de raison de commerce, ne saurait concerner les produits de la classe 16 s’ils ne sont utilisés que comme produits accessoires, ne peut résulter de documents datant d’après le dépôt du signe et n’est pas établie par l’usage du seul élément « QATAR » ou d’un signe figuratif duquel le signe « QATAR AIRWAYS » ressort de manière modifiée, ce d’autant que les moyens de preuve couvrent une période de trois ans seulement. L’imposition du signe « QATAR AIRWAYS » comme marque n’est dès lors pas rendue vraisemblable par la recourante (consid. 7.2).
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Art. 1 al. 1 LPM, art. 2 lit. a LPM
Un slogan est susceptible d’être enregistré comme marque au sens de l’art. 1 al. 1 LPM (consid. 4-4.2). La jurisprudence de la CJUE en la matière ne lie pas les autorités suisses (consid. 4.1). Un slogan peut être frappé d’un besoin de libre disposition (consid. 4.3). Le slogan en anglais « WE CARE ABOUT EYECARE » est compris (notamment « Wir sorgen/kümmern uns um Augenpflege/Augenfürsorge » ou « Wir nehmen Augenpflege wichtig ») par ses destinataires (consid. 6 et 7.2). En lien avec des « Appareils et instruments optiques » (classe 9) et des « Services médicaux, soins d’hygiène pour êtres humains ou animaux » (classe 44), il a un caractère descriptif et publicitaire, l’élément graphique du signe « WE CARE ABOUT EYECARE (fig.) » étant par ailleurs trop banal pour lui conférer une quelconque force distinctive. En revanche, en lien avec le service « Traitement de matériaux » (classe 40), le signe n’est ni descriptif ni frappé d’un besoin de libre disposition (consid. 7.3).
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Art. 2 al. 1 lit. a LPM
Sont exclus de la protection du droit des marques, en raison de leur appartenance au domaine public au sens de l’art. 2 al. 1 lit. a LPM, les signes qui décrivent les caractéristiques, les formes, les propriétés, la quantité, la qualité, les références ou d’autres caractéristiques des produits pour lesquels la protection de la marque est revendiquée et qui ne contribuent ainsi en rien à leur identification ou à leur différenciation. Le caractère descriptif de telles indications doit être immédiatement reconnaissable par le public concerné sans effort de réflexion ou d’imagination particulier. Un slogan est ainsi exclu de la protection en tant que marque lorsqu’il correspond à une indication sur la qualité du produit pour lequel la protection est revendiquée, et que le caractère descriptif du slogan n’a pas besoin d’une fantaisie particulière pour être compris. Le TF examine librement la façon de délimiter le cercle déterminant des destinataires des produits ou services pour lesquels la protection de la marque est revendiquée. Il s’agit là d’une question de droit, comme l’est celle de savoir, dans le cas de biens de consommation courante, de quelle façon les destinataires appréhendent le signe sur la base du degré d’attention attendu (consid. 2.1). Le slogan EIN STÜCK SCHWEIZ, en relation avec les produits de classe 29 pour lesquels la protection est revendiquée (fromage de l’Emmental) ne peut pas être considéré comme ayant plusieurs significations; en relation avec les produits revendiqués, l’évocation de la tradition suisse – et les attentes en termes de qualité qui en découlent – dominent par rapport à d’autres significations possibles et ce, sans effort d’imagination particulier pour le destinataire moyen (consid. 2.3.1). Il n’est pas déterminant de savoir si le signe provoque immédiatement une association d’idées avec le produit en question. En l’espèce, le slogan EIN STÜCK SCHWEIZ fait directement référence au fait que le produit pour lequel la protection de la marque est revendiquée est un produit traditionnel, typiquement suisse. Le fait qu’il vante directement les qualités du produit est immédiatement et facilement reconnaissable, sans qu’un effort ou une imagination particulière, ou plusieurs étapes de raisonnement ne soient nécessaires (consid. 2.3.2). La « suissitude » du produit ne joue aucun rôle à cet effet (consid. 2.3.3). L’expression EIN STÜCK suivie d’un nom de pays est apparentée à la tournure de phrase EIN STÜCK HEIMAT (un morceau de patrie) et fait ainsi partie du langage général. Il s’ensuit que l’utilisation du slogan EIN STÜCK SCHWEIZ est immédiatement comprise comme étant descriptive par le cercle déterminant des destinataires. N’étant pas particulièrement originale, elle n’est pas non plus apte à rester dans la mémoire du public déterminant comme étant particulièrement propre à individualiser un produit. Enfin, en tant que tournure de langage usuelle, la suite de mots EIN STÜCK SCHWEIZ doit être laissée à la libre disposition du public (consid. 2.3.4).
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Art. 2 lit. a LPM, art. 2 lit. c LPM
La demanderesse utilise les termes « Skin Caviar » pour des crèmes de beauté à appliquer sur la peau humaine et contenant des extraits de caviar. La défenderesse utilise l’association des mêmes termes pour des préparations (en particulier pharmaceutiques et diététiques) à avaler, entièrement dépourvues de caviar mais qui se veulent luxueuses. L’association des termes « Skin » et « Caviar » constitue une désignation de fantaisie dotée d’un caractère distinctif. Cependant, les termes « skin » et « caviar » en eux-mêmes appartiennent au domaine public (consid. 4.2), et les signes propres à induire en erreur sont exclus de la protection par le droit des marques (consid. 5.1). En l’occurrence, l’utilisation de l’association « Skin Caviar » pour des produits de soins corporels et de beauté à appliquer sur la peau humaine (classe 3) et contenant des extraits de caviar peut être protégée par le droit des marques (consid. 4.2). Il en va autrement pour l’utilisation de la même association pour des « préparations pharmaceutiques et diététiques à usage médical, compléments alimentaires à usage médical (classe 5) […] à base d’herbes ou d’extraits d’écorce de pin (classe 30), entièrement dépourvues de caviar » (consid. 5.6). Cette association est trompeuse car elle crée, pour le consommateur moyen, l’impression erronée que ces produits contiennent au moins des extraits de caviar. Le caractère trompeur d’une association s’apprécie en fonction du risque de confusion que la marque engendre pour le consommateur moyen (consid. 5.6). La marque de la défenderesse est ainsi nulle.
N. Tissot, V. Salvadé, D. Kraus, P.-E. Ruedin, M. Tissot J. Dubois, V. Wyssbrod, L. Ghassemi, Y. Hazinedar
Art. 2 LPM, art. 47 LPM
Détermination des cercles des milieux intéressés, art. 47 al. 1 LPM ; risque de confusion et de tromperie lors de l’enregistrement du nom d’une ville comme marque. Les noms ou signes géographiques, qui peuvent être enregistrés comme marques, sont ceux qui, selon l’art. 47 al. 1 LPM « ne sont pas considérés par les milieux intéressés comme une référence à la provenance des produits ou services. » Les milieux intéressés peuvent être composés de plusieurs cercles. Chacun de ces cercles doit être pris en compte, peu importe sa taille. Si l’on prenait en compte uniquement le plus grand cercle, ce serait toujours le même – celui du public de manière générale – qui entrerait en considération (consid. 3.2.1). Si les milieux intéressés ne savent pas que le signe utilisé comme marque est un nom géographique, il n’y a pas de risque qu’ils prennent la marque pour une indication de provenance et il n’y a risque ni de tromperie, ni de confusion (consid. 3.3.3). Si un nom ou un signe géographique n’est pas considéré comme une indication de provenance aux États-Unis et qu’il peut être protégé comme marque dans ce pays, il n’y a pas de raison qu’il ne puisse pas être enregistré comme marque en Suisse (consid. 4.3).
N. Tissot, V. Salvadé, D. Kraus, P.-E. Ruedin, M. Tissot J. Dubois, V. Wyssbrod, L. Ghassemi, Y. Hazinedar