Droit du développement territorial

ATF 149 I 49 (d)

2022-2023

Recours abstrait contre la modification de la loi cantonale zurichoise sur l’énergie prévoyant que les installations de chauffage électrique à résistance fixes et les chauffe-eau chauffés exclusivement directement doivent être remplacés par des installations qui respectent la loi, sous peine d’une amende jusqu’à 20 000 francs. La garantie de la propriété ne donne pas le droit au maintien de la situation juridique. L’obligation de remplacement statuée doit toutefois respecter les conditions de restriction des droits fondamentaux (art. 36 Cst.). La mesure poursuit un intérêt public, du point de vue environnemental et au vu de la rareté croissante de l’électricité, qu’il convient d’utiliser de manière efficiente. Même si d’autres installations nécessitent de l’électricité pour fonctionner (pompes à chaleur), leur efficience est notablement supérieure aux chauffages à résistance électrique. Du point de vue de la proportionnalité, en 1990 déjà, un arrêté fédéral soumettait à autorisation à de strictes conditions des chauffages électriques. Le législateur fédéral a ensuite enjoint les cantons à édicter des dispositions sur le remplacement et les nouveaux chauffages dans le même sens, ce qu’a fait le canton de Zurich en interdisant les nouveaux chauffages électriques en 2013. L’introduction d’un terme pour l’assainissement des systèmes de chauffage dans le canton représente la suite logique d’une démarche entamée il y a plus de trente ans. La durée de vie des installations incriminées est de quarante ans. L’atteinte portée à la garantie de la propriété est donc prévisible et correspond à la durée d’amortissement des installations concernées. De plus, une clause pour les cas de rigueur est prévue et des subventions existent pour le renouvellement de chauffages. L’atteinte est donc proportionnée. Elle n’est pas non plus assez grave pour constituer un cas d’expropriation matérielle.

TF 1C_391/2022 (d)

2022-2023

Initiative populaire communale fixant l’objectif que d’ici 2030, tous les chauffages des bâtiments situés dans des secteurs délimités du plan d’affectation communal fonctionnent aux énergies renouvelables. L’initiative d’espèce présente la forme d’un projet rédigé à faible densité normative. Elle n’indique pas qui doit s’assurer du respect de l’objectif – implicitement, les autorités communales –, ni n’indique les moyens à mettre en œuvre, la réglementation des cas de rigueur et l’éventuelle indemnisation. Le droit communal ou cantonal existant ne s’oppose pas à ce qu’une initiative comporte seulement une résolution de principe. Elle ne s’oppose pas au § 9 de la loi lucernoise sur l’énergie, qui permet aux communes d’édicter des dispositions plus sévères que celles de la loi, pour des secteurs désignés dans la planification d’affectation. L’initiative représente en outre une atteinte proportionnelle à la garantie de la propriété (art. 26 et 36 al. 3 Cst.) et ne viole pas la garantie de la situation acquise consacrée au § 178 PBG/LU, dans la mesure où la législation d’exécution aura tout loisir d’aménager un régime proportionné quant à l’attribution des coûts d’un tel changement. Cela est d’autant plus admissible que le droit cantonal prévoit déjà une certaine obligation de remplacer par soi-même l’alimentation de son chauffage par des sources renouvelables. La durée de vie moyenne des installations de chauffages fossiles, de 20 ans, confirme cette appréciation.

TF 1C_392/2022 (d)

2022-2023

Initiative populaire commandant à la commune de Hochdorf d’introduire une réglementation pour se préparer à la mobilité sans émissions, en particulier en garantissant que dans les garages d’habitations collectives de plus de quatre places, des trous pouvant accueillir des stations de recharge pour véhicules électriques jusqu’à 11 kW soient prévus. L’initiative poursuit plusieurs intérêts publics. La décarbonation de la mobilité individuelle sert la protection du climat, qui représente un intérêt public important. Le Grand Conseil lucernois a par ailleurs déclaré l’état d’urgence climatique, et le Conseil d’Etat lucernois adopté une stratégie climat et énergie qui fixe comme but la décarbonation de la mobilité individuelle, qui permet incidemment de réduire localement les émissions sonores et la pollution de l’air, autres intérêts publics notoires allant dans le sens d’un développement écologique plus durable (art. 73, 2 al. 2 et 4 Cst.). L’initiative consacre une atteinte proportionnelle à la garantie de la propriété (art. 26 Cst.). La mesure est apte, car bien que formulée de manière vague, elle constitue une amorce de solution à un problème identifié dans la littérature scientifique et relayé par le Conseil d’Etat. La mesure est en outre nécessaire. En particulier, le vélo et les transports publics, même si leur développement est souhaitable, ne constituent pas des alternatives à la mobilité individuelle motorisée, qu’il faut donc décarboner. Le fait que la réglementation fasse abstraction de tout besoin concret en bornes de recharge n’est pas non plus critiquable. La réglementation prévue dispense les parties au bail et membres de copropriété d’atermoiements qui rendent justement difficile la décarbonation de la mobilité individuelle. La tendance du marché automobile est à l’électrification, et la mesure est donc pertinente à cet égard.

ATF 144 II 454 (d)

2018-2019

Art. 5 al. 1, 164 al. 1 let. d, 127 al. 1 Cst. ; 84 let. a LENu ; 47 LRaP

Violation du principe de la légalité. Sur recours des exploitants des centrales nucléaires, le Tribunal fédéral examine la légalité de l’obligation des exploitants de prendre en charge la totalité des coûts liés à la distribution des comprimés à la population habitant dans un rayon de 50 kilomètres autour d’une centrale prévue par l’Ordonnance sur la distribution de comprimés d’iode à la population. A ce titre, le Tribunal fédéral estime que le report des coûts sur les exploitants constitue une taxe (et non un émolument) et doit par conséquent trouver son fondement dans une loi définissant le cercle des contribuables, son objet et les modalités de calcul. Or ni la LRaP ni la LENu ne les précisent, de sorte que cette obligation ne repose pas sur une base légale suffisante.

ATF 143 I 395 (d)

2017-2018

Art. 27 et 91 Cst. ; 4 al. 2 et 7 ss LEne ; 1, 5, 6, 13 LApEl ; 8 al. 2 OApEl

Il n’existe aucun monopole en matière de système de mesure du réseau ; le choix du prestataire du système de mesure relève de la liberté économique du producteur. L’exploitant d’installations photovoltaïques est un producteur d’électricité ; l’entreprise gestionnaire compétente du réseau de distribution a donc l’obligation de lui fournir un raccordement au réseau d’électricité. Le litige portait sur le point de savoir si le producteur d’électricité devait utiliser les prestations de système de mesure de l’entreprise gestionnaire du réseau de distribution ou s’il pouvait mandater un autre prestataire. Cette question relève de la sphère de protection de la liberté économique, de sorte qu’il n’y a pas lieu de se demander s’il existe une base légale pour la libéralisation du système de mesure, mais de savoir si la restriction à cette liberté repose sur une base légale. Le gestionnaire de réseau a certes, de par la loi, un droit exclusif à l’exploitation du réseau dans sa zone, mais qui trouve néanmoins une limite dans la liberté économique. Les prestations de système de mesure n’appartiennent pas à la gestion du réseau.

Art. 6, 22 LapEl ; 6 PA

Lorsque l’ElCom vérifie d’office les tarifs de l’électricité, elle agit en tant qu’autorité de surveillance. Les parties à la procédure sont l’ElCom en tant qu’auteur de la mesure de surveillance et les destinataires de celle-ci, à savoir les entreprises électriques et les exploitants de réseaux. En revanche, les consommateurs sont des tiers à cette procédure, qui ne sont touchés que de manière indirecte. La situation est différente lorsqu’un consommateur se trouve en litige avec un fournisseur d’électricité et que l’intervention de l’ElCom est demandée conformément à l’art. 22 al. 2 let. b LApEl. Dans ce cas, la qualité de partie lui est acquise. Selon l’art. 6 al. 1 LApEl, le gestionnaire de réseaux fournit aux consommateurs captifs et aux consommateurs finaux de l’électricité à tarif raisonnable. En cas de bénéfice tiré par l’entreprise d’approvisionnement de son accès au réseau, celui-ci doit profiter tant aux consommateurs captifs qu’aux consommateurs finaux. La méthode de calcul utilisée par l’ElCom pour vérifier les prix est conforme au droit.