Droit du sport

(Club A. [club de football professionnel] c. B. [entraineur]) ; recours contre la décision rendue le 20 mars 2018 par le TAS ; le recourant fait valoir que le TAS aurait fait preuve de formalisme excessif en refusant d’entrer en matière sur l’appel du fait du dépôt tardif de l’original de la déclaration d’appel par courrier postal ; le Tribunal fédéral (ré-)examine la question de savoir dans quelle mesure la violation de l’interdiction du formalisme excessif entre dans le champ d’application de la notion d’ordre public (procédural) au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP. Dans un arrêt de 2017 (TF 4A_692/2016), le Tribunal fédéral avait évoqué la possibilité que seules des « violations caractérisées » de l’interdiction du formalisme excessif pourraient être proscrites au titre de l’ordre public, sans toutefois trancher définitivement ce point. En l’espèce, la question peut à nouveau être laissée ouverte car le TAS n’a pas fait preuve de formalisme excessif (consid. 5.2). Le Tribunal fédéral rappelle que le strict respect des règles relatives aux délais de recours s’impose pour des motifs d’égalité de traitement et de sécurité du droit. Contrairement à la version antérieure du Code d’arbitrage du TAS, qui exigeait l’envoi postal de la déclaration d’appel avant l’expiration du délai, la version applicable en l’espèce prévoit que l’envoi de la déclaration par courrier postal peut être fait le premier jour ouvrable suivant l’expiration du délai. Le recourant y voit une modification de la nature du délai imparti pour déposer l’acte par courrier, qui serait désormais un simple délai d’ordre destiné à assurer une formalité administrative. Le Tribunal fédéral note que la révision de la disposition topique du Code d’arbitrage du TAS a résulté à l’évidence d’un « compromis » entre les exigences de sécurité et d’égalité de traitement et les contraintes liées à l’acheminement du courrier, qui pourraient priver l’appelant d’une partie du délai pour faire appel. Il est toutefois patent que ladite modification n’a nullement éliminé l’exigence de déposer l’original de la déclaration d’appel dans un délai strict (consid. 5.6). Recours rejeté.

(X. [société spécialisée dans le consulting sportif] c. Confederación Sudamericana de Fútbol [CONMEBOL])

Recours contre la sentence rendue le 13 juin 2018 par le TAS (procédure arbitrale ordinaire) ; selon la recourante, la Formation aurait rendu une sentence qui est incompatible avec l’ordre public en violant gravement la clausola rebus sic stantibus. Le Tribunal fédéral relève que « sous le couvert d’une prétendue violation de l’ordre public », l’argumentation de la recourante revient à critiquer l’appréciation des faits juridiquement pertinents telle qu’elle a été faite par la Formation. En d’autres termes, elle vise à provoquer un examen de l’application par les arbitres du droit de fond, ce qui n’est pas admissible. En tout état de cause, la Formation arbitrale n’a pas violé l’ordre public (matériel) en retenant que les événements postérieurs à la conclusion du contrat – en l’espèce des actes de corruption dont certains membres de l’intimée s’étaient rendus coupables – n’étaient pas imprévisibles et ne permettaient dès lors pas à la recourante de s’en départir. Recours rejeté.

(Football Club A. c. Football Club B.)

Demande de révision de la sentence rendue le 15 décembre 2016 par le TAS (procédure d’arbitrage ordinaire) ; le Tribunal fédéral rappelle que le chapitre 12 de la LDIP ne contient pas de dispositions spécifiques relatives à la révision des sentences arbitrales. Ce nonobstant, la révision d’une sentence peut être demandée si elle remplit les conditions posées par l’art. 123 LTF. L’art. 123 al. 2 let. a LTF dispose que la révision peut être demandée si le requérant découvre après coup des faits pertinents ou des moyens de preuve concluants qu’il n’avait pas pu invoquer dans la procédure précédente, à l’exclusion des faits ou moyens de preuve postérieurs à la sentence. Ainsi, la révision d’une sentence arbitrale exige que le requérant démontre qu’il a pris connaissance de nouveaux faits pertinents ou découvert de nouveaux moyens de preuve qui (i) existaient au moment où la sentence a été rendue, mais qu’il n’avait pas été en mesure de présenter dans la procédure arbitrale sans qu’une faute lui soit imputable et (ii) sont de nature à modifier l’issue du litige. En l’espèce, le Tribunal fédéral écarte les moyens de preuve soumis par le requérant, en partie car ils sont postérieurs au prononcé de la sentence, et en partie en raison de doutes quant à leur authenticité : les preuves en question ne sont pas de nature à modifier le fondement factuel de la sentence et à conduire à une nouvelle décision. Demande rejetée.

(Jérôme Valcke c. Fédération Internationale de Football Association [FIFA]) ; recours contre la sentence rendue le 27 juillet 2018 par le TAS (procédure arbitrale d’appel); la Formation arbitrale du TAS a considéré que les critères pour admettre un arbitrage interne (art. 353 al. 1 CPC) étaient remplis, notamment compte tenu du domicile des parties lors de la conclusion de la convention d’arbitrage. Seule avait été laissée ouverte la question de savoir si les parties avaient valablement convenu d’une élection de droit en faveur du chapitre 12 de la LDIP. Cette même question est présentement litigieuse devant le Tribunal fédéral (consid. 1.2). Selon l’art. 353 al. 2 CPC, les parties à un arbitrage interne peuvent, par une déclaration expresse dans la convention d’arbitrage ou dans une convention conclue ultérieurement, exclure l’application de la troisième partie du CPC et convenir que les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont applicables (« opting out »). L’art. 176 al. 2 LDIP confère aux parties à un arbitrage international la possibilité inverse, à savoir opter pour l’application des dispositions du CPC en lieu et place du chapitre 12 de la LDIP (« opting in »). Le Tribunal fédéral commence par relever que la jurisprudence relative à l’art 176 al. 2 LDIP est applicable mutatis mutandis à l’art. 353 al. 2 CPC. Le recourant conteste qu’en signant sans réserve l’ordonnance de procédure transmise par le TAS, les parties aient pu valablement convenir d’un opting out au sens de l’art. 353 al. 2 CPC. Le Tribunal fédéral rejette l’argument du recourant qui considère la clause en faveur de l’application du chapitre 12 de la LDIP comme une erreur de plume du TAS passée inaperçue au moment de la signature de l’ordonnance de procédure, voire comme un comportement contraire à la bonne foi de la part de la Formation arbitrale (consid. 1.4). Les juges fédéraux retiennent que le recourant, assisté d’un avocat, ne pouvait signer une ordonnance de procédure contenant une élection de droit et par la suite faire valoir qu’il n’est pas lié par cette clause sans violer le principe de la fidélité contractuelle (consid. 1.5). Le Tribunal fédéral rejette également l’argument du recourant selon lequel l’opting out contenu dans l’ordonnance de procédure, se bornant à exclure « tout autre droit de procédure » (« to the exclusion of any other procedural law » dans sa version originale), ne satisferait pas aux exigences posées par la jurisprudence. Sur ce point, le Tribunal fédéral relève, en s’inspirant des conditions de validité de la renonciation à recourir contre les sentences arbitrales (art. 192 LDIP), que la mention expresse des dispositions du CPC n’est pas une condition de validité d’un opting out au sens de l’art. 353 al. 2 CPC (consid. 1.6.1). Enfin, le Tribunal fédéral réfute aussi le (troisième et dernier) argument du recourant, à propos du moment de la conclusion de l’opting out, à ses yeux tardif car intervenant après le dépôt des mémoires des parties. Le Tribunal fédéral détermine qu’un opting out peut être conclu « jusqu’au prononcé de la sentence arbitrale », à tout le moins avec l’accord des arbitres, ce qui était incontestablement le cas en l’espèce (consid. 1.6.2). Dès lors, l’arbitrage étant régi par le chapitre 12 LDIP, seuls les motifs de recours énumérés à l’art. 190 al. 2 LDIP peuvent être invoqués.

(X. [club de football professionnel] c. Fédération Internationale de Football Association [FIFA])

Recours contre la sentence rendue le 27 novembre 2018 par le TAS (procédure arbitrale d’appel) ; le recourant reproche à la Formation arbitrale d’avoir violé les principes de la bonne foi et de l’interdiction de l’abus de droit. Quant à la violation du principe de la bonne foi, selon le recourant, la Formation arbitrale aurait refusé de tenir compte des paiements partiels qu’il avait effectués, tout en reconnaissant son plein pouvoir d’examen selon l’art. R57.1 du Code d’arbitrage du TAS. Le Tribunal fédéral relève qu’une limitation inadmissible du pouvoir d’examen du tribunal arbitral constitue tout au plus une violation de droit d’être entendu. Le fait que la Formation ait omis de prendre en considération des vrais nova n’est pas une restriction inadmissible à son plein pouvoir d’examen. Ceci est d’autant plus vrai qu’en l’occurrence la Formation a tenu compte des paiements partiels du recourant mais a néanmoins estimé qu’une sanction disciplinaire était justifiée (consid. 3.2). Quant à la prétendue violation de l’interdiction de l’abus de droit, le recourant se plaint du fait que l’art. 64 du Code disciplinaire de la FIFA aurait été appliqué contrairement à son but. Sur ce point, le Tribunal fédéral relève qu’une éventuelle interprétation erronée du Code disciplinaire de la FIFA n’entre pas dans la notion d’ordre public matériel et échappe donc au pouvoir d’examen du Tribunal fédéral. De même, le prononcé d’une sanction disciplinaire (en l’espèce l’imposition d’une amende) pour non-respect d’une décision du TAS n’est pas en soi constitutif d’un abus de droit, et le recourant ne démontre nullement qu’il aurait été fait un usage inapproprié de cette sanction, d’une manière qui contreviendrait à l’interdiction de l’abus de droit (consid. 3.3). Recours rejeté.

(FC A. [Club de football anglais] c. B. [joueur de football argentin]) contre le Termination Order prononcé le 6 décembre 2018 par la Présidente de la Chambre d’appel du TAS (procédure arbitrale d’appel)

Le recourant dénonce une violation de l’ordre public procédural dans la mesure où le TAS aurait versé dans le formalisme excessif en appliquant l’art. R31.3 du Code d’arbitrage du TAS pour décider de clore la procédure et rayer la cause du rôle, du fait que l’envoi postal de l’original du mémoire d’appel n’avait pas été effectué dans le délai applicable. Le Tribunal fédéral rappelle sa jurisprudence (cf. TF 4A_238/2018 et TF 4A_556/2018) selon laquelle (i) le TAS ne viole pas l’interdiction du formalisme excessif en sanctionnant par l’irrecevabilité le vice de forme que constitue l’envoi d’une déclaration d’appel ou autre mémoire par simple télécopie et (ii) l’exigence du dépôt d’une déclaration d’appel ou autre mémoire par courrier postal n’est pas une « simple formalité administrative » mais bien une condition de validité du dépôt de l’écriture (consid. 4.2.2). Ainsi, le grief fondé sur une violation de l’ordre public procédural du fait du prétendu formalisme excessif du TAS doit être écarté (sans qu’il soit nécessaire, une fois de plus, de décider si l’interdiction du formalisme excessif rentre bel et bien dans la notion d’ordre public au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP, consid. 4.1). Recours rejeté.

(A. [footballeur professionnel brésilien] c. B. [agent de joueur de nationalité portugaise] et Fédération Internationale de Football Association [FIFA])

Recours contre le Termination Order prononcé le 10 septembre 2018 par le Président suppléant de la Chambre d’appel du TAS (procédure arbitrale d’appel). Le recourant soutient que la décision de la Commission de discipline de la FIFA (le condamnant à payer USD 400’000.- à son agent alors qu’il ne dispose pas des ressources nécessaires au règlement de cette dette) est nulle car elle contrevient gravement à l’ordre public matériel en lui imposant une limitation « choquante et inadmissible » à sa liberté économique, en violation de l’art. 27 al. 2 CC. En refusant de constater la nullité de la décision précitée, le TAS aurait commis un déni de justice formel, violant ainsi l’ordre public procédural. Le Tribunal fédéral reconnait que « dans des cas exceptionnels » une sentence arbitrale peut être considérée comme nulle. Tel n’est pas le cas, en principe, lorsque la sentence viole l’ordre public, « à moins qu’elle ne porte atteinte à des intérêts publics prépondérants » (consid. 5.1). Le recourant n’a jamais fait valoir devant le TAS que la décision de la FIFA serait entachée de nullité absolue. Le faire au stade du recours soulève des interrogations « au regard des règles de la bonne foi ». Par ailleurs, le Tribunal fédéral émet également des doutes quant à la situation financière prétendument « dramatique » du recourant, qui n’est pas démontrée (consid. 5). Quant à l’argument du recourant selon lequel le Président suppléant de la Chambre d’appel aurait fait preuve de formalisme excessif en refusant d’entrer en matière sur l’appel par une application « mécanique » des art. R31 et R51 du Code d’arbitrage du TAS, le Tribunal fédéral se réfère à sa jurisprudence récente sur cette question (TF 4A_238/2018 et 4A_692/2016). Les juges fédéraux soulignent que les formes procédurales sont nécessaires à la mise en œuvre des voies de droit : en particulier, le respect strict des règles relatives aux délais pour le dépôt de recours s’impose pour des raisons d’égalité de traitement et de sécurité du droit. En décider autrement dans le cas d’une procédure arbitrale particulière reviendrait à oublier que la partie intimée est en droit d’attendre du tribunal arbitral qu’il respecte son propre règlement ; il n’est pas envisageable de sanctionner plus ou moins sévèrement le non-respect d’un délai - au lieu de déclarer toujours le recours irrecevable - suivant le degré de gravité de l’atteinte que la décision susceptible de recours porte à la partie qui n’a pas recouru en temps utile (consid. 6). Recours rejeté.

(A. S.p.A. [club de football professionnel] et B. [propriétaire de A. S.p.A.] c. C. [agent de joueur]) ; recours contre la sentence rendue le 19 décembre 2017 par le TAS (procédure d’arbitrage ordinaire) ; les recourants soutiennent que la Formation arbitrale (i) aurait tenu pour valable un contrat de mandat nul et illicite, issu d’une contrainte (ii) aurait tranché le litige selon le droit suisse, alors qu’elle aurait dû appliquer les règlements de la FIFA et de la fédération italienne de football, et (iii) aurait imposé un taux d’intérêt usurier. Le Tribunal fédéral écarte les arguments des recourants, en considérant qu’ils visent en réalité à obtenir une remise en cause des faits établis et de l’interprétation du contrat par la Formation, tout en rappelant que la détermination erronée du droit applicable au litige n’entre pas dans la notion d’ordre public au sens de l’art. 190 al. 2 let. e LDIP (consid. 6), et en relevant que les recourants n’ont nullement motivé leur grief au sujet du taux d’intérêt appliqué dans la sentence (consid. 7). Recours rejeté.

(Club A. [club de football professionnel] c. B. [entraineur]) ; recours contre la décision rendue le 20 mars 2018 par le TAS (procédure arbitrale d’appel) ; conformément à l’art. 77 al. 1 let. a LTF, toute sentence, soit-elle finale, partielle, voire préjudicielle ou incidente, peut faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral. En revanche, une simple ordonnance de procédure pouvant être modifiée ou rapportée en cours d’instance n’est pas susceptible de recours. En l’espèce, le recourant attaque la décision par laquelle le Secrétaire général adjoint du TAS signifiait aux parties le refus de procéder concernant l’appel déposé par le club. La cause de ce refus était le fait que le club n’avait pas déposé la déclaration d’appel par courrier le premier jour ouvrable suivant l’expiration du délai applicable, comme l’exige l’art. R31.3 in fine du Code d’arbitrage du TAS. Le Tribunal fédéral relève que la décision du Secrétaire général adjoint constitue une sentence finale susceptible de recours, au même titre que la décision rendue par une formation arbitrale du TAS déclarant le recours irrecevable pour le même motif. Il n’est pas déterminant (i) que ladite décision ait été rendue sous la forme d’un courrier, (ii) qu’elle n’émane pas d’une formation arbitrale du TAS mais de son Secrétaire général adjoint et (iii) que celui-ci ait écarté l’application de l’art. R49 du Code d’arbitrage du TAS pour justifier de sa compétence (consid. 2.2). Par ailleurs, le Tribunal fédéral rappelle que l’envoi d’une décision de la part du TAS par courrier électronique ne fait pas courir le délai de recours de 30 jours de l’art. 100 al. 1 LTF. Ledit délai commence à courir uniquement le lendemain de la notification de la décision attaquée par courrier postal (consid. 3.1). Recours recevable (mais rejeté sur le fond).

(A. [footballeur professionnel brésilien] c. B. [agent de joueur de nationalité portugaise] et Fédération Internationale de Football Association [FIFA])

Recours contre le Termination Order prononcé le 10 septembre 2018 par le Président suppléant de la Chambre d’appel du TAS (procédure arbitrale d’appel) ; le Tribunal fédéral retient que le TAS a constaté que l’original du mémoire d’appel n’a pas été déposé par courrier postal dans le délai pour ce faire et, partant, en a tiré la conséquence irréfragable du retrait de l’appel. Cette décision du TAS n’est pas une simple ordonnance de procédure ; elle est assimilable à une décision d’irrecevabilité du recours mettant définitivement un terme à la procédure et pouvant dès lors faire l’objet d’un recours immédiat au Tribunal fédéral (consid. 2.2). Recours recevable (mais rejeté sur le fond).

(X. [boxeur professionnel] c. Agence Mondiale Antidopage [AMA]) ; recours contre la « lettre » de la Présidente de la Chambre d’arbitrage d’appel du TAS datée du 25 février 2019 soumettant la cause à un arbitre unique (procédure arbitrale d’appel) ; le Tribunal fédéral rappelle sa jurisprudence selon laquelle la décision sur une demande de récusation d’un arbitre prise par un organisme privé n’est pas susceptible d’un recours immédiat au Tribunal fédéral, mais pourra être revue dans le cadre du recours contre la sentence finale en invoquant le grief de la composition irrégulière du tribunal arbitral, conformément à l’art. 190 al. 2 let. a LDIP. Références jurisprudentielles et doctrinales à l’appui, le Tribunal fédéral juge qu’il en va de même pour la décision de nomination d’un arbitre prise par un organisme privé. Dans le consid. 2.3, le Tribunal fédéral revient sur un précédent (TF 4A_282/2013) – ayant donné lieu à passablement de discussions en doctrine – dans lequel il avait lui-même considéré qu’une décision du Président de la Chambre ordinaire du TAS relative au nombre d’arbitres « ne s’apparente nullement à une simple ordonnance de procédure pouvant être modifiée ou rapportée en cours d’instance et soustraite de ce fait à l’examen du Tribunal fédéral » et que « [c]omme telle, [ladite décision] aurait pu et même dû être déférée au Tribunal fédéral » (consid. 5.3.2, non publié aux ATF 139 III 511). Dans l’arrêt précité, la question avait été laissée ouverte, le recours devant être rejeté pour d’autres motifs. Dans le consid. 2.4, le Tribunal fédéral revient également sur un autre précédent (TF 4A_546/2016) dans lequel il avait été jugé que la décision de la Swiss Chamber’s Arbitration Institution de nommer un arbitre unique n’était pas sujette à un recours immédiat. Sur la base de cette dernière jurisprudence, le Tribunal fédéral estime que la décision prise par la Présidente de la Chambre d’appel du TAS, de soumettre l’arbitrage à un arbitre unique ne peut pas être contestée directement et immédiatement devant le Tribunal fédéral. Recours irrecevable.

(28 athlètes paralympiques russes c. Comité International Paralympique) ; recours contre la sentence rendue le 20 octobre 2017 par le TAS (procédure arbitrale d’appel) ; conformément à l’art. 76 al. 1 let. b LTF, le recourant doit avoir un intérêt digne de protection à l’annulation de la décision attaquée. Celui-ci se définit comme étant « l’utilité pratique que l’admission du recours apporterait à son auteur, en lui évitant de subir un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée lui occasionnerait » (consid. 4.1). De plus, l’intérêt doit en principe être actuel, à moins (i) que la décision attaquée ne soit susceptible de se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, (ii) que sa nature ne permette pas de la trancher avant qu’elle ne perde son actualité et (iii) que, en raison de sa portée de principe, il existe un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse. En l’espèce, les conclusions prises par les athlètes devant le TAS tendaient exclusivement à leur permettre de prendre part aux Jeux paralympiques de Rio en 2016, et le recours au Tribunal fédéral n’a été déposé qu’en janvier 2018. Par ailleurs, les recourants reprochent à l’intimé d’adopter une attitude contraire à la bonne foi en invoquant, d’une part, le défaut d’intérêt actuel à l’admission du recours, tout en ayant, d’autre part, préalablement refusé de consentir à la mise en œuvre d’une procédure accélérée devant le TAS, ce qui, aux dires des recourants, lui aurait permis de statuer avant l’ouverture des Jeux paralympiques de Rio 2016. Le Tribunal fédéral réfute les arguments des recourants en relevant qu’il ressort du dossier que l’intimé avait lui-même invité le Comité Paralympique Russe à faire en sorte que tous ses athlètes fussent partie à la procédure l’opposant au Comité International Paralympique et que, de toute manière, les athlètes auraient pu solliciter devant le TAS, en vue de l’imminente ouverture des Jeux de Rio, des mesures provisoires tendant à leur admission aux compétitions jusqu’à droit connu sur leur appel ; ce que les athlètes n’ont pas fait. Ainsi, l’intérêt actuel fait défaut. Les recourants font encore valoir que le litige soulève une question juridique de principe susceptible de se reproduire à intervalles réguliers. Le Tribunal fédéral rejette cette argumentation, notamment en raison du fait que les critères d’admission des athlètes aux Jeux paralympiques divergent d’une édition à l’autre et que les athlètes en question, quand bien même le Comité Paralympique Russe avait été suspendu, pouvaient en tout temps demander d’être admis aux Jeux paralympiques en tant qu’« athlètes neutres » (consid. 4.3). Recours irrecevable.

(Fédération Internationale de Football Association [FIFA] c. X. [José Paolo Guerrero] et Agence Mondiale Antidopage [AMA]) ; recours contre la sentence rendue le 30 juillet 2018 par le TAS (procédure arbitrale d’appel) ; selon l’art. 76 al. 1 LTF, en matière d’arbitrage international (comme en arbitrage interne) la qualité pour recourir est admise aux conditions cumulatives suivantes : la partie recourante doit avoir pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou avoir été privée de la possibilité de le faire (let. a), être particulièrement touchée par la décision attaquée et avoir un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification (let. b). Si la qualité pour recourir apparaît douteuse, il incombe à la partie recourante de démontrer que ces conditions sont bien remplies. La recourante a pris part, en qualité de défenderesse, à la procédure arbitrale devant le TAS. Toutefois, le simple fait que la Formation arbitrale ait rejeté toutes ses conclusions ne lui octroie pas un intérêt digne de protection à l’annulation de la décision attaquée. Aux yeux du Tribunal fédéral, la position de la FIFA serait comparable « mutatis mutandis » à celle d’un tribunal de première instance dont le jugement est soumis à la juridiction d’appel compétente. Dans une telle constellation, ni ce tribunal ni la collectivité publique dont il dépend ne pourraient recourir au Tribunal fédéral sur le fondement de l’art. 76 al. 1 let. b LTF pour contester la décision d’appel au seul motif qu’elle a modifié le dispositif du jugement de première instance. De plus, le Tribunal fédéral relève que la FIFA avait déjà manifesté la volonté d’introduire un recours séparé en son propre nom dans sa réponse au recours interjeté par le footballeur (TF 4A_318/2018), et qu’elle entendait soutenir les arguments avancés par le footballeur dans son propre recours. Ce procédé est assimilable au fait de plaider pour autrui lequel est incompatible avec l’existence d’un intérêt personnel nécessaire pour se prévaloir de la qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral. Enfin, le seul désir (« fut-il compréhensible ») d’obtenir une réponse à une question juridique qualifiée ne confère pas à la recourante la qualité pour recourir (consid. 2.2). Recours irrecevable.

(X c. Oberstaatsanwaltschaft des Kantons Aargau) (destiné à la publication) ; recours en matière pénale contre l’arrêt rendu le 21 novembre 2018 par l’Obergericht du canton d’Argovie ; le recourant, un bodybuilder, a été reconnu coupable de la violation des art. 86 al. 1 let. b et let. c, art. 87 al. 1 let. f et al. 2 de la Loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux (LPTh, RS 812.21) et de violation par métier de l’art. 22 al. 1, al. 2 et al. 3 let. f de la Loi fédérale sur l’encouragement du sport (LESp, RS 415.0), ainsi que de blanchiment d’argent au sens de l’art. 305bis ch. 1 du Code pénal (CP, RS 311.0). Il lui est reproché, en substance, d’avoir acheté, distribué et revendu sans autorisation des produits dopants tels que des anabolisants et des hormones de croissance à des amateurs pratiquant le culturisme dans des centres de fitness, puis d’avoir caché une partie des recettes issues de cette activité à son domicile. Le Tribunal fédéral rappelle que la liste des produits ou méthodes considérés comme « dopants » est établie, en tenant compte des « développements sur le plan international », à l’art. 74 de l’Ordonnance du Conseil fédéral sur l’encouragement du sport et de l’activité physique (OESp, RS 415.01) ainsi que dans son Annexe. Le simple fait que la loi ne définit pas ce qu’on entend par l’expression « à des fins de dopage », utilisée à l’art. 22 al. 1 LESp, ou par le terme « sport », mentionné à l’art. 19 al. 1 LESp, ne constitue pas une violation du principe de la légalité, car le recourant peut aisément reconnaitre le comportement punissable (ainsi que ses conséquences) en se référant à la signification de ces termes dans le langage courant (consid. 2.3). De plus, le Tribunal fédéral confirme que, contrairement à l’opinion du recourant, l’art. 22 LESp punit pénalement le fait d’importer, exporter, fabriquer, distribuer ou revendre des produits ou méthodes dopants même si lesdits agissements interviennent en dehors des compétitions sportives. En effet, lors de la modification de la loi en 2012, le législateur a enlevé toute référence aux « compétitions sportives règlementées » et a ainsi voulu étendre le champ d’application de cette disposition au sport amateur, pour autant que l’utilisation des substances ou méthodes en question ne soit pas strictement personnelle (art. 22 al. 4 LESp). Cette interprétation se justifie également à l’aune des buts poursuivis par la loi, à savoir la promotion de la santé et l’encouragement de « comportements qui inscrivent les valeurs positives du sport dans la société et qui luttent contre ses dérives » (art. 1 al. 1 let. d LESp) (consid. 2.4). Recours rejeté.

ATF 145 IV 154 (f)

2018-2019

(X. c. Ministère public de l’Etat de Fribourg et A.) ; recours en matière pénale contre l’arrêt rendu le 19 novembre 2018 par la Cour d’appel pénal du Tribunal cantonal de l’Etat de Fribourg ; le recourant, un joueur amateur de football, a été condamné pour lésions corporelles simples par négligence pour avoir taclé un adversaire durant un match, lui causant une fracture de la cheville. L’arbitre avait sanctionné l’action avec un carton jaune pour « jeu dur ». La cour cantonale a retenu que le recourant n’avait pas eu l’intention - même par dol éventuel - de blesser l’intimé, mais avait agi par négligence. Cette constatation lie le Tribunal fédéral (art. 105 al.1 LTF). Le Tribunal fédéral rappelle qu’agit par négligence « quiconque, par une imprévoyance coupable, commet un crime ou un délit sans se rendre compte des conséquences de son acte ou sans en tenir compte ». L’imprévoyance est coupable quand l’auteur n’a pas usé des précautions imposées par les circonstances et par sa situation personnelle (art. 12 al. 3 CP). S’agissant d’une lésion corporelle infligée lors d’une rencontre sportive, le comportement accepté tacitement par le lésé (concernant le risque de lésion corporelle inhérent à toute activité sportive) et le devoir de prudence de l’auteur se déterminent en fonction des règles de jeu applicables et du principe de l’interdiction générale de porter atteinte à autrui (neminen laedere). Les règles du jeu ont notamment pour but d’empêcher les accidents et de protéger les joueurs. Selon les règles du football (Loi 12 des Lois du jeu édictées par l’International Football Association Board), un joueur doit être averti notamment s’il commet, par imprudence, une faute au contact sanctionnée par un coup franc direct. En l’espèce, l’arbitre a sanctionné l’auteur du tacle par un carton jaune, car il a considéré que celui-ci avait commis une violation importante des règles du jeu sans tenir compte du caractère dangereux ou des conséquences de son acte pour son adversaire. Au vu de la dangerosité du tacle pratiqué (admise en cours de procédure par le joueur lui-même), la violation de la règle de jeu en question peut être qualifiée de « suffisamment grave pour exclure un consentement tacite de l’intimé concernant le risque de lésion corporelle inhérent à la pratique du football » (consid. 2.5). S’il est vrai qu’en participant à la rencontre l’intimé a accepté tacitement un tel risque, cela ne couvre pas les comportements dangereux – soit ceux qui sont susceptibles notamment de causer des blessures – adoptés par les autres joueurs en violation des règles du jeu. Contrairement à l’opinion du recourant, il n’est pas déterminant que la violation des règles du jeu en question soit sanctionnée, au niveau sportif, par une exclusion (carton rouge) ou par un avertissement (carton jaune). Recours rejeté.